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lundi 27 octobre 2025

Jacques Prévert : La chanson des sardinières


Dans son blog Miriam raconte sa visite à Douarnenez et elle  note que la ville s'est construite autour de la richesse locale, la sardine. Richesse mais pas pour tout le monde ! C'est là qu'a eu lieu la première grève féminine des Penn Sardin, surnom donné aux ouvrières qui travaillaient dans les usines de sardines. 

 Lire le billet de Miriam Ici 

 En écho au billet de Miriam, Aifelle publie dans son Bon Dimanche, la chanson des Penn Sardin,  chantée pendant la grève de 1924-25 et qui a été reprise pendant la célébration du centenaire de la grève : "Pemp real a vo !" ( "cinq réaux ce sera")

 A écouter dans le blog Aifelle Ici 

Les Sardinières ont aussi chanté une chanson anarchiste de la Belle époque  qui est restée comme La chanson de sardinières et dont le refrain est : 

 Saluez, riches heureux,
Ces pauvres en haillons
Saluez, ce sont eux
Qui gagnent vos millions.

Des ouvrières furent licenciées après l'avoir chantée à l'usine en 1924. Cette chanson interdite est une sorte "d'hymne national" douarneniste.

La chanson de sardinières Voir ici

En  1905, il y avait eu une première grève des Penn Sardin pour obtenir d'être payées à l'heure et non au cent de sardines. En 1924, l'exploitation de ces ouvrières est telle qu'éclate la grande grève des sardinières qui a eu un écho national, entraînant la solidarité des travailleurs, partout en Bretagne et dans le reste de la France. 

Quel que soit l'âge, de 12 ans à 80 ans, ces femmes travaillent dans les conserveries à raison de 10 heures par jour et de 72 heures d'affilée. La loi de 1919 sur les 8 heures de travail n'est pas respectée. Elles réclament (entre autres) vingt centimes d'augmentation. Les heures passées à l'usine dans l'attente du poisson ne sont pas payées, les  heures supplémentaires ne sont pas majorées, les heures de travail de nuit (en principe interdit pour les femmes) ne sont pas majorées. Les revendications vont porter sur tous ces points. 

Enfin Ingammic a rédigé un billet sur un livre : Un belle grève de femmes d'Anne Grignon.

 Lire son billet Ici du 15 mars 2024   

"Elles sont ouvrières dès l’enfance, pour certaines à partir de huit ans -on contourne, quand le manque d’argent se fait trop criant, la loi qui impose d’en avoir au moins douze- dans des conditions difficiles. Le travail se fait debout et à un rythme infernal, dans des structures exhaussant l’inconfort des chaleurs estivales comme des froids hivernaux, chargées d’odeurs de saumure et d’entrailles. Et leurs journées se prolongent avec l’entretien de la maison -qui comme leurs tenues, se doit d’être impeccable-, le linge à laver (sans machine) mais aussi les tâches administratives comme la tenue des comptes dont elles s’occupent généralement, car la plupart maîtrisent mieux le français que leurs époux." Ingammic

 

Douarnenez : la grève de sardinières

"La grève, soutenue par le maire Daniel Le Flanchec, animée par un comité de grève et supportée entre autres par Lucie Colliard et Charles Tillon  pour la CGTU, commence le 21 novembre 2024 dans une fabrique des boîtes. Elle s'étend le 25 à toutes les usines du port. Les 1600 femmes (sur 2 100 grévistes), sont chaque jour en première ligne des manifestations, au cri de « Pemp real a vo ! » (« Cinq réaux ce sera , c'est-à-dire 25 sous, ou 1,25 franc). Les patrons sont intraitables. Et les choses s'enveniment dans la deuxième quinzaine de décembre lorsqu'ils font appel à seize "jaunes" (briseurs de grève), recrutés dans une officine spécialisée de la  rue Bonaparte à Paris. Le préfet destitue le maire communiste, Daniel Le Flanchec. La grève déborde Douarnenez.  Elle devient un enjeu national. Le , au débit  de L'Aurore, les jaunes tirent plusieurs coups de feu sur Le Flanchec, l'atteignant à la gorge, blessant grièvement son neveu et touchant quatre autres personnes.

On apprend que deux conserveurs, Béziers et Jacq, ont remis aux jaunes la somme de 20 000 francs (l'équivalent de 25 000 heures de travail de leurs ouvrières). Ils risquent la cour d'assises. Le préfet menace de porter plainte contre le syndicat des usiniers. Le 7 janvier, ce dernier pousse à la démission ses membres les plus durs. Le 8 janvier, après 46 jours de grève, des accords sont signés : toutes les heures de présence à l'usine sont désormais payées, les femmes obtiennent un relèvement de leur salaire horaire à un franc, une majoration de 50 % des heures supplémentaires et de 50 % pour le travail de nuit.  La grève est victorieusement terminée le alors que des briseurs de grève ont tiré sur le maire Daniel Le Flanchec le ." (wikipédia)



Quant à moi, j'ai tout de suite pensé à ce poème de Jacques Prévert que j'aime depuis longtemps :  une sorte de valse triste et lancinante qui raconte un conte de fées inversé avec le refrain qui revient en début et à la fin du poème comme s'il ne pouvait y avoir de fin à la misère des ouvrières. A tel point que cette danse avec la répétition de "tournez, tournez", évoquant un manège d'enfants plein de joie et d'insouciance, dépeint, au contraire, l'éternelle continuation du malheur.

 

Jacques Prévert, Chanson des Sardinières 

 

Paul Gruyer : conserverie de sardinières

Ce poème fut écrit par Jacques Prévert en 1935 à l'occasion d'une fête bretonne à Saint-Cyr, localité de Seine-et-Oise. Il a été publié en 1949 dans un recueil intitulé Spectacles.

 

Tournez tournez
petites filles
tournez autour des fabriques
bientôt vous serez dedans
tournez tournez
filles des pêcheurs
filles des paysans


Les fées qui sont venues
autour de vos berceaux
les fées étaient payées
par les gens du château
elles vous ont dit l’avenir
et il n’était pas beau


Vous vivrez malheureuses
et vous aurez beaucoup d’enfants
beaucoup d’enfants
qui vivront malheureux
et qui auront beaucoup d’enfants
qui vivront malheureux
et qui auront beaucoup d’enfants
beaucoup d’enfants
qui vivront malheureux
et qui auront beaucoup d’enfants
beaucoup d’enfants
beaucoup d’enfants...
 

Tournez tournez
petites filles
tournez autour des fabriques
bientôt vous serez dedans
tournez tournez
filles des pêcheurs
filles des paysans 

 

 Joséphine Pencalet

 

Première femme a être élue conseillère municpale
 

 

Joséphine Pencalet est l’un des visages de cette lutte victorieuse. En 1925, elle est élue conseillère municipale sur la liste présentée par le Parti communiste français. Election rapidement invalidée par le Conseil d'État, puisque les femmes n'ayant pas le droit de vote, elle ne sont pas considérées comme éligibles. Elle s'insurge contre cette annulation, mais le PC, qui avait pourtant fortement médiatisé sa candidature et son élection, ne la suit pas. Amère, s'estimant "utilisée", Joséphine Pencalet refusera de voter jusqu’à sa mort, en 1972. La petite sardinière bretonne reste cependant l'une des premières élues municipales en France." ( TV5 Ici

 

 Une autre chanson : Ecoutez le bruit de leurs sabots

 


 

Et même une BD