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jeudi 18 septembre 2008

Utopia, Jar city : Kormakur/Indridason


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 Je suis allée voir à Utopia, le cinéma d'art et d'essai d'Avignon, le film islandais Jar City du réalisateur Baltazar Kormakur.
La Cité des jarres, pour moi, c'est d'abord le roman d'Arnaldur Indridason, auteur  plusieurs romans,  La femme en vert (mon préféré peut-être), La Voix et de L'homme du lac.

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J'étais donc curieuse de voir comment l'univers sombre de Indridason, son pays crépusculaire et son personnage Erlendur seraient portés à l'écran. Erlendur vient rejoindre la famille littéraire des policiers désabusés, solitaires, pessismistes, que leur métier a habitué à ne voir que le côté négatif de l'espèce humaine. Frère du Wallander de Henning Mankell, proche aussi de l'Adamsberg de Fred Vargas, il porte en lui une blessure secrète qui se révèlera peu à peu (mais pas encore dans La Cité des jarres) et qui le pousse à s'intéresser aux personnes disparus. Divorcé, il a, comme Wallander, de graves problèmes avec sa fille Eva Lind dont il n'a pas su s'occuper lorsqu'elle était enfant  et qui se drogue. C'est aussi quelqu'un qui ne sait pas parler de ses sentiments, qui est retranché dans une carapace de silence qui le fait paraître indifférent alors qu'il est plein de souffrance et d'humanité.
J'aime bien le personnage d'Erlendur et son incarnation à l'écran m'a d'abord surprise. Je l'imaginais avec un physique moins dur, plus doux, plus vulnérable.

erlendur-1.1221741297.jpg  Erlendur

Il apparaît tout d'abord comme un vieux bougon pas très commode et plutôt dictatorial envers son coéquipier. Cette dernière caractéristique apporte d'ailleurs une note d'humour bienvenue dans une histoire très noire. L'acteur est excellent et sait faire apparaître la fêlure du personnage, son incapacité à exprimer ses sentiments et ses rapports tourmentés avec sa fille. Les autres personnage sont aussi bien interprétés.


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Sigurdur Oli, Elinborg et  Erlendur

Le metteur en scène qui est aussi le co-auteur du scénario avec Indridason lui-même a bien su rendre l'atmosphère tragique et pesante du roman et ce que j'ai beaucoup aimé dans le film c'est la part qui est donné aux paysages islandais. L'île est un personnage à part entière car elle reflète le caractère des gens qui y vivent. Elle est filmée dans toute sa sauvage et austère beauté, avec de longues lignes droites, la platitude de ses landes jaunâtres aux herbes brûlées qui bordent une côte où s'agite la masse d'eau sombre de l'océan. L'habitat, disséminé le long de la grande route empruntée par les policiers de Reykjavik à Keflavik, corrobore cette impression de solitude. La grisaille, la neige fondue, la brume enveloppent le paysage qui n'est pourtant pas encore hivernal mais annonce la mort. Les villes avec les immeubles sombres, où la  silhouette du héros apparaît, isolée sur un balcon, dans la nuit, sont d'une tristesse infinie. Parfois la caméra aérienne fait un long travelling, au ras du sol, des terres brunes et noires, en gros plan, et l'on ne sait plus ce que l'on regarde : une sorte d'abstraction du pays islandais, semblable à la mort et à l'image du scénario. Ce que j'ai bien aimé quand Kormakur filme ces  images c'est que même si elles sont belles, elles ne sont pas esthétisantes mais toujours justifiées revenant comme un leit-motiv pendant le déroulement de l'action.

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