Saint Rémy Van Gogh |
J'ai lu mais pas encore commenté Martin Eden, le roman autobiographique de Jack London et j'ai raté le film, hélas, que j'étais pourtant très curieuse de découvrir.!
Dans Martin Eden, Jack London, qui eut une enfance malheureuse dans un milieu défavorisé, fit très jeune l’apprentissage de la pauvreté et du travail en usine. Devenu marin, il tombe amoureux d’une jeune fille cultivée de la grande bourgeoisie. Pour elle, il décide de s’instruire et son intelligence supérieure alliée à une force de travail peu commune, l’ouvre à un univers qu’il ne connaissait pas : la littérature, la poésie, l’art, la science. Découverte qui va transformer sa vie entière :
Avant, je ne savais pas que la beauté avait un sens. Je l’acceptais comme telle, comme une réalité sans rime ni raison. J’étais dans l’ignorance. A présent, je sais, ou plus exactement, je commence à savoir. Cette herbe me paraît beaucoup plus belle maintenant que je sais pourquoi elle est herbe, par quelle alchimie du soleil, de la pluie et de la terre elle est devenue ce qu’elle est. Mais c’est tout un roman que l’histoire du moindre brin d’herbe et un roman d’aventures ! Cette seule idée m’émeut. Quand je réfléchis à tout ce drame de la force et de la matière et à leur formidable lutte, j’ai envie d’écrire l’épopée du Brin d’herbe ! (…)
Tenez, je plonge ma figure dans l’herbe et l’odeur qu’aspirent mes narines évoque en moi mille pensées, mille rêves. C’est l’haleine de l’univers que j’ai respirée; c’est sa chanson et son rire, sa douleur, ses larmes, ses luttes et sa mort. J’aimerais vous dire, à vous, à l’humanité entière, les visions évoquées en moi par cette odeur d’herbe.
Avant, je ne savais pas que la beauté avait un sens. Je l’acceptais comme telle, comme une réalité sans rime ni raison. J’étais dans l’ignorance. A présent, je sais, ou plus exactement, je commence à savoir. Cette herbe me paraît beaucoup plus belle maintenant que je sais pourquoi elle est herbe, par quelle alchimie du soleil, de la pluie et de la terre elle est devenue ce qu’elle est. Mais c’est tout un roman que l’histoire du moindre brin d’herbe et un roman d’aventures ! Cette seule idée m’émeut. Quand je réfléchis à tout ce drame de la force et de la matière et à leur formidable lutte, j’ai envie d’écrire l’épopée du Brin d’herbe ! (…)
Tenez, je plonge ma figure dans l’herbe et l’odeur qu’aspirent mes narines évoque en moi mille pensées, mille rêves. C’est l’haleine de l’univers que j’ai respirée; c’est sa chanson et son rire, sa douleur, ses larmes, ses luttes et sa mort. J’aimerais vous dire, à vous, à l’humanité entière, les visions évoquées en moi par cette odeur d’herbe.
Jack London |
Herbe Vincent Van Gogh |
Christian Bobin trouve dans un brin d'herbe la force de résister à la disparition de sa femme et à la douleur du deuil. Un passage que j'ai déjà cité dans mon blog en 2008 !
"Je fais du tout petit, je témoigne pour un brin d'herbe. Le monde tel qu'il va, mal, je le connais et je le subis comme vous, un peu moins que vous peut-être : dessous un brin d'herbe, on est protégé de beaucoup de choses. (...) Le désastre, je le vois. Comment ne pas le voir? Le désastre a déjà eu lieu lorsque je commence à écrire. Je prends des notes sur ce qui a résisté et c'est forcément du tout petit, et c'est incomparablement grand, puisque cela a résisté, puisque l'éclat du jour, un mot d'enfant ou un brin d'herbe a triomphé du pire. Je parle au nom de ces choses toutes petites. j'essaie de les entendre. Je ne rêve pas d'un monde pacifié. Un tel monde serait mort. J'aime la lutte et l'affrontement comme j'aime la vie du même amour." (...)
