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mercredi 13 septembre 2017

Jean-Pierre Siméon, Olivier Tallec : Ceci est un poème qui guérit les poissons


Ceci est un poème qui guérit les poissons : texte de Jean-pierre Siméon Illustrations d’Olivier Tallec. Editions Rue du Monde


La page de garde de ce bel album pour enfant rappelle un tableau de Magritte : un grand poisson rouge sur lequel un petit personnage assis sur un chaise joue de l’accordéon est surmonté d’une inscription ondulant comme une vague : Ceci n’est pas un poisson qui guérit les poèmes et puis le titre : Ceci est un poème qui guérit les poissons.



Et oui, car tout est poésie dans cet album fantaisiste,  un joli livre un peu fou où les serpillères et les nouilles parlent, un monde à l’envers que ce soit dans le texte ou les illustrations.
 Et tout cela pourquoi? Parce qu’un petite poisson rouge est en train de mourir d’ennui au fond de son bocal et qu’il faut un poème pour le guérir ! Oui, mais, un poème qu’est-ce que c’est ? Arthur part en quête et questionne toutes les personnages qu’il rencontre, la boulangère, le marchand de vélo, sa grand mère.. C’est de la réponse de chacun d’eux que naîtra la magie, le poème qui nous plongera tous dans l’eau du bocal.

Les dessins aux couleurs gaies sont doux, agréables à l’oeil et surtout quand le monde est à l’envers n’oubliez pas de retrouver l’image !


Un très joli album qui est une bonne introduction à la poésie, porte de l'imagination et de la liberté.


mardi 12 septembre 2017

Thorkild Hansen : La mort en Arabie



Avec La mort en Arabie aux éditions Actes Sud, Babel, Torkild Hansen écrit un livre magnifique et prenant, roman historique comme le révèle sous-titre Une expédition danoise 1761_1767.

 Un roman historique

La carte du Yemen établie par Carsten Niebuhr

 La Mort en Arabie commence par la vision d’une barque sortant de la rade de Copenhague le 4 Janvier 1761 et  transportant cinq hommes vers un vaisseau de ligne Le Gronland. C’est le départ d’un voyage d’études commandité par le roi du Danemark Frédérick V, en direction de l’Arabie Heureuse. Nous apprendrons que le pays ainsi nommé est le Yemen alors terre inconnue et quelle est l’origine de ce nom. L’on ne peut que constater, en regard de ce qui est arrivé aux membres de l’expédition, l’ironie tragique de cette appellation puisque quatre d’entre eux ne reviendront pas.

Un retour en arrière nous permet de voir les préparatifs et les buts de l’expédition et  faire connaissance de ses membres. Deux sont danois, deux allemands et le cinquième suédois.

Frédéric Christian Von Haven est philologue : il est attiré par l’argent mais espère que l’expédition ne partira jamais; on s’apercevra bien vite qu’il se révèle incompétent, veule et paresseux. Il n’accomplira jamais ce que l’on attend de lui. Non seulement il ne servira pas l’expédition mais on peut dire qu’il introduit la dissension dans le groupe.
Peter Forsskal, suédois, physicien et botaniste, élève de Linné : ses prétentions, la haute opinion qu’il a de lui-même, le rendent antipathique mais il est réellement compétent, érudit et même brillant. C’est un bourreau de travail.
Carsten Nieburhr mathématicien et astronome allemand : d’origine modeste, il n’est pas professeur comme les précédents et est en grande partie autodidacte. Travailleur consciencieux et scrupuleux, passionné par son métier, curieux de tout, observateur, il dresse des cartes des pays qui ont fait autorité pendant les siècles qui vont suivre.
Christian Carl Kramer, médecin et astronome est un personnage sans envergure, assez falot, qui n’apportera pas grand chose à l’expédition.
Georg Wilhelm Bahrenfeld, peintre et graveur a exécuté des dessins très précis de lieux archéologiques et des scènes croquant la population.

 La mission a pour but d’identifier la faune et la flore citées dans la Bible, élaborer une carte topographique du Yemen, comprendre le cycle des marées lors de l’Exode des Hébreux et analyser les modes de vie des Arabes et des Juifs. Elle durera sept ans et Frédéric V mourra entre temps.
L’expédition gagnera le Yemen en passant par Marseille, Constantinople, l’Egypte, la mer Rouge avant d’arriver à Mocha, Sanaa.  Le seul survivant reviendra au Danemark via la Perse, après avoir fait une escale en Inde.

Des personnages romanesques

Carsten Niebuhr
Le récit de l’expédition est d’abord une étude psychologique qui faite revivre des personnes qui ont réellement existé comme s’il s’agissait de héros romanesques tout en s’appuyant sur une analyse poussée de leurs motivations, leur caractère, leurs faiblesses et leurs qualités à partir de documents,  lettres, témoignages, et de leurs journaux. Nous éprouvons donc de l’antipathie pour certains ou, au contraire, et nous nous attachons à  certains d’entre eux. Carsten Nieburhr, en particulier, est une beau personnage. Quant à ses aventures, elles sont dignes de la fiction la plus folle, il va même disparaître pendant six mois, se fondre dans le paysage, adopter les vêtements, les coutumes, la langue des autochtones, changer de nom pour survivre dans ces contrées.
 Avec ce voyage en Arabie nous explorons toutes les facettes des travers humains, lâcheté, couardise, orgueil, soif du pouvoir, cupidité, colère,  jalousie, paresse mais aussi la capacité de certains hommes à transcender l’impossible, courage et détermination, soif de savoir, curiosité intellectuelle, intelligence et ingéniosité, attachement au devoir et à l’honneur.

