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samedi 20 avril 2024

Jules Verne : Le phare du bout du Monde


"Au moment où le disque solaire ne montrait plus que sa partie supérieure, un coup de canon retentit à bord de l’aviso Santa-Fé, et le pavillon de la République Argentine, se déroulant à la brise, fut hissé à la corne de la brigantine. Au même instant jaillit une vive lumière au sommet du phare construit à une portée de fusil en arrière de la baie d’Elgor, dans laquelle le Santa-Fé avait pris son mouillage.
Deux des gardiens, les ouvriers réunis sur la grève, l’équipage rassemblé à l’avant du navire, saluaient de longues acclamations le premier feu allumé sur cette côte lointaine.
Deux autres coups de canon leur répondirent, plusieurs fois répercutés par les bruyants échos du voisinage. Les couleurs de l’aviso furent alors amenées, conformément aux règles des bâtiments de guerre, et le silence reprit cette Île des États, située au point où se rencontrent les eaux de l’Atlantique et du Pacifique."


C’est ainsi que, dans le roman de Jules Verne, s’allument les premiers feux du Phare du Bout du Monde dans l’île aux Etats où Jules Vernes place son récit. L'écrivain situe l'action en 1859 mais il prend pour modèle le phare de San Juan del Salvamento édifié en 1884 par la République argentine et qui fut remplacé en 1902 par le Phare Nuevo mieux situé.

L’île des Etats et le phare du Bout du Monde

 

Le phare du Bout du Monde

Le roman commence au mois de décembre, au début de la belle saison, et trois gardiens restent sur place pour veiller au bon fonctionnement du phare. Vasquez est le chef. Un peu plus âgé que ses compagnons, Felipe et  Moriz, Vasquez est doté d’une solide expérience, d’un bon sens et d’une bonhomie souriante. Ils savent tous trois que rester seuls pendant trois mois avant la relève, sur une île aussi isolée, ne va pas être de tout repos. Mais le phare est un asile solide, les provisions sont abondantes,  et ils sont motivés par leur mission qui est de sauver des vies humaines, la navigation étant extrêmement dangereuse dans ces eaux houleuses, hérissées d’écueils, en proie à  de violentes et soudaines tempêtes.

"La tour était d'une extrême solidité, bâtie avec les matériaux fournis par l'île des États. Les pierres d'une grande dureté, maintenues par des entretoises de fer, appareillées avec une grande précision, emboîtées, les unes dans les autres à queue d'aronde, formaient une paroi capable de résister aux violentes tempêtes, aux ouragans terribles qui se déchaînent si fréquemment sur cette lointaine limite des deux plus vastes océans du globe. Ainsi que l'avait dit Vasquez, le vent ne l'emporterait pas, cette tour."

Jules Verne nous explique le fonctionnement d’un phare à cette époque :

" La lanterne était donc munie de lampes à double courant d’air et à mèches concentriques. Leur flamme, produisant une intense clarté sous un petit volume, pouvait dès lors être placée presque au foyer même des lentilles. L’huile leur arrivait en abondance par un système analogue à celui des Carcel. Quant à l’appareil dioptrique disposé à l’intérieur de la lanterne, il se composait de lentilles à échelons, comprenant un verre central de forme ordinaire, qu’entourait une série d’anneaux de médiocre épaisseur et d’un profil tel que tous se trouvaient avoir le même foyer principal. Dans ces conditions, le faisceau cylindrique de rayons parallèles produit derrière le système de lentilles était transmis au dehors dans les meilleures conditions de visibilité. "

Il nous fait découvrir cette île inhabitée aux côtes déchiquetées, où les plaines du centre cèdent la place vers l’ouest à des hautes falaises et à des pics escarpés qui rendent la circulation dans l’île difficile.


