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samedi 16 avril 2011

Halla S. Haasse : Un long week end dans les Ardennes


Un long week-end dans les Ardennes de Hella S. Haasse, écrivain néerlandais pose le problème de la Mémoire familiale liée à la guerre et au nazisme, à l'attitude que chacun a eu face à cette idéologie raciste qui niait les principes fondamentaux de liberté et d'égalité. Ce roman met en scène des personnages singuliers dans un étrange manoir au coeur de la forêt ardennaise. Il y a Edith Waldschade, une grande pianiste, qui défend la mémoire de son père, le professeur Erik Waldschade, éminent anthropologue qu'elle admire et qui a étudié les légendes et les superstitions populaires de l'Europe du Nord, notamment en ce qui concerne les loups.. Elle-même élève trois loups dans la forêt qui entoure son domaine. Elle entretient des rapports de haine-répulsion avec sa soeur qui dirige une secte suspecte de liens avec des groupes néo-nazis, avec son beau-frère qui vit à ses crochets et joue le gentleman farmer, et sa nièce, une évaporée sans cervelle, qui ne rêve que de célébrité. C'est dans ce contexte tendu que survient un homme qui affirme être son demi-frère et dont elle ignorait jusqu'à l'existence : Erwin Waldschade. Quel est son but? Pourquoi apparaît-il après tant d'années de silence, pourquoi accuse-t-il son père? Les théories du professeur Erik Waldschade allaient-elles vraiment dans le sens de l'idéologie nazie comme le pense Erwin? Ou bien, parce qu'il s'intéressait au patrimoine culturel allemand, a-t-il été à tort considéré comme suspect de sympathie au nazisme comme le croit Edith? A l'issue de ce drame étouffant qui va se jouer en grande partie dans ce huis-clos familial, Edith va découvrir pourquoi elle a été séparée de Yon, (Jonathan Altmann) musicien comme elle, qu'elle aime toujours mais qui est parti en Israel rejoindre sa soeur et qui ne lui a plus jamais donné de ses nouvelles.
Le récit est intéressant de par la variation des points de vue entre le narrateur et deux personnages essentiels qui sont à la fois témoins et protagonistes de l'action :
Mathias  Crone, journaliste, écrit une encyclopédie sur les loups. C'est à ce titre qu'il s'intéresse à Edith Waldschade et qu'il parviendra à s'introduire dans le manoir, entrant ainsi dans l'histoire et y jouant un rôle non négligeable car il mène une enquête qui nous éclairera.
Nous découvrons Edith par les lettres qu'elle écrit à Yon, non pour les lui envoyer puisqu'elle ne sait plus rien de lui mais pour entretenir son souvenir. A travers ces lettres nous sont révélés le passé et le présent de la pianiste, ses sentiments, ses pensées intimes.
Le thème du loup est omniprésent dans l'histoire, génie tutélaire ou bête maléfique?Il est vu à travers le prisme des légendes et des superstitions et introduit une note fantastique dans le roman, en particulier avec le tableau gigantesque qui orne le mur d'une salle du château et peint le loup légendaire Fenrir en train d'avaler le soleil. Mais le symbolisme du loup est complexe. Pour le professeur Waldasche, Fenrir en avalant le soleil marque la fin de la civilisation occidentale "menacée par d'immenses flux migratoires". A cette affirmation Erwin répond :
Je partage sa conviction que cette immigration est le phénomène radical de ce siècle et probablement du suivant. Mais je le regarde d'une manière radicalement opposée. Pour moi, ce n'est pas une menace. Au contraire, je veux contribuer à ce processus migratoire, à ce mélange ethnique.
Car Erwin est le personnage clef du roman. Il est plein de ressentiment et d'aversion pour ce père qui ne l'a jamais aimé et s'est débarrassé de lui dès qu'il a pu, assumant seulement son entretien matériel. Il est persuadé que c'est pour des raisons ethniques que son père l'a repoussé ainsi. En se faisant reconnaître par ses soeurs, il vient briser l'ordre établi, troubler la  bonne conscience de cette société bourgeoise mais aussi les manipuler, jouer avec leur destin. A la fin du roman, Erwin va s'opposer à ce père disparu depuis longtemps, en prenant le contrepied : il crée un centre d'hébergement pour demandeurs d'asile, provoquant de la part des conservateurs et des groupuscules racistes des troubles sociaux.
A t-il pour autant changer l'attitude d'Edith? Cette  femme qui a toujours évité de parler à Yon de sa judaïcité, qui n'a rien voulu savoir de la famille Altmann disparue pendant l'Holocauste, qui a toujours évité de sonder le passé de son père, ne lui ressemble-t-elle pas, en fait?
Erik Waldasche confiait à sa fille pendant la guerre :
 Nous sommes à l'ère des loups, la bêtise et la malveillance ont tôt fait de placer sous un mauvais éclairage des choses bonnes en elles-mêmes. Ne rien dire est encore la meilleure manière de protéger ce qu'on pense.

Ne rien dire! C'est peut-être cela que Hella Haasse condamne, c'est ce que Erwin lui reproche à son père :
"Intervenir, oui mais sans courir de risques personnels. Jamais il n'a osé prendre parti ouvertement avant ou après la guerre. Et jamais il n'a eu une parole après la guerre pour l'holocauste.
Edith ne veut pas écouter son frère, prend congé de lui pour partir en concert. Elle se réfugie dans son art comme son père se cachait derrière ses livres et ses citations de Goethe, refusant de prendre parti. Rien n'a changé malgré le drame qui vient d'avoir lieu.

