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jeudi 21 novembre 2013

Le Nouveau Tartuffe : Molière/Pelaez/ Gélas au théâtre du Chêne Noir



Orgon (Damien Rémy) et Elmire (Sabine Sendra )

Le nouveau Tartuffe -comme  son titre l'indique-  donné à Avignon au théâtre Le Chêne noir et mis en scène par Gérard Gélas, n'est pas celui de Molière mais celui de Jean Pierre Pelaez qui nous en propose une réécriture.
Je le dis tout de suite, si je me méfie beaucoup des metteurs en scène qui prétendent "dépoussiérer" , "déstructurer",  selon les termes à la mode, les grandes pièces du répertoire théâtral classique comme si elles n'attendaient qu'eux pour avoir un sens, je ne suis pas contre la réécriture. Après tout Molière, Racine, Corneille, Shakesperare et bien d'autres l'ont  fait avant eux! Et il n'est plus temps à notre époque de relancer le débat entre les Anciens et les Modernes. Pascal le disait  : Quand on joue à la paume, c'est une même balle dont se sert l'un et l'autre mais l'un la place mieux!

 Mieux? pas obligatoirement! Mais il suffit qu'il la place judicieusement, comme le fait Jean Pierre Pelaez en imaginant un Tartuffe de notre temps,  soit un médecin humanitaire dont les passages à la télévision servent de tremplin à  la carrière politique et financière :  portefeuille de ministre et  revenus substantiels. Vous aurez reconnu sans peine? Mais au-delà de l'anecdote, bien sûr, la pièce de Pelaez rappelle que les Tartuffes de notre époque sont aussi nombreux que jadis! Et si si les moyens d'y parvenir ont changé, le processus, lui, est resté le même et le but à atteindre aussi! La famille d'Orgon paraît bien appartenir à ce que l'on appelle la gauche caviar, confort, richesse et bonne conscience, avec leur jeune fille au pair colombienne (mais gênante quand elle la ramène trop!) et les jeunes gens de bonne famille qui s'évanouissent ou presque à l'idée de devoir travailler… pour vivre! Et bien sûr, de même que Molière prend soin de distinguer les vrais dévots des faux, Pelaez insiste sur la distinction entre les vrais humanitaires et.. les imposteurs, ceux qui ont, dit-il,  "leur compte en Suisse" et le porte-monnaie à la place du coeur!


Un Tartuffe réussi! (Jacky Nercessian)
Pour bien montrer cette permanence de l'espèce humaine au-delà des siècles,  les personnages  sont vêtus en tenue du XVII siècle mais Tartuffe en vêtement moderne - costume de lin blanc et écharpe blanche -, uniforme de ce faux humanitaire médiatisé. Le jeune messager qui rétablit l'ordre au dénouement d'une manière aussi factice ( en réalité ce sont toujours les Tartuffes qui gagnent) que dans le Tartuffe  du XVII siècle, l'un au nom du président de la République, l'autre  du roi, porte, lui, le costume du commissaire révolutionnaire de 1793 et arbore la cocarde tricolore. A noter aussi les beaux éclairages qui soulignent l'action.
La mise en scène est réglée comme un ballet, avec une précision rigoureuse qui souligne l'entêtement, la sottise, l'aveuglement, d'un Orgon, (excellent Damien Rémy) habité de tics, agité de gestes automatiques, traçant devant lui des dessins géométriques comme pour affirmer une autorité qui lui échappe. Le dialogue s'interrompt parfois pour laisser place à une danse saccadée ou chaque personnage perd son statut d'humain pour devenir automates, déshumanisés. La prestation homogène de tous les acteurs ajoute au plaisir du spectacle. Un bon moment théâtral.

Théâtre du Chêne Noir : Avignon
Le nouveau Tartuffe jusqu'au 24 Novembre

Challenge Théâtre  En scène chez Eimelle