Pages

Affichage des articles dont le libellé est challenge Victor Hugo. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est challenge Victor Hugo. Afficher tous les articles

dimanche 18 juin 2017

Victor Hugo : La Marseillaise, l'immense porte entre-baîllée de l'avenir...

Rouget de Lisle chantant la Marseillaise
Dans la pièce de Victor Hugo Mille francs de récompense, le major Gédouard, grand-père de  Cyprienne, musicien, donne son interprétation de La Marseillaise. Dans ce passage que je trouve très beau, c'est le Grand Victor Hugo qui s'exprime. Il répond à travers les siècles à ceux qui veulent s'approprier la Marseillaise prétendant être les seuls vrais "patriotes" comme à ceux qui la refusent par crainte du nationalisme et de ses excès. 

CABU


"La musique, c'est la puissance. Cette Marseillaise, voyez-vous, c'est un projectile. Il s'agit de jeter bas le vieux monde. La Marseillaise part, tonne, et frappe. Il s'agit de délivrer, de sauver, de régénérer, d'écraser toutes les bastilles, d'abolir toutes les exploitations, de délier l'esclave, de racheter le pauvre, d'anéantir tous les despotismes, le despotisme de l'or comme le despotisme du dogme; il s'agit de payer la vieille dette de toutes les fatalités et de toutes les misères; il s'agit de remuer le fond de l'homme; il s'agit de faire ouvrir les ailes toutes grandes à l'âme du peuple. Ecoutez :

Amour sacré de la patrie,
conduit, soutiens nos bras vengeurs.
Liberté, liberté chérie,
Combat avec tes défenseurs.

Voyez-vous ces horizons qui resplendissent ? Voyez-vous l'immense porte entre-baîllée de l'avenir ? Plus de tyrannie, plus d'ignorance, plus d'indigence. Plus de prostitution pour la femme. Plus de servitude pour l'homme. Le genre humain était couvert de chaînes, ce chant les dissout. Plus de pourpres en haut, mais plus de haillons en bas. Fraternité. Où sont les pauvres, dans les bras des riches. Refoulement des despotes dans les ténèbres. L'antique fatalité est morte. Délivrance ! Délivrance !
Aux armes, citoyens ! Formez vos bataillons !
Marchons ! ... "






vendredi 16 juin 2017

Victor Hugo : Mille francs de récompense



Mille francs de récompense de Victor Hugo appartient  au recueil de pièces intitulé  Théâtre en liberté, pièces que l’auteur n’a jamais vues sur scène avant sa mort.
Ce mot de liberté appliqué au théâtre a deux sens. Il correspond d’abord au manifeste romantique de Hugo dans la préface de Cromwelll ou de Hernani qui prône la liberté dans l’art. Ainsi au théâtre, Hugo met à mal les règles classiques des trois unités et prône le mélange des genres : ni comédie, ni tragédie, il invente le drame, tout en se réclamant de Shakespeare. Le second sens est à prendre au sens propre. Hugo, exilé, jugé dangereux, sait que la censure n’autorisera jamais ses pièces à être jouées. Par contre, elles peuvent être publiées. C’est ce qu’il fait. Le théâtre est l’art de la parole et doit déjouer les pièges de ceux qui veulent la museler.

Mille francs de récompense : Théâtre national de Strasbourg 1969

Mille francs de récompense est un « drame » typiquement  romantique, c’est à dire que la pièce présente ce mélange des genres voulu par Victor Hugo :  tragique et comique, grotesque et sublime s’y côtoient.
La noirceur est là, représentée par Rousseline, cet homme horrible, dont la richesse est fondée sur des malversations, des intrigues et des trahisons. Il est l’ogre qui veut manger les petites filles, en l’occurence Cyprienne, la charmante jeune fille qui est en son pouvoir. Mais ce voleur est respecté par la société qui le comble d’honneurs.
Glapieu, lui représente le « bon » voleur. C’est la misère qui l’a amené à voler, c’est en prison qu’il a appris les ficelles du « métier » et depuis c’est en vain qu’il veut s’amender. Il est poursuivi par le police qui veut le jeter en prison. Il est honni par la société, celle-là même qui est responsable de ce qu’il est devenu.

