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samedi 14 décembre 2024

AndreÏ Kourkov : Les abeilles grises

 

 

Serguei Sergueïtch et Pachka, les deux derniers habitants du village de Mala Starogradovtich située en « zone grise », c’est à dire ni en terre russe, ni en terre ukrainienne, dans l’oblast du Donetsk, région du Donbass, ont une position très inconfortable ! Nous sommes dans les années 2014. Les séparatistes russes épaulés par les Russes et les nationalistes ukrainiens s’affrontent. Au-dessus de la tête des deux hommes, les obus volent de part et d’autre de la frontière et tombent parfois bien près de leur maison. Les villageois sont partis, les maisons sont fermées, l’électricité est coupée, l’approvisionnement difficile, et les deux «meilleurs ennemis » d’enfance sont bien obligés de s’entendre et de coopérer pour survivre. L’un Pachka, pro-séparatiste, l’autre, Sergueï, pro-ukrainien, mais tous les deux dans la même situation. Force est de constater que Kourkov nous conte, de la part des deux « ennemis », et tant bien que mal, une histoire d’amitié.

Serguei Serguievtich est apiculteur. Son épouse et sa fille l’ont quitté pour vivre, il y a plusieurs années de cela, dans la grande ville. Après avoir assuré la sécurité dans les mines de ce pays houiller, Serguei a été réformé pour silicose. Ses abeilles, il les aiment et c’est pourquoi, au printemps, il les amène loin de la zone grise pour qu’elles trouvent la tranquillité et les fleurs pour butiner en paix. Un voyage vers l’Ouest de l’Ukraine où il est considéré, venant du Donetstk, comme suspect par les Ukrainiens de l’Ouest, puis vers la Crimée où il se lie d’amitié avec les Tatars mais est suspecté par les Russes. Des tatars, il s'en aperçoit, qui ne sont pas acceptés par le reste de la population et lui-même, il lui faut bien vite s'en retourner, pressé par les autorités russes.  Décidément, ou qu’il soit, Serguei est toujours en zone grise ! Même ces abeilles deviennent grises ! C'est la couleur du récit, c'est aussi la couleur des êtres humains, ni blanc, ni tout à fait noir, gris !

Le livre d’Andreï Kourkov est un beau roman, d’une tristesse égayée par des situations inédites voire burlesques, comme cette fameuse nuit où Sergueï intervertit les noms des rues du village pour ne plus vivre rue Lénine mais dans la rue d'un poète ukrainien ! Une tristesse pleine de tendresse. Sergueï est, en effet, à priori, un homme un peu fruste, avec toutes ses faiblesses, mais capable d’une certaine délicatesse et d’attention vis à vis des autres. On le découvre, à plusieurs reprises, plein d’humanité lorsqu’il va recouvrir de neige, au péril de sa vie, le cadavre d’un soldat ukrainien, ou lorsqu’il intervient en Crimée, auprès des autorités russes, et ceci malgré sa peur, pour découvrir ce qu’est devenu Athem, un tatar, apiculteur comme lui, disparu depuis deux ans. Grâce à ses abeilles, Serguei est proche de la nature même s’il leur reproche parfois de trop ressembler aux hommes d’où une petite musique poétique et nostalgique, mi-optimiste, mi-pessimiste, une musique qui ne cesse pas complètement de croire en l'humain,  bref !  en demi-teinte, qui baigne le roman. Une belle lecture.
 

Sergueï recueille une abeille sans ruche et cherche à la faire accepter dans une autre :

Allez, monte ! " dit-il à l'abeille.

Celle-ci, comme si elle l'avait entendu, se glissa gaillardement dans l'ouverture.

Sergueï n'eut pas le temps de cligner de l'oeil que l'insecte retomba en arrière sur la planchette, aussitôt suivi par trois ou quatre abeilles de la ruche qui entreprirent de le repousser loin de l'entrée, jusqu'à le culbuter dans le vide.

- "Voyez-moi ça !"soupira Serigueïtch en se penchant. Il ramassa l'abeille par terre, comme pour lui offrir de bâtir une petite ruche dans l'interstice.

Il tourna les yeux vers la planche d'envol.

" Eh bien, vous êtes donc comme les humains ? demanda-t-il aux abeilles avec amertume.

lundi 25 novembre 2024

Eleanor Shearer : La liberté est une île lointaine

  

1834. L’esclavage vient d’être aboli à La Barbade. C’est ce que le maître de la plantation La Providence, annonce à ses esclaves mais il ajoute qu’ils ont l’obligation de travailler comme apprentis chez lui pendant six ans. Ils sont libres mais ne peuvent s’en aller, travail harassant dans le champ de cannes à sucre, le contremaître, fusil en bandoulière, les sifflets, le fouet, les coupas, la fatigue, le chagrin :  « Liberté est le nom de la vie qu’ils avaient toujours connue. ».

C’est alors que Rachel décide de fuir. Elle veut retrouver ses enfants qui ont été vendus les uns après les autres, à des âges différents, et dont elle conserve le souvenir précieusement dans son coeur : Micah, Mary Grace, Mercy, Cherry Jane, Thomas Augustus sans compter ceux qui sont morts en bas âge. Rachel n’ignore pas le sort que l’on réserve aux esclaves fugitifs, les risques qu’elle encourt si on la rattrape et le fait qu’elle soit libre n’y changera rien.  

Cette longue route semée de dangers à la recherche de ses enfants est jalonnée par de belles rencontres, comme celle de Mama B, une vieille femme, généreuse et forte, qui la conduit à Bridgetown, la capitale de la Barbade où elle retrouve Mary Grace. Mais sa recherche l’amène plus loin encore en Guyane Britannique et à Trinidad. Les descriptions des paysages donnent une idée de la grandeur de la nature sauvage que cette mère courage doit affronter.

 Dès qu'ils furent sur l'eau, Rachel eut l'impression qu'ils avaient perdu le contrôle des choses. Elle en avait senti les prémices à Georgetown et les plantations - cette sensation que les arbres, le fleuve, les buissons, les oiseaux, les insectes, et même le ciel commençaient à reprendre le pouvoir. Mais lorsqu'ils se furent éloignés de la berge et commencèrent à dériver, Rachel comprit qu'il étaient à la merci de la nature."

 Les retrouvailles avec ses joies mais aussi ses peines, de nouvelles séparations, les enfants adultes ayant choisi une autre direction, le deuil aussi, accompagnent Rachel dans ce roman qui tout en décrivant l’horreur de l’esclavage, les souffrances physiques et morales infligées, montrent la profondeur des séquelles que la privation de liberté laissent dans l’âme. Pourtant la fin porte un message d’espoir. 

Avec La liberté est une île lointaine Eleanor Shearer écrit un premier roman intéressant et plein d'émotion.
 

Eleanor Shearer est une écrivaine britannique, petite-fille d'immigrants caribéens venus au Royaume Uni en 1948.

Issue de la génération Windrush, Eleanor Shearer a toujours été fascinée par l’histoire des Caraïbes et s'est rendue à Sainte Lucie et à la Barbade pour interviewer des militants, des historiens et des membres de sa famille.

La liberté est une île lointaine, son premier roman, est le fruit de ses recherches.