Récit d’aventures et recherche scientifique

Peter Forsskall
Nous lisons et ce n’est pas le moins passionnant, un roman d’aventures plein d’aléas et de dangers. En mer Méditerranée le navire est sur le point d’être arraisonné par des bateaux anglais, ils évitent de justesse le combat ; plus tard, les savants se rendent compte que la cargaison transportée est humaine, ce sont des femmes qui vont être vendues dans les sérails égyptiens, une idylle naît entre Niebuhr et l’une de ces jeunes prisonnières comme dans un roman de Pierre Loti ! A Alexandrie ils sont pris à partie par la population qui voit dans l’astrolabe de Niebuhr un instrument de destruction, plus loin des voleurs sont lynchés devant eux par la foule en furie. Parfois la réalité semble dépasser l’imagination, Von Haven les menace d’empoisonnement à l’arsenic. Ils remontent le Nil, parviennent au Caire, traversent le désert avec une caravane en direction de Suez. Ce n’est qu’au prix de bien d’efforts et de peines, la maladie s’abat sur eux, la mort s’invite, qu’ils parviendront en Arabie Heureuse ou leurs souffrances ne feront que s’accentuer et où la mort s’abattra!
Et pendant tout ce voyage les infatigables Niebuhr et Forsskal ne s’arrêtent que terrassés par la maladie. Niebuhr cartographie avec une rare précision les pays qu’il traverse, mesure la hauteur des pyramides, note les coutumes des populations comme un vrai ethnologue, étudie et recopie les hiéroglyphes, témoignages des vestiges archéologiques :

Jour après jour, il recueille de nouvelles pièces pour ce grand jeu de construction qui deviendra enfin la carte du Yemen, un travail de pionnier qui, pendant plus d’un siècle, sera la base de toutes les explorations européennes de ce lointain pays.

tandis que Forskall part à la recherche d’arbres et de fleurs rares, constitue d’immenses collections, étudie les animaux, analyse les marées de la mer Rouge, cherche à comprendre des phénomènes physiques comme la luminescence de la mer. Il est en relation avec diverses universités européennes et fait parvenir des collections de plantes au Danemark. Cette quête scientifique, passionnante, nous permet donc de découvrir de nombreux pays tels qu’ils étaient au XVIII siècle. Un régal !

Une réflexion philosophique

Thorkild Hansen
Le roman est aussi une réflexion philosophique car le voyage se révèle vite être une marche vers la mort puisqu’un seul des cinq explorateurs en reviendra. L’échec de l’expédition rend d’autant plus tragique le destin de ces hommes. En effet, si Niebruhr qui ne cherchait ni les honneurs ni la richesse a eu la satisfaction de voir son travail reconnu, Peter Forskall dont on peut dire que sa vie fut dévouée à la science jusqu’à la fin n’a pas eu cette chance. Les immenses collections expédiées tout au long de sa mission finiront par pourrir dans des caisses au fond d’un musée, réduisant à néant des années de travail acharné. Quant aux dessins de Bahrenfeld, ils brûleront dans un incendie. Il y a dans cette fatalité qui s’est attachée à ces hommes et dans l’absurdité de leur mort inutile de quoi désespérer. Et effectivement je me suis senti le coeur étreint.

Pourtant la grandeur de ces hommesforce l’admiration et  fait naître l’espérance. C’est ce que note Thorkild Hansen. Au milieu de la préparation affolée d’un combat naval, des canons pointés sur son navire, Carsten Niebuhr observe la course de Vénus devant le soleil :

"Si le monde subsiste encore, l’une des causes en est peut-être qu’il se présente toujours même dans les moments les plus dramatiques quelqu’un qui dirige impassiblement son regard d’un autre côté…  Sur quelques signes tracés dans le sable… Sur quelques pignons de la ville de Delft… Ainsi, à bord d’un bateau où les canons s’apprêtent à délivrer leurs arguments de vie et de mort, un homme se plonge tout entier dans l’observation du passage de Vénus. Comment ne pas trouver dans cette image une sorte de consolation ? Nous qui cherchons à suivre Niebuhr et ses compagnons dans une histoire vieille de deux siècles, alors que des rampes de lancement sont prêtes à tirer bien d’autres projectiles. Nous aussi nous voulons observer ces évènements lointains avec autant d’exactitude que possible, mais la main tenant l’astrolabe tremble un peu…."

Thorkild Hansen se révèle un grand écrivain en portant le récit historique d’une expédition scientifique au niveau du mythe. Son livre est pour moi un coup de coeur.

Le sens du nom : L'Arabie Heureuse

Le Yemen est au Sud de la Mecque et à droite du point cardinal de référence, l'Est

Voici un passage du livre  pour ceux qui voudrait savoir tout de suite l'explication du nom de l'Arabie Heureuse. Si vous le préférez lisez le livre pour le découvrir !

