Je vous ai déjà parlé dans mon blog d'Estelle Fenzy : Rouge vive ICI. La voici à nouveau avec un merveilleux recueil vrai, tendre, intitulé Mère, poèmes vibrants d'émotion et de retenue qui font mouche et vous touchent en plein coeur.
Être mère : l'enfantement, déchirure vers un amour infini :
Mon ventre s'accomplit.
Un sanglot ouvre gorge à la vie. Le cri de l'enfant se jette dans mes bras. Et pendant qu'on le baigne et l'entoure de linges, l'avenir hors de moi pleure déjà dans son alcôve.
Chantant sirène mes eaux perdues, je suis mère.
Moments de bonheur précieux :
Il joue. Accroupi dans le salon, il me regarde. Chance d'être là. De sentir sur moi cet amour rebondir.
(...)
Un petit nez mouillé dans mon cou, je suis mère.
mais aussi d'inquiétudes et de craintes :
Je tremble.
Devant les rues à traverser, les marches d'escalier, les bouts de verre cassés. Là où ça coupe, pique, brûle.
Lorsqu'un danger cogne sans bruit sur le doux mur du ventre, moi seule je l'entends
(...)
Je suis une femme qui tremble
Je suis mère.
Joies de voir grandir l'enfant, savoir qu'il va partir, dériver vers un autre avenir où l'on ne sera plus.
Elles sont belles et rondes. Leurs joues quémandent sans cesse les baisers. L'urgence heureuse à me trouver tout près dans la maison.
J'ai vu pousser les dents, les cheveux. Les seins magnifiques. Les ailes et les ongles vernis.
A peine humaines, elles s'essuient les pieds sur les bords du chemin. Se déchaussent et légères promènent rossignols la chanson de leur jeune temps. Les plumes de leur robe.
A peine humaines, elles s'essuient les pieds sur les bords du chemin. Se déchaussent et légères promènent rossignols la chanson de leur jeune temps. Les plumes de leur robe.
(...)
Être toute leur vie. Pas pour toujours.
Je suis mère.
Consolation, Partage, Transmission :
Au milieu de la nuit enfant pleure.
Il dit
Je ne veux plus grandir. Si je continue, tu vas devenir vieille. Et mourir. Je ne veux pas.
Je dis
C'est la vie. Elle passe. L'amour, non. Nos absents glissent tout bas des mots dans nos poings fermés. Si tu ouvres les mains, le souffle se libère dans le vent. Là s'écrit notre bonne aventure.
Quand mon coeur battra trop tard, tes yeux joueront de la musique. Ma joie survivra dans leur bleu. J'y serai cette ombre dansante que jamais le soleil ne gomme.
Je suis mère.
Acceptation, vieillesse, Amour toujours :
Un jour je guetterai les pas sur les graviers. Les coups à la fenêtre.
Les dimanches de chance, ils m'encercleront de leurs bras, de leurs questions. Réchaufferont mes épaules. Le bleu écaillé de mes yeux. (...)
Je serai vieille, enfant de mes enfants.
Toujours
mère.
Ces quelques extraits pour vous communiquer l'émotion qui naît de la lecture de ce beau recueil : chaque poème explore avec délicatesse, sensibilité et justesse, la légèreté et la gravité d'être mère.
Mère : Estelle Fenzy aux Editions Boucherie littéraire collection La feuille et le fusil