Avec Le testament du magicien ténor, je lis pour la première fois un livre de César Aria, un des grands noms de la littérature argentine.
L'histoire? Un magicien suisse à la retraite vend ses tours de magie l'un après l'autre pour vivre mais sentant sa mort prochaine, il décide de léguer son dernier tour, le plus extraordinaire, - celui qui lui permet de monter et de descendre en même temps un escalier- à Boudha l'Eternel. Le président Hoffman qui est l'exécuteur testamentaire confie le secret enfermé dans une enveloppe scellée à Jean Ball, un jeune avocat. Celui-ci part immédiatement en Inde où vit Boudha l'Eternel, un petit être minuscule, avec l'énigmatique madame Gohu, sa gouvernante. Sur le bateau, Jean Ball a une liaison avec Palmyra, brillante étudiante indienne, qui retourne chez elle à Bombay. Que va-t-il se passer en Inde?
A cette question, j'avoue ma surprise car rien ne se passe comme je l'attends. J'ai l'impression d'être non seulement en face d'un anti-héros mais aussi d'un anti-roman qui part dans des directions si étranges que l'action a l'air de se défaire au lieu de se faire. Par exemple, le lecteur s'attend à ce que Jean Ball rencontre le Boudha; il s'attend aussi à ce que l'on reparle du tour de magie qui l'intrigue et le ferait entrer dans une dimension fantastique car il ne s'agit de rien de moins que de se rendre maître du temps. Si l'on peut monter et descendre un escalier en même temps, n'accède-t-on pas à l'immortalité? Et bien non, ces pistes ne débouchent sur rien! L'histoire d'amour tourne court; la découverte de l'Inde aussi, malgré la visite de Bombay, car le "héros" s'enfuit après trois jours passés dans ce pays! Je vous l'ai dit, un anti-roman!
Voilà un livre qui me déroute totalement à sa lecture! La langue en est simple, belle, élégante, mais je n'ai pas la clef pour entrer dans cette oeuvre. Les nombreuses critiques de presse sont unanimes pour en célébrer la grandeur, soulignant surtout sa portée onirique… sans donner d'autres pistes. Moi, j'y ai vu pourtant une bonne dose de réalisme, surtout dans la description de la vie de Boudha et de sa gouvernante qui fricote avec des trafiquants de drogue et la dénonciation du capitalisme qui apparaît dans toute son horreur! Celui-ci fait irruption dans ce qui devait être une aventure spirituelle sous la forme d'une multinationale la Brain Force qui exploite l'image de Boudha de la manière la plus lamentable : autocollants, chocolats, sirop contre la toux, lanternes, amulettes … et romans populaires à deux sous qui racontent les aventures fictives de Boudha L'Eternel!
Finalement, la clef m'a été donnée par une interview de l'auteur sur France-inter qui m'a permis de comprendre que j'abordais mal ce roman, dans un esprit trop rationaliste : César Aira se réclame, en effet, du surréalisme et du dadaïsme dans lesquels il puise : " L’invention, la liberté, une certaine irresponsabilité, la possibilité de faire tous les arts sans faire aucune de façon professionnelle. "
Ainsi, si vous arrivez comme je l'ai fait avec des idées toutes faites et une idée traditionnelle de l'art romanesque vous risquez bien de passer à côté. César Aira déclare, en effet, qu'il n'a aucune intention précise quand il commence un roman :
"Je crois qu’il est inutile de l’avoir parce que l’écriture se moque des intentions, surtout dans mon cas, parce que j’écris en improvisant et je ne sais jamais ou me mènera l’imagination. Dans ce livre du Magicien Ténor, l’idée initiale était celle d’un magicien qui invente un tour de magie très spécial : monter et descendre une escalier en même temps. Quoi faire avec ce tour merveilleux ? Qui mériterait de connaître son secret ? Ainsi a commencé le voyage, qui m’a mené très loin."
Enfin, j'ai lu une belle analyse du roman par Matthieu Hervé dans Paper blog que je vous conseille parce que cet article m'a vraiment fait comprendre la démarche de l'écrivain mais aussi ce que doit être celle du lecteur. L'illusion étant au centre de l'oeuvre, il ne faut pas entrer dans ce roman avec des idées établies, à la recherche de réponses qui de toutes façons s'infirment toutes :
"Impossible pour le lecteur d'anticiper une direction." Il faut donc "comme devant un spectacle d'illusionniste, (..) se laisser aller à l'étonnement, celui des couleurs et des paysages, de la Suisse et de l'Inde, des aventures rocambolesques, absurdes ou romantiques, de l'apparition de créatures étranges et amusantes, ou de lieux propices aux considérations philosophiques.
Tout le contraire de ce que j'ai fait en lisant ce livre! Il me reste donc à me laisser aller à mon imagination si je veux aimer César Aira.