"Parce que tout cela repose sur un malentendu, parce que le nom d'Arabie Heureuse est une erreur de traduction. C'est le petit mot Yemen, de nos jours aussi le nom du pays, qui est la cause de toute l'histoire. En Arabe, Yemen signifie à l'origine la main droite ou le côté droit. Lors que les Arabes veulent désigner les points cardinaux, ils se tournent depuis l'aurore des millénaires vers l'est, tout comme nous trouvons naturel de regarder le nord. Face au "nombril du Monde", la pierre sainte de la Kaaba à La Mecque, l'Arabe a toujours le visage tourné vers l'est. C'est de cette façon que " Yemen", qui signifiait "droite " à l'origine, est arrivé peu à peu à désigner le sud. Le Yemen est donc le pays qui est droite, le pays vers le sud. Or disent les Arabes, la main droite est quelque chose de beaucoup plus distingué que la main droite. Alors que la main gauche s'appelle aujourd'hui encore "la main sale" et est considéré comme inférieure, le mot "droite "ou "Yemen" en est venu à signifier heureux, qui porte bonheur. Arabia Yemen est donc devenue par le fait d'une mauvaise traduction Eudaimon Arabia, puis Arabie Felix, puis l'Arabie Heureuse... En réalité, ce mot signifie l'Arabie du Sud.


C'est Dominique qui m'a donné envie de lire ce livre  ICI 

Luocine l'a beaucoup aimé aussi ICI


dimanche 10 septembre 2017

Louise Cohen et Toni Demuro : L’oiseau qui avait avalé une étoile


L’oiseau qui avait avalé une étoile de Louise Cohen et Toni Demuro  aux éditions La Palissade

Une nuit, un oiseau avale une étoile et se met à briller.




Mais  les autres animaux ne veulent plus de lui car sa luminosité risque d’attirer les prédateurs.


Dès lors, il parcourt le vaste monde et reste toujours seul. Un jour pourtant un homme, dans le désert, l’accepte pour compagnon et l’amène dans son palais des Mille et une nuits où il pourra être heureux..

Un joli conte sur la différence qui entraîne le rejet des autres mais il est bon de savoir que chacun peut trouver sa place quelque part et avoir un ami qui l’accepte. Chacun, en effet, porte en soi une richesse qui mérite d’être connue, une graine qui ne demande qu’à être semée pour éclore comme cette fleur lumineuse née d’une larme de l’oiseau.

J’ai aimé ce récit émouvant et plein de poésie dans sa grande simplicité souligné par les illustrations très pures qui l’accompagnent. Le contour des animaux et des arbres stylisés se détachent sur un fond uni. Peu à peu l’obscurité du début, le noir, le bleu nuit, le marron, les verts bronze et les bruns vont laisser place aux couleurs du désert, les ocres, les jaunes, les verts clairs et finir sur une nuit dorée qui est la couleur du bonheur.

Un très bel album coup de coeur que je retiens pour son optimisme et la beauté des illustrations.

Avis de mon petit-fils Liam (4 ans) :
J'ai aimé le livre quand l'oiseau brille et personne ne le veut. Il a des petits yeux qui pleurent et il est malheureux.

Prix des Incorruptibles 2016-2017

samedi 9 septembre 2017

André Didierjean : La madeleine et le savant ou Balade proustienne du côté de la psychologie cognitive



Ce livre La madeleine et le savant sort de ma PAL où il était entré sur les conseils de Keisha  Ici et Ici.  Je l’ai enfin sorti de l’oubli où il n’aurait jamais dû être ! 

Marcel Proust dans sa Recherche du temps perdu a exploré les phénomènes de la mémoire et de la résurrection des souvenirs avec une intuition, une intelligence et une justesse géniales. Depuis, les chercheurs ont développé une science dite de la psychologie cognitive qui étudie tous les processus cognitifs  expliquant notre fonctionnement : la mémoire, la perception, l'attention, l’apprentissage, le sentiment d’être soi… Elle corrobore les observations de Marcel Proust et vont plus loin en s’appuyant sur les connaissances actuelles.

André Didierjean, professeur de Psychologie cognitive à l’université de Besançon, revisite l’oeuvre de Proust dans cet essai La madeleine et le savant  dont le sous-titre est tout un programme : Balade proustienne du côté de la psychologie cognitive. A la lumière des découvertes récentes et des avancées de cette science en plein essor, il met en relief la fabuleuse clairvoyance du grand écrivain en ce qui concerne les phénomènes de la mémoire.

L’auteur invite ceux à qui la lecture des extraits de Proust ferait peur à passer outre en ne suivant que la démonstration scientifique. Pour moi, bien évidemment, ce serait appauvrir cette lecture car le livre d'André Didierjean présente indéniablement un double intérêt :

Un intérêt scientifique

 

André Didierjean
Je me suis intéressée aux recherches, aux expériences et aux découvertes de la psychologie cognitive qui nous permet de mieux comprendre le fonctionnement de notre cerveau en ce qui concerne la mémoire à court terme ou à long terme, sa sélectivité, la naissance de faux souvenirs. Les tests qui sont imaginés pour expérimenter au plus près et en évitant le plus possible les marges d’erreur sont inventifs et parfois bluffant...  Comme cette chercheuse qui imagine un dispositif astucieux, un mobile pour mesurer la mémoire des bébés de trois mois.
Quant à l’étude de la mémoire, garante du sentiment de soi, elle permet de mieux comprendre les dysfonctionnements de la pensée, en particulier de la maladie comme celle d’Alzheimer.