Eleanor est diplômée en sciences politiques de l'Université d'Oxford.
Elle partage son temps entre Londres et Ramsgate sur la côte du Kent.


Sur la génération windrush lire cet article ICI


jeudi 21 novembre 2024

Maria Turstschaninoff : Nevabacka, terre des promesses


"Au loin, de l'autre côté de la tourbière, il distingua une créature à longues pattes et au cou interminable, comme un serpent. A y regarder de plus près, elles étaient plusieurs. Grises et noires, elles s'envolaient, leurs ailes déployées et leurs pattes oscillant dans les airs.
Les grues cendrées dansaient sur la tourbière. Les ailes tendues les unes vers les autres, le cou courbé, elles criaient et approchaient, le garçon ne fit aucun bruit, retenant son souffle. Jamais il n'avait vu un tel spectacle."

Nevabacka formé de deux mots, l’un finlandais neva, les marais, l’autre en suédois backa, la colline, désigne la ferme et la forêt où se déroule l’action du roman de Maria Turstschaninoff, en Ostrobotnie, à l’est de la Finlande.

Maria Turstschaninoff, finlandaise de langue suédoise, écrit un roman historique puisqu’il commence au XVII siècle et se termine de nos jours, mais qui est aussi un conte nourri de légendes traditionnelles, un poème en prose amoureux de la nature, des forêts et des animaux et qui plonge le lecteur au coeur même de la vie et de la beauté mystérieuse et sauvage.

Un soldat, Matts Rak, reçoit du roi, comme récompense de ses bons services militaires, une terre éloignée et sauvage qu’il appellera Nevabacka et qu'il s’efforcera de défricher, de labourer et de rendre fertile en bon fermier qu’il jamais cessé d’être malgré la guerre qui avait fait de lui un soldat. Sur son domaine s’étend une grande tourbière et des marais que le jeune paysan se propose d’assécher. Mais dans ces lieux se cache le peuple des forêts, celui qui échappe au christianisme et que le peuple révère et craint. La fée de la Tourbière - manifestation des croyances populaires, allégorie de la forêt et plus généralement de la nature toute puissante ? -  lui interdit de toucher à la tourbière et lui donne un fils en cadeau comme une compensation pour son obéissance. Nous suivons les différents membres de la famille issus de ces deux ancêtres, au cours d’une longue remontée dans les siècles où l’on passe de croyances primitives en des éléments surnaturels qui imposent le respect, à un monde où L’Eglise combat le surnaturel, punit ceux qui y croient et, à notre monde contemporain qui maltraite la nature et l’exploite au nom d’une économie efficace et productive.

Le réalisme du récit nous amène à partager la dure vie de ces paysans dans la ferme Nevabacka, qui, pour être la plus grande et la plus riche de la région, n’en exige pas moins un travail pénible mais la présence de la nature, de sa beauté majestueuse, baigne le roman d’une aura magique.

"Je me suis installée sur un arbre couché et, ma chère Charlotte, j'ai été saisie par la beauté de ce moment. D'abord, le ciel est devenu rouge, presque écarlate, avec des tâches roses et jaunes. Puis le soleil s'est levé à l'horizon et les rayons ont traversé la forêt, ornant les ombres des arbres de gravures dorées. Je n'ai jamais écrit de poèmes, mais à ce moment-là, mon âme en est devenu un."

 Les personnages se succèdent dans des récits qui semblent  indépendants les uns des autres mais qui sont reliés par des liens de parenté. L’existence éphémère de chacun forme un grand Tout, à la fois au niveau familial mais aussi à la dimension du pays, célébrant ainsi l’âpre beauté de la Finlande. Les personnages attachants et le style de l’auteure, poétique, font de ce roman une belle lecture.

mardi 26 mars 2024

Emma Stonex : Les gardiens du phare


 Dans son roman Les gardiens du Phare, Emma Stonex s’appuie sur un fait divers réel qui est toujours demeuré un mystère.
En 1895, sur les îles Flannan, au large de l’Ecosse, au coeur de l’archipel des Hébrides, la construction d’un phare dans cette zone pleine de récifs, réputée dangereuse, commence. C’est en décembre 1899 que le phare d’Eilean Mor, qui se dresse sur un rocher inhospitalier, inhabité, battu par les vagues et le vent,  s’illumine pour la première fois
Pour assurer sa maintenance, il faut quatre hommes, dont trois doivent rester en permanence sur l’île, le quatrième  partant en congé sur la terre ferme toutes les six semaines.  En Décembre 1900, un capitaine de navire signale que le phare est resté éteint. Quand on envoie des secours, les trois gardiens restés sur place, James Ducat, Thomas Marshall et Donald MacArthur, ont disparu sans laisser de traces. 

L’enquête a conclu que les gardiens avaient dû s’approcher trop près du bord pour sécuriser une grue et avaient été emportés par une vague géante. Mais cette conclusion est restée à l’état d’hypothèse n’ayant jamais pu être confirmée.

Les trois gardiens disparus d'Eilean Mor
 

C’est cette histoire que raconte Emma Stonex dans Les gardiens du phare en la transposant en 1972  et en situant le phare sur les îles Maidens, au nord de l’Irlande.
Les trois hommes, Arthur Black, le gardien-chef de la Maiden, Bill Walker son second et Vince dont c’est le premier poste - et à qui l’on essaiera de faire porter le chapeau parce qu’il a fait de la prison - disparaissent. La société des phares cherchent rapidement  à clore l’enquête, refusant de creuser plus avant, de crainte de détruire la bonne réputation de la Société, plutôt paternaliste, qui exige la fidélité et la bonne conduite de ses employés dont elle veut donner une image héroïque et qui prend soin de leur famille en retour.

L'île Flannan : Eilenn Mor

C’est l’occasion pour l’écrivaine de présenter la vie dans le phare et la dureté du métier de gardien qui exige des nerfs solides, une bonne santé mentale et une entente entre les trois personnes qui sont obligés de vivre ensemble de jour comme de nuit. Si l’une de ces conditions n'est pas réunie, les agacements deviennent vite antipathies, les tensions naissent, les risques d’affrontement s’exacerbent. La journée est rythmée par les travaux d’entretien du phare et de l’optique de la lanterne, les nuits exigent des quarts de veille pour assurer le bon fonctionnement de la lumière. Il faut imaginer la monotonie de la nourriture et des occupations, la solitude qui ébranle le moral, la séparation d’avec la famille, les tempêtes, effrayantes, avec des vagues gigantesques qui se brisent sur le phare dans un vacarme  incessant, la responsabilité des vies humaines qui pèse sur les gardiens s’il y a un dysfonctionnement.

Dans le roman,  Emma Stonex imagine que vingt ans après, un journaliste décide d’écrire sur cette histoire et demande à rencontrer les  femmes des disparus, Helen, Jenny et Michelle. Car ce qui intéresse aussi l'écrivaine, c’est de donner une explication à ces disparitions ou tout au moins d’avancer une autre hypothèse que celle retenue officiellement. Les femmes parlent, en effet, et se dessinent des secrets de couple, des mésententes, des jalousies, des non-dits… Une analyse psychologique assez fine qui fait apparaître les caractères et les sentiments de chacun, sous laquelle, en filigane, se dessine une réponse au mystère et à la tragédie ! Un roman intéressant !

