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dimanche 8 mars 2009

Paulo Coelho : Le pèlerin de Compostelle (2)

                                                           Première étape : Roncevaux

 Le Pèlerin de Compostelle (voir texte 1) nous donne des renseignements précis sur l'itinéraire de Paulo Coelho.

Le départ a lieu dans le pays Basque français à Saint-Jean -Pied-de-Port.

Là, il reçoit le le manteau où sont cousues les coquilles de Saint Jacques et le chapeau du pèlerin ainsi que le bourdon, long bâton au bout duquel est attachée une petite calebasse pour l'eau. Le chapeau le protège du soleil et des mauvaises pensées, le manteau de la pluie et des mauvaises paroles, le bourdon des ennemis et des mauvaises actions.

Il en sort par la porte d'Espagne et prend la route empruntée par les armées romaines, puis par celles de Charlemagne et de Napoléon.

La première étape dont parle Coelho est Roncevaux qui à l'époque des grands pèlerinages était le plus puissant monastère de la région. Il reste quelques bâtiments  religieux et une église collégiale avec des objets d'art d'une valeur inestimable: sur l'autel la Vierge de Roncevaux tout en argent massif.

La seconde est Puente la Reina. Là, inscrite sur la base d'une statue figurant un pèlerin, Coelho lit l'inscription suivante 

                                     Ici, tous les chemins  de Saint-Jacques ne font plus qu'un .

L'épisode de l'enfant qui joue à la balle ("le démon")se place devant le pont qui donne son nom à la petite ville. Il atteint un tronçon de chemin où des vestiges de pavements romains étaient toujours présents. Tout au long du chemin se dressent de lourdes croix en bois.

A Estella, il apprécie la bonne chère et le vin de la  taverne: quelques ruelles donnent directement sur la rivière (l'Ega) - comme à Venise- et c'est dans l'une d'elles que j'ai décidé de m'asseoir."

Ensuite, il traverse Pampelune puis Logrono; celle-ci est une des plus grandes villes que traversent les pèlerins;  il assiste à une fête de mariage et discute avec le marchand de pop corn qui regrette le temps de Franco
Logrono

A Santo Domingo de la Cazalda : Nous avons gravi une petite éminence et, d'en haut, j'ai aperçu le clocher principal de l'église ...


C'est dans la petite ville de Ponferrada que Petrus, le guide, quitte Coelho et c'est dans la château des Templiers qu'il assiste à un rituel. Les Templiers défendaient les pèlerins des chemins de Compostelle. Lorsque l'ordre fut détruit, nous dit Paulo Coelho, celui de Saint-Jacques-de-l'Epée devint responsable de la garde des chemins.

Il arrive à Villafranca del Bierzo avec sa petite église dont le portail est décoré de coquilles Saint Jacques et de scènes de la vie du saint, avec la statue de Saint Jacques Matamore brandissant son épée, les chapiteaux décorés de coquilles, le portail du Pardon. Enfin, sur le pic Cerebor il découvre le sens de son voyage et c'est dans la petite chapelle au pied du mont que le Maître lui remet son épée. A partir de là, Paulo Coelho considère sa quête comme terminée. Il gagne Saint -Jacques de Compostelle en prenant un car qui assure une correspondance entre Pédrafita et Saint-Jacques, près du Cerebro. De la ville, nous apercevons par la fenêtre de son hôtel, quelques touristes devant le portail principal de la cathédrale Saint-Jacques. Et c'est tout! Et moi, lectrice, qui achève le livre, je me sens un peu dépitée ! Avoir accompli un si long voyage avec l'auteur et rester ainsi à la porte!

C'est que pour l'auteur brésilien, les lieux où il s'arrête, n'ont pas un intérêt en eux-mêmes ;il ne s'attarde pas à les décrire et il quand il le fait c'est dans un style plat et sans émotion. Ils sont liés aux  étapes iniatiques de la RAM : Rigueur, Amour, Miséricorde - secte,  confrérie chrétienne?- qui doit le mener à mériter l'épée. En dehors de cette recherche, il s'intéresse peu au voyage lui-même.