"Je fais du tout petit, je témoigne pour un brin d'herbe. Le monde tel qu'il va, mal, je le connais et je le subis comme vous, un peu moins que vous peut-être : dessous un brin d'herbe, on est protégé de beaucoup de choses. (...) Le désastre, je le vois. Comment ne pas le voir? Le désastre a déjà eu lieu lorsque je commence à écrire. Je prends des notes sur ce qui a résisté et c'est forcément du tout petit, et c'est incomparablement grand, puisque cela a résisté, puisque l'éclat du jour, un mot d'enfant ou un brin d'herbe a triomphé du pire. Je parle au nom de ces choses toutes petites. j'essaie de les entendre. Je ne rêve pas d'un monde pacifié. Un tel monde serait mort. J'aime la lutte et l'affrontement comme j'aime la vie du même amour." (...)
La beauté est une manière de résister au monde, de tenir devant lui et d'opposer à sa fureur une patience active.
Christian Bobin |
Volubilis peinture japonaise |
Et Walt Whitman :
"Un volubilis à ma fenêtre me plaît plus que toute la métaphysique des livres."
"Je pense qu’un brin d’herbe ne compte pas moins que le labeur des étoiles
Et que la fourmi est également parfaite et un grain de sable et l’oeuf du roitelet
Et que la reinette est un chef d’oeuvre du plus haut des cieux
Et que la ronce grimpante pourrait orner les salons du ciel
Et que la plus infime jointure de ma main l’emporte sur toute mécanique
Et que la vache qui broute tête baissée surpasse n’importe quelle statue
Et qu’une souris est un miracle capable de confondre des milliards d’incroyants."
Et que la reinette est un chef d’oeuvre du plus haut des cieux
Et que la ronce grimpante pourrait orner les salons du ciel
Et que la plus infime jointure de ma main l’emporte sur toute mécanique
Et que la vache qui broute tête baissée surpasse n’importe quelle statue
Et qu’une souris est un miracle capable de confondre des milliards d’incroyants."
La majesté et la beauté du monde sont latents dans n'importe quel iota du monde »
Walt Whitman |
Oh merci, Claudialucia, pour ces extraits sur la beauté toute simple du brin d'herbe et de la vie, ces invitations à s'émerveiller - et les illustrations. "Martin Eden" est sorti de la bibliothèque, avec d'autres relectures en vue. Bon dimanche !
RépondreSupprimerBon dimanche à toi aussi. Un beau livre, ce Martin Eden.
SupprimerMartin Eden est mon roman préféré de London je l'ai lu plusieurs fois et toujours avec plaisir malgré sa noirceur
RépondreSupprimerJe l'ai beaucoup aimé aussi. Mais j'ai conservé toujours un faible pour les livres de mon enfance, L'appel de la forêt et Croc Blanc.
SupprimerUn roman que je n'ai pas lu mais il est noté, bien sûr. La moindre plante, tige, fleur est observée ici dans ma campagne, aucune n'est laide, même pas mi-belle..la nature est tellement parfaite que c'en est bouleversant, souvent.
RépondreSupprimermerci, bon dimanche.
Pourtant, il y a des choses que je n'aime pas dans la nature, certaines mauvaises herbes, certains insectes...
SupprimerUn roman dont j'entends parler depuis longtemps, mais que je n'ai toujours pas lu. Ce sera peut-être pour 2020 ..
RépondreSupprimerTu sais que c'est un bon roman, donc, cela viendra bientôt.
SupprimerC'est bizarre, mes commentaires n'apparaissent pas! Je voulais seulement dire comme j'aime la beauté des brins d'herbe et les illustrations : les Van Gogh quelle merveille
RépondreSupprimerC'est vrai les Van Gogh quelle merveille ! mais les textes aussi, j'aime beaucoup.
SupprimerLondon, Bobin (qu'il faut que je lise davantage) et Van Gogh dans le même billet ! Merci pour ces superbes réflexions.
RépondreSupprimerJe les ai réunis car le thème malgré les différences est le même pour tous.
SupprimerEncore une lacune que j'essaierai de combler mais après l'avoir lu aurais-je autant de souvenirs qu'après avoir lu "Croc blanc" dans mon enfance?
RépondreSupprimerC'est vrai que Croc Blanc de mon enfance m'a énormément marquée comme toi. Je pense que Martin Eden est vraiment un très bon roman aussi, mais très différent.
SupprimerJ'ai aussi raté le film mais je ne sais pas si j'ai envie de le voir... J'aime tellement le livre.
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