 Tout seul

 

Je vous signale la magnifique BD  intitulée Tout Seul de Christophe Chabouté sur les gardiens de phare.

Voilà ce que j'en écrivais : "Tout seul, bande dessinée de Chabouté, est un petit bijou d'émotion, de poésie, de beauté, de tendresse, d'espoir. .. Si vous n'avez pas encore lu cette BD, faites-le vite ! Et si vous ne deviez en lire qu'une dans votre vie, que ce soit celle-là!

Cet album est presque sans paroles, les personnages qui y vivent sont soit des marins taciturnes, soit un solitaire, séparé de la civilisation, prisonnier volontaire dans un phare en pleine mer. Le dessin en noir et blanc, jouant sur le lumières de la nuit et du jour,  prend alors toute son importance, c'est lui qui raconte tout ce qui n'est pas dit, c'est pourquoi il faut être attentif aux moindres détails, et il est fantastique. Les variations des points de vue nous permet une approche toujours renouvelée de l'histoire. Nous sommes oiseaux et nous nous laissons porter par le vent pour nous poser sur la lanterne du phare, poisson dans un bocal nous contemplons la solitude d'un autre être, solitude qui n'a d'égale que la nôtre, marin, nous essayons de percer le mystère du phare..  A cela s'ajoutent les variations des cadrages, d'un gros plan qui éveille en nous la curiosité à un plan d'ensemble qui nous révèle la réalité…  Le dessinateur joue ainsi sur le mystère, éveille notre imagination. Chabouté suggère aussi le mouvement par le procédé cinématographique  d'un plan fixe qui permet de voir s'éloigner le bateau ou au contraire de le voir se rapprocher, venant droit sur nous, pour créer l'impression de durée dans le temps. Car l'histoire a un rythme, celui de la lenteur, de l'égalité des jours qui se traînent et se ressemblent, sauf quand survient un évènement, quand il y a irruption de la vie dans le quotidien."
VOIR la suite ICI

 

La Tour d'amour

 
 
"La tour d'amour de la "sulfureuse" Rachilde est un roman qui sidère, qui laisse pantelant. Jamais en ouvrant le livre de quelqu'un qui était pour moi une inconnue, jamais je n'aurais pensé découvrir un texte d'une telle force, servi pas un style puissant aux images hallucinatoires. Je comprends, bien sûr, que le récit ait fait scandale et je ne suis pas sûre qu'il ne choque pas, même de nos jours, les lecteurs sensibles tant il est morbide et nous entraîne dans la spirale d'une folie qui tient de la perversion. Si vous êtes de ceux-là, tant pis, mais ne dites pas que Rachilde est un médiocre écrivain" Voir Ici


 Le gardien du feu


J'ai aimé aussi :  Le gardien du Feu de l'écrivain breton Antoine Le Braz

"Je vous l'ai dit à propos du roman de Rachilde La Tour d'amour, les phares bretons inspirent aux écrivains des romans sombres et tourmentés tout comme le sont les personnages qui y vivent! Dans Le gardien du Feu d'Anatole Le Braz, c'est le phare de Gorlébella en plein Raz qui sert de décor pour cette histoire d'amour et de jalousie proche de la folie." Voir  Ici

 

 Les disparus du phare

 

J'ai moins aimé Les disparus du phare de Peter May mais lisez  le premier volet de la trilogie L'île des chasseurs d'oiseaux !

"Peter May, je l’ai découvert avec sa trilogie écossaise qui se situe dans l'archipel des Hébrides, dans l’île Lewis, et c’est de loin L’île des chasseurs d’oiseaux, le premier, qui demeure mon préféré. Il offre des pages d’une force étonnante qui raconte le quotidien des hommes de cette île et décrit leur mentalité ancrée dans le passé, si loin de la civilisation urbaine actuelle.
 Avec Les disparus du Phare, Peter May retourne dans les Hébrides, plus précisément dans les îles Flannan à une vingtaine de kilomètres de l’île Lewis. L’auteur s’empare d’un fait divers réel, survenu en 1900 : la disparition jamais élucidée des trois gardiens du phare d’Eilean Mor." 
Voir Ici


Tadloidu ciné chez Dasola conseille aussi les titres suivants et Je lis Je blogue une BD. Merci à eux  ! Je ne les ai pas encore lus mais cela me donne envie de les découvrir.

 

Robert Louis Stevenson : Journal de la construction d'un phare

Au large de l’Écosse, en mer du Nord, à la croisée de plusieurs routes maritimes, se trouve un récif meurtrier, où les navires s’abîment par dizaines. En 1807, un homme décide de mettre fin à cette malédiction. Ingénieur pour la Compagnie des Phares du Nord, Robert Stevenson se lance dans une entreprise périlleuse : ériger un phare sur un récif immergé vingt heures par jour. Trois années durant, dans des conditions chaotiques, il coordonne le chantier de Bell Rock. Animés par la volonté de rendre la mer plus sûre, ses hommes et lui luttent contre vents et marées pour mener à bien ce projet ambitieux.

En racontant l’histoire de sa famille et en publiant les carnets de son grand-père, Robert Louis Stevenson rend non seulement hommage à la dynastie de pionniers et de bâtisseurs dont il est issu, mais il révèle aussi au public une formidable aventure collective. (quatrième de couverture)  

 

Jules Verne : Le Phare du bout du monde


L’île des États : un îlot désertique au large de la Terre de Feu, à plusieurs dizaines de milles de tout espace civilisé. Les autorités argentines viennent d’y inaugurer un phare, pour permettre aux navires de franchir le cap Horn par une route plus rapide et plus sûre. Trois gardiens de phare sont déposés sur l’îlot pour y séjourner, seuls, durant les trois mois de l’hiver austral. Seuls ?... (quatrième de couverture) 

 

Emmanuel Lepage :  Ar -Men  BD


Au large de l’île de Sein, à la pointe Finistère, Ar-Men émerge des flots. Construit en 1867, on surnomme ce phare mythique «L’enfer des enfers». Sa lumière veille les navires, et les protège des récifs menaçants. Les hommes se sont succédés pour l’entretenir, sentinelles d'une côte déchiquetée que les marins redoutent. Germain, dans les années 1960, est l’un de ces gardiens téméraires et solitaires. Dans l'édifice isolé, contre vents et marées, il a trouvé son exacte place, emportant là ses blessures et son abandon d’une vie sur terre, avec les autres hommes. ( quatrième de couverture ) Editions Futuropolis




lundi 18 mars 2024

Yan Lespoux : Pour mourir, le monde


Dans Pour Mourir, le monde, Yan Lespoux, historien, universitaire spécialiste de la civilisation occitane, s’appuie sur un fait historique, le plus grand naufrage de l’histoire de la marine portugaise en janvier 1627 sur les côtes françaises de Saint-Jean-de-Luz et d'Arcachon jusqu’au Médoc à la suite de tempêtes violentes. 
 
