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lundi 28 septembre 2009

Frédérique Hébrard : La Chambre de Goethe




La chambre de Goethe est un roman sur l'enfance, celle d'une petite fille que tout le monde appelle Riquette. C'est sur le quai de la gare de Montauban, en 1980, que Frédérique Hébrard, âgée, évoque ses souvenirs pour faire l'inventaire de ce que l'on appelle les raisons de vivre.

Une enfance pas tout à fait comme les autres puisqu'elle se déroule en 1939 et que le père de la fillette n'est autre que André Chamson, écrivain cévenol, auteur entre autres de Roux le bandit, Le chiffre de nos jours. De plus les amis de ses parents se nomment Roger Martin du Gard, Jean Lurçat, Paulhan, André Malraux, Tristan Tzara, André Gide, André Wurmser, Jean Guéhenno... et j'en passe. Voilà déjà de quoi avoir une enfance exceptionnelle. Ce qui donne lieu a des descriptions pleines d'humour du point de vue de la petite fille :
J'ai de la chance, je dispose de gentilles grandes personnes. Les écrivains sont agréables. Ils ne ressemblent pas aux parents de mes camarades. Même quand ils sont très vieux, ils aiment s'asseoir sur la moquette."
ou
Il y avait aussi Gaston Gallimard, un petit gros qui n'avait pas l'air bête.." et encore "Saint Exupéry, mon premier aviateur"

Mais ce n'est pas tout. Son père, André Chamson est conservateur des Musées Nationaux, sa mère archiviste et bibliothècaire du Louvres, à une époque où la préoccupation première est de sauvegarder les collections des grands musées français en les évacuant dans le sud de la France. La fillette est d'abord expédiée à Nîmes chez sa "mémé parpaillote" où elle fera ses études, puis elle suit ses parents selon les déplacements des oeuvres, de château en château. Et c'est alors l'aventure de l'Art, souvent inattendue, étrange. Ainsi les Chamson arrivent au chevet de leur fille opérée d'urgence avec deux Poussin et un Tintoret dans leur musette, le tableau Les Noces de Cana transporté en camionnette manque brûler dans un virage. Dans l'appartement de ses parents, Jean Lurçat déroule sa tapisserie intitulée La Liberté. Dans la chapelle de Loc-Dieu, le conservateur des peintures du Louvres ouvre une grande boîte capitonnée de rouge et présente aux enfants émerveillés, un sourire de femme qui émerge de l'ombre...
La Joconde
Même les plus petits l'avaient reconnue. Son nom chuchoté avait quelque chose de magique. Elle va bien, dit-il avec tendresse, et il referma la boîte aussi doucement qu'il l'avait ouverte.
Et puis c'est Montauban où les trésors du Louvres trouvent refuge au Musée Ingres, c'est  l'aménagement de la famille dans un vieil appartement qui garde des traces de sa somptuosité passée :  dans une pièce, un vrai Ingres au mur et un piano droit sur lequel repose une partition de Schumann, pièce que son père appelle La Chambre de Goethe. A cette occasion, l'enfant découvre l'universalité de la littérature et de l'Art au-delà de l'appartenance nationale et des violences des hommes.
Ainsi malgré les horreurs de la guerre, la disparition de personnes aimées, la peur, l'exil, les privations, la fillette tout en devenant adulte apprend l'espoir d'un monde libre, d'un monde débarrassé du Mal.
Ce doit être cette nuit-là que je contractai l'espoir. Comme on contracte une maladie. Incurable.

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