Résultat de l'énigme n°63
Les vainqueurs du jour sont : Aaliz, Asphodèle, Dasola, Dominique, Eeguab,
Keisha, Miriam, Pierrot Bâton, Somaja, Syl ... Et merci à
tous!
le roman: La lettre écarlate de Nathaniel Hawthorne
le roman: La lettre écarlate de Nathaniel Hawthorne
Le film : La lettre écarlate de Wim Wenders (1973)
Nathaniel Hawthorne (1804-1864) est né à Salem (Massachussetts) dans une famille calviniste, puritaine qui émigra d'Angleterre. Il est marqué par l'idée du péché et de la prédestination. L'un de ses ancêtres avait été un juge sévère et impitoyable au procès des sorcières de Salem, ce qui a engendré chez l'écrivain un sentiment de culpabilité dont il n'a jamais pu se défaire. Il a même changé son nom qui était à l'origine : Hathorne. La lettre écarlate qui traite du péché d'adultère
témoigne des contradictions de Hawthorne.
Un livre contre le puritanisme?
Alors que Hawthorne est marqué par son éducation religieuse qui ne permet pas de croire au pardon des fautes et à la rédemption, la femme adultère, Hester Prynne, qui est
coupable et incarne le péché se sauve par sa dignité, sa force de
caractère, sa générosité et son altruisme. Il dresse d'elle un très beau portrait. Ce sont les autres, les notables qui ont le pouvoir et la richesse, qui se rendent coupables de violence psychologique envers elle. Mais dans leur certitude d'être meilleurs qu'elle, ils étalent égoïsme, suffisance et intolérance. Hester Prynne est une femme libre alors que son mari qui est
à l'origine l'offensé se damne parce qu'il ne sait pas
pardonner. L'écrivain se distingue donc de sa famille religieuse en
dénonçant l'intolérance du puritanisme et son hypocrisie et en prenant
le parti de la liberté individuelle.
Hester Prynne et sa lettre écarlate (film de Victor Sjöström)
Le roman
La lettre écarlate de Nathaniel Hawthorne paru en 1850 est un des plus grands romans américains. Henri James affirmait même que c'était l'oeuvre la plus remarquable et la plus authentiquement américaine. Le sujet qu'il traite est, en effet, résume bien la société américaine toujours déchirée entre puritanisme et scandale.
Dans ce que lui-même appelait une histoire de « la fragilité et du chagrin humains... véritablement embrasée par les feux de l'enfer », Hawthorne évoque les tragédies de la conscience malheureuse dans la colonie puritaine de la Nouvelle-Angleterre au XVII siècle. L'intrigue est simple et semble relever du triangle amoureux. Un vieil érudit anglais a envoyé à Boston sa jeune épouse, Hester Prynne, pour qu'elle s'y installe avant lui. Quand il vient la rejoindre deux ans plus tard, il la trouve exposée au pilori, Pearl, sa fillette illégitime, dans les bras. En effet, Hester a refusé de révéler le nom de son amant. Elle est désormais condamnée à porter sur tous ses vêtements une lettre écarlate, un A majuscule, symbole de l'adultère.
Mais ce qui attirait tous les regards et transfigurait en quelque sorte la femme ainsi vêtue, si bien qu'hommes et femmes de son ancien entourage étaient à présent frappés comme s'ils la voyaient pour la première fois, c'était la LETTRE ÉCARLATE si fantastiquement brodée sur son sein. Elle faisait l'effet d'un charme qui aurait écarté Hester Prynne de tous rapports ordinaires avec l'humanité et l'aurait enfermée dans une sphère pour elle seule.
Son
mari, lui, décide de se faire passer pour le docteur Roger Chillingworth
afin de mieux parvenir à démasquer le coupable..... (source encyclopédie Universalis pour le résumé)
La beauté du style
Le livre de Hawthorne m'a touchée par la beauté du style. Je pourrais citer des passages entiers. C'est un roman magnifique tant par les personnages qui l'habitent que par sa poésie.
La nature
La nature sauvage y occupe une grande place face à la ville des colons. Elle est peuplée par les indiens mais aussi selon les croyances de l'époque par le diable et les sorcières. La forêt touffue et secrète permet aux amants de se retrouver et d'imaginer une vie où ils seraient libres d'aimer. Enfin la nature a une vie propre, elle est animée, vivante, douée de sentiments, d'émotions..
Au centre, un ruisseau
courait, nimbé d’une vapeur légère. Les arbres qui se penchaient au-dessus
avaient laissé tomber dans ses eaux de grosses branches. Elles engorgeaient le
courant, produisant, çà et là, des tourbillons et des profondeurs noires tandis
que sous le passage libre du flot on voyait briller comme un chemin de cailloux
et de sable brun. Si l’on suivait le ruisseau des yeux, on pouvait apercevoir
ses eaux miroiter à quelque distance, mais on en perdait bien vite toute trace
dans l’enchevêtrement des troncs d’arbres, des buissons, des rocs couverts de
lichens. Tous ces arbres géants et ces blocs de granit semblaient s’appliquer à
rendre mystérieux le cours de ce petit ruisseau. Peut-être craignaient-ils que,
de sa voix infatigable, il allât murmurer sur son passage les secrets du cœur
de la vieille forêt ? ou refléter des révélations sur le miroir lisse
d’une de ses anses ? Sans cesse, en tout cas, le petit ruisseau
poursuivait son murmure gentil, tranquille, apaisant mais mélancolique comme la
voix d’un enfant qui passerait son enfance sans amusement et ne saurait comment
être gai au milieu d’un entourage morne et d’événements sombres.
