Je suis allée voir à Utopia, le cinéma d'art et d'essai d'Avignon, le film islandais Jar City du réalisateur Baltazar Kormakur.
La Cité des jarres, pour moi, c'est d'abord le roman d'Arnaldur Indridason, auteur  plusieurs romans,  La femme en vert (mon préféré peut-être), La Voix et de L'homme du lac.
J'étais  donc curieuse de voir comment l'univers sombre de Indridason, son pays  crépusculaire et son personnage Erlendur seraient portés à l'écran.  Erlendur vient rejoindre la famille littéraire des policiers désabusés,  solitaires, pessismistes, que leur métier a habitué à ne voir que le  côté négatif de l'espèce humaine. Frère du Wallander de Henning Mankell,  proche aussi de l'Adamsberg de Fred Vargas, il porte en lui une  blessure secrète qui se révèlera peu à peu (mais pas encore dans La Cité des jarres)  et qui le pousse à s'intéresser aux personnes disparus. Divorcé, il a,  comme Wallander, de graves problèmes avec sa fille Eva Lind dont il n'a  pas su s'occuper lorsqu'elle était enfant  et qui se drogue. C'est aussi  quelqu'un qui ne sait pas parler de ses sentiments, qui est retranché  dans une carapace de silence qui le fait paraître indifférent alors  qu'il est plein de souffrance et d'humanité.
J'aime bien le personnage d'Erlendur et son  incarnation à l'écran m'a d'abord surprise. Je l'imaginais avec un  physique moins dur, plus doux, plus vulnérable.
Il apparaît tout d'abord comme un vieux bougon pas  très commode et plutôt dictatorial envers son coéquipier. Cette dernière  caractéristique apporte d'ailleurs une note d'humour bienvenue dans une  histoire très noire. L'acteur est excellent et sait faire apparaître la  fêlure du personnage, son incapacité à exprimer ses sentiments et ses  rapports tourmentés avec sa fille. Les autres personnage sont aussi bien  interprétés.
 Sigurdur Oli, Elinborg et  Erlendur
Le metteur en scène qui est aussi le co-auteur du  scénario avec Indridason lui-même a bien su rendre l'atmosphère tragique  et pesante du roman et ce que j'ai beaucoup aimé dans le film c'est la  part qui est donné aux paysages islandais. L'île est un personnage à  part entière car elle reflète le caractère des gens qui y vivent. Elle  est filmée dans toute sa sauvage et austère beauté, avec de longues  lignes droites, la platitude de ses landes jaunâtres aux herbes brûlées  qui bordent une côte où s'agite la masse d'eau sombre de l'océan.  L'habitat, disséminé le long de la grande route empruntée par les  policiers de Reykjavik à Keflavik, corrobore cette impression de  solitude. La grisaille, la neige fondue, la brume enveloppent le paysage  qui n'est pourtant pas encore hivernal mais annonce la mort. Les villes  avec les immeubles sombres, où la  silhouette du héros apparaît, isolée  sur un balcon, dans la nuit, sont d'une tristesse infinie. Parfois la  caméra aérienne fait un long travelling, au ras du sol, des terres  brunes et noires, en gros plan, et l'on ne sait plus ce que l'on regarde  : une sorte d'abstraction du pays islandais, semblable à la mort et à  l'image du scénario. Ce que j'ai bien aimé quand Kormakur filme ces   images c'est que même si elles sont belles, elles ne sont pas  esthétisantes mais toujours justifiées revenant comme un leit-motiv  pendant le déroulement de l'action.
 
 
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