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dimanche 16 mai 2010

Dimanche poétique : Julos Beaucarne et Victor Jara


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                                            Victor Jara                                                        

Víctor Lidio Jara Martínez était un chanteur, auteur et compositeur populaire chilien. Membre du parti communiste chilien, il soutint l'unité populaire et le président socialiste Salvador Allende. Jara fut arrêté pendant la vague de répression qui suivit le  coup d'état du 11 septembre 1973 perpétré par les militaires avec l'aide du gouvernement de Nixon dont Kissinger était le secrétaire d'état.  Salvador Allende meurt (suicide? assassinat?) et le général Pinochet prend  pouvoir; c'est la fin de la démocratie.  Enfermé dans un stade avec des milliers de prisonniers, Jara est assassiné le 15 septembre et enterré à la hâte le 18 septembre 1973. Il faudra attendre le 5 décembre 2009 pour que le chanteur ait droit à des funérailles nationales en présence de la présidente du Chili, Michelle Bachelet.
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Quand il chante La lettre à Kissinger Julos Beaucarne, chanteur, auteur et compositeur belge, explique ainsi la raison de cette chanson : le devoir de mémoire

Il y a des centaines de silences qui assassinent
Pendant des siècles et des siècles
Nos oreilles sont là pour nous tenir éveillés
Il y a des réveille-matin qui sonnent comme des clairons
Il y en a peu qui chantent des berceuses

Quand nous écoutions La lettre à Kissinger dans notre jeunesse post 68, nous étions dans l'actualité  brûlante de la tragédie du Chili et éprouvions révolte, solidarité, émotion. La lette à Kissinger nous bouleversait. Mais d'où vient que ce texte est toujours aussi émouvant si longtemps après et qu'il peut toucher même ceux qui n'ont pas connu ces évènements?
C'est que le devoir de mémoire est de tous les temps et que l'écrivain, le poète témoignent de leur époque mais parlent aussi aux hommes de demain.
Le poète est là pour rappeler la fragilité d'une démocratie, le jeu souterrain des états qui ne respectent pas l'Humain, les crimes impunis des puissants; il est là pour prendre le parti de l'opprimé, de la victime. Il est là, faible en tant qu'être humain mais fort, pourtant, parce qu'il possède les Mots, et que la Parole  du poète fait trembler le pouvoir. Le martyre et l'assassinat de Jara ne s'expliquent pas autrement. C'est lui que l'on veut faire taire parce que l'on a peur de lui. Et  c'est un autre poète, Julos Beaucarne qui se lève à la mort du poète chilien, pour prendre le relais, et lui prêter sa voix .

j'veux te raconter Kissinger
l'histoire d'un de mes amis
son nom ne te dira rien peut-être
il était chanteur au Chili
ça se passait dans un grand stade
on avait amené une table
mon ami qui s'appelait Jara
fut amené tout près de là
on lui fit mettre la main gauche
sur la table et un officier
d'un seul coup avec une hache
les doigts de la gauche a tranché
d'un autre coup il sectionna
les doigts de la dextre et Jara
tomba tout son sang giclait
6000 prisonniers criaient
l'officier déposa la hache
Il s'appelait p't'être Kissinger
il piétina Victor Jara
chante dit-il tu es moins fier
levant les mains vides des doigts
qui pinçaient hier la guitare
Jara se releva doucement
faisons plaisir au commandant
il entonna l'hymne de l'U
de l'unité populaire
repris par les 6000 voix
des prisonniers de cet enfer
une rafale de mitraillette
abattit alors mon ami
celui qui a pointé son arme
s'appelait peut-être Kissinger
Cette histoire que j'ai racontée
Kissinger ne se passait pas
en 42 mais hier
en septembre septante trois


La littérature régionale est-elle affaire de ploucs ?

Je découvre souvent en lisant des blogs ou des chroniques,  des textes qui me parlent,  dont j’aime l’idée et l’écriture. J’ai envie de les conserver pour les relire. J’ai décidé de les “collectionner”.

  
Dans un article de son blog Scriptural intitulé La littérature régionale est-elle affaire de ploucs? Schlabaya dénonce le parti pris d'un article de Laurent Simon paru sur le site Zone Littéraire. Que l'article date de 2007 ne change rien car il est, a été, et malheureusement sera, je le crains, toujours d'actualité dans un pays centralisé comme la France. Il y a dans notre pays un  rejet de toute littérature française quand elle ne vient pas de Paris!

Le parisianisme aigu est, en effet, une maladie bien connue dont est atteinte une certaine frange culturelle, mineure, mais qui fait la loi et qui rejette comme inférieur tout ce qui n'est pas de son cercle! J'en profite pour affirmer ce qui est pour moi une évidence : il n'y a pas de littérature régionaliste, il y une bonne ou un mauvaise littérature et si elle est bonne, elle devient universelle.
Jean Giono
Si l'on s'en tient aux affirmations de Laurent Simon... 
"ces romans sont corps et âmes des utopies : une sorte de panthéisme littéraire, où le paysan est la terre et la terre est paysanne. En une conception finalement très rousseauiste, et complètement idéalisée, de la vie au contact de la nature matricielle : une sorte de mythologie païenne."
... l'on doit considérer les oeuvres de  Frédéric Mistral, de Giono, Bosco (ciel! des provençaux!) ou de George Sand pour ne citer qu'eux..  comme nulles. Et pourquoi pas Rousseau lui-même? Ou Virgile? Ah! j'oubliais, eux? non! Ils ne sons pas nés en province française!
Lisez donc  l'article de Schlabaya dans Scriptural (extrait) :
J'ai lu avec ahurissement et consternation, sur le site "Zone littéraire", un article, intitulé "Ouvrez le terroir-caisse !", dont le seul but est de dénigrer à l'envi la littérature dite régionale ou de terroir. Libre à chacun, bien entendu, d'exprimer librement son avis sur quelque ouvrage ou genre littéraire que ce soit - étant sous-entendu que la critique en question est également susceptible à son tour d'être critiquée. En l'occurrence, il y a de quoi s'en donner à coeur joie... Daté de 2007, ce billet d'humeur bilieuse commis par un certain Laurent Simon, a des relents assez malodorants.

Tout au long de son réquisitoire, Simon Laurent dénonce le fait que la littérature régionale, bien que peu médiatisée, se vend très bien, et rapporte donc aux auteurs et aux éditeurs des revenus conséquents. Il insinue évidemment qu'il s'agit là d'un fond de commerce peu honorable. Ce monsieur n'a sans doute pas réalisé que, dans un système capitaliste, toute entreprise privée est effectivement contrainte à la rentabilité. Il lui a sans doute échappé que même des maisons d'édition comme Actes Sud, P.O.L. ou Picquier, sont également soumises aux lois du marché, et tenues de générer des bénéfices. Toujours est-il que la prospérité d'une collection comme Terres de France  constitue à ses yeux un scandale qu'il convient de montrer du doigt. "Du propre aveu de Jeannine Balland, les à-valoir versés aux auteurs sont plutôt importants." Un "aveu" dont il conviendrait de rougir, sans doute ? Rétribuer équitablement les auteurs dont on publie les ouvrages, voilà qui est en effet répréhensible ! persifle-t-il...