Une histoire de pirates


 Cependant, si les deux premiers chapitres nous décrivent le départ de l'aviso La Santa Fé, l’installation de Vasquez et ses collègues et posent le cadre du récit, la description du travail et de la vie des gardiens va être de courte durée car c’est un récit d’aventures que Jules Verne nous propose et assez haut en couleurs !  Rapidement nous nous apercevrons que l’île n’est pas aussi inhabitée qu’il le paraît !
Le troisième chapitre intitulé La Bande Kongre nous présente des pirates qui ont fait naufrage sur l’île et attendent de pouvoir mettre la main sur un bateau pour repartir. Pendant la durée de construction du phare, ils ont vécu cachés dans une caverne entassant les provisions et les richesses des navires naufragés. Quand ils parviennent à prendre possession d’un bateau échoué encore en état de naviguer mais nécessitant des réparations, ils décident de s’installer à l’abri dans la baie d’Elgor,  d’attaquer les gardiens et de s'emparer du phare. Désormais les chapitres vont présenter en alternance les agissements des pilleurs d’épave qui sont aussi des naufrageurs et la résistance de Vasquez.   

Une leçon de navigation

Un trois-mâts


Si l’on apprend relativement peu de la vie dans un phare, par contre les pirates qui sont d’excellents navigateurs nous en apprennent beaucoup sur la navigation dans des eaux tumultueuses et sur les types de bateaux de l’aviso, le bateau de guerre qui assure la relève et est prêt à intervenir avec ses canons, à la Goélette, la Maule, que vont réparer les pirates : 

 "Dans cette position, on voyait son pont depuis le gaillard d’avant jusqu’au rouf de l’arrière. Sa mâture était intacte, mât de misaine, grand mât, beaupré, avec leurs agrès, ses voiles à demi carguées, sauf la misaine, le petit cacatois et la flèche qui avaient été serrés."

au  trois-mâts, aux baleiniers, aux steamers qui passent devant l'île ou s'y échouent.
 

"Le premier était un steamer anglais venant du Pacifique, qui, après avoir remonté le détroit de Lemaire, s’éloignait, cap au nord-est, probablement à destination d’un port d’Europe. Ce fut en plein jour qu’il passa à la hauteur du cap San Juan.
Le second navire était un grand trois mâts dont on ne put connaître la nationalité. La nuit commençait à se faire, lorsqu’il se montra à la hauteur du cap San Juan pour longer la côte orientale de l’île jusqu’à la pointe Several. "



Un vocabulaire riche sur les parties du navire : 

"Les lames avaient tout saccagé. Elles avaient arraché les planches du pont, démoli les cabines de la dunette, brisé les gaillards, démonté le gouvernail, et le choc sur les récifs avait achevé l’oeuvre de destruction."


"Il vint alors examiner la carène du côté du large. Le bordé ne paraissait pas avoir souffert. L’étrave, un peu enfoncée dans le sable, semblait intacte, de même l’étambot, et le gouvernail adhérait toujours à ses ferrures."

"Dans toute la portion comprise entre l’étrave et l’emplanture du mât de misaine, aucune avarie ne fut
constatée. Varangues, membrure, bordé étaient en bon état; chevillés en cuivre, ils ne se ressentaient pas du choc de l’échouage sur le banc de sable"
 

sur les voiles  "On hissa la trinquette et le foc… »  « Carcante fit établir  la misaine, la brigantine qui est la grande voile dans le gréement d’un goélette, puis hisser le hunier à bloc. "


 

 Henri Paasch, Illustrated Marine Encyclopedia, 1890, croquis de la poupe. 1. quille ; 2. aileron ; 3. massif d'étambot / courbe d'étambot ; 4. étambot ; 5. garniture pour bois ; 6. petites barres d'arcasse ou barres de contre-arcasse ou contre-lisses ; 7. barre d'hourdi, lisse de hourdi ou grande barre d'arcasse ; 8. jaumière ; 9. allonge de poupe (voûte) ; 10. bord (voûte) ; 11. apôtre d'étambot ; 12. jambette de voûte ; 13. allonge de côté (voûte) ; 14. couples de l'arrière ; 15. estain ; 16. couples dévoyés ou élancés ; 17. Couples droits.

 Un étambot : Partie du navire qui continue la quille à l'arrière et où se trouve le gouvernail.

