Avec Dans le grand cercle du monde, l’écrivain canadien, Joseph Boyden, raconte la fin du peuple Huron (les Wendat dans leur langue) dont les membres furent décimés ou dispersés en 1649 par les iroquois lors de la guerre qui les oppose.
Les Hurons qui furent baptisés ainsi par les français à cause de leur coiffure comparable à une hure de sanglier avaient fait alliance avec Samuel de Champlain dès le début du XVII siècle pour le commerce des peaux. Selon le contrat, les français leur devaient assistance contre les iroquois. En contre partie, la présence de jésuites sur leur territoire leur était imposée, ceux-ci oeuvrant pour la christianisation et favorisant les visées colonialistes de la France. Les Iroquois, eux, furent bien vite alliés aux Hollandais puis aux Anglais si bien que les guerres fratricides entre tribus servirent les intérêts des envahisseurs.
Cornelius Krieghoff : Huron-Wendat Callingmoose |
Joseph Boyden présente le génocide de ce peuple divisé en cinq tribus et la diaspora des survivants à travers un récit qui s’étend sur une vingtaine d’années, vu par trois personnages principaux :
Un jésuite (que les indiens appellent le Corbeau comme tous ceux de son ordre) qui vient christianiser les Hurons, devient leur prisonnier puis leur allié imposé, jamais accepté.
Un chef Wendat, Oiseau, animé par sa haine contre les iroquois qui ont tué sa femme et ses filles. Il est conscient du danger que représente les Corbeaux pour son peuple et cherche en vain à l’en libérer. C’est lui qui mènera les négociations avec Samuel de Champlain et conclura l’alliance avec les français. .
Et une petite fille iroquoise, Chutes de neige, prisonnière d’Oiseau qui a tué ses parents. Elle deviendra bien contre son gré sa fille adoptive. Oiseau, entend par là, selon la coutume des amérindiens, remplacer ses filles défuntes par une adoption dans la tribu ennemie.
Cornelius Krieghoff : Huron indians at portage |
Ce sont ces points de vue différents qui vont mettre en relief le choc des cultures, chacun appréhendant l’autre selon sa mentalité qui lui fait trouver cocasses, ridicules ou véritablement effroyables les coutumes, les croyances ou tout simplement la présence de l’autre. Ainsi les Corbeaux qui apportent des maladies mortelles aux indiens sans être malades eux-mêmes ne sont-ils pas des sorciers? Le Jésuite est de plus un être incompréhensible à leurs yeux avec son amulette autour du cou (la croix), ses gestes ridicules (les signes de croix) et son outrecuidance à proclamer la supériorité de sa religion. L’incompréhension du Jésuite envers les indiens n’est pas moindre !
Joseph Boyden qui est lui-même d’ascendance indienne, connaît bien cette civilisation et nous permet d’entrer dans cette culture qui parfois nous rebute (les tortures infligées aux prisonniers sont atroces) et parfois nous séduit. Leur religion, en particulier, est très belle car elle ne place pas l’homme au centre de l’univers en affirmant sa suprématie mais donne à tous une juste place, humains, végétaux, animaux, tous reliés à un Tout, tous serviteurs de la Nature plutôt que maîtres.
Maison longue Huron reconstitution pour le film Robe noire |
Dans le grand cercle du monde nous permet donc d’aborder cette civilisation d’une manière agréable, intéressante, en nous attachant à certains personnages, y compris secondaires, en voyant vivre les autochtones dans les maisons-longues qui regroupent plusieurs foyers. Amour, mariage, amitié, agriculture, chasse, trappe, commerce, fêtes, croyances et guerres … les saisons passent, les héros grandissent comme la petite iroquoise qui devient femme et se marie, épousant définitivement les moeurs des Hurons; ou ils vieillissent comme le jeune jésuite apeuré et tremblant du début qui s’affirme dans sa foi et manifeste un courage et une ouverture aux autres qui permet de faire oublier certains aspects peu sympathiques de ses tentatives de conversion.
Ce roman est donc une belle approche de cette nation indienne et de cette période tragique qui a vu disparaître en grande partie ce peuple, les Wemdat.