En savoir plus sur http://www.paperblog.fr/7133842/le-maitre-des-illusions-cesar-aira-le-testament-du-magicien-tenor-christian-bourgois-trad-marta-martinez-valls-par-matthieu-herve/
http://www.franceinter.fr/depeche-salon-du-livre-les-argentins-invites-et-les-absents
L'histoire? Un magicien suisse à la retraite vend ses tours de magie l'un après l'autre pour vivre mais sentant sa mort prochaine, il décide de léguer son dernier tour, le plus extraordinaire, - celui qui lui permet de monter et de descendre en même temps un escalier- à Boudha l'Eternel. Le président Hoffman qui est l'exécuteur testamentaire confie le secret enfermé dans une enveloppe scellée à Jean Ball, un jeune avocat. Celui-ci part immédiatement en Inde où vit Boudha l'Eternel, un petit être minuscule, avec l'énigmatique madame Gohu, sa gouvernante. Sur le bateau, Jean Ball a une liaison avec Palmyra, brillante étudiante indienne, qui retourne chez elle à Bombay. Que va-t-il se passer en Inde?
A cette question, j'avoue ma surprise car rien ne se passe comme je l'attends. J'ai l'impression d'être non seulement en face d'un anti-héros mais aussi d'un anti-roman qui part dans des directions si étranges que l'action a l'air de se défaire au lieu de se faire. Par exemple, le lecteur s'attend à ce que Jean Ball rencontre le Boudha; il s'attend aussi à ce que l'on reparle du tour de magie qui l'intrigue et le ferait entrer dans une dimension fantastique car il ne s'agit de rien de moins que de se rendre maître du temps. Si l'on peut monter et descendre un escalier en même temps, n'accède-t-on pas à l'immortalité? Et bien non, ces pistes ne débouchent sur rien! L'histoire d'amour tourne court; la découverte de l'Inde aussi, malgré la visite de Bombay, car le "héros" s'enfuit après trois jours passés dans ce pays! Je vous l'ai dit, un anti-roman!
Voilà un livre qui me déroute totalement à sa lecture! La langue en est simple, belle, élégante, mais je n'ai pas la clef pour entrer dans cette oeuvre. Les nombreuses critiques de presse sont unanimes pour en célébrer la grandeur, soulignant surtout sa portée onirique… sans donner d'autres pistes. Moi, j'y ai vu pourtant une bonne dose de réalisme, surtout dans la description de la vie de Boudha et de sa gouvernante qui fricote avec des trafiquants de drogue et la dénonciation du capitalisme qui apparaît dans toute son horreur! Celui-ci fait irruption dans ce qui devait être une aventure spirituelle sous la forme d'une multinationale la Brain Force qui exploite l'image de Boudha de la manière la plus lamentable : autocollants, chocolats, sirop contre la toux, lanternes, amulettes … et romans populaires à deux sous qui racontent les aventures fictives de Boudha L'Eternel!
Finalement, la clef m'a été donnée par une interview de l'auteur sur France-inter qui m'a permis de comprendre que j'abordais mal ce roman, dans un esprit trop rationaliste : César Aira se réclame, en effet, du surréalisme et du dadaïsme dans lesquels il puise : " L’invention, la liberté, une certaine irresponsabilité, la possibilité de faire tous les arts sans faire aucune de façon professionnelle. "
Ainsi, si vous arrivez comme je l'ai fait avec des idées toutes faites et une idée traditionnelle de l'art romanesque vous risquez bien de passer à côté. César Aira déclare, en effet, qu'il n'a aucune intention précise quand il commence un roman :
"Je crois qu’il est inutile de l’avoir parce que l’écriture se moque des intentions, surtout dans mon cas, parce que j’écris en improvisant et je ne sais jamais ou me mènera l’imagination. Dans ce livre du Magicien Ténor, l’idée initiale était celle d’un magicien qui invente un tour de magie très spécial : monter et descendre une escalier en même temps. Quoi faire avec ce tour merveilleux ? Qui mériterait de connaître son secret ? Ainsi a commencé le voyage, qui m’a mené très loin."
Enfin, j'ai lu une belle analyse du roman par Matthieu Hervé dans Paper blog que je vous conseille parce que cet article m'a vraiment fait comprendre la démarche de l'écrivain mais aussi ce que doit être celle du lecteur. L'illusion étant au centre de l'oeuvre, il ne faut pas entrer dans ce roman avec des idées établies, à la recherche de réponses qui de toutes façons s'infirment toutes :
"Impossible pour le lecteur d'anticiper une direction." Il faut donc "comme devant un spectacle d'illusionniste, (..) se laisser aller à l'étonnement, celui des couleurs et des paysages, de la Suisse et de l'Inde, des aventures rocambolesques, absurdes ou romantiques, de l'apparition de créatures étranges et amusantes, ou de lieux propices aux considérations philosophiques.
Tout le contraire de ce que j'ai fait en lisant ce livre! Il me reste donc à me laisser aller à mon imagination si je veux aimer César Aira.
En savoir plus sur http://www.paperblog.fr/7133842/le-maitre-des-illusions-cesar-aira-le-testament-du-magicien-tenor-christian-bourgois-trad-marta-martinez-valls-par-matthieu-herve/
http://www.franceinter.fr/depeche-salon-du-livre-les-argentins-invites-et-les-absents
Merci à Dialogues croisés et aux Editions Christian Bourgois
chez Eimelle |