Le personnage de Glapieu, mélange de grotesque et de sublime, qui nous fait rire et que l’on admire, ridicule mais bon et courageux, est une constante chez Hugo. On le retrouve dans L’homme qui rit à la fois sous les traits de Gwinplaine défiguré par son affreux sourire mais porteur d’un idéal et sous les traits de Ursus, le philosophe, bourru au grand coeur, qui analyse la société aristocratique avec une lucidité implacable. Glapieu ressemble aussi au voleur Aïrolo qui prend le parti de la liberté contre le despotisme religieux et royal et vole au secours des amoureux dans Mangeront-ils ? Et l’on pense aussi à Jean Valjean, Hernani, à tous les marginaux et proscrits de l’oeuvre de Victor Hugo. Glapieu, enfant, n'est-ce pas aussi Gavroche que l’inégalité sociale maintient dans la misère et l'ignorance et amène au vol ? Le dramaturge condamne le rôle des prisons qui loin d’éduquer, pervertissent ceux qui y entrent, sans espoir de retour. Un thème d’actualité ?  Cela n'a pas beaucoup changé, n’est-ce pas ?

A travers la saisie dont sont victimes Etiennette et Cyprienne dépossédées de leur bien en plein hiver alors qu’elles ont été spoliées par Rousseline, c’est la justice sociale que Hugo remet en cause. Une justice qui n’a aucune compassion envers un vieil homme gravement malade et qui poursuit son travail au risque de provoquer sa mort. 
L’amoureux de Cyprienne, Edgar Marc, représente aussi un aspect du sublime romantique. Son geste pour sauver le grand père de sa bien-aimée est noble mais paradoxalement le déshonore. Il veut réparer sa faute dans la mort.
Pourtant si cette situation est tragique, l’humour est toujours présent surtout par l’intermédiaire de Glapieu et la fin de la pièce est heureuse. Pour cela Victor Hugo utilise un procédé facile et courant de la comédie (Molière) : celui de la reconnaissance d’un père et de son enfant.

Mille francs de récompense : mis en scène de Laurent Pelly

On voit ainsi que le propos de Hugo, épris de liberté (il faut lire ce beau passage émouvant où il explique le sens de La Marseillaise) est subversif et que toutes les idées qu’il développera dans ses grandes oeuvres sont présentées dans cette pièce. 

Quand on referme le recueil des pièces de Théâtre en liberté, on se dit que cette lecture de Mille Francs de récompense a été plaisante, pleine d’humour mais aussi pleine d’émotion - j’aime les textes qui font vibrer, qui dénonce l’injustice, qui plaide pour la liberté et l’égalité-  car l’on y retrouve Hugo et son amour de ceux qui sont les victimes d’une société inhumaine. Et l’on n’a plus qu’une envie, celle de voir cette pièce sur scène avec une mise scène et des comédiens sensibles et intelligents. Un rêve ?


LC dans le cadre du challenge Victor Hugo et  romantique avec  : 




mardi 6 juin 2017

Victor Hugo : Rappel des lectures communes pour le challenge Victor Hugo





Je vous rappelle quelques lectures communes pour le challenge Victor Hugo. Vous pouvez vous inscrire dans les commentaires de ce billet. Il est toujours temps de nous rejoindre même si vous n'être pas inscrit(e) au challenge.

Pour le 16 Juin je propose une pièce de théâtre extraite du recueil Le Théâtre en liberté  : Mille francs de récompense   Margotte Nathalie Caroline Claudialucia

Pour le  16 Juillet :  dans Le Théâtre en liberté : une toute petite pièce intitulée : L'intervention. Quant à moi,  au festival d'Avignon, je présenterai, en plus de L'Intervention une pièce de Victor Hugo au choix dans le festival OFF.  Nathalie Caroline Laure Claudialucia

 Pour le 15 Septembre : je propose de remettre à l'honneur un rendez-vous du mois de novembre 2016 en partie manqué : Il s'agit de lire une biographie de Victor Hugo aucun choix imposé.

J'avais présenté celle de Giorda pour la jeunesse mais je lirai volontiers une autre biographie du poète.

Caroline, Laure, Miriam , Nathalie, Claudialucia, Margotte

 Ensuite nous ferons le point au mois de Septembre pour voir si nous sommes motivés pour continuer.

 NATHALIE VOUS PROPOSE LA LECTURE DE LES MISÉRABLES cet été . Qui veut la rejoindre? Pour ma part, je déclare forfait car c'est un roman que j'ai "trop" lu et relu et étudié.

  AIFELLE propose la lecture de  Judith Perrignon : "Victor Hugo vient de mourir" ? pour le mois de Novembre. 