Joseph Boyden est un écrivain canadien, né en octobre 1966. Il a des origines irlandaises, écossaises et indiennes. Son premier roman, Three Day Road, publié en 2005, a été bien accueilli et lui a permis d'acquérir une certaine notoriété au Canada. Son deuxième roman, Through Black Spruce, a remporté le Prix Giller. Ses ouvrages sont consacrés au destin des Premières nations du nord de l’Ontario. (wikipédia)
Son oeuvre traduite en français :
Joseph Boyden (trad. Hugues Leroy), Le Chemin des âmes [« Three Day Road »], Paris, Albin Michel, coll. « Terres d'Amérique », 2006, 391 p. (ISBN 978-2226173201)
Prix Amazon 2006
Joseph Boyden (trad. Michel Lederer), Les Saisons de la solitude [« Through Black Spruce »], Paris, Albin Michel, 2009, 400 p. (ISBN 978-2226193995)
Giller Prize 2008
Joseph Boyden (trad. Michel Lederer), Dans le grand cercle du monde [« The Orenda »], Paris, Albin Michel, coll. « Terres d'Amérique », 2014, 610 p. (ISBN 978-2-226-25615-7)
Son oeuvre traduite en français :
Joseph Boyden (trad. Hugues Leroy), Le Chemin des âmes [« Three Day Road »], Paris, Albin Michel, coll. « Terres d'Amérique », 2006, 391 p. (ISBN 978-2226173201)
Prix Amazon 2006
Joseph Boyden (trad. Michel Lederer), Les Saisons de la solitude [« Through Black Spruce »], Paris, Albin Michel, 2009, 400 p. (ISBN 978-2226193995)
Giller Prize 2008
Joseph Boyden (trad. Michel Lederer), Dans le grand cercle du monde [« The Orenda »], Paris, Albin Michel, coll. « Terres d'Amérique », 2014, 610 p. (ISBN 978-2-226-25615-7)
Ma seule lecture de Boyden, le chemin des âmes, m'avait beaucoup plu. Je me dis souvent que je devrais lire celui là, il a l'air très intéressant en plus.
RépondreSupprimerJ'ai l'intention de lire Le chemin des âmes car le Grand cercle du monde m'a vraiment intéressée.
Supprimeril a l'air très intéressant!
RépondreSupprimerOui, c'est un roman riche par bien des aspects.
SupprimerJ'ai lu les trois livres de Boyden et ils m'ont dans l'ensemble vraiment intéressé. Dans Dans le grand cercle du monde il n'édulcore pas la brutalité des conquérants bien sûr mais pas plus celle des tribus entre elles, souvent radicale.
RépondreSupprimerC'est vrai! Il n'y a pas de manichéisme et la violence est dans les deux camps.
SupprimerJ'ai beaucoup aimé "le chemin des âmes" et je me promets bien de lire un autre titre un jour. En plus, l'auteur est extrêmement sympathique (vu au festival America il y a 4 ans)
RépondreSupprimerTout le monde me parle de Le chemin des âmes,je me demande si ce n'est pas son meilleur livre? Et voilà, encore un écrivain que tu as rencontré !
SupprimerJ ai visite autrefois ces maisons longues. Je note pour le moment où je pourrai lire un pavé. En ce moment le programme est charge
RépondreSupprimerTu les as visitées ? Où?
SupprimerJe n'ai rien lu de cet auteur, mais ce sujet m'intéresse beaucoup, et son point de vue. C'est noté.
RépondreSupprimerTrois points de vue, en fait et trois mentalités différentes qui font bien apparaître le "chacun appelle barbarie ce qui n'est pas de son usage."
Supprimerj'aime cet écrivain et ses romans sont très bons, je préfère le premier malgré tout mais je trouve que sa vision des conquérants est forte et juste
RépondreSupprimerOui,la mentalité des conquérants est vraiment très bien analysée et leurs motivations aussi, économiques pour les uns, religieuses pour les autres!
RépondreSupprimerJ'ai lu il y a peu un avis moins convaincant que le tien ... mais comme c'est un pavé, je ne suis pas encore décidée pour le moment (déjà lu et apprécié 2 livres de l'auteur).
RépondreSupprimerPeut-être ses autres livre sont-ils meilleurs mais je ne peux comparer n'ayant que celui-là qui m'a vraiment plu.
SupprimerUn livre que je dois lire absolument, depuis le temps...
RépondreSupprimerBises Claudia