Un intérêt Littéraire  : 

Marcel Proust
 La madeleine et le savant est un essai passionnant pour tous ceux qui aiment la littérature et Proust, en particulier.
Le parallèle établi par André Dierjean entre les extraits de La Recherche et les tests scientifiques correspondants, révèle à quel point les impressions proustiennes sont vérifiées par l’expérimentation; il montre aussi la dette de la psychologie cognitive envers Marcel Proust. Une interaction absolument passionnante qui met en lumière l’immense pouvoir de la littérature. L'écrivain est proche, par l’intuition et par son intelligence des autres, de la vérité psychologique. Il a le pouvoir, nouveau démiurge, de recréer le monde dans son oeuvre.

C’est ce qu’avait très bien vu Marcel Proust : « L’impression est pour l’écrivain ce que l’expérimentation est pour le savant, avec cette différence que chez le savant le travail de l’intelligence précède et chez l’écrivain vient après »

Le sentiment de soi vu par Marcel Proust


Le chapitre que André Didierjean a intitulé Le sentiment de soi prend comme point de départ l'étonnement éprouvé par Proust et son questionnement quand il se réveille d’un lourd sommeil.

On appelle cela un sommeil de plomb; il semble qu'on soit devenu, même pendant quelques instants après qu'un tel sommeil a cessé, un simple bonhomme de plomb. On n'est plus personne. Comment, alors, cherchant sa pensée, sa personnalité comme on cherche un objet perdu, finit-on par retrouver son propre moi plutôt que tout autre? Pourquoi, quand on se remet à penser, n'est-ce pas alors une autre personnalité que l'antérieure qui s'incarne en nous? On ne voit pas ce qui dicte le choix et pourquoi, entre les millions d'êtres humains qu'on pourrait être, c'est sur celui qu'on était la veille qu'on met juste la main. Qu'est-ce qui nous guide, quand il y a eu vraiment interruption (soit que le sommeil ait été complet, ou les rêves entièrement différents de nous)? Il y a eu vraiment mort, comme quand le cœur a cessé de battre et que des tractions rythmées de la langue nous raniment. Sans doute la chambre, ne l'eussions-nous vue qu'une fois, éveille-t-elle des souvenirs auxquels de plus anciens sont suspendus; ou quelques-uns dormaient-ils en nous-mêmes, dont nous prenons conscience. La résurrection au réveil — après ce bienfaisant accès d'aliénation mentale qu'est le sommeil — doit ressembler au fond à ce qui se passe quand on retrouve un nom, un vers, un refrain oubliés. Et peut-être la résurrection de l'âme après la mort est-elle concevable comme un phénomène de mémoire.  Le côté de Guermantes 


Ces interrogation sont le point de départ de l’expérimentation cognitive : « Pourquoi avons-nous le sentiment être le même depuis l’enfance alors que nos centres d’intérêt ont changé ainsi que de nombreuses dimensions de notre personnalité ? » Qu’est-ce qu’être soi?
La réponse du savant est complexe après observation et une batterie de tests :  La construction de notre moi est le fruit d’un travail complexe qui structure, en autres, nos souvenirs, nos ressentis, et ce que les autres nous renvoient.

jeudi 7 septembre 2017

Estelle Fenzy : Mère


Je vous ai déjà parlé dans mon blog d'Estelle Fenzy : Rouge vive  ICI.  La voici à nouveau avec un merveilleux recueil vrai, tendre, intitulé Mère, poèmes vibrants d'émotion et de retenue qui font mouche et vous touchent en plein coeur.


Être mère : l'enfantement, déchirure vers un amour infini : 

 Mon ventre s'accomplit.

Un sanglot ouvre gorge à  la vie. Le cri de l'enfant se jette dans mes bras. Et pendant qu'on le baigne et l'entoure de linges, l'avenir hors de moi pleure déjà dans son alcôve.

Chantant sirène mes eaux perdues, je suis mère.

Moments de bonheur précieux :

Il joue. Accroupi dans le salon, il me regarde. Chance d'être là. De sentir sur moi cet amour rebondir.
(...)
 Un petit nez mouillé dans mon cou, je suis mère.

mais aussi d'inquiétudes et de craintes :

 Je tremble.

Devant les rues à traverser, les marches d'escalier, les bouts de verre cassés. Là où ça coupe, pique, brûle.

Lorsqu'un danger cogne sans bruit sur le doux mur du ventre, moi seule je l'entends
 (...)

Je suis une femme qui tremble

Je suis mère.

Joies de voir grandir l'enfant, savoir qu'il va  partir, dériver vers un autre avenir où l'on ne sera plus.

 Elles sont belles et rondes. Leurs joues quémandent sans cesse les baisers. L'urgence heureuse à me trouver tout près dans la maison.

J'ai vu pousser les dents, les cheveux. Les seins magnifiques. Les ailes et les ongles vernis. 

A peine humaines, elles s'essuient les pieds sur les bords du chemin. Se déchaussent et légères promènent rossignols la chanson de leur jeune temps. Les plumes de leur robe.
 (...)

 Être toute leur vie. Pas pour toujours.

Je suis mère.
 
Consolation, Partage, Transmission  :

Au milieu de la nuit enfant pleure.

Il dit 
Je ne veux plus grandir. Si je continue, tu vas devenir vieille. Et mourir. Je ne veux pas.

