Le Pion de Pablo Cerda paru aux éditions La contre allée fait partie de la sélection du prix littéraire des avignonnais.
Le 10 Février 1962, Bobby Fisher et Arturo Pomar disputent une partie lors d’un tournoi d’échecs interzonal de Stockholm. L’un est américain, l’autre espagnol. L’un a dix-huit ans, marqué par la pauvreté, ambitieux, l’autre trente et un ans, issu d’un milieu modeste, ancien enfant prodige adulé, déjà résigné, délavé, fini. Tous deux sont des pions, tous deux manipulés par des « rois » qui les mettent en mouvement sur l’échiquier du monde, l’un contre les soviétiques pendant la guerre froide, l’autre par le Caudillo, servant la dictature, tous deux manipulés, puis rejetés quand l’on n’a plus besoin d’eux. Car, il faut le savoir : "Un pion n’est pas seulement un pion. Confiné dans ses mouvements par sa condition grégaire, il intègre un camp, il sert un roi, il obéit à une main".
|
Pomar et Fisher : Stockholm
|
Et comme dans toutes les langues le mot pion a la même résonance, celle de
l’humilité, Paco Cerda, tout en relatant cette partie d’échec et la vie de ces deux partenaires, nous raconte l’histoire de tous ces hommes ou femmes qui, aux Etats-Unis ou en Espagne, pendant cette année 1962, ont été des pions voués au sacrifice :
"Un pion, seulement un pion. Avec le regard de ton roi sur la nuque. Avec ce dédain souterrain de l’aristocratie de ton camp. L’insignifiance d’une babiole, une bagatelle inscrite dans les gênes."Ainsi en est-il du pion James Meredith, le premier noir qui a pu a accéder à une université réservée aux blancs grâce à sa volonté, son courage, sa persévérance, son refus de céder à la peur, et de même de tous les américains sacrifiés à la toute puissance des Etats-Unis, à leur volonté de domination sur le monde. Ainsi en est-il de Julien Grimau, dernier mort de la guerre civile, emprisonné puis exécuté pour avoir défendu jusqu’au bout la démocratie, comme le sont tous les espagnols qui ont payé le prix fort, exil, emprisonnement, tortures, assassinats, entre les mains de Franco.
A travers les histoires que Paco Cerda nous raconte, nous découvrons le poids du déterminisme social, religieux, politique qui font un pion de l’être humain : "Sachant que les cinq ou six pas à faire pour te défaire de ton pesant destin sont tout un monde quand l’échiquier n’est pas fait à la mesure de tes forces, quand les règles te condamnent au rang de pion, quand les dangers sont à l’affût, démultipliés par les inégalités d’une origine viciée. Tu n’as pas choisi d’être pion.". De toutes les pièces du jeu d'échec, remarque Pablo Cerda, roi, dame, fou, tour, cavalier, seul le pion ne peut changer de trajectoire et ne peut revenir en arrière : " C'est irréversible".
Mais j’aime aussi qu’il nous laisse un espoir en citant en exergue Ezequiel Martinez Estrada : « Ils sont les jouets du destin, même si, parfois, par ironie, c’est d’eux dont dépend le destin ». Car seuls les pions, remarque Paco Cerda dénotent un esprit de solidarité : « C’est l’éternel idéal de l’union et la force. Le jonc fragile qui, au milieu d’une touffe, ne peut être arraché». C’est ce qui arrive quand les mineurs des Asturies se mettent en grève dénonçant leurs conditions de travail et les salaires de misère entrainant la fermeture de toutes les mines en Espagne ou quand les femmes américaines s’unissent pour exiger l’arrêt des essais nucléaires qui empoisonnent le lait de leurs enfants. Et puis les pions peuvent devenir dames, faible espoir, cependant, pour lequel il faut réaliser de grands sacrifices. Enfin, ce qui rétablit l'équilibre mais c'est une conclusion bien pessimiste, l'auteur partage avec nous un proverbe italien : " A la fin de la partie, le roi et le pion retournent dans la même boîte". Seule la mort égalise les pièces de l'échiquier.
J’aime les écrivains qui savent relier ainsi l’idée philosophique au vécu, à l’histoire des hommes, et qui parviennent à nous impliquer en nous faisant sentir le tragique de la condition humaine. Non pas des personnages désincarnés mais des êtres de sang et de chair. Pablo Cerda est de ceux-là !
J’aurais voulu dire que ce roman était un coup de coeur mais je l’ai trouvé malheureusement trop dense. A force de multiplier les histoires, l’auteur m’a un peu perdue. Même si j'ai beaucoup aimé ce livre, j’ai éprouvé de temps à autre une lassitude et c’est vraiment dommage car cet écrivain - c’est son deuxième roman - a quelque chose d’important à dire sur l'être humain et l'Histoire. Son style est d’une force qui me touche ainsi que sa tendresse et son respect pour les humbles. Donc, malgré cette restriction, c'est un vrai, beau roman, qui vaut la peine d'être lu.
