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samedi 12 mai 2012

Antonio Altabirra/ Kim : L'art de voler



L'art de voler de Antonio Altabirra est un roman graphique. J'avoue qu'au départ ces toutes petites vignettes sagement alignées, en noir et blanc, ne m'enthousiasmaient pas! Je trouvais à priori la conception un peu vieillotte à côté des bandes dessinées actuelles. Mais... sur les conseils de Wens,  du blog En effeuillant le chrysanthème, - "lis-le et tu verras!" - , je me suis lancée dans cette lecture! Que dis-je lancer? Plutôt plonger, enfoncer, perdue, et je n'ai pu quitter de roman avant la fin. Roman estampillé donc : lu d'une seule traite, roman prenant, passionnant d'où naît tristesse, nostalgie mais aussi attachement et admiration pour le personnage central.

Antonio Altabirra part d'un fait réel : Un homme de 90 ans se jette du quatrième étage d'une maison de retraite. Oui mais ce vieillard, c'est son père, un autre lui-même.  Altabirra nous raconte alors la vie de son père, Antonio, et son enfance pauvre dans un petit village rural d'Aragon, comment il s'arrache à cette vie âpre de petit paysan attaché à son lopin pour la misère de la grande ville, pris ensuite dans l'engrenage de la guerre civile qui l'oblige à choisir son camp. Lui qui refuse de tuer et feint d'être un mauvais tireur s'engage alors dans l'armée anarchiste où il devient chauffeur. De quoi lui rappeler ses jeunes années quand il pilotait une automobile en bois et s'envolait en rêve avec elle dans le ciel....

Oui, mais le rêve n'est pas pour des gens comme Antonio. Ce roman raconte, à travers l'histoire individuelle, la vie brisée de toute une génération d'espagnols jetés dans la guerre civile, du côté des perdants... Ces "soldats de Salamine" dont parle Javier Cercas dont les déchirements ne s'arrêtent pas avec la fin de la guerre civile mais continuent en France où ils sont parqués dans des camps. Enrôlés dans une autre guerre et, malgré la part qu'ils ont pris dans la résistance, poussés par la xénophobie française à revenir en Espagne après 1945, malgré le franquisme. Ils n'ont jamais connu la liberté.

Le personnage d' Antonio est un homme sympathique avec ses défauts et ses faiblesses. Il devra faire des compromis et mettre ses idées sous éteignoir pour faire vivre sa famille. Mais il n'abandonne jamais complètement ses rêves de liberté. Qu'il les réalise en se jetant d'une fenêtre de sa maison de retraite où il est encore traité comme un prisonnier en dit long sur ce qu'a été sa vie! Nous sommes aussi touchés par la tendresse et l'admiration que l'écrivain porte à son père.  D'où la totale empathie que nous éprouvons envers ce personnage hors du commun.

Quant au graphisme de Kim qui m'avait d'abord peu attirée, voilà qu'en me penchant sur ces petites images, je suis entrée entièrement dans ce monde, prêtant attention aux détails révélateurs des sentiments des personnages, à la reconstitution  historique  précise. Mes préjugés sont tombés. L'aspect miniature du dessin nous oblige à être près des gens, de leur misère, de la violence autour  d'eux.  D'où la totale empathie que nous éprouvons envers eux. Nous faisons partie du décor et comme il est bien sombre nous en ressortons avec le coeur serré!


 Challenge d'Ys dans le cadre des romans graphiques

11 commentaires:

  1. Je ne lis que le premier paragraphe de ton billet car je ne veux pas en savoir trop avant de lire ce roman graphique qui, je l'avoue honteusement, est dans ma PAL depuis sa sortie...

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  2. J'avoue que j'ai commencé, puis ai délaissé, car la situation actuelle du Québec m'incite à rechercher des lectures un peu plus revigorantes... Ce n'est certes pas la Syrie, et tout est donc relatif, mais quand même! Ce récit est loin d'être drôle...

    J'y reviendrai donc lorsque le ciel sera moins sombre au-dessus de la «belle province»!

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  3. J'y viens doucement à cette forme de littérature, les dessins peuvent apporter un vrai plus dans des histoires fortes. En plus si c'est conseillé par Wens aussi ....

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  4. @ ys : pas de honte à avoir mais lis-le!

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  5. @ Marie-Josée : Je te comprends. Espérons que le soleil va se remettre à briller sur la Belle Province.

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  6. @ Aifelle ; je suis comme toi; j'y viens doucement et j'aime! je découvre des oeuvres fortes!

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  7. Je commence moi aussi à beaucoup apprécier les romans graphiques... Celui ci à l'air vraiment très intéressant, pas joyeux joyeux mais vraiment très tentant... Je le note !! Je vais voir si je trouve quelques planches sur le net, bisous et bonne soirée

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  8. Il a l'air vraiment très très bien... Il devrait me plaire...

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  9. @ l'or ; Je vois que toi aussi tu te mets au roman graphique!; J'ai commencé par Tout seul et faire un feu de Chabouté ; c'est très beau à la fois par le dessin et l'histoire.

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  10. Et ce qu'il y a peut-être de plus fabuleux, c'est la justesse des mots de l'auteur, dans la sorte de postface qui conclue la bande-dessinée. C'est ce qui m'a le plus ému en tout cas. Au-delà de cette bande-dessinée qui est très bien, mais qui ne m'a pas autant emporté que ce que j'espérais. C'est peut-être trop lointain pour moi et je ne m'étonne pas d'avoir dévoré le récit de ces jeunes années alors qu'il y a eu des périodes par la suite où je me suis un peu essouflé. Mais bon, je pinaille un peu, c'est un très beau récit.

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  11. Oui, un beau récit. La guerre civile espagnole et le sort de ces gens qui n'ont connu que la guerre, l'échec, la privation de la liberté m'a toujours émue. Peut-être apprécie-t-on différemment selon son âge.

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