Je dis
C'est la vie. Elle passe. L'amour, non. Nos absents glissent tout bas des mots dans nos poings fermés. Si tu ouvres les mains, le souffle se libère dans le vent. Là s'écrit notre bonne aventure.

Quand mon coeur battra trop tard, tes yeux joueront de la musique. Ma joie survivra dans leur bleu. J'y serai cette ombre dansante que jamais le soleil ne gomme.

Je suis mère.

Acceptation, vieillesse, Amour toujours :

Un jour je guetterai les pas sur les graviers. Les coups à la fenêtre.

Les dimanches de chance, ils m'encercleront de leurs bras, de leurs questions. Réchaufferont mes épaules. Le bleu écaillé de mes yeux. (...)

Je serai vieille, enfant de mes enfants.

Toujours 
mère.

Ces quelques extraits pour vous communiquer l'émotion qui naît de la lecture de ce beau  recueil :  chaque poème explore avec délicatesse, sensibilité et justesse, la légèreté et la gravité d'être mère.

 Mère  : Estelle Fenzy aux Editions Boucherie littéraire collection La feuille et le fusil

 
Henry Moore  : Mère


mardi 5 septembre 2017

Arnaldur Indridason : Dans l'ombre



Le roman d’Arnaldur Indridason, Dans l'ombre aux éditions Métailié, explore un des moments de l’histoire Islandaise qui en 1941 fut occupée par les forces armées britanniques et américaines, pour faire obstacle au nazisme.

L’écrivain brosse un tableau passionnant de ce bouleversement historique qui chamboule la vie, les habitudes et même les moeurs des habitants de l’île. C’est l'aspect du roman qui m’a le plus intéressée. L’occupation de l’Islande par des soldats alliés, arrivés en masse, transforment l’économie du pays, créent des emplois, donnent aux femmes, en particulier, des espoirs d’avenir et d’émancipation.  Se faire épouser par un soldat anglais, c’est sortir de la misère et quitter un pays pauvre, économiquement en retard sur ceux des occupants. Les femmes couchent avec les soldats, s’amusent avec eux dans des bars et des dancings qui se développent, trouvent du travail dans les blanchisseries et les cantines. C’est ce que les islandais ont appelé la Situation. La police est obligée de protéger les jeunes adolescentes attirées par le miroir aux alouettes pour éviter qu’elles ne servent de prostituées aux soldats.

C’est dans ce contexte que se place l’intrigue policière : un représentant de commerce, Eyvindur, est assassiné dans l’appartement d’un de ses collègues, Félix Lunden. Son cadavre est marqué au visage par une croix gammée. Les soupçons se portent vite sur ce Félix qui appartient à une famille d’origine allemande qui semble avoir eu des sympathies pour l’idéologie nazie. Félix exercerait-il des activités d’espion à la solde de l’Allemagne nazie ? De plus,  c’est un ancien camarade de classe d'Eyvindur, ce qui va mettre à jour des zones d’ombre de leur enfance commune.
 Pourtant un colt appartenant à l’armée américaine oriente les enquêteurs vers les soldats qui peuplent la ville. Et ceci d’autant plus que Véra, la femme d'Eyvindur, qui a quitté son mari pour travailler comme blanchisseuse, a une liaison avec un soldat  étranger.

Ce sont deux jeunes enquêteurs peu expérimentés qui mènent l’enquête : Flovent qui travaille depuis quelques années à la Criminelle de Reykjavik où les crimes sont rares. Il a fait un stage à Scotland Yard. Thorson, canadien d’origine islandaise, interprète maîtrisant la langue islandaise, est affecté à la police militaire britannique puis américaine. Il devient l’assistant de Flovent parce qu’il est le seul capable de communiquer avec les habitants tout en garantissant les intérêts de l’armée.
Les deux policiers malgré leur inexpérience vont se révéler entêtés et coriaces. Ils sont sympathiques et l’on s’intéresse à eux, même s’ils ne m’ont pas encore  permis d’oublier le regretté Erlendur. Mais laissons leur le temps ! Dans l’ombre n’est que le premier tome d’une trilogie qui va certainement permettre aux deux personnages de s’imposer. Le deuxième volume La femme de l’ombre paraîtra en octobre  2017. A suivre donc !



dimanche 3 septembre 2017

Ian Mc Ewan : Dans une coque de noix



Bien au chaud et bien à l’abri (du moins c’est ce que l’on pourrait espérer ! ) dans l’utérus de la mère, le foetus assiste, impuissant, à un complot dont les protagonistes sont sa mère, la belle, la sublime Trudy et son amant Claude qui n’est autre que le frère de son père. Et qui est son père ? Le poète John Cairncross, brillant et lettré, très amoureux de sa femme, que le bébé ne peut s’empêcher de comparer à l’infâme, grossier et ignare Claude. Les mystères du sexe et de l’amour le laissent perplexe ! C'est ce qu'imagine Ian Mc Ewan, avec son dernier roman  : Dans une coque de noix

Et quel complot, allez-vous me dire? C’est ce que l’enfant en devenir va s’efforcer de comprendre en espionnant les uns et les autres. Le meurtre du père ! Dès lors, la grande question du futur bébé sera : « naître ou ne pas naître? »