L'évaporée de Fanny Chiarello, Wendy Delorme
Juste un mot sur L'évaporée paru aux Éditions Cambourakis. Comme j'ai abandonné la lecture, je me dois d'être rapide pour expliquer pourquoi.
L'écriture est due à deux écrivaines Fanny Chiarello et Wendy Delorme. Ce sont des textes qui se répondent et parlent de la rupture d'un amour, de la souffrance de l'une et de l'autre femme, du manque, de la difficile guérison de celle qui a été abandonnée et de celle qui est partie, qui s'est évaporée. Le roman est bien écrit, l'analyse des sentiments est fouillée, le processus de perte et de résilience décortiquée, mais voilà cela ne m'intéresse pas. C'est trop intellectuel ou plutôt trop cérébral. On dirait que le plaisir de l'analyse prend le pas sur l'humain. On dit de quelqu'un qui parle "qu'il s'écoute parler", que pourrait-on dire de quelqu'un qui écrit ? Bref! je n'ai pas ressenti d'émotion. C'est intelligent, presque trop ! Mais je conçois que l'on puisse apprécier ce livre, rien à redire sur sa qualité. D'ailleurs j'ai lu deux critiques positives dans Babelio ICI.
Lu pour le Prix littéraire des Avignonnais
La Ville d’Avignon lance le premier Prix littéraire des Avignonnais. À partir du 1er octobre et jusqu’au 12 novembre, les avignonnais et tous les amoureux de la littérature
sont invités à élire, parmi les cinq ouvrages sélectionnés par les
bibliothèques, les librairies d'Avignon, un professeur de lettres du
lycée René Char et la directrice des bibliothèques d'Avignon, leur roman
préféré issu de la rentrée littéraire d’automne. Lectures, tables
rondes, midi-sandwichs et de nombreuses animations permettront de mieux
faire connaître ces cinq ouvrages et de voter pour celui qui emportera
le premier Prix.
Les cinq romans sélectionnés sont disponibles en
prêt dans les bibliothèques de la Ville et à la vente dans les
librairies partenaires.
«
Qu’est-ce qui peut bien faire qu’une femme soudain abandonne celle à
qui elle vient de dire, Quels merveilleux moments j’ai passés auprès de
toi, aujourd’hui encore : je veux ça tous les jours de la vie ? » Tel
est le questionnement auquel est confrontée Jenny après le départ d’Ève.
Toutes deux apprendront que l’ on peut vivre une même histoire de deux
façons totalement différentes ».
Le pion
Paco Cerdà
Éditions La Contre Allée
Stockholm,
hiver 1962. Deux hommes de mondes adverses se font face. Arturo Pomar,
l’enfant prodige espagnol, affronte sur l’échiquier Bobby Fischer, un
jeune Américain excentrique et ambitieux.
En pleine guerre froide, l’un était le pion du régime franquiste, l’autre sera celui des États-Unis.
• Première sélection du Prix du Meilleur Livre Étranger - catégorie non-fiction.
Eleftheria
Murielle Szac
Éditions Emmanuelle Collas
1940, au nord de la Crète. La communauté juive célèbre Rosh Hashana.
Rebecca écoute les commérages sur le futur mariage de Stella. On
s’interroge aussi sur la guerre qui a commencé en Europe. Metaxas, le
dictateur au pouvoir à Athènes, saura-t-il résister à Mussolini et à son
allié, Hitler ? Bientôt, le bateau de Nikos, le Tanaïs, est
réquisitionné par l’armée grecque. Malgré la menace, la vie continue…
Jusqu’au matin du 20 mai 1941, lorsque le 3e Reich lance sur la Crète
une invasion aéroportée. Faut-il fuir ou rester ? C’est l’heure de
savoir si l’on est libre de choisir son destin.
Des rêves d’or et d’acier
Émilie Tôn
Éditions Hors d’atteinte
Je
veux savoir comment mon père est arrivé dans cette Lorraine où l’acier
s’écoule, comprendre comment il est devenu cet homme au destin plusieurs
fois brisé, qui n’a jamais abandonné. Il l’a toujours dit : « Quand on a tout perdu plusieurs fois, on n’a plus peur de se lancer. »
L’invention du diable
Hubert Haddad
Éditions Zulma
Papillon
de Lasphrise s’est retiré dans sa tour d’ivoire angevine. Après une
existence dédiée à l’amour et à la guerre, le voilà tout entier habité
par le démon de l’écriture. Au soir de sa vie, il pactise avec le diable
: tant que ses Poésies n’auront pas accédé à la postérité, il ne
connaîtra pas le repos éternel. L’immortalité sera sa malédiction.