 

La varangue (16) fait la jonction entre la quille (9) et les couples(14)

Une varangue est une des pièces de charpente d'un bateau, servant, dans les fonds, de liaison transversale entre la quille et les deux couples de chaque côté, à la base de la coque1.( wikipedia)

Bref ! Un livre qui entre très bien dans la thématique de Book Trip en mer.

 

 


 

vendredi 29 mars 2024

Brandon Sanderson : Tress de la mer émeraude


 

Tress de la mer d'émeraude est un livre de  Brandon Sanderson, le premier des quatre romans secrets écrits par l'auteur pendant la pandémie de covid19.

Tress vit sur un rocher, une île exiguë que la pierre noire rend plutôt lugubre. Seuls les marins qui déchargent les marchandises lui laissent entrevoir d’autres horizons, les lunagrées, dont les douze lunes de couleurs différentes sont vénérées comme des déesses par les habitants du pays.
La jeune fille vit dans la lunagrée verdoyante, celle qui déverse des spores vertes, ( mortelles au contact de l’eau), celles-ci formant l’océan de la même couleur. Un océan de spores ! La vie est monotone sur l’île mais Tress, petite fille humble, effacée et sage, simple laveuse de vitres, s’en accommode.  N’a-t-elle pas pour ami, le "jardinier" du château,  Charlie, qui n’est autre que le fils du Duc ? Or, elle est amoureuse  de lui et réciproquement. Mais voilà que Charlie est amené au loin par son père pour se marier avec une princesse et qu’il disparaît, enlevé par la sorcière de la mer de Minuit, la mer aux spores noires, la plus dangereuse de toutes. Il faut traverser la mer Pourpre où vit un terrible dragon pour atteindre l’antre de  la sorcière et l’affronter.  
Pour sauver le jeune homme, Tress décide de partir et comme chacun le sait, l’amour soulève les montagnes et, en l’occurence, ici, traverse les océans ! 

Comment la petite laveuse de vitres va-t-elle s’enfuir, passagère clandestine sur un bateau de contrebandiers, puis prisonnière et bientôt capitaine sur un vaisseau de pirates ? Comment va-t-elle être aidée (ou non?) par son ami le rat parlant et les marins ? Comment va-t-elle se révéler fûtée, fûtée, et pleine de ressources, la petite laveuse de vitres ? C’est ce que je ne vous dirai pas !  Il va falloir lire le livre! Et oui, c’est comme ça, la vie !

Ma première impression, je l’avoue, a été de me retrouver dans un conte de fées traditionnel plutôt que dans un roman Fantasy : la structure d’abord en trois parties, la situation initiale, l’élément perturbateur, les péripéties avec les adjuvants magiques ou pas qui interviennent jusqu’à la résolution finale si possible heureuse. L’héroïne, la petite laveuse de vitres, est bien un personnage de contes déterminée par ce qu’elle représente socialement et non par ce qu’elle est,  comme la petite fille aux allumettes, le petit ramoneur, le vilain petit canard…
Je me suis dit qu’il s’agissait donc d’un conte pour enfants et j’ai un peu renâclé à entrer dans le livre. J’aime les romans fantasy mais ceux qui s’adressent aux adultes. Pourtant, je voyais déjà se dessiner l’originalité du récit, c’est la fille qui part secourir son amoureux (un peu falot, le pauvre gars !) et qui va se révéler indépendante, intelligente, astucieuse et courageuse et, ce qui n'empêche rien, gentille, altruiste! Elle devient donc au cours de la lecture, de plus en plus intéressante surtout quand son caractère s’affirme et qu’elle commence à travailler avec les spores.  Donc, un bon point ! Ensuite, j’ai commencé à goûter un humour à La Princesse Bride, le film culte de mes filles, de mes petits-enfants et de leur grand-mère, vu et revu cent fois.  Et là, re re re bon point !