 
Francisco Manuel de Melo ,, écrivain portugais et marin

 
 
Yan lespoux s'inspire des mémoires du capitaine-mor dom Manuel de Meneses, qui publia un mémoire, de dom Francisco Manuel de Melo, écrivain et marin, qui raconta son histoire trente ans après, et du livre de Jean-Yves Blot et Patrick Lizé qui ont réuni de nombreux documents retrouvés dans les archives espagnoles, portugaises et françaises.
Voilà quel est le bilan de ces naufrages d'après ces études  : «  7 navires coulés, deux énormes caraques des Indes de 1800 tonneaux, chargées de pierres précieuses et d'épices, escortées par cinq galions de guerre portant la fine fleur de l'aristocratie portugaise, 2000 morts, 300 rescapés. Tout cela donna lieu à un imbroglio diplomatique entre la France et le Portugal, qui impliqua le duc d'Epernon, Richelieu, Louis XIII, l'Eglise et les grandes familles du Médoc. Car si les " bourgeois " de Saint-Jean-de-Luz recueillirent des naufragés, plus au nord, sur les côtes des Landes et du Médoc, les Français pillèrent les épaves et massacrèrent les survivants. »
 
 
 
 Une caraque

 
 De Gao :  Le roman débute avec le naufrage, sur la côte du Médoc, à Lacanau, de la caraque Sao Bartolomeu, avec à sa tête, le capitaine-mor Vincente de Brito, navire revenant des Indes.  ll y avait à bord cinq cents voyageurs et un chargement d’une valeur inestimable, épices, pierres précieuses, étoffes. Il n’y eut que douze survivants. Fernando Teixeira, jeune portugais, personnage fictif du roman est l’un des leurs. Pauvre, orphelin, il a été recruté de force dans l’armée portugaise et amené aux Indes où il eut une vie aventureuse qui finit par le conduire dans les geôles de la Sainte Inquisition à Goa. Gracié, il embarque pour un retour au Portugal sur le Saint Bartolomeu et projette de voler les diamants transportés à bord, avec l’intention de sortir de sa condition car « naître petit et mourir grand est l’accomplissement d’un homme » dit le poème d’Antonio Vieira, mis en exergue du roman :  « Pour naître le Portugal; pour mourir le Monde. »

Dans le Médoc :  Fernando va rencontrer Marie. Cette dernière, une fille qui sait se défendre, a blessé un fils de famille qui l’agressait et doit se cacher des autorités dans les landes sauvages du Médoc, chez son oncle Louis, un homme brutal, pilleur d’épaves. Celui-ci qui règne par la terreur sur un peuple de travailleurs primitifs et misérables. Ces hommes vont non seulement piller les richesses de la nef mais aussi achever les rares rescapés.


Piet Heyn, le commandant de la flotte hollandaise occupe Bahia

De Salvador de Bahia :  Au Brésil, vit Diogo, dont les parents ont été brûlés vifs pendant le siège mené par la marine Hollandaise pour enlever la ville aux Portugais. Ces derniers, avec à sa tête Dom Manuel de Meneses secondé par les espagnols, vont reprendre Bahia. A cette époque le Portugal, au grand dam des nobles portugais, était alors réuni à la couronne d’Espagne. Au cours de cette guerre Diogo et son ami, un indien Tupinamba, Ignacio, deviennent les aides de camp de Dom Manuel Meneses et partiront avec lui vers le Portugal. Plus tard, sommés par le roi d’escorter les caraques venues de l’Inde, leur galion le Santo Antonio et Sao Diogo fera naufrage devant Saint Jean de Luz.

C’est ainsi que Yan Lespoux mène ses trois personnages principaux à travers les océans et de points de l’horizon diamétralement opposés jusqu’aux côtes françaises où ils se rencontreront, une navigation houleuse et tumultueuse qui se double d’une traversée de l’enfance à l’âge adulte, tout au long de ce roman initiatique.

Le roman de Yan Lespoux est très enlevé et bien écrit ! Les descriptions sont à la hauteur des éléments déchaînés, des pays exotiques. De plus, l’écrivain se révèle un bon conteur et nous plonge dans un récit mouvementé et aventureux, agréable à lire par un effet proportionnellement contradictoire aux émotions rencontrées, plus j’ai peur, mieux c’est !  Oui, je sais ! Je dois avoir gardé mon âme d’enfant parce qu’après les romans qui parlent du froid, de la neige et de la survie dans le Grand Nord, juste après, j’adore toujours les récits de mers démontées et de bateaux en détresse, voire d’îles désertes.

 Découvrir la vie au bord d’une caraque ou d’un galion, braver les tempêtes, souffrir du scorbut, faire naufrage deux fois, échapper à l’inquisition, commercer avec les Indes, découvrir la misère et la sauvagerie des résiniers, des costejaires et des bergers des Landes dans notre France du XVII siècle, mesurer la misère des peuples, qu’ils soient colonisés, esclaves ou nés, comme Fernando, « au mauvais endroit », du mauvais côté de la barrière sociale, tout est passionnant !
 Le sérieux de la documentation nous permet de découvrir des faits historiques que je ne connaissais pas , ce naufrage, la reconquête de Bahia, la colonisation des Indes et la présence de l'Inquisition jusque là-bas,  et ceci, comme si on le vivait en même temps que les personnages. 

 

Dom Manuel de Meneses capitaine-mor du Sao Juilao et du Bartolemeu

De plus, le texte ne manque pas d’humour. J’ai aimé le personnage du noble portugais, le Fidalgo, Dom Manuel de Meneses, dont l’écrivain fait un portrait réjouissant par exemple lorsqu'il refuse d’échapper à la flotte anglaise plus nombreuse et mieux armée que lui à la faveur de la nuit. Il fait attacher un fanal à la poupe de son navire pour ne pas avoir l’air de fuir … d’où un premier naufrage quand il se fait canarder le lendemain matin  ! Ou encore en 1627 quand il discute de figures de style dans un texte de Lope de Vega avec Dom Manuel de Melo alors que son navire est en train de sombrer, malmené par les vagues de l’océan déchaîné. On rit de son sens de l’honneur qui n’a d’égal que sa stupidité mais qui finit par forcer l’admiration, porté à un degré tel que la démesure l’empêche d’être ridicule !  De plus sous ses airs de grand seigneur impassible, l’écrivain nous fait toucher l’homme, celui qui éprouve de la peur et trahit parfois ses faiblesses, un être humain, pas des meilleurs, mais humain, en quelque sorte ! Une personnalité historique que Yan Lespoux traite comme l'un de ses personnages et à qui il donne une complexité.
 

Donc un bon roman ! N'hésitez pas à embarquer ! A lire pour le plaisir de l’aventure et de la rencontre avec l’Histoire !  

Et puis, quand vous l'aurez lu, venez nous voir Fanja et moi,  pour nous dire ce que vous avez pensé de la fin ouverte du roman, l'écrivain ne précisant pas vraiment ce que ses personnages sont devenus !

Enfin, j'ajoute que j'aime ce livre parus aux éditions Agullo. Je trouve que c'est un bel objet  (conception de la couverture par Cyril Favory) avec la carte jaquette d'après Jan Huygen van Linschoten et les images de la première et quatrième de couverture d'Alfredo Roque Gameiro.

