Avec L’art de perdre, Alice Zeniter, écrit un livre sensible, intelligent, qui explore toute la complexité de l’avant et de l’après-guerre d'Algérie en introduisant l’humain, à travers les membres d’une famille algérienne qui a vécu les évènements.
Le récit d'Alice Zeniter ne se départit jamais d'un ton calme, sans ressentiment et sans haine. Il s'agit de comprendre, non de juger ! J'ai beaucoup aimé aussi son rapport aux mots, à leur origine, à leur
sens mais aussi à leur impact parfois redoutable comme une blessure.
Ce beau livre me rappelle bien des souvenirs. J’étais enfant puis adolescente pendant la guerre d’Algérie et dans notre quartier l’on voyait partir des jeunes français qui n’en avait rien à faire de l’Algérie Française mais qui devait se battre au nom d’un idéal qui n’était pas le leur, le colonialisme. Je me souviens encore du jeune homme qui n’est jamais revenu et de cette foutue guerre qui n’en finissait pas, menaçant mon frère aîné d’un départ vers… là-bas ! Je me souviens aussi qu’après la guerre, le mot "harki" résonnait péjorativement en France, synonyme, me semblait-il alors, de "traître" à leur pays. Beau remerciement de la France pour laquelle ils avaient combattu et qui les parquaient maintenant dans des camps insalubres ! Mais de cela, je n’en étais pas vraiment consciente à l’époque ! Je me souviens des attentats de l’OAS, je me souviens aussi de la longue interdiction du film J’avais vingt ans dans les Aurès et de la chape de silence qui régnait alors en France quant à cette guerre. Mais là ce sont des souvenirs côté français !
Aussi le roman d’Alice Zeniter qui présente par l’intérieur le vécu des Algériens me paraît passionnant, lucide et aussi utile sinon indispensable. En contant la saga familiale qui commence avec le grand-père Ali, montagnard kabyle, devenu « harki » un peu malgré lui, de sa grand-mère Yema, de Hamid son père déraciné en 1962, Naïma, la jeune narratrice (mais l’on se doute, bien sûr, qu’elle est la soeur fictive d’Alice), nous fait prendre conscience de la douloureuse odyssée vécue par cette famille. C’est autre chose de le savoir intellectuellement et de le vivre par l’intérieur, en empathie. Les personnages sont vivants, complexes dans leurs hésitations, leurs atermoiements vis à vis de l’Algérie et de la France. On s’intéresse à leurs sentiments, mais aussi à leurs mentalités, leurs manières de vivre, de penser, leurs peurs et leurs souffrances. On apprend à les connaître dans leur vie algérienne puis, lorsqu’ils sont en France, dans leur lutte pour survivre aux logements sordides, au froid, à la pauvreté, au mépris des français et dans leurs efforts pour une vie meilleure. Est-ce cela l’art de perdre ?
Je me suis vraiment intéressée à la quête de Naïma, à la recherche de ses ancêtres, à son voyage en Algérie pour retourner sur leurs traces et qui montre combien les algériens subissent eux aussi, à l’heure actuelle, les pressions et les dangers du terrorisme islamique.
De plus, tout en éclairant le passé, Naïma-Alice montre les blessures que celui-ci a creusées et les répercussions qu’il a sur le présent sur la jeunesse française.
Un très bon roman, à lire à la fois pour plaisir de la lecture et pour le désir d'en savoir plus sur une page bien sombre de l'histoire française.
Ce beau livre me rappelle bien des souvenirs. J’étais enfant puis adolescente pendant la guerre d’Algérie et dans notre quartier l’on voyait partir des jeunes français qui n’en avait rien à faire de l’Algérie Française mais qui devait se battre au nom d’un idéal qui n’était pas le leur, le colonialisme. Je me souviens encore du jeune homme qui n’est jamais revenu et de cette foutue guerre qui n’en finissait pas, menaçant mon frère aîné d’un départ vers… là-bas ! Je me souviens aussi qu’après la guerre, le mot "harki" résonnait péjorativement en France, synonyme, me semblait-il alors, de "traître" à leur pays. Beau remerciement de la France pour laquelle ils avaient combattu et qui les parquaient maintenant dans des camps insalubres ! Mais de cela, je n’en étais pas vraiment consciente à l’époque ! Je me souviens des attentats de l’OAS, je me souviens aussi de la longue interdiction du film J’avais vingt ans dans les Aurès et de la chape de silence qui régnait alors en France quant à cette guerre. Mais là ce sont des souvenirs côté français !
Aussi le roman d’Alice Zeniter qui présente par l’intérieur le vécu des Algériens me paraît passionnant, lucide et aussi utile sinon indispensable. En contant la saga familiale qui commence avec le grand-père Ali, montagnard kabyle, devenu « harki » un peu malgré lui, de sa grand-mère Yema, de Hamid son père déraciné en 1962, Naïma, la jeune narratrice (mais l’on se doute, bien sûr, qu’elle est la soeur fictive d’Alice), nous fait prendre conscience de la douloureuse odyssée vécue par cette famille. C’est autre chose de le savoir intellectuellement et de le vivre par l’intérieur, en empathie. Les personnages sont vivants, complexes dans leurs hésitations, leurs atermoiements vis à vis de l’Algérie et de la France. On s’intéresse à leurs sentiments, mais aussi à leurs mentalités, leurs manières de vivre, de penser, leurs peurs et leurs souffrances. On apprend à les connaître dans leur vie algérienne puis, lorsqu’ils sont en France, dans leur lutte pour survivre aux logements sordides, au froid, à la pauvreté, au mépris des français et dans leurs efforts pour une vie meilleure. Est-ce cela l’art de perdre ?
Je me suis vraiment intéressée à la quête de Naïma, à la recherche de ses ancêtres, à son voyage en Algérie pour retourner sur leurs traces et qui montre combien les algériens subissent eux aussi, à l’heure actuelle, les pressions et les dangers du terrorisme islamique.
De plus, tout en éclairant le passé, Naïma-Alice montre les blessures que celui-ci a creusées et les répercussions qu’il a sur le présent sur la jeunesse française.
Un très bon roman, à lire à la fois pour plaisir de la lecture et pour le désir d'en savoir plus sur une page bien sombre de l'histoire française.
