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lundi 23 janvier 2017

Donna Leon : Un vénitien anonyme



Dans la perspective d’un voyage à Venise en février et en quête d’un livre facile à lire (j’ai eu une période de baisse de régime) voilà un titre de Donna Leon (auteure que j’ai beaucoup lue dans le passé). Il s’agit de Un vénitien anonyme, livre policier dans lequel le lecteur retrouve, bien sûr, le commissaire Brunetti.

Venise Roberto Ferruzi

Plus que Venise, c’est Mestre que nous découvrons dans cette enquête policière et vous conviendrez que la banlieue industrielle de la glorieuse cité des Doges, près des abattoirs, est une visite peu romantique. C’est là, dans un terrain vague, lieu de rencontre des prostitué(e)s que l’on découvre un travesti sauvagement assassiné. En cette période de vacances où la moitié de l’effectif de police est déjà partie, c’est à Brunetti que l’on va confier l’affaire.
Celle-ci nous mènera des milieux de prostitués masculins de Mestre à Venise dans les milieux de la banque et la société bien pensante de la bonne bourgeoisie vénitienne. En particulier cette fameuse ligue de la Moralité, dont le moins que l’on puisse dire c’est qu’elle paraît un peu louche et… pas très morale !
 L’enquête permet à Donna Leon, tout en explorant les bas-fonds des la ville, de faire un portrait charge d’une société corrompue. Elle dénonce, au passage, la catastrophe écologique qui menace la cité et dont l’homme en général et les politiques en particulier sont les grands responsables. Nous sommes en été, la chaleur est abrutissante et exalte l’odeur d’égout à ciel ouvert de la lagune  :

Nous avons tué les mers et ce n’est qu’une question de temps avant qu’elles  se mettent à puer. Etant donné que la lagune n’est qu’un égout au fond de l’Adriatique, laquelle n’est elle-même qu’un égout par rapport au reste de la Méditerranée, laquelle..

Tout le monde parlait, tout le temps, de la destruction imminente de la ville, ce qui n’empêchait pas le prix des appartements de doubler tous les deux ou trois ans et les loyers d’augmenter dans des proportions qui les mettaient hors  de portée de la classe laborieuse.

Comme d’habitude, le charme de l’histoire tient au commissaire Brunetti, toujours aussi sympathique et qui tranche par son ouverture d’esprit et malgré son éducation de mâle italien sur les homophobes primaires qu’il rencontre dans son enquête. Nous suivons avec plaisir ses déambulations dans Venise sous la statue de bronze de Goldoni, Campo San Bartolomeo, au marché d’herbes du Rialto, ou dans le quartier de Dorsudoro, place Ramo Dietro gl'Incurabili chez un ami journaliste, possesseur de tableaux de maîtres italiens Ferruzi, Morandi, Guttoso.. Nous  nous attablons avec lui dans les petites trattoria où il fuit l’insalata di calamari laissée par sa femme dans le réfrigérateur.

Giorgio Morandi

Bref! une lecture agréable, peut-être pas la meilleure enquête parmi celles que j’ai lues de  cette écrivaine mais avec une recette toujours gagnante : Venise, véritable personnage de tous les romans de Donna Leon et à son commissaire Brunetti.