L’île des chasseurs d’oiseaux est le premier livre de la trilogie écossaise de Peter May. C’est le seul des trois que j’ai lu pour l’instant.
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L'île de Lewis et Harris (source) |
L’inspecteur Fin MCleod travaille à Edimbourg mais il est envoyé dans son île natale de Lewis, au nord de l’Ecosse, car un meurtre vient d’y être commis. C’est l’occasion pour Fin de revoir les lieux où il a passé son enfance, de rencontrer des gens qui ont fait partie de sa vie, camarades d’école, premier amour, de se remémorer ses parents aimants, morts trop tôt, et la tante qui l’a élevé. Tous ces souvenirs assaillent l’inspecteur mais le souvenir le plus fort et le plus mystérieux a trait à une coutume de l’île Lewis. Les hommes se rendent chaque année sur l’îlot rocheux de An Sgeir pour tuer des milliers d’oiseaux nouveaux-nés (guga en gaélique) qui nichent sur les falaises.
Un voyage périlleux et dangereux qui constitue pour les adolescents une sorte de rite de passage initiatique. Mais Fin, lui, ne se souvient pas avec exactitude de ce qui s’est passé sur l’îlot quand il y est allé sinon qu’il y a eu mort d’homme, le père de son meilleur ami. Parallèlement à l’enquête policière, c’est une plongée dans la mémoire qui est ainsi menée et qui va révéler un pan tragique de sa vie occulté.
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Les chasseurs de gugas (fous de Bassan)(source) |
J’ai beaucoup aimé l’ambiance de ce roman dont la force tient dans la description de cette île qui a, certes, peut-être un peu évolué depuis l’enfance de Fin dans les années 70 mais qui est pourtant sensiblement la même. Attachés à ses traditions et à la langue gaélique, marqués par un religion austère, façonnés par le climat et leur travail (la terre ou la mer) les habitants de cette île sont des personnages rudes. Les jeunes gens ne rêvent qu’à une chose : quitter l’île comme l’a fait Fin Mcleod en son temps !
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Ilot rocheux de Sgeir (source) |
Peter May révèle une puissance d’écriture certaine quand il entreprend le récit de la chasse aux oiseaux sur l’îlot de An Sgeir. Il y a dans le sacrifice des Fous de Bassan, dans le sang versé, les dangers partagés, la cadence infernale, la longueur de l'épreuve (deux semaines) une sorte de rite primitif ; les hommes se retrouvent soudés par une solidarité viscérale qui n’a plus rien à voir avec la raison. Cette chasse qui, jadis, obéissait à des impératifs économiques (un peuple très pauvre qui trouvait là de quoi se nourrir après un hiver rigoureux) n’est plus une nécessité. Mais elle se poursuit malgré les combats menés par les écologistes. Les hommes risquent donc leur vie gratuitement sur ces falaises suspendues au-dessus de l’océan parce que c'est la tradition et aussi, comme le dit l’un d’entre eux, « parce que personne d’autre ne le fait, nulle part dans le monde; Nous sommes les seuls ». D'autre part, tous les personnages se révèlent, au fil du roman, liés entre eux par un lourd passé dont ils ne peuvent se délivrer. Ces passages sont des grands moments du roman, assez inoubliables. Quant à l’intrigue policière proprement dite, elle est en relation avec le passé de Fin Mcleod mais je ne vous en dirai pas plus..