Le titre du roman Dans une coque de noix, outre qu’il fait allusion à la situation du bébé dans le ventre de sa mère, s'explique par les vers de Shakespeare issus de Hamlet  donnés en exergue  : «  O Dieu, je pourrais être enfermé dans un coque de noix et m’y sentir roi d’un espace infini, n’était que j’ai de mauvais rêves. »
En réalisant cette enquête policière in utero, Ian Mc Ewan signe un roman dont l’humour noir, au second degré, procure un vif plaisir ! Nous assistons donc aux interrogations du foetus angoissé, qui tel Hamlet, hait l’amant de la mère, cherche à sauver son père mais comprend bien que sa vie ne tient qu’à un fil si la mère échoue et meurt ! Et le voilà écartelé entre ses deux parents ! Cruel dilemme... si jeune !
Mais ne vous y trompez pas  ! Malgré le point de vue farfelu, l’enquête est conduite jusqu’au bout comme un véritable thriller où l’on craint tour à tour pour la vie du père, celle du foetus et de la mère. La passion, l’adultère, la jalousie, l’amour si proche de la haine, meurtre et fratricide, il s’agit bien de la tragédie shakespearienne traitée avec une savoureuse ironie !
Un brillant exercice de style !

samedi 2 septembre 2017

Myriam Ouyessad, Arnaud Nebacche : Tibouli, rêve de couleurs


C’est l’hiver sur la banquise. Maman ours (Mamours) rassemble ses petits dans la grotte : c’est le moment d’hiberner pendant de longs mois alors que la nuit va régner sur le paysage tout blanc de la banquise. 


Mais petit ours en a assez du blanc et il veut des couleurs ! Le voilà parti sur son iceberg qui vogue sur la mer toute bleue, si bleue que notre petit aventurier voudrait bien une autre couleur et encore une autre…

Site de l'Illustrateur Arnaud Nebacche Ici
Son radeau de glace, de couleurs en couleurs, l’amène dans de lointains pays où toutes les couleurs éclatent comme un feu d’artifice ! Comme le Monde est divers et beau !




Voilà un délicieux petit livre avec une histoire simple, bien à la portée des tout-petits et de magnifiques illustrations qui sont un régal pour les yeux. Petit ours découvrira au cours de son voyage que chacun désire ce qui n’est pas à sa portée et que le blanc peut être une belle couleur aux yeux de ceux qui ne peuvent en jouir. Grâce à la solidarité des oiseaux multicolores, il pourra regagner son beau pays de glace et de neige.

Un livre coup de coeur aux éditions Circonflexe !

Ma petite-fille Léonie qui entre en CE1 l'a lu. La lecture est très facile pour elle et elle a été séduite par l'histoire et les illustrations qu'elle a énormément aimées.

Voyons maintenant ce qu'en pense mon petit-fils Liam (4 ans)  à qui j'ai offert et lu ce livre destiné aux enfants à partir de 3 ans :
J'ai aimé le livre beaucoup, beaucoup,  beaucoup. Surtout quand tout est bleu et quand l'ours rencontre les oiseaux multicolores. Et ce qui ma plu, c'est quand la maman ours appelle tous ses enfants pour venir se coucher et que petit ours n'y va pas et s'en va sur son radeau.

 

 Les Incorruptibles


 *Les Incorruptibles  : http://www.lesincos.com/

J’ai découvert les Incorruptibles grâce à l’enseignante de ma petite-fille qui avait signalé aux parents qu’ils pouvaient charger des livres gratuits pendant l’été. 


Les Incos est une association agréée par l’éducation nationale qui cherche à susciter chez les jeunes le désir et le plaisir de lire. Elle organise chaque année un concours auquel participe les élèves des écoles et collèges et qui permet de sélectionner les meilleurs livres pour enfants de la Maternelle à la 3ième. 

Pour offrir des livres à mon petit Liam (4ans) j’ai choisi des albums qui ont été lauréats du 28°  prix 2016-2017 des Incorruptibles :  Tibouli rêve de couleurs en fait partie.  

Je vous parlerai aussi d'un autre livre choisi pour Liam qui a été primé : L'Oiseau qui avait avalé une étoile

 Et un autre qui a été sélectionné pour le 29ième prix  : Au bureau des objets trouvés

Avis aux parents  : Ce sont tous des livres de qualité

jeudi 31 août 2017

Anne-Cathrine Riebnitzsky : Les guerres de Lisa


De retour de mission en Afghanistan pour l’armée danoise, dans l’avion qui la ramène au Danemark, Lisa se retrouve aux côtés d’Andreas, médecin, à qui elle décide de raconter l’histoire de sa vie. Une histoire familiale lourde à ­porter : une mère manipulatrice et dépressive, un père violent, la tentative de suicide de sa jeune sœur… Mais aussi l’histoire de quatre frères et sœurs liés par un même combat : survivre — à la guerre comme dans la vie.
Lisa dévoile de terribles secrets, comme les cir­constances exactes de la mort accidentelle du père, et les conséquences tragiques d’une mission para­chutiste en ­Russie à laquelle son petit frère Peter a participé. (Quatrième de couverture)