Personnellement je l'ai déjà lu et commenté récemment mais qui veut la suivre?

Vous pouvez aussi nous proposer d'autres lectures communes! A bientôt !

mercredi 3 mai 2017

Challenge Victor Hugo : Bilan 4 et proposition de lectures communes.



Voici le bilan N° 4  de Victor Hugo
Le challenge est au point mort depuis quelque temps mais si vous êtes d'accord je vous propose quelques lectures communes.

Vous pouvez vous inscrire dans les commentaires de ce billet.

Pour le 16 Juin je propose une pièce de théâtre extraite du recueil Le Théâtre en liberté  : Mille francs de récompense   Margotte Nathalie Caroline Claudialucia

Pour le  16 Juillet :  dans Le Théâtre en liberté : une toute petite pièce intitulée : L'intervention. Quant à moi,  au festival d'Avignon, je présenterai, en plus de L'Intervention une pièce de Victor Hugo au choix dans le festival OFF.  Nathalie Caroline Laure Claudialucia

 Pour le 15 Septembre : je propose de remettre à l'honneur un rendez-vous  du mois de novembre 2016 en partie manqué : Il s'agit de lire une biographie de Victor Hugo aucun choix imposé.

 Caroline, Laure, Miriam , Nathalie, Claudialucia

Quant à moi j'avais présenté celle de Giorda pour la jeunesse mais je lirai volontiers une autre biographie du poète.

 Ensuite nous ferons le point au mois de Septembre pour voir si nous sommes motivés pour continuer. 

Vous pouvez aussi nous proposer des lectures communes!

 NATHALIE VOUS PROPOSE LA LECTURE DE LES MISÉRABLES cet été . Qui veut la rejoindre? Pour ma part, je déclare forfait car c'est un roman que j'ai "trop" lu et relu et étudié.

 

...................................................................................................

Aaliz blog Cherry livres

Annonce du challenge Victor Hugo :

Nouvelles acquisitions et autres joyeusetés


..........................................................................................................................


Claudialucia  blog Ma librairie

Annonce du challenge Victor Hugo de Moglug et claudialucia




Victor Hugo : Souvenir de la nuit du 4

Victor Hugo : Exposition Les arcs-en-ciel du noir(musée Victor Hugo)
Victor Hugo : Les misérables

Victor Hugo et les surréalistes : la cime des rêves (musée Victor Hugo)

Victor Hugo : L'homme qui rit

Victor Hugo : l'homme qui rit (citation) La vie n'est qu'un pied à terre...

Victor Hugo : L'homme qui rit (citation) C'est de l'enfer des pauvres...

Victor Hugo L'homme qui rit (citation) : le genre humain existe...

Victor Hugo : L'homme qui rit (citation) : une habitude idiote qu'ont les peuples...
L'homme qui rit au festival d'Avignon 2016 compagnie Chaos vaincu

Hugo : Les travailleurs de la mer(LC)

Victor Hugo : Quatre-vingt treize(LC)

Victor Hugo : Bug-Jargal (LC)
Victor Hugo : Notre- Dame de Paris (LC)
Victor Hugo : Claude Gueux (LC)
Demain dès l'aube : poésie préférée(LC)
Lart d'être grand-père
La rose de l'infante La légende des siècles
Vieille chanson du jeune temps poésie (je ne pensais pas à rose...) Julos Beaucarne
Hernani (LC )
Ruy Blas LC
Représentation de Mangeront-ils? au bois de Boulogne
Mangeront-ils? festival d'Avignon 2016 compagnie Les Barriques
Les spectacles Victor Hugo au festival d'Avignon 2016
Victor Hugo : Mangeront-ils? Lecture commune
Victor Hugo : Mazeppa et Marcus Malte dans le Garçon
Biographie de Juliette Drouet de Henri Troyat
Victor Hugo ou La légende d'un siècle de GIorda Lecture commune
Torquemada LC théâtre Victor Hugo
Victor Hugo Bon conseil aux amants
Judith Perrignon : Victor Hugo vient de mourir

.....................................................................................

 

Cleanthe blog Dans la bibliothèque de Cléanthe

 

................................................................................................................. 

 

 Eimelle blog les carnets d'Eimelle








 L'annonce du challenge
http://lecture-spectacle.blogspot.fr/2014/11/challenge-victor-hugo.html


Lucrèce Borgia

Ruy Blas

Le roi s'amuse
 

 Tempête sous un crâne d'après les misérables: Lecture spectacle

L'homme qui rit


Hernani

................................................................................................................... 