Mais j’étais gênée parfois par un humour potache, un peu lourd, en tout cas que je ne comprenais pas toujours, jusqu’au moment où je me suis aperçue que c’était le narrateur Hoid* qui prenait la parole, un être apparemment fou, subissant un sortilège lancé par la sorcière et qui tient des propos incohérents dont certains, pourtant, ont un sens caché. J’ai pensé aux personnages d’Alice au pays des Merveilles, le chapelier par exemple, confinant à l’absurde, un humour au deuxième degré. Le roman prenait des colorations différentes, interrompues parfois par des considérations qui s’adressent aux adultes plutôt qu’aux enfants. Et finalement j’ai aimé et je l’ai lu avec plaisir.

Bon, je me serais épargnée toutes ces hésitations, ces interrogations sur le roman si j’avais lu la post-face de Brandon Sanderson, avant ma lecture mais, disciplinée, je l’ai lue après : «  Je ne voulais pas d’un conte de fées, mais visais quelque chose d’adjacent. L’idée n’était pas néanmoins pas d’obtenir un résultat trop enfantin. Je souhaitais quelque chose que mes fans apprécieraient : un conte de fées pour adultes en quelque sorte. Chemin faisant, je me suis retrouvé en train de repenser à l’incroyable roman de William Goldman, Princess Bride (1987) qui parmi mes lectures, se rapproche le plus du ton que je tâchais d’atteindre . »  Un conte de fées pour adultes, c’est exactement ce qu’il est parvenu à réaliser !

*C’était le premier livre que je lisais de Brandon Sanderson  donc je ne savais pas  que Hoid est un personnage récurrent dans les livres de cet auteur et dans l’univers du Cosmere qu’il a créé.. Elantris est le premier  livre où il apparaît.

Et comme il s'agit de navigation même sur des spores, je participe à la lecture commune du Booktrip en mer de Fanja ICI

 


 

jeudi 21 mars 2024

Florence Hinckel : L'aube est bleue sur Mars

 

Esther, 22 ans, brillante étudiante en astrophysique, est sélectionnée par la NASA pour partir sur Mars avec deux autres jeunes candidats comme elle, encadrés par des astronautes chevronnés. Nous sommes dans un futur proche, dans les années 2030/40, la vie sur la planète Terre est de plus en plus problématique, les pandémies se succèdent, la pollution s’accentue dans l’indifférence de tous ceux qui en tirent profit. Il faut donc envisager d’aller coloniser la planète rouge. Le but de l’expédition est donc de trouver de l’eau pour aménager une première base de vie sur Mars. Science-fiction, oui, mais plus pour longtemps !

Un tardigrade
 

La narratrice est Esther et c’est à travers elle que nous découvrons les autres : Sa petite soeur Chloé est morte, victime de la maladie de l’étoile de mer, pandémie qui a ravagé la planète, sept ans après le covid19, laissant un vide douloureux. Ses parents se sont séparés. Sa mère est remariée. Son père replié sur lui-même et sur son deuil, entomologiste, élève des tardigrades, « ces petites bestioles increvables de moins d’un millimètre qui ressemblent un peu à des oursons ». Ils jouent un grand rôle dans le récit ! Chloé a des amis et un amoureux Hugo dont elle vient de faire connaissance juste avant son départ. Ils sont en tout point opposés, lui littéraire, elle scientifique, l’un contre la technologie et pour le retour aux valeurs de la nature, l’autre pour le progrès, l’avancée vers le futur. L’affrontement est parfois virulent.  Mais on verra au fur et à mesure combien ils ont de points communs et comment leur quête respective parvient à se rejoindre. L’auteure fait sienne, sans le dire, la maxime de Rabelais, « science sans conscience n’est que ruines de l’âme ». Elle rappelle que ce  n’est pas la science qui est en cause mais l’usage qu’on en fait.

Le roman s’adresse à des adolescents de 14 ans et il a beaucoup plu à cette tranche d’âge puisqu’il a obtenu le prix RTS de "la littérature pour ados"…

Il faut dire que les thèmes traités sont proches de leurs préoccupations, les études, la famille, l’amour, l’amitié, l’écologie et la destruction de la planète : Hugo part avec une association pour défendre les océans. La responsabilité de ceux qui ne pensent qu’à s’enrichir est mise en cause.