Fanja ICI 

Keisha ICI 

Je lis je blogue

Première de couverture

Quatrième de couverture
 


Chez Fanja

                    

mardi 12 mars 2024

Jules Verne : Les forceurs de blocus

 


 

Les forceurs de blocus est une longue nouvelle de Jules Verne parue en 1871. La guerre de Sécession ou guerre civile américaine (1861 à 1865) eut de graves répercussions en Ecosse sur l’économie du textile. Pendant La famine du coton, six-cent vingt cinq mille métiers s’arrêtèrent, des milliers d’ouvriers sans travail furent réduits à la misère, les patrons subissant des revers de fortune importants. En effet, les Etats du Sud pourvoyeur du coton cultivé par les esclaves noirs subissaient un blocus de la part des fédérés et ne pouvait ni exporter leur coton, ni recevoir de l’aide extérieure.
Le jeune capitaine James Playfer dont l’oncle,Vincent Playfer, est un riche négociant de Glascow, décide de partir en mer avec un navire à vapeur d’une rapidité exceptionnelle, The Delphin, pour forcer le blocus de Charleston. Il partira chargé d’armes et, après avoir forcé le blocus il les échangera avec du coton.

Il embarque à son bord, en plus de l’équipage, un nommé Crockston, un homme qui se dit excellent marin et son jeune neveu. Or, dès le début du voyage, Crockston se révèle complètement ignorant des choses de la marine et James Playfer comprend tout de suite que le jeune neveu est, en fait, une fille. Je pense que l’on peut le révéler tout de suite car l’intérêt du récit n’est pas là et il ne s’agit en aucune mesure d’une surprise ! En effet, si le lecteur, se doute tout de suite du travestissement, le capitaine n’est pas dupe non plus et traite avec beaucoup d’égard sa jeune et jolie passagère, Jenny Halliburtt.  
Celle-ci a embarqué avec son domestique pour rejoindre son père, journaliste des Etats du Nord, anti-esclavagiste convaincu, retenu prisonnier dans le Fort de Charleston pas les confédérés.
Et c’est là que réside l’intérêt de ce récit :  Le capitaine est avant tout un commerçant et il voit les fédérés et leur cause, l’abolition de l’esclavage, d’un mauvais oeil. Tout ce qui est néfaste au commerce attire son courroux. Face à ce matérialisme, la jeune fille, idéaliste, va plaider pour les Etats du Nord, montrer que la question de  l’esclavage prime dans cette lutte entre le Sud et le Nord,  et mettre en valeur la noblesse de la cause défendue par son père. Le jeune homme, d’abord commerçant dans l’âme, se laisse peu à peu gagner par les idéaux de la jeune fille. Les idéaux? ou les beaux yeux ? Un peu des deux mais les beaux yeux surtout ! 

Les forceurs de blocus est donc un récit d’aventure mais aussi d’amour et ne manque pas d’humour comme on le voit dans la chute de la nouvelle ! Comment les héros forceront-ils le blocus ? Echapperont-ils aux dangers de l’aventure ? Parviendront-ils à libérer le père de Jenny ? C’est ce que je vous laisse découvrir !
Un petite oeuvre peu connue de Jules Verne mais très agréable à lire et qui présente une vue originale de la guerre de Sécession vue du côté européen et des idées de Jules Verne opposé à l'esclavage.

LC  avec Violette ICI

 LC avec Fanja ICI


Chez Fanja
 


 

Chez Nathalie

jeudi 7 mars 2024

David Grann : La note américaine

 

J’ai découvert David Grann avec Les Naufragés du Wager (ICI) que j’ai vraiment beaucoup aimé. Il me restait donc à lire La note américaine dont les échos sont élogieux dans les blogs.

Nous sommes en 1921 chez les Osages. Cette tribu indienne a été chassée de ses terres du Kansas pour y installer les colons blancs au XIX siècle, dans les années 1870, et a été reléguée sur les territoires les plus rocailleux, les plus déshérités de l’Oklahoma. Mais le découverte de gisements de pétroles va changer la donne et faire des Osages l’un  des peuples les plus riches du monde. Scandaleux ! Non seulement ils sont millionnaires mais, en plus, ils se font servir par des domestiques… blancs ! Le monde renversé ! Tout va être mis en place pour les dépouiller de leur fortune, les spolier de leurs biens, par tous les moyens légaux ou non, y compris le meurtre, et ceci avec la complicité des pouvoirs politiques, financiers et juridiques des Etat-Unis.

Le livre se divise en trois parties :

Première Chronique : La femme marquée

 

Mollie Buckhart et son interprète dans le film de Scorcese
 

C’est à travers le personnage de Mollie Burkhart, une indienne osage, que l’écrivain va présenter cette période qui  commence en 1921, période que l’on a appelée le règne de la terreur et dont la durée officielle est de quatre ans. Mais l'enquête révèle que les meurtres ont commencé certainement plus tôt et ont continué au-delà. Cette première partie nous éclaire aussi sur la vie des indiens osages par le passé et maintenant qu’ils sont devenus riches, la perte de leurs traditions, de leurs croyances. Leurs enfants leur sont enlevés pour être éduqués dans des internats religieux. Le gouvernement les déclare inaptes (ce sont des indiens donc incapables! ) à gérer leur fortune et les met sous tutelle. Les curateurs, des blancs, leur refusent toute dépense, chipotent sur leurs besoins et les dépouillent peu à peu de leurs biens.

« …par exemple le cas d’une veuve dont le curateur avait disparu en emportant presque tous ses biens, avant de l’informer qu’elle n’avait plus un sou, et l’avait laissée élever ses deux enfants en bas âge dans la misère. Quand l’un des enfants tomba malade, le curateur refusa de lui octroyer le moindre centime. Dépourvu d’une nourriture suffisante et de soins médicaux, l’enfant décéda. »

Mollie, mariée à un blanc Ernest Buchart, a vu disparaître sa soeur Minnie et sa mère Lizzie, toutes deux empoisonnées, sa soeur Anna tuée d’un balle est retrouvée dans un ravin. Plus tard c’est sa soeur Rita et son mari qui disparaissent dans un attentat contre leur maison. D’autres meurtres font régner la terreur dans tout le comté osage. La police et la justice bâclent les enquêtes, peu soucieuses de trouver les coupables dont on pressent qu’ils bénéficient de protections occultes. Devant la mauvaise volonté des autorités, les familles touchées par ces meurtres engagent des détectives privés qui engrangent de nombreux renseignements, ouvrent de nombreuses pistes mais en vain. W W. Vaughan, un avocat honnête, semble avoir élucidé les crimes, mais au moment où il va révéler la vérité, il meurt assassiné. Mollie, désespérée, se barricade dans sa maison mais on apprend qu’elle est en train de mourir, elle aussi empoisonnée.


Deuxième chronique : L’homme d’indices



Dès 1908 Roosevelt avait créé le Bureau of investigation (Le BOI)  qui deviendra le FBI. En 1925, le nouveau patron du BOI, J. Edgar Hoover va le diriger de manière dictatoriale et le moderniser. Il demande à l’ancien ranger, Tom White, de prendre l’affaire en main et lui envoie des agents infiltrés. Le groupe parvient à établir la culpabilité de certains, en particulier d’un personnage haut placé. Cette seconde partie nous révèle les dessous de l’enquête et décrit le procès difficile et tumultueux. Mollie qui a survécu y assiste.