 

Laure  blog Mic-Mélo

 

 

 Bug-Jargal (LC)

 Le dernier jour d'un condamné

...........................................................................................................

 
Margotte :  blog Le bruit des pages

 

 

Bug-Jargal (LC)

.................................................................................................................


Miriam  blog Carnets de voyage


Victor Hugo : Les travailleurs de la mer

Victor Hugo : l'homme qui rit

Victor Hugo : l'enfant grec 

Victor Hugo : la maison de Victor hugo à haute ville

Bug-Jargal  (LC)

Hernani

 Notre-Dame de Paris (LC)

 Ruy Blas LC

Mangeront-ils ? lecture commune 

Torquemada LC

................................................................................................

 

Moglug  Blog Synchronicité et sérendipité

 

Annonce du challenge Victor Hugo de Moglug et de claudialucia

Emmanuel Godo : Victor Hugo et dieu

Bug-Jargal (LC) 

Les oiseaux : poème

 Hernani 

 ..............................................................................................


Nathalie Blog Mark et Marcel

 

 

 

 


Extraits du discours prononcé aux funérailles de Balzac

Quatre-vingt-treize

Les Travailleurs de la mer

Notre-Dame de Paris

 Burg-Jargal  LC

Hernani LC

Ruy Blas LC

Mangeront-ils? LC

Torquemada : LC

............................................................................................................................... 

Ont aussi participé à la LC Victor Hugo pour le choix du poème préféré : 

 

 

vendredi 21 avril 2017

Judith Perrignon : Victor Hugo vient de mourir



Victor Hugo vient de mourir ! Oui, je sais, ce n’est pas un scoop ! Et nous savons tous que le décès du poète en 1885 et ses obsèques ont eu un retentissement national et international immense et ont suscité une énorme émotion tant auprès du gouvernement que du peuple. Mais ce que nous savons moins et Judith Perrignon va nous en faire un compte rendu animé au cours d’un récit bouillonnant de vie, de drames et de fracas, c’est tout ce qui tourne autour de cet événement, toutes les implications politiques, religieuses, humaines de cet événement hors du commun : la Mort du Poète ! Ce  petit livre très réussi nous mène donc d’étonnement en étonnement.

Dès l’annonce de sa fin prochaine, des milliers de personnes se pressent auprès de sa demeure, hommes politiques, célébrités, membres du gouvernement,  grands de ce monde, mais aussi les obscurs :

"Viennent tous ceux qui ne laisseront aucune trace. Ils ne sont pas les moins tristes, ces ouvriers et ces ouvrières s’arrêtant un instant sur le chemin du travail et demandant sous la porte du petit hôtel : Comment va-t-il?"

Dans les jours qui suivront le décès  « C’est la marée montante devant la maison du poète. La foule est de plus en plus considérable. »

Les implications religieuses

Le Panthéon

Bien avant sa mort, lorsque sa fin est annoncée, le combat idéologique de l’Eglise commence ! Il s’agit d’obtenir que Victor Hugo fasse amende honorable et demande les derniers sacrements. Il faut le récupérer sur son lit de mort pour montrer au peuple que le poète s’est repenti et a regretté sa conduite anticléricale.

« Si Hugo persiste à refuser l’extrême-onction, quel dangereux signal envoyé aux foules et au reste du monde. »

Or, si sa foi en Dieu est vive, Hugo a toujours méprisé les prêtres, ceux qui sont du côté des puissants et des riches, insensibles à la misère et aux souffrances du peuple. Jusqu’à son dernier souffle, il a répété : « pas de prêtre » !
« Un mot de lui, un prêtre auprès de lui, et ce sont les Lumières qui s’éteignent, les dévotions qui se vengent, chacun le sent, le sait, chacun tire le mourant pour le faire tomber de ce côté. »
L’enjeu est immense ! Aussi lorsque l’évêque Freppel se présente en confesseur pour forcer la porte du moribond, les parents et amis de Hugo l’empêchent d’accéder jusqu’à lui. Plus tard, quelques jours après sa mort, lorsque le cadavre de Hugo mal embaumé se couvrira de taches obligeant à la fermeture prématurée du cercueil, les représentants de l’église feront courir le bruit que Dieu s’est détourné de lui et l’a puni ! La bataille ne s’arrête pas là et continue avec la laïcisation de l’église Sainte Geneviève définitivement enlevée au culte pour devenir le Panthéon qui accueillera le grand homme mais tout ceci non sans remue-ménage et scènes de comi-tragédie aigre-douce.

