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mardi 5 juillet 2011

Festival Danse de Marseille 2011 (2) : Akram Khan


Vertical Road de Akram Khan

Autant le dire tout de suite, je connais mal la danse contemporaine. Mes connaissances s'arrêtent à Elvin Ailey, autrement dit aux années 1970-80. Le festival de Marseille a donc été l'occasion pour moi de découvrir des artistes de premier plan. Akram Khan en fait parti. Chorégraphe anglo-blangadais, il allie les techniques contemporaines à la danse traditionnelle de l'Inde du Nord, le Kathatk. Dans Vertical Road il doit beaucoup au poète et philosophe persan Roumi. Akram Khan y explore le difficile chemin que doit parcourir l'âme pour accéder à la spiritualité.


 Le ballet est d'une virtuosité étonnante, puissante, violente même. Les danseurs semblent dotés d'une énergie décuplée par le rythme musique. Ils tournoient, scandent avec force la musique de leurs pieds, bondissent, se préparant à l'envol mais retombent sur le sol, le corps écartelé par la douleur. Sur la scène se livre un étrange lutte comme si ces âmes en souffrance étaient retenus sur le sol, empêchées. Mais quel est cet étrange personnage qui semble tour à tour les guider et les empêcher de continuer leur route? Peut-être un ange puisque, nous dit-on, Akram Khan s'inspire de la présence des anges dans différentes légendes? Mais est-ce l'Ange du Bien ou du Mal car il semble dominer les âmes, les contraindre à l'obéissance et la silhouette athlétique le rattache à la matérialité de la terre. Parfois la révolte gronde, l'un d'entre eux se lève pour s'opposer à lui, des mains s'agrippent pour le retenir. Mais toujours, il reprend le dessus jusqu'au moment, où les âmes trouvent leur voie et passent de l'autre côté, un au-delà matérialisé sur scène par un immense rideau blanc tendu entre les Mondes. Cette frontière transcendée par des jeux de lumière sublimes laissent apparaître par transparence les silhouettes et, à la fin du ballet, les mains de ceux qui sont passés de l'autre côté comme pour un dernier adieu. Un magnifique tableau.

Comment se fait-il pourtant que malgré l'admiration éprouvée à la fois pour les danseurs virtuoses, la scénographie éblouissante et la puissance de la chorégraphie, je n'ai pas été entièrement prise par ce spectacle?  Je crois que je me suis posée trop de questions. Or, je n'étais pas certaine de bien interpréter ce que je voyais. Ainsi au début du ballet, les danseurs se lèvent secouant de leur vêtements une fine poudre blanche qui forme comme une brume autour d'eux. J'y ai vu les morts du jugement dernier soulevant la poussière de leur tombeau. Mais à chercher des explications, on laisse de côté l'émotion. Et c'est dommage! J'ai parfois eu l'impression de longueurs et de redites. Peut-être aussi ne suis-je pas assez mystique pour apprécier pleinement? Bref! j'ai vraiment eu conscience d'être devant un grand chorégraphe mais d'avoir partiellement raté la rencontre! C'est pourquoi j'aimerais vraiment voir d'autres ballets de Akram Khan.



La connaissance du poète persan Rumi doit ouvrir les portes de la compréhension de ce ballet. Voici un extrait d'un poème trouvé sur le net.

I died from minerality and became vegetable;
And from vegetativeness I died and became animal.
I died from animality and became man.
Then why fear disappearance through death?
Next time I shall die
Bringing forth wings and feathers like angels;
After that, soaring higher than angels -
What you cannot imagine,
I shall be that.

Sophie Loubière : L'enfant aux cailloux


Etrange personnage cette Elsa du roman de Sophie Loubière, L'enfant aux cailloux. Fillette, elle voyait le fantôme de sa mère s'asseoir sur son lit, jeune femme exaltée et emportée, elle chasse Gérard, son mari qui ne s'occupe pas assez d'elle et reste seule avec son fils, Martin. Quand elle devient grand mère, elle ne se conduit pas plus raisonnablement envers son petit fils Bastien. Et cela ne s'améliore pas par la suite. Agée, elle vit dans la vieille maison familiale, continue à voir des fantômes, affiche un sacré caractère, empoisonne la vie de son fils devenu médecin, pourtant bien dévoué à sa folle de mère. Présentement, elle surveille la maison d'à côté où jouent les enfants des voisins, les Desmoulins; la  petite Laurie s'amuse avec son jeune frère, Kévin et plus loin, toujours à l'écart, un enfant joue avec des cailloux; il paraît malade. Elsa, ancienne directrice d'école ne s'y trompe pas, ce petit garçon souffre de maltraitance. Elle alerte les services sociaux, la police. Oui, mais pour les autorités les Desmoulins n'ont que deux enfants. Le troisième mentionné par Elsa n'existe pas. Alors Elsa, prête à tout pour sauver le gamin, part en guerre!

Etrange livre aussi. Mon esprit cartésien a d'abord été malmené dans les premiers chapitres. J'ai commencé par ne rien y comprendre! Je trouvais l'histoire décousue et pour cause! Sophie Loubière nous présente la vie d'Elsa par de grands flashs sur des moments clefs de sa vie. Mais ces épisodes ne sont pas totalement éclairés, certains aspects restent donc inexpliqués et nous nous interrogeons sur ce qu'a voulu montrer l'auteur. Ce survol est en accéléré jusqu'au moment où commence le récit proprement dit, c'est à dire quand la vieille femme rentre chez elle après une longue absence et découvre le petit garçon maltraité. Mais rassurez-vous, peu à peu toutes les pièces se mettent en place et nous aurons la réponse... au dénouement, l'écrivain ménageant le suspense jusqu'au bout! Jusqu'au bout, oui! nous nous interrogerons sur ce petit bout de femme pas commode en nous demandant si elle est folle à lier ou simplement étrange et visionnaire? A vous de le découvrir ! Un bon suspense!

 Merci à la librairie Dialogues croisés et aux éditions du Fleuve noir