« Mais White savait que le système judiciaire américain, au même titre que ses services de police, était gangréné par la corruption. Il y avait beaucoup de juges et d’avocats véreux. Les témoins étaient menacés et le jury acheté. »


Troisième chronique : Le journaliste


Ernest Buckhart et son Interprète Di caprio

Au-delà de l’enquête, le journaliste, David Grann donc, continue ses recherches. Il rencontre les petits-enfants des Osages qui ont connu le règne de la terreur. Ces descendants gardent en mémoire cette horrible période et les meurtres de leurs grands-parents qui n’ont pas obtenu justice. Les coupables ont bénéficié de remises peine, d’amnistie, ou n’ont tout simplement pas été poursuivis. Le journaliste  découvre qu’il y a de nombreux meurtres restés impunis ou qui n’ont été ni reconnus comme tels, ni fait l’objet d’une enquête.

Les Osages vivent dans le souvenir et l’amertume : «  Cette terre est gorgée de sang » commenta Mary Jo  (Marie Jo Webb petite-fille de Paul Pearce assassiné pendant la terreur ). Elle se tut un instant et nous entendîmes les feuilles des chênes bruisser dans le vent. Puis elle me rappela ce que Dieu avait dit à Caïn après le meurtre d’Abel : « La voix du sang de ton frère crie de la terre jusqu’à moi. ».

Le livre de David Grann se révèle une enquête complexe qui tient en haleine, éclairant les manquements de la justice face à la disparition violente de nombreux membres de la tribu, révélant les zones d’ombre, les complicités, les mensonges et les non-dits. Les personnages prennent vie et nous assistons, révoltés et désemparés, à leurs souffrances. Grâce au dépouillement d'archives, de mémoires, et de la presse de l’époque et à la rencontre des descendants des Osages disparus, David Grann mène une investigation passionnante que l'on ressent aussi comme un cri d'indignation et un appel à la justice.

jeudi 22 février 2024

Elsa Osorio : Double fond


 

Double fond, le roman de Elsa Osorio, écrivaine argentine, se déroule dans deux espaces temporels différents qui finiront par se rejoindre dans le dénouement.

2024 ; Le corps d’une femme, le docteur Marie Le Boullec, est retrouvé, échoué sur une plage de La Turballe, près de Saint Nazaire. Le commissaire Fouquet enquête et met sur l’affaire (officieusement)  une jeune  journaliste Française, Muriel Le Bris qu’il juge brillante, en lui faisant part de ses soupçons. La morte aurait été anesthésiée puis jetée dans l’océan d’une très haute altitude, avion ou hélicoptère. Ce procédé rappelle à la mémoire les vols de la mort pratiqués par la dictature argentine dans les années 1976-1983 pour se débarrasser des opposants sans laisser de trace. Cette technique employée pendant la guerre d’Algérie, fut enseignée aux argentins par des militaires français (L’OAS). Muriel aidée par Marcel, son petit ami, et par une vieille dame, Geneviève, amie de Marie le Boullec, découvre des mails entre un jeune argentin Mathias et celle qui semble être Marie Le Boullec  mais se présente sous le nom de Soledad Durant. Elle apparaît aussi sous un autre nom Maria Landaburu ? Un double fond ?

Qui est réellement Marie Le Boullec, médecin urgentiste, épouse d’Yves Le Boullec,  unanimement aimée et saluée par ses patients ? Pourquoi a-t- elle promis à Mathias de lui raconter la vie de sa mère, disparue, que le jeune homme n’a pas revue depuis des années ? Marie Le Boullec a-t-elle réellement été assassinée ou s’est-elle suicidée après la mort de son mari Yves Le Boullec ?

Emilio Eduardo Massera


1978 : Nous sommes en pleine dictature militaire depuis le coup d’état de 1976 dirigé par le général Jorge Rafael Videla, avec l'amiral Emilio Eduardo Massera appelé le commandant Zéro et le brigadier Orlando Ramón Agosti. Les opposants au régime,  entre autres les membres du FAR (force armée révolutionnaire) et les Monteneros, (organisation de lutte armée de tendance péroniste de gauche) sont enlevés, séquestrés à L’ESMA (école mécanique de la marine) qui devient un lieu sinistrement célèbre, tortures, viols, vols de bébés, assassinats…  Les victimes disparaissent, enterrés dans des fosses communes ou jetés à la mer lors des vols de la mort et les familles restent dans l’ignorance de ce qui leur est arrivé. Il y eut près de 30 000  desaparecidos ou disparus. Bien vite, les crimes ne concernent plus seulement les opposants mais ceux qui ont des biens, riches propriétés, entreprises, qui attirent la convoitise d’un régime organisé en mafia et qui s’enrichit de la confiscation des biens. Marcel, historien, oriente d’ailleurs  sa thèse sur la répression mafieuse en Argentine au temps de la dictature.

Ils avaient volé tous leurs biens aux disparus, ils s’étaient appropriés, par la torture, des terrains et des entreprises appartenant à des personnes qui n’avaient aucun lien avec le militantisme, le syndicalisme, ni les groupes armés révolutionnaires, et ces personnes sont  encore aujourd’hui disparus. Ils faisaient des affaires juteuses en Argentine et à l’étranger, avec le concours de la loge P2.

 

83 avenue Henri Martin


Juana, guerillera, officier montanera, a été emprisonnée à L’ESMA avec son fils Mathias âgé de trois ans. Affreusement torturée, elle a obtenu de son tortionnaire Raul Raidas dit le Poulpe que son enfant soit libéré et envoyé chez son père. Devenue la maîtresse de Raul, elle se dit « repentie » car c’est le seul moyen pour elle de survivre et d’épargner la vie de son fils qui est toujours menacée. Mais elle espère pouvoir un jour témoigner des crimes du régime. Toujours sous surveillance, privée de liberté malgré les apparences, elle est envoyée à Paris en 1978 pour infiltrer les comités du COBA, organisme qui prend position, à l’époque, en France, contre la dictature et le fait que Le Mondial du football ait lieu en Argentine.

83 avenue Henri Martin. Elle monte l’escalier qui conduit au bureau du Centre pilote de Paris , et de nouveau cette sensation : un cloaque puant dans des pièces élégantes et claires. La Folie est encore pire qu’à l’ESMA. C’est une annexe de l’ESMA, mais à Paris, à l’angle d’une avenue arborée, au premier étage d’un superbe immeuble.

 C’est en France qu’elle rencontre Yves Le Boullec et qu’elle en tombe amoureuse. Un amour réciproque mais qui met sa vie en danger car son amant Raul est d’une jalousie féroce. Obligée à paraître véritablement « repentie » aux yeux de la junte  sous peine de mort, elle est de plus considérée comme traître et menacée par les siens.  

Parallèlement à ces deux récits temporels un texte en italique semble être le récit promis par Soledad à Mathias sur sa mère, Juana, et joue le rôle de trait d’union entre les deux récits. Il nous en apprend plus sur l’horreur des crimes de masse en argentine avec la complicité silencieuse ou non du gouvernement français..

L’année dernière j’ai rencontré Poniatowski, le ministre de Giscard, quand il est venu en Argentine, et il était totalement d’accord avec nous sur la nécessité d’éradiquer le terrorisme. Et tu veux que je lui parle de victimes ?