« Beaucoup d’entrepreneurs ne voient dans Mars qu’un nouvel Eldorado économique. Tu ne t’en doutais pas ? Tu es si naïve ? Tu crois vraiment que l’état d’esprit de tous  ces gens qui détruisent la Terre va se modifier en la quittant ?
Ils sont prêts à détruire Mars peu à peu comme on l’a fait de la Terre. Voilà ce qui se profile. »


Le féminisme est aussi un thème important.  Esther est la première femme à mettre le pied sur Mars ! Oui, les petites filles peuvent rêver maintenant car elles pourront aller jusqu’au bout de leur rêve !

"Mon pied sur Mars. Je suis sur Mars. Et je ne peux pas m’empêcher de prononcer cette phrase qui me trotte dans la tête depuis que je suis toute petite : "un premier pas pour les femmes, un  grand pas pour l'humanité ». Juste après j'éclate de rire, ce qui ôte pas mal de solennité à mon propos."

 

La planète rouge : Mars
 

Le style est simple, direct, adapté à un public jeune. Quelques descriptions … 

Mars : "cette planète, que personne encore n’avait approchée d’aussi près, est moins uniformément rouge que je ne le croyais. Elle est parcourue de diverses teintes ocre, du plus clair au plus sombre, et ses reliefs sont de plus en plus visibles au fil des sols comme autant de rides d’expression sur un visage qui a vécu.
 Elle est immense, ronde, et intimidante. A côté d’elle la Terre semblait être une bonne fille accueillante, toute vêtue de bleue et de blanc comme pour un baptême. Mars arbore une tenue digne des Enfers."


… mais pas assez pour moi et peut-être pas assez lyriques à mon goût. Il faut dire qu’Esther est une scientifique et la poésie n’est pas son for. Elle laisse cela à Hugo ! J'ai trouvé aussi que les personnages  étaient peu développés mais c'est le point de vue de l'adulte.

"Notre premier coucher de soleil sur Mars.(…) Un coucher de soleil martien est bleu. Presque violet. Le bleu se disperse plus vite du fait de ses longueurs d’onde plus grandes. C’est pour cette raison que l’atmosphère martienne, composée de particules très fines, laisse passer la lumière bleue plus facilement que les autres couleurs."
"Ma satanée déformation scientifique me pousse toujours à vouloir tout comprendre, tout expliquer. Mais cela n’empêche pas l’émerveillement, qui est intense, en ce moment. Un peu plus haut les deux lunes de Mars, Phobos et Deimos, trouent le ciel bleu turquoise de leurs disques blancs presque fantomatiques accentuant un profond sentiment d’étrangeté."


Le coucher de soleil est bleu sur Mars

Ce roman présente donc plusieurs centres d’intérêt :  réflexion proposée aux adolescents sur le thème de la survie de la planète, dénonciation de l’irresponsabilité de ceux qui la saccagent pour en tirer des profits, réflexion aussi sur la science et le progrès, le rôle de la femme. Il faut ajouter que l’écrivaine s’est sérieusement documentée sur les voyages dans l’espace. Le récit répond à toutes les questions d’une curiosité bien légitime sur les conditions de vie et de travail dans un vaisseau spatial et tout ce que nous découvrons est solidement étayé car, à ce sujet, il ne s’agit plus de science-fiction mais du réel. Les envois de sondes et de matériel sur Mars ont permis d’en apprendre beaucoup sur la planète rouge.

 

Rover le robot Curiosity sur Mars
 

Enfin, puisqu’il s’agit de navigation que ce soit dans le ciel comme dans la mer, les astronautes n’échappent pas à toutes sortes de dangers qui mettent leur vie en péril. De plus, vivre en huis clos n'est pas toujours facile et des tensions se manifestent au sein des membres de l'équipage. Il s’agit donc bien aussi d’un bon gros livre d’aventures !  Une lecture intéressante et vivante !



