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dimanche 20 mai 2012

Un livre/Un film : Flaubert/Minelli Madame Bovary




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 Réponse à l'énigme 34,
Félicitations à  :  Aifelle, Dasola, Eeguab, Keisha, Lireaujardin, Maggie,  Miss Léo, Pierrot Bâton, Shelbylee 

Le roman Flaubert : Madame Bovary

Le film :  Vincente Minelli : Madame Bovary

Merci à tous et toutes pour votre participation ....



Texte à deux mains de Wens et Claudialucia


Madame Bovary de Gustave Flaubert (1857) :  Résumé.
Dans son petit village de Normandie, Emma, fille de paysan aisé, élevée comme un jeune fille de bonne famille, au couvent des Ursulines à Rouen, rêve d'une autre vie. Elle épouse un modeste médecin de campagne, Charles Bovary. Le couple s'installe à Yonville, une petite bourgade, et de cette union naît une petite fille, Berthe, à laquelle Emma ne parvient pas à s'intéresser vraiment. La jeune femme s'ennuie et sa vie lui paraît médiocre. Un bal chez le marquis d'Anvilliers lui permet d'entrevoir le raffinement et le luxe qui correspondent à ses aspirations. Le jour des Comices agricoles, elle se laisse séduire par un jeune noble, Rodolphe. C'est pour elle le début d'une grand amour romantique rapidement déçu. Après le départ de Rodolphe, Emma tente de se satisfaire de sa vie et de se rapprocher de son mari. Elle souhaite sa réussite et le pousse à opérer le pied bot d'un jeune villageois. L'opération est un terrible échec et loin de pouvoir admirer son mari Emma est amenée à le mépriser un peu plus. Lors d'un voyage à Rouen, le couple rencontre Léon, un jeune clerc de notaire originaire de Yonville. Emma va devenir la maîtresse de Léon. Mais la jeune femme, coquette et dépensière, a accumulé des dettes l'insu de son mari et lorsque la ruine se précise, elle met fin à ses jours.

 Madame Bovary  de Minnelli.. 1949.

 Déclarons d'entrée de jeu : le film de Minelli est une totale trahison du roman, la portée réaliste et la critique sociale de l'oeuvre de Flaubert sont totalement absentes,  Minnelli dresse un portrait naïf de la société française du XIXème siècle, les personnages du film n'ont pas la richesse, la profondeur du roman …. Et grâce à ce long préambule en forme d'amende honorable, nous pourrons, espérons-le, sans trop de crainte, sans risque de lynchage, affirmer que nous aimons Madame Bovary de Minnelli. Car le cinéaste est un très  grand réalisateur.

Il faut rappeler que, en 1949, le film risquait de choquer le public et de se heurter à la censure toujours présente dans le cinéma américain comme du temps de Flaubert!Minnelli mettait en scène une femme adultère, frivole, abandonnant son enfant, en faisait le personnage principal de son film et ne condamnait pas sa conduite. De plus la belle Jennifer Jones donnait au personnage d'Emma Bovary une connotation extrêmement sensuelle. Pour contourner la censure, Minnelli et son scénariste ont donc créé un prologue et un épilogue faisant référence au procès de Flaubert. L'écrivain, en effet, fut accusé d'atteinte aux bonnes moeurs mais finalement acquitté.
James Mason qui incarne Flaubert à l'écran prend la parole pour défendre Emma et le film est présenté comme le plaidoyer de l'écrivain. Il faut donc montrer Emma sous un jour favorable, expliquer qu'elle a des torts mais qu'elle n'est pas entièrement coupable et surtout attirer la compassion du public. Le film va donc s'intéresser seulement au personnage d'Emma et non à la société décrite par Flaubert et à la peinture de la bourgeoisie qu'il exécrait!  Première trahison de Flaubert!
Emma est présentée comme une ravissante femme qui vit la tête dans les étoiles et refuse la médiocrité de sa condition. Mariée à Charles Bovary, un brave homme, sympathique, mari attentionné, bon père de famille, elle attend le vertige de l'amour et de la passion. Elle bute contre les murs de sa maison alors qu'elle rêve de vastes demeures et de palais. Mais alors que Flaubert voulait montrer à travers Emma un personnage qui bâtit sa vie sur des mensonges romantiques, des sentiments faux, convenus, et parfois peu intelligents, l'Emma de Minnelli est totalement romantique, d'un romantisme hollywoodien qui réclame apitoiement et larme à l'oeil. Alors que Flaubert  décrivait un personnage romantique pour mieux condamner les excès du romantisme, Minelli utilise ce trait de caractère pour attirer la sympathie du public. Deuxième trahison de Flaubert!
Mais le talent du réalisateur est tel qu'on se laisse emporter par la virtuosité de la mise en scène…  Ainsi, chez le marquis d'Anvilliers, la séquence du bal est filmée d'une manière éblouissante et permet de comprendre l'exaltation d'Emma, ses affinités avec le luxe, la richesse et la beauté.. Minnelli nous entraîne progressivement dans un tourbillon, reflet des sentiments d'Emma. Lors de la valse, elle est étourdie par la danse et par son bonheur, il faut briser les vitres pour qu'elle puisse continuer à vivre. Mais son rêve prend fin quand Charles légèrement ivre la rejoint. Minelli sait aussi nous montrer par l'image la distorsion entre les rêves d'Emma et ce qu'elle vit. Par exemple, elle regarde souvent le monde à travers un miroir qui reflète une réalité ne correspondant pas à son univers intérieur. Terrible est le moment où lors de son rendez-vous galant avec Léon, elle aperçoit le couple qu'ils forment tous deux dans le miroir fêlé d'une misérable chambre d'hôtel. Tous rêves romantiques s'effondrent alors.. Pour souligner l'opposition entre les rêves d'Emma et la réalité  de sa vie,  Minnelli joue aussi avec le décor et les costumes avec  l'aide de ses fidèles complices Willis pour les décors et Plunkett, dessinateur des splendides robes d'Emma.
Minnelli, l'auteur de Un Américain à Paris, réalise ainsi un flamboyant mélodrame romantique.