 

L'amiral Massera et Alfredo Artiz lors de leur procès

 

Que dire de ce roman ? C’est qu’il m’a appris beaucoup sur la dictature en Argentine ! Et je dois ajouter que j’ai dû faire une incursion dans le net pour me documenter sur tous les personnages historiques du roman tant mon ignorance est profonde. Par exemple, je pensais qu'Elena Homlberg était un personnage fictionnel mais j’ai découvert que, attachée de presse à l’ambassade d’Argentine à Paris et pourtant proche de la dictature, elle avait été assassinée par ordre de l’amiral Massera. On rencontre ainsi à Paris Alfredo Astiz surnommé l’ange blond de la mort, tortionnaire de l’ESMA, responsable de la disparition de deux religieuses françaises.  Il est question aussi des mères de la place de Mai qui se réunissent avec la photo de leurs enfants disparus. Je me suis perdue dans les noms des responsables militaires parfois désignés par leur nom, parfois par leur surnom comme le capitaine de corvette Acosta, criminel de guerre, appelé Le Tigre. j'ai cherché aussi ce qu'était la loge P2, loge maçonnique secrète où se retrouvent mafia, criminels argentins, et bien d'autres d'où est issu Berlusconi.

Ma lecture n’a donc pas été aisée tout au moins au début et j’ai eu du mal à entrer dans l’histoire. D’autre part la trame narrative est complexe et parfois un peu trop enchevêtrée. J’ai trouvé aussi qu’il y avait des longueurs dans la partie enquête, les personnages fictionnels refusant de dire à Matthias la vérité sur le meurtre de Marie Le Boullec, et lui écrivant comme si elle était toujours vivante. On se demande bien pourquoi si ce n’est pour prolonger artificiellement l’enquête. Bref! Je n’ai pas tout aimé dans ce livre. Mais j’ai apprécié l'aspect historique et l'immersion pas obligatoirement agréable, on s'en doute,  mais nécessaire dans cette cette période tragique de l’histoire de ce pays et d'en savoir plus sur la complicité de la France, de l’église catholique et des Etats-Unis. Du coup, je suis allée me documenter sur les procès menés contre les responsables de ces crimes contre l’humanité. Il faut savoir que ceux-ci, en 1983, à la fin de la dictature, ont été protégés par des lois d’amnistie et ceux qui ont été condamnés lors procès de la junte en1985 ont été grâciés par le président Carlos Menem. Il a fallu attendre 2003 pour mettre fin à l’impunité. Une soixantaine de condamnations furent prononcées entre 2005 et 2009. En 2006 et 2010 deux témoins à charge payèrent de leur vie. De grands procès auront lieu en 2009, 2012, 2016, 2017. Au cours de mes recherches j’ai trouvé un procès en 2022 mettant en cause dix officiers pour les atrocités commises dans la caserne militaire de Campo de Mayo contre 350 personnes, dont des femmes enceintes et des ouvriers de l’industrie automobile. Une Histoire qui n'a jamais fini de s'écrire !

Et voilà ce que je lis dans wikipédia


Le procès de Luis Maria Mendia et les « vols de la mort »
En janvier 2007, lors de son procès, en Argentine, pour crimes contre l’humanité, l’amiral Luis Maria Mendia, idéologue des « vols de la mort », demanda la présence de Valéry Giscard d’Estaing, de l’ancien Premier ministre Pierre Messmer, de l’ex-ambassadrice à Buenos Aires Françoise de la Gosse et de tous les officiels en place à l’ambassade de France à Buenos Aires entre 1976 et 1983, pour qu'ils comparaissent devant la cour en tant que témoins.
Tout comme Alfredo Astiz, l’« ange de la mort », avant lui, Luis Maria Mendia a, en effet, fait appel au documentaire de la journaliste Marie-Monique Robin, Les escadrons de la mort – l’école française, qui montrait comment la France — et notamment des anciens de la guerre d’Algérie —, par un accord secret militaire en vigueur de 1959 à 1981, avait entraîné les militaires argentins. Ils demandèrent par ailleurs la présence d'Isabel Peron (arrêtée en Espagne début 2007), Italo Luder, Carlos Ruckauf et Antonio Cafiero.
Luis Maria Mendia accusa un ancien agent français, membre de l'OAS, d'avoir participé à l'enlèvement des nonnes Léonie Duquet et Alice Domon. Celui-ci, réfugié en Thaïlande, nia les faits, tout en admettant avoir fui en Argentine après les accords d'Évian de mars 1962.
Par ailleurs, début janvier 2010, l'ex-pilote militaire Julio Alberto Poch, détenu en Espagne, accepta d'être extradé pour répondre des accusations l'impliquant dans les « vols de la mort », dans lesquels il nie avoir eu la moindre participation.


https://www.france24.com/fr/20121127-argentine-proces-histoire-vol-mort-dictature-militaire-esma-armee-astiz-acosta-cavallo-miguel
https://www.rfi.fr/fr/ameriques/20171130-proces-esma-argentine-vols-mort-astiz-acosta-verdict-perpetuite

 https://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_sale

 https://www.lemonde.fr/international/article/2022/07/07/argentine-dix-officiers-condamnes-a-la-perpetuite-pour-des-crimes-commis-sous-la-dictature_6133675_3210.html


 


lundi 12 février 2024

Almudena Grandes : Les Secrets de Ciempozuelos


Je ne connaissais pas Almudena Grandes avant de voir sur Netflix ( et oui, on peut y trouver des pépites) Les patients du docteur Garcia du même auteur. C’est pourquoi j’ai été heureuse de dénicher à la médiathèque d’Avignon Les Secrets de Ciempozuelos d'Almudena Grandes qui  est un de mes coups de coeur ce mois-ci.


Hildegard et Aurora Carballeira

German Vélasquez a fui l’Espagne en 1939 après la victoire de Franco et s’est installé en Suisse. Son père, psychiatre réputé, condamné à mort par les nationalistes, s'est suicidé en prison. Or en 1954, Jose Luis Roblès, directeur de l’asile pour femmes de Ciempozuelos propose à German, devenu psychiatre lui aussi, de venir travailler dans son établissement afin de mettre au point le protocole d’un nouveau médicament susceptible de venir en aide aux malades mentaux jusqu’alors incurables. Si German peut revenir en Espagne en toute sécurité, c’est que le pays manque de psychiatres. En arrivant à l’asile, German découvre qu’elle abrite une patiente Aurora Rodrigue Carballeira, qu’il avait aperçue, lorsqu’il était enfant, dans le cabinet de son père, et qui défrayait alors la chronique, personnage devenue tristement célèbre en 1933 pour avoir tué sa fille Hildegard, jeune prodige. Il y fait également la connaissance d'une aide-soignante, María Castejón, à qui doña Aurora a appris à lire et à écrire. La jeune fille intelligente et sensible, dont le grand-père est jardinier à l’asile de Ciempozuelos, a vécu dans ce lieu depuis son enfance et est attachée à Aurora qui lui a ouvert les portes du savoir. German, fasciné par cette patiente, paranoïaque, espère en apprendre plus sur elle en interrogeant Maria. 