Challenge marsien chez Dasola et Ta d loi du ciné


 

mardi 9 mai 2023

Nicolas Vanier : La Grande Course, dans l'enfer de la Yukon Quest

 


De temps en temps, j’aime lire les écrits de Nicolas Vanier et me replonger dans la neige, le froid polaire, les lacs gelés, les montagnes aux déclivités effrayantes et les exploits héroïques et surhumains ! C’est ce que j’appelle mon syndrome Jack London et James Curwood. Je suis tombée dans la potion magique de leurs livres presque à ma naissance et  j’y retourne sans cesse par un biais ou par un autre.

Dans ce récit intitulé la Grande course, Nicolas Vanier raconte sa participation à l’une des plus difficiles et des plus exigeantes courses de traîneaux du monde : dans l’enfer de la Yukon Quest !

26 participants qui sont les plus grands mushers (conducteurs de traîneaux) du monde, beaucoup d’accidents, beaucoup d’abandons, de nombreux chiens mis en repos dans les droppers (lieu où sont laissés les bêtes trop fatigués pour continuer sur décision des vétérinaires) .

Inutile de dire que j’ai aimé ! J’ai suivi avec intérêt toutes les étapes et les détails techniques de la course qui réclame des capacités physiques et intellectuelles des animaux comme de leur musher, endurance, rapidité, volonté, capacité d’analyse : Les chiens de tête sont capables de prendre la bonne décision en une fraction de seconde, de négocier un tournant dangereux, de choisir la bonne piste, d’éviter les nombreux pièges tendues par la neige ou le gel… Les obstacles à franchir malgré la fatigue obsédante, le manque de sommeil accumulé, le froid,  (des températures à -50°!) sont les étapes de cette course qui accumule les difficultés.

Ce que j’aime dans ce récit, c’est d’abord le rapport de Nicolas Vanier avec ses chiens, cet amour réciproque, cette compréhension mutuelle qui font qu’il est véritablement en communion avec eux. J’ai aimé que l’animal passe toujours avant le maître qui prend d’abord soin d’eux avant de s’occuper de lui-même  à chaque étape. J’ai aimé connaître le nom de chacun, les distinguer d’après leur caractère, leurs qualités et leurs faiblesses. Quand Nicolas Vanier s’interroge sur ce qui le pousse à s’infliger tant d’épreuves, à aller toujours aux limites de ses forces, et quand il se demande la même chose pour ses chiens, la réponse est la même pour l’homme comme pour les bêtes.

Jamais je n’ai senti une telle communion avec mes chiens, ressenti une telle harmonie. Leurs souffles font écho au mien. Leur fatigue est la mienne. Je suis une sorte d’archer qui fait vibrer les cordes d’un bel instrument, en osmose avec son orchestre, et dont aucune fausse note ne vient troubler la mélodieuse partition qu’ensemble nous écrivons sur le pupitre de cette course.

Et puis, bien sûr, il y a les paysages, la traversée du Kondklide avec les traces des chercheurs d’or et l’hommage de Nicolas Vanier à Jack London ( et oui, je sais, je ne  ne suis pas la seule ! ), les aurores boréales qui illuminent les nuits d’une beauté irréelle, les silhouette des loups qui mêlent leur voix à la lumière des cieux, une beauté à couper le souffle qui est une récompense aux souffrances endurées pendant la course.

Au cours de ses réflexions pendant cette longue course, Nicolas Vanier fait sienne cette phrase : « il vaut mieux accomplir sa vie que la rêver » , j’ai envie de lui répondre que oui, bien sûr, il a théoriquement raison mais… quand je me plonge dans ces récits d’aventures et de glace, moi qui aime tant la neige, les pays nordiques et qui suis si frileuse, si peu sportive, je me dis que c’est bien la vie, aussi, parce qu’on peut la rêver ! 

 

PS : les documents en annexe sont appéciables :  d'abord une carte qui permet se suivre l'itinéraire de Whitehorse à Fairbanks, puis le lexique du vocabulaire de la course, les dessins de l'attelage, les résultats de la course (à ne pas lire avant la fin du livre pour bénéficier du suspense !)  et des photos.