Les implications politiques

Les Funérailles de Victor Hugo : arrivée du cortège au Panthéon
Les enjeux politiques sont nombreux et si différents que l’on l’impression d’une toile d’araignée aux fils inextricablement enchevêtrés dans laquelle chacun s’empêtre et cherche  à tirer le cadavre à soi. De l’extrême droite à l’extrême gauche, même les royalistes, même les Bonapartistes, c’est « l’unanimité nationale » il faut rendre les honneurs au Grand Homme mais…

La République embourgeoisée, dévoyée par son culte de l’argent, s’inquiète, voit le spectre de la révolution s’agiter devant elle.. Qui sait ce que vont faire  les ouvriers ? Comment contenir le peuple?
 Et les autres ?  Les anarchistes  veulent défiler avec le drapeau noir marqué du vers de Hugo : « Le peuple a sa colère  et le volcan sa lave qui dévaste d’abord et qui féconde après » ;  les communards avec le drapeau rouge sur lequel sera inscrit Amnistie. Même si ces derniers en veulent à Hugo de ne pas les avoir soutenus au moment de l’insurrection, ils lui sont redevables de l’asile qu’il a donnée chez lui aux membres de la Commune vaincue, de son intervention pour sauver Louise Michel et de ses demandes d’amnistie réitérées en faveur des communards. Des rumeurs d’attentat circulent; la tension monte. La cavalerie tire sur la foule composée d’anarchistes, de communards, des tailleurs en grève, de la chambre syndicale des menuisiers qui s’était réunie  dès le premier dimanche au cimetière du Père Lachaise pour une journée du souvenir. Morts rapidement enterrés, nombreux blessés. Le gouvernement a gagné son épreuve de force avant même que commencent les commémorations de deuil officielles !

Le catafalque de Victor Hugo à L'Arc de Triomphe

Et la République prend des mesures : Le drapeau noir et le drapeau rouge seront interdits.  Les funérailles auront lieu le lundi 1er Juin 1885, un jour où les ouvriers seront au travail et non le dimanche. Si bien que les ouvriers, ceux que Victor Hugo a passé sa vie à défendre, ne seront pas présent à l’enterrement de leur poète. Mais, le dimanche 31 Mai,  précédant la cérémonie, ils pourront défiler devant le catafalque du poète exposé à l’Etoile, une journée interrompue d’hommages qui se terminera la nuit par une orgie dans les rues de Paris. Qu’importe ? La police ferme les yeux. Il vaut mieux que les misérables bafouent les bonnes moeurs plutôt que l’ordre bourgeois !

Arrivée du cortège rue Soufflot
 Et c’est ainsi que Hugo « n’est plus que le héros impuissant de ses obsèques ».  Le défilé sera immense : deux millions de personnes. Les derniers arriveront au Panthéon quatre heures après la mise au tombeau du poète.
Le gouvernement est satisfait,  le ministre Targé, le préfet, les commissaires de police, les membres du parlement sont rassurés : « la foule chantait, les ouvriers étaient parqués dans leurs ateliers, les drapeaux colorés étaient confisqués et le plus applaudi des chars étaient celui de l’Algérie » préfigurant la lutte coloniale qui allait s’ouvrir pour « conquérir, pomper, pomper, écraser et voler ». Et non comme certains veulent bien nous le faire accroire aujourd’hui encore, par altruisme et pour doter les Algériens de routes et des bienfaits de notre civilisation !
Le lendemain le journal La Bataille titrait : On a fait au poète des Misérables des obsèques de Maréchal. On ne dégrade pas mieux un homme ».

Documenté, précis, cultivé, vivant, ce petit livre m’a donné beaucoup de plaisir et, ce qui ne gâche rien, il a parfois des accents hugoliens. Jugez plutôt !

« La République ce jour-là étouffait l’homme révolté. La phrase était en cage. »




Le 2 août 1883, Victor Hugo avait remis à son ami Auguste Vacquerie, dans une enveloppe non fermée, les lignes testamentaires suivantes, qui constituaient ses dernières volontés pour le lendemain de sa mort.
Je donne cinquante mille francs aux pauvres. Je désire être porté au cimetière dans leur corbillard.