– Ô ruisseau ! Sot
et fatigant petit ruisseau ! s’écria Pearl après l’avoir écouté un
instant. Pourquoi es-tu si triste ? Prends un peu courage et ne sois pas
tout le temps à soupirer !
Mais, au cours de sa petite
vie parmi les arbres de la forêt, le ruisseau avait traversé tant de graves
aventures qu’il ne pouvait s’empêcher d’en parler et paraissait n’avoir rien
d’autre à dire. Pearl lui ressemblait en ceci que sa vie à elle provenait aussi
d’une source mystérieuse et se déroulait dans un décor aussi mélancoliquement
assombri. Mais à l’inverse du petit ruisseau, elle bondissait, étincelait et
babillait légèrement dans sa course.
– Que dit ce petit
ruisseau triste, Mère ? demanda-t-elle.
– Si tu avais un chagrin
à toi, le ruisseau t’en parlerait comme il me parle du mien, lui répondit sa
mère.
L'enfance
L'enfance quand elle est sauvage, coupée de la civilisation, est proche
de la nature. C'est le cas
de Pearl, la petite fille de Hester Prynne, enfant illégitime, que le
péché de sa mère a éloigné du contact des autres, et qui a gardé une
sensibilité, une pureté non altérée qui lui permet de deviser avec les
éléments naturels et de les comprendre. Elle n'est pas capable de ressentir de la tristesse, de l'émotion et si cela lui donne quelque chose d'inhumain, elle a par contre la liberté, la
vivacité et la force première qui est celle propre à la Nature. Elle échappe ainsi à la marque
du christianisme, le sens du péché, et apparaît un peu comme un esprit païen; Hawthorne la nomme l'enfant-lutin.
Hester dit à la petite Pearl
de courir s’amuser avec les algues et les coquillages pendant qu’elle parlerait
avec l’homme qui là-bas ramassait des herbes. L’enfant s’envola comme un
oiseau, dénuda ses petits pieds blancs et se mit à trottiner au long du bord
humide de la mer. De temps à autre, elle s’arrêtait net et regardait
curieusement dans une flaque – miroir que la mer avait laissé en se retirant
pour que la petite Pearl pût y voir son visage. Il la regardait du bord de la
flaque, entouré de boucles brunes, avec un sourire de lutin dans les yeux –
image d’une petite fille à qui Pearl, n’ayant d’autre compagne de jeux, faisait
signe de venir courir avec elle la main dans la main. Mais la petite fille
faisait de son côté le même signe comme pour dire : « On est mieux
ici ! Viens, toi ! » Et Pearl, enfonçant dans la flaque jusqu’à
mi-jambes, n’apercevait plus au fond que ses petits pieds blancs, tandis que de
profondeurs plus lointaines, la lueur d’une sorte de morceau de sourire montait
et flottait çà et là sur les eaux agitées.
L'ombre et la lumière
Le roman est bâti sur une antithèse entre le bien et le mal, symbolisé par l'ombre et la lumière. Il y a des personnages sombres comme celui du mari d'Hester, d'autres lumineux comme Pearl, la fille d'Hester.
– Mère, dit la petite
Pearl, le soleil ne vous aime pas. Il court se cacher parce qu’il y a sur votre
poitrine quelque chose qui lui fait peur. Tenez, le voilà qui brille au bout du
chemin. Restez là et je vais courir l’attraper. Je ne suis qu’une petite fille.
Il ne se sauvera pas devant moi puisque je ne porte encore rien sur ma
poitrine.
– Ni ne porteras jamais
rien, j’espère, mon enfant, dit Hester.
– Et pourquoi non,
Mère ? demanda Pearl en s’arrêtant net à l’instant de prendre sa course.
Est-ce que ça ne viendra pas tout seul quand je serai devenue grande ?
– Dépêche-toi de courir
attraper ce rayon de soleil, dit la mère, il va être bientôt parti.
Pearl s’élança à toutes
jambes et Hester sourit en voyant l’enfant atteindre bel et bien l’endroit où
brillait le soleil et s’y tenir en riant, animée par sa course et toute
rayonnante. La lumière s’attardait autour de la petite fille comme si elle
était heureuse d’avoir trouvé pareille compagne de jeu. Hester cependant
avançait et fut bientôt sur le point d’entrer à son tour dans le cercle
magique.
– Il va s’en aller, à
présent, dit Pearl en secouant la tête.
– Regarde !
répondit Hester en souriant, j’étends la main et je le touche.
Comme elle étendait, en
effet, la main, le rayon de soleil disparut.
Si Hester Prynne est un personnage que le soleil fuit à cause de sa marque d'infamie, c'est pourtant
et paradoxalement, cette marque qui lui apporte
couleur et lumière, la lettre écarlate que, par défi et fierté, elle a
brodé elle-même, et qu'elle a voulu non pas discrète mais somptueuse,
brillamment colorée. La jeune femme par sa dignité et sa bonté va effacer le signe de sa honte en s'élevant sur le plan moral au-dessus de ceux qui l'ont jugée et condamnée.
Au cinéma le livre a été adapté trois fois : En 1926, par Victor Sjöström, un film que je ne connais pas mais que j'aimerais voir car j'aime le réalisateur.
En 1973 par Wim Wenders qui juge son film avec une extrême sévérité (et il a bien raison!!) : Voir chez Wens
Et une troisième fois en 1995 par Roland Joffé.