Le roman de Stef Penney La tendresse des loups commence comme un roman policier avec la découverte du cadavre de Laurent Jammet, un trappeur affreusement mutilé, dans une cabane du village de Dove River en Nouvelle-Ecosse. C’est madame Ross, émigrée avec son mari des Highlands d’Ecosse, qui l’a découvert. Les envoyés de la compagnie de la Baie d’Hudson dont le jeune Donald Moody mènent l’enquête qui s’oriente vers deux suspects : Parker, un trappeur indien, qui était en relation commerciale avec Jammet et qui est fait prisonnier, et le fils adoptif des Ross, le jeune Francis, qui a disparu le même jour. Madame Ross est persuadée de l'innocence de Francis. Elle s’inquiète pour lui et lorsque Parker qui est parvenu à s’enfuir lui demande de l’accompagner, elle n’hésite pas. Tous deux partent dans la forêt et vont affronter les dangers, les difficultés, les souffrances d’un voyage dans un pays où les grands espaces, les forêts touffues, le froid, la neige et la faim, sont autant d’épreuves que seule l’expérience de l’indien Parker leur permet de surmonter.
Le roman devient donc un récit d’aventure, une histoire de survie où le courage, la force morale et physique et la volonté animent des personnages au caractère bien trempé. Mais la tendresse des loups est aussi une page d’Histoire - Nous sommes en 1867 - et raconte le voyage, l’installation des émigrés écossais dans ce pays où tout est à faire, défricher, bâtir des maisons, et même donner des noms à ces lieux inhabités.
La tendresse des loups est raconté à la première personne par Mrs Ross en alternance avec des passages rapportés à la troisième personne par un autre narrateur. Nous faisons connaissance avec les autres habitants du village, comme le Pasteur Knox et sa famille, ses filles, la belle Suzanna et l’intellectuelle Maria. Les mentalités, les grandeurs et les faiblesses de ces pionniers apparaissent. Nous apprenons le fonctionnement des Compagnies qui font le commerce des fourrures, leur rivalité entre elles, leur attitude avec les indiens qu’ils poussent à boire pour assurer leur hégémonie; d’autres thèmes apparaissent encore, la disparition déjà lointaine et mystérieuse de deux jeunes filles qui devient une sorte de légende, l’homosexualité condamnée sévèrement et qui exclut de la communauté. Et puis il y a les loups mais contre toute attente étant donné le titre, ils restent très secondaires !
Malgré tous ces aspects variés et la richesse de son propos, j’ai mis un moment à entrer dans le roman, car le récit est entièrement au présent de narration que, personnellement, je trouve un peu agressif. Le style est sec, énergique et efficace, certes, mais peu descriptif et manque de poésie surtout pour un roman parlant de la nature. Il ne m’a pas accrochée de prime abord. Et puis les personnages sont durs, à l’image du pays, et il faut le temps de les connaître pour les apprécier. Ce que j’ai fini par faire ! Progressivement, je me suis laissée entraîner par l’histoire et sans être un coup de coeur, La tendresse des loups m’a paru un bon roman, maîtrisé, complexe et intéressant.
Stef Penney est née et a grandi à Édimbourg. Après un diplôme de philosophie et de théologie de l’université de Bristol, elle entreprend des études de cinéma. Elle a déjà écrit et réalisé deux films. La Tendresse des loups, son premier roman, a été récompensé du prestigieux prix Costa Award pour la meilleure première œuvre, ainsi que pour le meilleur roman. (10/18)
Lu pour le challenge Le Pavé de l’été de Sur mes Brizées : 600 pages éditions 10/18