On le voit, Paulo Coelhe n'a pas l'érudition, ni la curiosité intellectuelle, ni la richesse de Cees Nooteboom sur le même sujet, ni les mêmes centres d'intérêt. Il n'est pas passionné par l'Histoire, ni par l'Art. Il ne cherche pas sur les traces du passé l'écho des voix disparus. Il n'a pas, non plus, la langue superbe, dense, colorée, qui est celle de Cees Nooteboom dans Le labyrinthe du pèlerin pour décrire la beauté d'un pays aride et sauvage qu'il aime passionnément. Si leur quête, à tous deux, est spirituelle, elle est radicalement opposée.

Quant à moi, ma préférence est pour l'écrivain néerlandais et je ne résiste pas à vous citer ce passage de Cees Nooteboom que je ne me lasse pas de relire :

Cette terre aura la couleur d'ossements, de sable ocre, de coquillage effrités, de fer rouillé, de bois pourri, mais même les couleurs plus foncées seront comme parées d'un reflet lumineux qui, de loin, ressemblera à un voile,comme si l'oeil devait être protégé de tant d'espace et de lumière. A l'horizon se dressent des églises et des monastères qui correspondent à l'infini visible et veulent nous parler d'un passé inconcevable, conservé - pour celui qui le recherche- par les airs chauds et froids d'un climat extrême. Autrefois, quand je n'en étais pas encore conscient, ces paysages durent s'infiltrer en moi, fournir une réponse à une soif d'infini, d'un infini que l'on ne trouve nulle part en dehors de l'océan et du vrai désert. Je sais que ces vocables sont d'un autre temps, mais cela m'indiffère, sur ce point je veux bien être mal compris. Car à qui pourrais-je parler d'accomplissement ou de lumières?

samedi 7 mars 2009

Paulo Coelho : Le pèlerin de Compostelle (1)



Pour préparer mon voyage en Espagne et en particulier à Galice, je viens de lire Le Pèlerin de Compostelle de Paulo Coelho. J'avoue que le livre m'a tout d'abord laissée perplexe. Pourquoi? Que pouvais-je attendre de ma lecture connaissant un peu l'auteur? Une description et une présentation historique de ce chemin? Non, bien sûr! sinon je me serais contentée de mon guide touristique! En fait, je voulais surtout partager par le biais de la lecture une expérience vécue! Et sur ce point, le livre de Paul Coelho répondait au centuple à mon attente! Alors d'où me venait cette réticence?

Je m'attendais, bien sûr, après l'Alchimiste, à une démarche spirituelle et religieuse. Je voulais savoir au cours de ce parcours de 700 km que Coelho entreprend avec un guide à travers les Pyrénées, de Saint Jean Pied de Port à Saint Jacques de Compostelle, ce que je pouvais partager avec lui d'un point de vue humaniste même si je n'ai pas ses convictions religieuses. De plus, Paulo Coelho m'offrait un point de vue différent de celui de Cees Nooteboom après ma re-relecture du livre de l'auteur néerlandais : Le Labyrinthe du Pèlerin, mes chemins de Compostelle, qui retrace la quête spirituelle d'un homme sans dieu à la recherche de lui-même.

En fait, il faut bien le dire, ce qui m'a profondément gênée dès le début du récit, c'est l'appartenance de l'écrivain à une secte nommée RAM et le but même de son voyage, la recherche de l'épée qui, pense-t-il, lui donnera des pouvoirs occultes. Forcément, tout ce que j'ai appris des sectes, fait que je regarde avec suspicion, ceux qui déclarent en faire partie, qu'ils en soient les victimes ou les instigateurs. J'avoue avoir eu bien du mal à assumer l'aspect "illuminé" du voyage de Paul Coelho, les visions, les phénomènes occultes, productions de lumière, lévitation, les rencontres avec des "démons", le gitan, l'enfant, et le chien, l'obéissance aveugle au guide même lorsqu'il te donnera l'ordre de tuer, les humiliations, la mise en danger volontaire, le recours à la souffrance du corps pour libérer l'esprit. Ces dernières pratiques rejoignant celles qui avaient cours jadis dans certains ordres catholiques et chez les saints et les ascètes. Car finalement, Paulo Coelho montre, à plusieurs reprises, la correspondance entre le RAM et le christianisme et même entre les diverses religions. Un des Mages qu'il rencontre sur le chemin de Compostelle est d'ailleurs un prêtre.