Je refuse l'oraison de toutes les églises; je demande une prière à toutes les âmes.
Je crois en Dieu.
VICTOR HUGO.



jeudi 9 février 2017

Victor Hugo : Bon conseil aux amants

L'ogre (détail du Chat botté) de Gustave Doré


Bon conseil aux amants est un poème de Victor Hugo. Il montre que le poète n'était pas toujours sérieux au cas où vous en auriez douté !

Bon conseil aux amants

Un brave ogre des bois, natif de Moscovie
Était fort amoureux d'une fée et l'envie
Qu'il avait d'épouser cette dame s'accrut
Au point de rendre fou ce pauvre cœur tout brut

L'ogre, un beau jour d'hiver, peigne sa peau velue
Se présente au palais de la fée et salue
Et s'annonce à l'huissier comme prince Ogrousky
La fée avait un fils, on ne sait pas de qui

Elle était ce jour-là sortie et quant au mioche
Bel enfant blond nourri de crème et de brioche
Don fait par quelque Ulysse à cette Calypso
Il était sous la porte et jouait au cerceau

On laissa l'ogre et lui tout seuls dans l'antichambre
Comment passer le temps quand il neige en décembre
Et quand on n'a personne avec qui dire un mot ?
L'ogre se mit alors à croquer le marmot

C'est très simple, pourtant c'est aller un peu vite
Même lorsque on est ogre et qu'on est moscovite
Que de gober ainsi les mioches du prochain
Le bâillement d'un ogre est frère de la faim

Quand la dame rentra, plus d'enfant. On s'informe
La fée avise l'ogre avec sa bouche énorme
"As-tu vu, cria-t-elle, un bel enfant que j'ai ?"
Le bon ogre, naïf, lui dit : "Je l'ai mangé"

Or c'était maladroit. Vous qui cherchez à plaire
Ne mangez pas l'enfant dont vous aimez la mère.


Version de Julos Beaucarne, chanteur et poète belge, dont je n'ai pu trouver l'interprétation savoureuse sur you Tube.




mardi 20 décembre 2016

Victor Hugo : Torquemada


Torquemada est un drame en quatre actes et en vers de Victor Hugo écrit en 1869 et publié en 1882  en réaction à de nouveaux pogroms en Russie. Il fait partie du recueil Théâtre en Liberté qui  rassemble 4 drames et 5 comédies. Nous avons déjà lu ensemble la pièce Mangeront-ils au cours d'une lecture commune pour le challenge Victor Hugo. 
Torquemada n'a jamais été donnée du vivant de l'auteur. Le moine dominicain Tomás de Torquemada (1420-1498) qui fut le premier inquisiteur est un personnage historique.

L'intrigue

Tomas Torquemada, premier inquisiteur espagnol
Le moine espagnol Torquemada, considéré comme hérétique, est emmuré vivant. Il  est délivré par don Sanche et doña Rosa, de jeunes gens purs et innocents qui ont été élevés ensemble et ont découvert l'amour qu'ils ont l'un pour l'autre.  Pris de pitié pour le sort affreux qui attend le moine,  ils le délivrent.
Torquemada part à Rome où il obtient l'absolution du pape et revient en Espagne pour y fonder l'inquisition.  Cependant le roi Ferdinand amoureux de Rosa veut la séparer de son amoureux. Il les envoie au couvent et cherche à tendre un piège à don Sanche pour le tuer. Son premier ministre, le comte de Fuentel, les délivre et les confie à Torquemada. Celui-ci reconnaît en eux ses deux sauveurs  mais lorsqu'il apprend que ceux-ci l'ont délivré à l'aide d'une vieille croix pour soulever la pierre de sa prison, il décide de sacrifier leurs "corps" sur le bûcher pour sauver leurs "âmes".

Le sens

Avec le personnage de Torquemada, Hugo critique avec virulence le fanatisme religieux et l'intolérance. Au personnage de Torquemada qui fonde la religion sur la peur, il oppose saint François de Paule, un ascète, un saint, pour qui la religion ne peut reposer que sur l'amour.
Sa critique du pouvoir monarchique s'exerce à travers les personnages de Isabelle et Ferdinand d'Espagne, les rois catholiques, personnages tout aussi implacables.