 
 

Chabrol. Madame Bovary. 1991.

En France,la plus célèbre adaptation est celle de Claude Chabrol. A la sortie du film, celui-ci  affirmait : "J'ai voulu être le plus fidèle possible au texte de l'auteur" et  encore : "j'essaie de faire le film qu'il aurait  fait s'il avait eu une caméra au lieu d'une plume". Pour rester au plus près du texte, le réalisateur a utilisé tous les rares dialogues du roman et a eu recours très fréquemment à la voix off.
Mais cette adaptation linéaire, très (trop?) respectueuse du texte de Flaubert est bien sage et plate. Isabelle Huppert, glaciale, à son habitude, maîtrise ses sentiments à un tel point qu'elle ne rend pas assez le côté passionnel, insatisfait et romantique du personnage.

Manoel de Oliveira. Le Val Abraham.1993.
Voilà sans aucun doute la plus belle adaptation du roman de Flaubert à l'écran. Oliveira transpose l'histoire d'Emma dans le Portugal des années soixante. En se libérant des contraintes du lieu, du temps, en abandonnant la linéarité, Oliveira réussit le pari de rendre l'esprit du roman.  Ema du Val d'Abraham est une femme qui résiste aux contraintes du milieu social, à la domination des hommes.


5 commentaires:

  1. J'avais bien trouvé Madame Bovary mais pas du tout les films; évité Chabrol pour cause de Huppert qui ne correspondait pas du tout à l'image que je me fais d'elle et complètement zappé les autres : Bovary, c'est comme la baguette, une spécialité nationale!

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  2. Autant, j'aime le roman, autant les adaptations ne me tentent pas... justement à cause de son infidélité pour minneli ! et pour le jeu glacial de Huppert dont j ene suis pas fan...

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  3. @ miriam : je suis d'accord avec toi sur le Chabrol. Le Minelli ne m'a pas satisfaite entièrement même si je reconnais le talent du cinéaste, ce n'est pas du Flaubert! Et je n'ai pas encore vu le film d'Oliveira qui n'est pas une adaptation mais une transposition. C'est un film qui faitl'admiration de Wens.

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  4. @ maggie : je pense exactement comme toi! Reste le "bon" film a faire sur Emma Bovary!

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  5. Tout est question de ressenti décidément.
    Concernant le film de Chabrol il m'est impossible de tomber d'accord avec vous au sujet de l'interprétation d'Isabelle Huppert qui est...remarquable !
    Elle brûle d'un feu intérieur et se consume sous nos yeux au fur et à mesure en courant à sa perte.
    Selon moi elle n'est pas glaciale mais habitée par l'insatisfaction maladive qui la ronge.
    Par contre Christophe Malavoy est un peu trop falot, plus que ne l'est (déjà) Rodolphe dans le roman de Flaubert.

    ...B.

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