Enfin, je me suis dit que s'il s'agissait d'une oeuvre de fiction, j'aurais lu le livre en m'intéressant à ce qui, sous le couvert de l'aventure, pouvait se rapporter à l'humain. Nonobstant mes réticences, j'ai donc continué ma lecture et et je m'y suis intéressée, découvrant, contre toute attente, dans le cheminement du disciple et son maître, une belle leçon d'humanisme.

Ainsi il y a dans l'apprentissage initiatique du RAM, certains exercices qui ne font pas obligatoirement appel à l'occulte mais à l'observation, la concentration, l'imagination : exercice de l'audition, exercice de la semence, exercice des ombres. Ils permettent d'affiner ses sens, de faire le vide dans son esprit pour se libérer des soucis quotidiens, de faire le tri entre ce qui a de l'importance et ce qui est factice et vain, d'établir un contact étroit avec la nature afin de se sentir en communion avec elle, et de renaître à une vie nouvelle.

Parmi toutes les sensations que j'ai éprouvées dans ma vie, je ne peux oublier cette première nuit sur le chemin de Saint Jacques. .. J'ai regardé la voie lactée qui montrait l'immense chemin que nous allions parcourir. En d'autres circonstances, cette immensité aurait été cause d'une grande angoisse et j'aurais eu terriblement peur de ne pas être capable de réussir, de ne pas être à la hauteur. Mais aujourd'hui, j'étais une semence et j'étais né de nouveau... je pouvais naître autant de fois que je voulais, jusqu'à ce que mes bras soient assez grands pour étreindre la terre d'où j'étais venu.
Le guide, Pétrus, va au cours de ce long voyage lui montrer la voie de la sagesse et la grandeur de la vie. Ainsi il lui apprend que l'homme qui tue ses rêves ne désire plus que la mort :

L'homme ne pourra jamais cesser de rêver. Le rêve est la nourriture de l'âme comme les aliments sont la nourriture du corps... La seule manière de sauver nos rêves est d'être généreux envers nous-mêmes.
Son enseignement est celui de la sagesse, du discernement et du bon sens :

Nous voyons toujours le meilleur chemin à suivre, mais nous ne prenons que celui auquel nous sommes accoutumés

 Il est toujours bon d'avoir une activité lente avant de prendre une décision importante dans la vie, a-t-il dit. Les moines zen écoutent les rochers grandir. Moi, je préfère pêcher.
Mais tout en lui montrant le chemin, Il l'avertit qu'un disciple ne doit pas suivre aveugément les pas de son maître, que chacun a sa manière de conduire sa vie, de surmonter les difficultés. Il affirme de cette manière la liberté de l'homme et il a cette belle formule  :

Enseigner c'est montrer ce qui est possible. Apprendre, c'est rendre possible à soi-même

Enfin, c'est sur le mont Cerebor, au pied de la croix, presque à la fin de son pèlerinage, que Paulo Coelho, dont le but était de conquérir des pouvoirs occultes, comprend le sens de son voyage :

J'étais orgueilleux de ma sagesse, Tu m'as fait parcourir le chemin que tous peuvent parcourir, et découvrir ce que tout le monde saurait s'il prêtait un peu d'attention à la vie. Tu mas fait voir que la quête du bonheur est personnelle, et qu'il n'y a pas de modèle que nous puissions transmettre aux autres.

 Aujourd'hui cette compréhension est ce que je possède de plus précieux : l'extraordinaire se trouve sur le chemin des hommes ordinaires.

Voir texte 2