Il y a dans cette pièce tardive de Victor Hugo (il avait quatre-vingt ans quand il la publie)  de grands moments où les vers flamboyants rappellent le jeune romantique Hugo. Le personnage de  l’inquisiteur espagnol est un personnage impressionnant. Il incarne le fanatisme porté à la plus haute puissance car Torquemada va jusqu’au bout de sa logique et de sa foi pervertie. Puisque brûler des corps, c’est sauver des âmes, il tient la promesse qu’il a faite aux jeunes gens en les « sauvant » c’est à dire en les livrant au feu.

L'inquisition Espagnole

La critique au moment de la parution en 1882  a reproché à Hugo ses erreurs en ce qui concerne l'histoire et la psychologique. Dans La Revue des deux mondes Louis Ganderax écrit  :

« L’interprétation du poète, si éloignée qu’elle soit de la vérité historique, l’est encore plus de la vraisemblance humaine : elle est justement contraire à la psychologie du chrétien. Comment un chrétien pourrait-il croire qu’en brûlant un hérétique, il le sauvera contre son gré ? Pour que la douleur de la chair profite à l’esprit, il faut que l’esprit l’accepte et l’offre au Seigneur ; le supplice n’a pas la valeur morale du martyre, et le ciel n’admettra pas ce racheté malgré lui.
Donc ce Torquemada n’est ni vrai, ni possible ..…  »  

 Louis Ganderax semble oublier que le fanatique ne raisonne pas comme un être normal. De plus, si comme il le dit, le personnage perd en vérité psychologique, il gagne, je pense, au point de vue dramatique. Le poète a voulu faire de ce moine un symbole du fanatisme religieux, il a voulu frapper les esprits en créant un personnage monstrueux dont le raisonnement échappe à la part d’humanité que chacun porte en soi. L'Histoire nous apprend que ces raisonnements existent ! Torquemada me fait penser à Savonarole à Florence et plus près de nous à Hitler. De ce fait, ce moine illuminé a une telle force qu’il met en relief tout ce qu’il y a d’atroce dans l’Inquisition. Il représente tout ce que hait Victor Hugo, l’intolérance, la haine de l’autre, l'atteinte à la liberté, le rejet de ceux qui n’obéissent pas à la norme, la volonté de domination des esprits. Torquemada n’est plus un homme, c’est un monstre et l’on pourrait en dire autant des autres personnages, les rois catholiques : Isabelle et Ferdinand qui représentent le pouvoir monarchique absolu …  ou presque absolu car les souverains doivent se courber devant le pouvoir religieux.

Quant à la vérité historique, Louis Ganderax a certainement raison. Victor Hugo a une grande connaissance de l'Espagne, un pays qu'il a visité, qu'il aime, et sa culture est immense.  C'est pourquoi ses didascalies sont très précises sur le décor et les costumes mais elles trahissent avant tout une  préoccupation esthétique et poétique.  Lorsque la vérité historique le gêne, il la sacrifie volontiers à l'Idée ou au Sens qu'il veut donner. C'est avant tout un poète, un visionnaire et il écrit ici un texte engagé qui dénonce les abus de pouvoir de l’église et de la royauté. La pièce est  évidemment une démonstration et parfois elle l’est un peu trop à mon goût ! je n’ai pas aimé par exemple le passage ou Torquemada rencontre Saint François de Paule et la discussion théologique qui s’ensuit et qui est trop démonstrative. De plus  cette scène ne sert pas l’intrigue, elle l’arrête.
   Pourtant Victor Hugo voulait que le drame peigne le « vrai» , soit conforme à « la nature », en mêlant comme dans la vie, « le sublime au grotesque », « le bien et le mal », « le tragique et le comique". Mais le drame finalement a été bien autre chose du moins chez Victor Hugo. La conception antithétique de la vie, le noir et le blanc, l’ombre et la lumière, qu’il développe dans toute son oeuvre, romans, poésies, dessins, et pas seulement dans le théâtre, a été animée par le souffle du grand poète. Loin de refléter la réalité, le drame frappe l’imagination, l’exalte, donne une dimension décuplée à l’intrigue d’où naît la beauté.
 Finalement Louis Ganderax a raison sur certains points mais pour moi sa critique passe à côté de ce qu'est le drame hugolien ! Ce qu'il y a de bien c'est qu'il ne pourra pas me répondre et me mettre en difficulté.  Après tout le pauvre homme a écrit cela en 1882 (ICI La revue des deux mondes), il y a prescription ! Et il fallait un certain courage pour critiquer Victor Hugo, vénéré comme un prophète, à l’époque ! 

Lecture commune  avec :

Miriam, Nathalie , Margotte