Bien vite, les jeunes gens sont attirés l’un vers l’autre mais outre la différence sociale - médecin/aide-soignante-, dans un pays où tout est hiérarchisé, un avenir est-il possible pour deux êtres que leur passé fragilise au coeur d’une terrible dictature ?

On peut se demander ce qui pousse German à accepter cette invitation, à se jeter dans la gueule du loup ? Ses collègues espagnols qui vivent la dictature comme une oppression et étouffent dans ce pays sans horizon, sans espoir n'osent lui poser la question.  Mais on le comprend peu à peu. La réponse est à la fois simple et complexe : Le désir, bien sûr, d’expérimenter en tant que chef du service ce médicament prometteur, le besoin de fuir un divorce difficile et de s'éloigner de la famille juive de son beau-père qui vit dans la douleur de la perte de son fils tué par les nazis,  fuir aussi un pays, la Suisse, qu’il trouve gris et froid, et puis la nostalgie de l’Espagne, de ses couleurs, de sa chaleur, le bonheur de revoir, après quinze ans d’exil, sa mère et sa soeur… La liste est longue.

C’est qu’il ne connaît pas, non plus, la réalité de l’Espagne franquiste, et ce qu’il découvre est au-delà de ce qu’il peut imaginer dans une dictature que Almudena Grandes qualifie au cours d’une interview de « prototypique à cause de son application nette de la terreur ».
 Et d’abord l’obscurantisme religieux avec une église catholique toute puissante qui pèse sur les esprits, brime les consciences avec l’obligation de participer aux offices, condamne la sexualité et où tout est péché, une église qui dénonce, punit, culpabilise, manipule ceux qui ne font pas partie des puissants. Ces derniers sont intouchables et l’hypocrisie des élites n’a d’égale que la stigmatisation et le mépris des pauvres. Maria va l’apprendre à ses dépens, elle qui est un temps domestique chez des bourgeois « méritants » et « bien-pensants » !

C’est ce que découvre German lorsqu’il dit à Maria avec un franc-parler qui paraît extraordinaire voire scandaleux dans cette société  :  «  Ce pays est vraiment bizarre ! Les gens n’ont que ça en tête. Ils espionnent, critiquent, disent du mal des autres, se signent parce que c’est péché, mais ils ne parlent que de ça, ne pensent qu’au sexe, c’est l’obsession nationale.  Cette dernière phrase, c’est ce qui m’a le plus impressionnée, j’ai eu peur de l’entendre évoquer ces choses-là si naturellement, comme s’il parlait la météo. Cela faisait trop longtemps que je n'avais pas entendu ce mot, sexe, prononcé aussi simplement, sans importance. »

Un gouvernement qui met à mal toute liberté, une société où personne ne peut exprimer sans danger des idées non-conformes à celles du régime. La sexualité, l’homosexualité, la lecture, le socialisme, tout est sévèrement réprimé. Une chape de plomb pèse sur le pays et chacun se méfie de son voisin, les parents demandent à leurs enfants de ne pas répéter ce qui s'est dit dans les foyers.

"Parler, lire des livres, acheter le magazine La Cordoniz, ou s’embrasser sur la bouche en plein jour, même chez soi, étaient des activités suspectes, qui pouvaient attirer l’attention d’une personne en lien avec la police."

L’Espagne et son penchant pour l’eugénisme, sa ségrégation sociale, son mépris des humbles mais aussi des femmes qui sont les premières touchées, tellement formatées qu’elles ne peuvent, même en pensée, échapper à la cage qu’on leur destine. Le roman est donc aussi un livre écrit en mémoire de ces femmes victimes d’une société qui les tient pour biologiquement inférieures.

Don Eijo Garay évêque franquiste


Tout cela, German va rapidement le découvrir quand il rencontre le père Armenteros, secrétaire particulier de don Eijo Garay, évêque de Madrid-Alcala et patriarche des Indes occidentales qui s’oppose à un traitement des malades mentaux.

« Ces créatures (il bougea le bras comme s’il voulait étreindre tous les malades qui l’entouraient) sont aussi des enfants de Dieu, sûrement les plus aimés. En les créant ainsi, le Seigneur a voulu qu’ils fassent partie de son oeuvre. Sincèrement, il nous semble préoccupant d’aspirer à corriger le plan divin. »

ou encore Antonio Vallejo Najera, directeur de l’asile pour hommes de Ciempozuelos, colonel de l’armée nationale, idéologue de l’eugénisme qui a pratiqué des expériences sur les prisonniers politiques pour isoler le gène du socialisme. 

Antonio Vallejo Najera

« Et je saluai l’idéologue de l’eugénisme fasciste espagnol, créateur de la théorie selon laquelle le marxisme était un gène pervers, intrinsèquement associé à l’infériorité mentale, qu’il fallait extirper à tout prix en fusillant tous ceux qui le portaient et en confiant leurs nouveau-nés à des familles irréprochables, qui sauraient neutraliser leur épouvantable héritage génétique grâce à une éducation religieuse et patriotique appropriée. »

 
Mais plus que tout, ce que dénonce Almuneda Grandes, c’est le silence qui s’est abattu sur la population, le silence qui est le seul moyen de se préserver de la dictature quand exprimer ses pensées devient dangereux. L’écrivaine rend sensible cette peur qui s’insinue en chacun d’entre eux lorsqu’il doit sans cesse contrôler ses pensées, cacher ses opinions, se méfier de son interlocuteur. Ainsi tout en nous racontant le passé, l’écrivaine s’interroge aussi sur le présent et nous montre comment, par la suite, dans l’Espagne démocrate, les petits-enfants n’ont pu exercer une pensée critique sur l’époque franquiste, n’ont pu comprendre le passé de leurs grands-parents, le silence toujours de rigueur rognant les ailes à la mémoire. C’est ce que veut dire Pedro Almodovar quand il écrit : « Almudena Grandes est un phare pour tous ceux qui, comme moi, veulent savoir d’où ils viennent... En plus d’être un roman-fleuve jouissif à lire, il est le meilleur antidote à l’inquiétude actuelle. »

Oui,  Les Secrets de Ciempozuelos est un roman additif, passionnant, qui épouse tour à tour des  points de vue différents, German, Maria, Aurora…  et fait alterner le passé, celui de German et de Maria, et les lieux, la Suisse et l’Espagne, avec une incursion dans l’Allemagne nazie et l’holocauste. Les  personnages, Maria et German, en sont extrêmement attachants et tous ceux qui gravitent autour d’eux sont intéressants. Avec leurs forces et leurs faiblesses, ils nous apparaissent profondément humains. On aime les accompagner tout au long de leur vie et de leurs épreuves. Il faut ajouter qu’en interrogeant le passé, Almuneda Grandes ne nous parle pas seulement du présent de l’Espagne mais aussi du nôtre. Elle nous rappelle que la privation de la liberté est peut-être l’une des plus grandes épreuves qu’un peuple ait à subir et que la dictature détruit jusqu’à l’âme et le coeur d’un pays.

Les Secrets de Ciempozuelos est le cinquième de la fresque écrite par l’écrivaine sur l’époque franquiste (Episodes d’une guerre interminable). Il est aussi le dernier car l’écrivaine est décédée en 2021. J’ai bien l’intention de les lire tous !