Portail sud de la cathédrale de Saint jacques de Compostelle (détail)
La femme adultère
Avant d'y arriver (en voiture et non comme pèlerin) j'avais déjà visité Saint Jacques de Compostelle avec Cees Nooteboom dans son Labyrinthe du pèlerin, Mes chemins de Compostelle...
Sur l'immense praza do Obradoiro (l'oeuvre d'or),  qui doit son nom à la façade baroque de la cathédrale se dressent non  seulement la  cathédrale, romane à l'origine, mais aussi l'hôtel des  Rois catholiques, ancien hôpital royal fondé par Isabelle et Ferdinand,  le palais de Raxoy, néo-classique, devenu hôtel de ville, l'Ayuntamiento,  et le collège San Jeronimo, actuel siège du rectorat...
Cette place, Cees Nooteboom au cours de ses nombreux voyages l'a souvent visitée :
La vue est toujours belle.  Neige, nuit, grêle, verglas, lune, pluie, brouillard, tempête, soleil,  tous les éléments peuvent jouer à leur gré avec cette plaza del   Obradoiro, ils changent les gestes, les attitudes, la démarche des gens  selon la morsure de leur froid ou de leur chaleur, leurs coups de fouet  ou le voile dont ils les enveloppent, leur lumière ou leurs ténèbres;  ils vident ou remplissent la place, créant un dessin sans cesse  changeant, dont vous faites partie dès que vous mettez le pied sur ce  rectangle, tout comme les sculptures dansantes qui se dressent sur le  ciel à l'ouest; vous devenez un élément mobile dans une oeuvre d'art  dont le plan fut conçu par un autre.
Le pèlerin qui arrive au bout du voyage à Saint Jacques de Compostelle obtient un diplôme pour loger à l'Hostal de los Reyes Catolicos :

        Hôtel des Rois catholiques (détail)    

 
Hôtel des Rois catholiques (détail)
Celui qui y descend a  l'impression de devoir interpréter à lui tout seul le drame d'une  famille royale, ou se croit obligé pour le moins de prendre un air  aristocratique pour sortir par le portail plateresque; gothique,  Renaissance, baroque, tous conflue dans cet édifice(...) Une fois qu'ils  l'ont dépassé, ils se trouvent devant l'une des plus belles places du  monde. Dans leur dos les troublantes richesses de leur "auberge"  temporaire...
A droite  le palacio de Rayoy, classique et sévère 
De l'autre côté de la façade vide pavée, l'archaïque colegio de San Jeronimo, vaste aire de granit entre joyaux de granit..
La cathédrale : Bien  que les énormes grilles de la cathédrale fussent fermées, je savais ce  qu'il y avit à voir là-haut, derrière les portes également fermées et  les façades baroques s'envolant vers le ciel, je savais qu'à  l'intérieur, on traversait une grotte pleine de sculptures et que, parmi  toutes ces figures de granit rose, il en était une que je verrai la  première après avoir posé ma main dans la main absente, c'était celle de  Daniel souriant, parce que de ce sourire presque idiot on croirait voir  s'ouvir une ère nouvelle.
 le portail de la façade Est
le portail de la façade Est est baroque,
 
Le portail Sud est roman
Dans la lumière blafarde  j'avais contemplé les sculptures du portail sud. Dieu créait toujours un  Adam au visage grave, le roi David tenait toujours son archet sur les  cordes de sa harpe qui ressemblait à un luth. Pas un seul des plis de  son manteau royal n'était déplacé, du cou à ses chevilles, ils  retombaient, telles des vaguelettes se pourchassant vers les étroits  pieds croisés. Le Christ avec sa couronne médiévale et les yeux aveugles  d'un Dieu grec, la femme adultère  à la tête trop grosse, aux cheveux  de Gorgone, aux petits seins ronds, et la contradiction avec la tête de  mort sur son giron, tous étaient au rendez-vous et attendaient - moi  avec eux - que le roi se mît à jouer de la harpe dans une autre vie, un  autre millénaire, plus tard, un jour, quand le monde n'aura toujours pas  disparu et que nous reviendrons sous la forme de quelqu'un que nous ne  reconnaîtrons pas nous-mêmes.

 portail roman (détails)
 
Adam et Eve
Le roi David