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dimanche 2 juillet 2017

Mikhail Boulgakov : Le roman de monsieur Molière



Je vais assister bientôt, pendant le festival In d’Avignon  2017,  à une pièce montée par le metteur en scène allemand Frank Castorf, adaptée du livre de Mikhail Boulgakov : Le roman de monsieur Molière. L’occasion pour moi de relire ce livre que je n’avais plus ouvert depuis ma première lecture dans les années 70.

Mikhail Boulgakov
Mikhail Boulgakov a écrit Le roman de Monsieur Molière, sous la dictature de Staline en 1933 mais le livre n’est paru qu’en 1962.
Pourquoi Mikhail Boulgakov s’est-il particulièrement intéressé au dramaturge français ? Nous savons que l’écrivain russe qui adorait le théâtre est lui-même l’auteur de pièces qui se verront interdites au fur et à mesure de leur parution.
Comme Molière, il s’est donc heurté au pouvoir en place, il a vu ses pièces  censurées, suscitant de violentes polémiques, puis retirées de l’affiche. Sans possibilité de trouver du travail, Boulgakov doit son salut à Staline à qui il écrit une lettre désespérée. Celui-ci lui procure un emploi au théâtre d’Art.

La vie de Boulgakov ressemble donc à celle de Molière dont la vie et l’oeuvre sont sans cesse menacées par les pouvoirs en place en France au XVII siècle. J’écris les pouvoirs au pluriel car il n’y a pas seulement celui de la monarchie absolue mais aussi celui de l’église et des dévots tout puissants qui se déchaînent après le Tartuffe ou Dom Juan. Quant à la noblesse, elle n’apprécie pas sa critique des petits marquis et des courtisans, et les salons littéraires qui se reconnaissent dans Les Précieuses ridicules ou Les femmes savantes ne le portent pas plus dans leur coeur ! Et que dire aussi des médecins ou encore des bourgeois ridicules et imbus d’eux-mêmes qui sont les cibles de ses railleries!

Les oeuvres de Molière ont souvent été interdites et le dramaturge a compris qu’il fallait se faire un allié du roi s’il ne voulait pas succomber sous les coups de ses ennemis. D’où ses lettres, ses prologues de courtisan flatteur quand il s’adresse à ses maîtres. Par contre, il ne cède rien dans son oeuvre et ne fait aucune concession quand il s’agit de décrire la société telle qu’elle est et de lutter contre les vices de son temps, le fanatisme, l’intolérance, l’obscurantisme, l’hypocrisie religieuse, le manque de liberté...

Jean-Baptiste Poquelin dit Molière
C’est donc ce point de vue qui intéresse Boulgakov  :  l’écrivain face au pouvoir,  qui pose les problèmes de la liberté du créateur,  et qu’il va aborder en racontant la vie de Molière.
Cette vie qui est à proprement parler un « roman » avec ses nombreuses péripéties, ses rebondissements, ses joies et plus encore ses drames.  Molière lui-même, est le véritable héros de ce récit, un homme avec ses faiblesses et ses travers mais aussi son courage, son intelligence redoutable quand il s’agit d’observer ses semblables; un écrivain dont l’immense talent comique n’a d’égal que la sensibilité tragique car Molière a le don de faire rire de ce qui est triste.


Or, dans le Télérama Spécial festival d’Avignon (du 1er au 7 juillet), je lis dans l’article de Joëlle Gayot que Frank Castorf, le metteur en scène qui va monter l’oeuvre de Boulgakov sur Molière a lui-même été évincé de la direction du Volksbühne, théâtre de Berlin, par le sénat de la ville.

« Dans un spectacle chahuteur, qui règle leur compte aux souverains sacrant ou répudiant les artistes, il invite deux figures connues pour leurs rapports houleux avec la tutelle. Le premier Mikhail Boulgakov buta en permanence contre les oukases d’un Staline qui ne lui laissait d’autres choix que de soumettre ses oeuvres à une hypothétique approbation. Le second, Molière, vécut avec Louis XIV des périodes d’amour sans nuage que le couperet royal savait sèchement interrompre. Adoubés la veille pour mieux être rejetés le lendemain, ces deux auteurs sont le symptôme du lien permanent noué entre l’Etat-providence et ses créateurs. » 

Frank Castorf, metteur en scène allemand

Castorf, Bougakov, Molière… une triple mise en abyme !  que je vais voir dès le 8 juillet.  A suivre donc !

11 commentaires:

  1. Tu donnes envie de le lire et surtout d aller au festival !

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  2. Quelle rencontre de destins, cela promet d'être passionnant. A relire pour moi qui ne connaissais quasi rien de Boulgakov quand j'ai lu ce "Roman".
    Très bon & joyeux festival, Claudialucia.

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    1. Merci Tania. La rencontre des trois créateurs peut être très intéressante, en effet !

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  3. un roman que j'ai bien aimé, l'adaptation va être intéressante

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  4. Tout se rejoint! Un roman à lire en ce qui me concerne.

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    1. J'aime bien le roman, il permet de voir combien Molière a souffert du manque de liberté, de la violence des attaques et des menaces qui ont pesé sur lui ! Et de mieux comprendre la valeur de son oeuvre !

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  5. J'adore Molière et ça doit être intéressant un roman sur ses rapports avec le pouvoir. JE note.

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    1. Oui, très intéressante, une lecture qui t'ouvre une vision de l'oeuvre.

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  6. Je me suis souvent demandé pourquoi il avait décidé d'écrire sur Molière... je verrai si je le trouve!

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