Voilà ma réponse; je n'ai  rien de plus à te dire. Les mots s'arrêtent où commence la musique. Au revoir Erwin.

Quand être breton dérange! Nouvel Observateur



Je relaie  cette information que j'ai trouvée dans le blog de Clara et je vous invite à faire de même si, comme moi, vous êtes choquée par les termes péjoratifs employés par ce journaliste du Nouvel Observateur concernant la Bretagne et les Bretons.
Il s'agit d'une critique du disque de Nolwenn Leroy qui reprend des chansons du Folklore breton. Si le journaliste s'était contenté de critiquer la qualité du disque, la voix de la chanteuse, l'orchestration, le choix des chansons... ce serait tout à fait légitime. Je ne connais pas cette chanteuse et je n'ai jamais écouté son disque, je serai donc bien en peine de me prononcer mais le débat n'est pas là! Il s'agit de tout autre chose.
Sous prétexte de faire de l'esprit, ce monsieur se livre à des plaisanteries de bas étage sur la culture bretonne. Il fait preuve d'un mépris et d'un manque d'ouverture qui nous rappelle la France de jadis, celle où l'on interdisait  aux enfants de parler leur langue maternelle à l'école. Il se fait le porte-parole passéiste d'un centralisme borné qui a l'outrecuidance de croire qu'il est le seul critère du goût et la culture. On se doute bien que la Bretagne n'est pas la seule dans le collimateur de ce journaliste, c'est la culture du "terroir" qui est visée donc de toutes les régions françaises. Comme si la France ne  s'était pas construite sur ses différences même si elle a d'abord voulu les étouffer, comme si la France ne s'enrichissait pas de ses cultures variées.
Jugez plutôt ! Je cite :
La pochette montre la chanteuse à 5 ans, en Bigouden, comme une preuve génétique de sa bretonnante traçabilité. Garantie née coiffée. Après le bébé-éprouvette, le bébé-cornette.
Nolwenn Leroy, droite dans ses sabots, s'enivre de cadastre, d'ancrage et de toponymie:
Quand elle n'inhale pas avec extase «l'odeur de la bouse mouillée», cette Finistérienne au nom si peu républicain oppose une fin de non-recevoir à l'expérience jacobine
Avec son prénom de sainte décapitée, Nolwenn affiche un pedigree de la vieille roche
Car bien entendu tout ce qui a trait à la culture des régions a quelque chose de suspect. De là à faire un amalgame  entre le foulard et la coiffe bretonne, il n'y a qu'un pas, vite franchi  :
De toute évidence, le fichu de Nolwenn se porte mieux dans l'opinion que celui de Diam's.
L'article conclut  en passant la brosse à reluire aux bretons avec une citation de Renan exaltant la "race" bretonne (pour mieux enfoncer la Normande, d'ailleurs! mais ceci est un autre sujet!): "Jamais race ne fut plus impropre à l'industrie et au commerce", ceci afin de mieux accuser la chanteuse de mercantilisme éhonté.
Autrement dit, si vous choisissez de chanter dans la langue de votre région, si vous cherchez à mettre en valeur votre  patrimoine régional, soit vous êtes en train de spéculer pour gagner du fric sur les valeurs que vous défendez, soit vous développez une forme d'intégrisme, soit vous êtes  maurrassien (à la manière du député UMP Christian jacob)  ou disons le d'un autre manière, vous flirtez avec l'extrême-droite!
Et vous êtes aussi, bien entendu, anti-mondialiste puisque la question est posée dès le début de cet article lamentable :  le terroir contre la mondialisation ?
Dans son droit de réponse , les propos de Nolwen sont clairs et dignes :
Je suis extrêmement choquée par ce procès d'intention que je trouve indigne. Comme j'estime douteux et déplacé l'emploi, pour me décrire, des termes : «preuve génétique de sa bretonnante traçabilité», «droite dans ses sabots, ivre de cadastre, d'encrage et de toponymie», «affichant un pedigree de la vieille roche» ou «premier robot de fabrication 100% bretonne».
J'ai choisi de réaliser cet album sans aucune arrière-pensée, car mon attachement à la Bretagne et à sa culture est sincère. Mon projet n'a jamais été de mettre en avant mes origines et de m'inscrire ainsi dans une mouvance protectionniste où seuls sont encensés ceux qui peuvent se targuer d'un droit du sol.
Affirmer qu'il en serait ainsi relève de la malveillance. Et prétendre que j'aurais imaginé cet album comme un «coup financier» relève de l'intention de me nuire.
Mais le journaliste récidive dans un autre article  avec la même suffisance et le même mépris.
Nous publions une petite critique espiègle sur le disque d’une chanteuse yéyé, et on nous menace d’une guerre civile et d’une extermination. N’est-ce pas beaucoup pour un loup, un renard et une belette (j’en profite pour préciser que j’ai le plus grand respect pour ces trois espèces animales)?
Mais ne vous inquiétez pas, Bretons, avec ses bons baisers de Paris, ce monsieur vous le  déclare, il vous aime ou plutôt il aime vos plages et rappelle "des évidences touristiques" et oui, c'est ainsi qu'il formule sa déclaration d'amour... en touriste! Une vision de carte postale bien superficielle, preuve que ce journaliste n'a rien compris à l'émotion et à l'indignation que son triste article suscite.
Lire Mango
Lire Wens