 Si le livre Les guerres de Lisa de Anna-Cathrine Riebnitzsky aux éditions Gaïa commence en Afghanistan où Lisa et son frère Ivan, tous deux soldats comme le fut l’auteure elle-même, mènent leur guerre, le roman nous ramène bien vite au Danemark au chevet de la petite soeur Marie, musicienne, qui vient de faire une tentative de suicide. Et l’on s’aperçoit que la guerre ne cesse pas mais se déplace de l’extérieur vers l’intérieur, au sein de la cellule familiale où la fratrie, deux frères, deux soeurs dont Lisa est l’aînée, est unie dans la lutte pour la survie qui les a opposés à leurs parents et dont ils porteront toujours les marques. Le roman alterne, en effet, les retours dans le passé et les moments présents.
La mère admirée mais malade, suicidaire, dont on découvre comment elle joue avec l’affection de ses enfants disant à chacun d’eux qu’il est le préféré ; le père violent et brutal qui attise la haine de ses enfants. Haine qui unit aussi les époux qui ne se sont jamais aimés, jamais entendus. Oui, la guerre est à l’intérieur. C’est ce qu’exprime Marie, la jeune soeur artiste, plus fragile que ses aînés : « Elle dit que les munitions, dans cette maison, ce sont les gifles et les mots. »
L’auteure dont il semble que le récit soit en partie autobiographique crée une atmosphère pesante autour de cette famille sur laquelle pèse, même après la mort du père, des non-dits, ce que l’on soupçonne sans jamais le formuler. Une version des Atrides au Danemark qui permet de comprendre pourquoi deux des enfants Lisa et Ivan se réalisent dans les combats de l'armée danoise qui mettent leur vie en danger, vie que les poussées d’adrénaline rendent précieuse tandis que le second frère Peter est sur un fauteuil roulant. On y voit aussi comment les névroses se forment d’une génération à l’autre, de la grand-mère de Lisa à sa mère qui dès l’âge de huit ans avait la conviction: « que la seule façon de rendre sa mère heureuse était de mourir. »  L’écrivain arrive à rendre la complexité des rapports humains mais j’ai trouvé que les enfants étaient singulièrement tendres entre eux contrairement à ce que leur enfance à la dure laissait attendre !

Si l’enfance malheureuse et ses séquelles est un thème largement exploité dans la littérature, Anne-Cathrine Riebnitsky, écrivaine danoise, a une manière personnelle de traiter ce sujet grave qui se termine contre toute attente par une note optimiste.



vendredi 18 août 2017

Elizabeth George : Un patience d'ange



En promenant son chien dans la lande près du cercle de pierres de Nine Sisters Henge, au nord de l'Angleterre, une vieille dame découvre le cadavre d'un jeune homme, poignardé. La police, rapidement arrivée sur les lieux, ne tarde pas à trouver, non loin de là, le corps d'une jeune femme, tuée d'un violent coup à la tête. Et très vite les premières questions se posent : les victimes se connaissaient-elles ? Existait-il un lien entre elles ? Y a-t-il une raison pour que le meurtrier les ait tuées de deux façons différentes ? (Résume quatrième de couverture)

Un double meurtre sur une lande dans le Derbyshire. Elizabeth George nous concocte ici une intrigue vraiment complexe avec une foule de personnages qui tous auraient eu une raison - y compris ses propres parents-  pour tuer Nicola Maiden! Nicola, une fille qui n’a pas froid aux yeux et collectionne les amants comme des vieilles chaussettes ! Voilà de quoi  faire quelques mécontents ! Mais ce n’est pas tout ! Ce que l’on va découvrir sur elle au cours de l’enquête complique encore le récit  et l’on peut en dire tout autant, quoique pour d’autres raisons, du jeune homme occis en même temps qu’elle, Terry, artiste autoproclamé. Bien, n’oublions pas le prologue qui a une importance extrême et pourrait nous mettre sur la voie si nous étions plus fûtés.
 C’est tout à l’honneur de Elizabeth George de pouvoir nous tenir en haleine en nous amenant de fausse piste en fausse piste ! De plus elle nous balade dans des milieux interlopes pas piqués des vers qui feront votre éducation ! Et oui, l’on apprend beaucoup dans ce livre sur les milieux sado-masochistes !
J’ai bien aimé aussi, dans un tout autre ordre, me promener dans ce paysage du Derbyshire (même si l’auteure nous dit qu’elle a pris des libertés envers les lieux) au milieu de ces landes trouées de grottes, qui offrent des sites préhistoriques et des vieux châteaux en ruine.

C’est le premier livre que je lis de cette auteure aussi ai-je découvert ses personnages récurrents, les deux policiers : le très aristocrate Thomas Linley chargé de l’enquête, homme à principes, peut-être un peu misogyne, et sa coéquipière Barbara Havers issue du peuple. Celle-ci a du caractère et a l’air assez difficile à gérer mais est généreuse et humaine. Ma sympathie va à la seconde et j’aimerais bien lire le roman précédent qui l’a mise dans une situation difficile et l’a fâchée avec son chef. Quant à la victime Nicola, Elizabeth George a créé un personnage assez étonnant au point de vue psychologique  : une femme tellement exempte de préjugés et tellement libérée de toute morale judéo-chrétienne en ce qui concerne la sexualité déviante ou non, qu'elle paraît être une ovni.

En résumé un livre qui se lit bien et maintient notre intérêt pendant 650 pages !



samedi 12 août 2017

André Gardies, Jacques Mauduy : Je t'écris du Gévaudan, ma Lozère

Le Causse et la stippe pennée (source)
Retirée dans mes Cévennes natales, voici ce que je lis en ce moment : Je t'écris du Gévaudan, ma Lozère. Je rédigerai un billet sur ce livre qui se présente sous forme épistolaire quand je l'aurai terminé. En attendant voici  des extraits de la lettre 7 sur le Causse Méjean pas très loin de l'endroit où j'habite.

 Aujourd'hui, je t'écris de Hielzas sur la Causse Méjean.

"Ce qui me fascinait aussi c'était le paysage. Une immense steppe ondulée, grise en hiver, soyeuse, plus que verte au printemps, surmontée de croupes chauves. A l'assaut de ces versants doux, des murs, des murailles délimitaient d'immenses rectangles. J'y voyais volontiers d'anciennes fortifications, des enclos préhistoriques. Les chazelles, les capitelles couvertes de pierres m'attiraient : à l'intérieur de ces cabanes, un banc de pierre permettait de s'asseoir, un trou dans la couverture laissait échapper la fumée d'un feu dont on voyait les brandons éteints au sol dans un foyer sommaire. Je croyais dur comme fer que tout cela était préhistorique jusqu'au jour où, gardant les moutons avec l'oncle Sully, un violent orage nous attaqua et, réfugiés dans une de ces bories ("construite par le grand-père de sa femme") l'oncle avec son briquet en amadou alluma "un petit feu pour se sécher" avec un fagot qu'il prenait soin de renouveler après usage. Sa capitelle lui servait aussi à se mettre à l'ombre car elle  était bien fraîche en été grâce au frêne qui la protégeait."

Stippe pennée (source)

"Nous étalions nos cueillettes des plumets doux et chatouillants, de ce que les savants nomment la stippe pennée pour moi ce n'était que de l'herbe de soie joyeuse jouant au vent; lorsque j'ai vu la mer pour la première fois, je me suis retrouvé devant les ondulations de cette steppe. Mais la mer bleutée est violente alors que la mer herbue du Causse apaise. Pourtant les oiseaux, les araignées et les sauterelles y mènent d'âpres combats."

Le chardon-baromètre ou Carline à feuilles d'acanthe
"Quand mon grand-oncle venait voir son frère (discrètement) et et que nous cheminions tous les trois de chardons en chardons-baromètres, une grande tranquillité me gagnait : les histoires de beau temps, les légendes du géant enterré sous le dolmen et le mystère de ces eaux souterraines, des grottes, des avens, me fascinaient. Nous passions dans les combes ou du blé, de l'orge, attendaient d'être moissonnés. Des taches circulaires, vertes, jaunes et rouges en hiver, trouaient l'espace gris du Causse. J'avais alors, comme Tintin, aluni dans ces cratères, et les vrombissements des moteurs de ma fusée sortaient de la doline*, se perdaient dans l'immensité de la planète lunaire."
                                                                                                                  Jacques Mauduy

Doline en Lozère (source)

*Les dolines :  Les dépressions circulaires créées par la dissolution dans le calcaire du Causse sont appelées dolines ; elle sont cultivables.

Editions du Mont Ici


AndrRené Gardies, spécialiste de cinéma, est l’auteur de nombreux romans, enracinés dans le pays languedocien, cévenol et lozérien. En Gévaudan, il réside en Margeride.
Jacques Mauduy, géographe, historien, cartographe des Camisards, a inventorié et publié l’ensemble des monuments aux morts des pays catholiques et huguenots de la Lozère. En Gévaudan, il vit sur le versant nord du Bougès.

vendredi 4 août 2017

Pause estivale : Lozère et derniers échos du festival

Lozère  : le Petit Arbre Tourmenté sur le chemin de l'Arbre Foudroyé


Philadelphie, deux frères vivent seuls dans une grande maison depuis la disparition de leurs parents. L'aîné, Treat, est un petit délinquant qui vole les passants, armé de son cran d'arrêt. Il rapporte bijoux et argent à la maison, où son petit frère, Phillip, un garçon un peu lunaire, guette son retour, non sans crainte car Treat a pour habitude de le terroriser. Un soir, Treat ramène chez eux un homme alcoolisé, un peu loufoque, Harold, qui lui paraît fortuné. Harold s'endort et les deux frères découvrent dans sa mallette beaucoup plus d'argent qu'ils ne l'imaginaient. Ils décident de le kidnapper pour l'échanger contre une rançon ... Ils obtiendront beaucoup plus...
 
Un peu trop bon sentiment pour mon goût.

1830. Hugo est le porte-drapeau du romantisme, Sand, celui du féminisme, et Balzac invente le réalisme. Tels leurs héros, ils sont tourmentés et rebelles. Leur vie privée est une source intarissable d’anecdotes, de combats politiques et de passions amoureuses.
Emportés dans l'explosif 19ème siècle, les spectateurs accompagnent Victor, George et Honoré, boulimiques de travail et d'amour, au milieu des génies de la peinture (Delacroix), du roman (Dumas), du théâtre (Musset) et de la musique (Chopin).
 Assez pédago.




C'est avec ses deux derniers spectacles que s'achève mon festival d'Avignon 2017.

Et maintenant pause estivale en Lozère pour fuir la canicule avignonnaise : 41° à l'ombre aujourd'hui!  Il paraît que dans quelques dizaines d'années, les régions du sud de la France connaîtront des température avoisinant les 55° .. si l'on ne fait rien pour inverser la courbe !

A bientôt ! Un bel été à tous !