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lundi 7 septembre 2020

Olivier Truc : Le cartographe des indes boréales


D’Olivier Truc, j’ai lu ses romans Le dernier lapon, Le détroit du loup, La montagne rouge, qui nous font vivre dans le pays des samis norvégiens, la Laponie, tel que j’ai pu le découvrir récemment au cours de mon séjour en Norvège, au-delà du cercle polaire. C’est dire si j’avais apprécié ces lectures qui précédaient mon voyage et qui décrivaient la vie de ces éleveurs de rennes, la transhumance, leurs coutumes, leur religion, la colonisation, les problèmes qu’ils rencontrent dans la Norvège contemporaine. Descriptions tellement précises et justes que je reconnaissais les lieux et m’attendais presque à tomber nez à nez avec les personnages du roman !
Ici, avec ce roman de 739 pages, intitulé Le cartographe des Indes boréales,  nous partons du pays basque où vit Izko pour voyager à travers l’Europe du XVII siècle, de 1628 à 1693, Portugal,  France, Pays-bas, Suède, Laponie suédoise, sans oublier une tragique chasse à la baleine dans l’archipel du Svalbard norvégien dans l’océan Arctique.
Ce roman qui s’appuie sur des bases historiques solides met en scène des personnages qui ont réellement existé, illustres comme la reine Christine, Pierre de Lancre, juge au parlement de Bordeaux pour en citer qu'eux.
Et puis il y a Izko, jeune garçon, âgé de 13 ans au début du roman. Il vit à Saint-Jean-de- Luz et rêve de devenir chasseur de baleines comme son père. Mais Pierre de Lancre, va en décider autrement. Pour des raisons que Izko mettra toute une vie à découvrir, ce personnage tout puissant va convaincre ses parents de faire de leur fils, un espion à la solde de Richelieu. Celui-ci doit partir à l’Ecole de Sagres au Portugal puis à Lisbonne pour apprendre la cartographie et il sera ensuite envoyé en Suède, à la cour de la reine Christine, puis en Laponie. Tout en cartographiant ces pays encore mal connus, il envoie des rapports qui permettent à la France de connaître les ressources naturelles de ces puissances étrangères et de louvoyer dans ses rapports conflictuels avec la Suède et les Pays-Bas.
La cartographie comme base de l’espionnage ! C’est là qu’on découvre l’importance de cette science toute nouvelle, les ateliers de cartographie d’Amsterdam, et le pouvoir que détiennent les cartographes capables d’envoyer à la mort un équipage d’un navire pour une faute de relevé involontaire ou de tricher sur les défenses d’une ville pour la rendre plus redoutable à ses ennemis !
Je me suis passionnée pour de nombreux aspects du roman : participer dans les moindres détails à une chasse à la baleine et découvrir les conditions de la vie rude et dangereuse de ces marins, rencontrer la fameuse reine Christine qui se convertit au catholicisme et renonça au trône, assister au naufrage du Vasa, le bateau que j’ai visité au musée de Stockholm, découvrir l’horreur de la chasse aux sorcières en France, et renvoyer ainsi dos à dos l’intolérance, le fanatisme, la folie meurtrière de l’église catholique et des pasteurs luthériens, deux églises toute puissantes qui font contrepoids au pouvoir royal  dans leur pays respectif pour le pire et non pour le meilleur !  Le portrait du pasteur luthérien rigide, cruel, avide de pouvoir, zélateur, est d’ailleurs très bien campé.
Mais plus que tout ce qui m’a intéressée, c’est d’en apprendre plus (les livres d’Olivier Truc et mes visites dans les musées ethnographiques m’en avaient donné un bon aperçu) sur la colonisation brutale, sauvage des samis, paupérisés par les exactions des colons, obligés de se convertir, d’abandonner leurs pratiques religieuses, privés de liberté, bref! traités comme des esclaves… Et de le découvrir par le biais du roman, c’est à dire à travers de personnages qui vivent l’histoire. Même si pourtant j’ai trouvé parfois trop longs et répétitifs certains passages.

J’ai beaucoup aimé ce roman mais il m’a manqué quelque chose pour qu’il devienne addictif. Parfois, il paraît un peu trop long comme je l’ai noté ci-dessus. Mais parfois, au contraire, les années défilent trop rapidement! Quand on commence à se laisser emporter par des passages de la vie d’Izko, on le retrouve déjà adulte ou âgé dans les chapitres suivants. 65 ans de la vie d’Izko, cet enfant sacrifié, cet homme victime, tourmenté, auquel on s’attache mais que l’on aimerait voir vieillir moins vite !
Alors trop long ou trop court, ce roman ? Je parais être en contradiction ! Mais j’ai parfois eu l’impression que ce roman fleuve avait en lui la matière pour plusieurs romans, une sorte de saga, permettant de s’attarder sur l’enfance d’Izko, sur certaines parties de sa vie tout en ne sacrifiant pas, bien sûr, l’intérêt historique du roman que j’ai vraiment apprécié !

Lu dans le cadre du pavé de l'été initié par Sur mes Brizées édition 2020




jeudi 20 avril 2017

Vilhem Moberg : La saga des émigrants Tome IV : Les pionniers du Minnesota/ Tome V Le Terme du voyage


Kristina et Karl-Oscar : départ de leur pays natal

Pour en finir avec La saga des émigrants de l'écrivain suédois Vilhem Moberg (voir billet n° 1 Tome I et II ; Billet n° 2 tome III) voici la présentation des deux derniers volumes dans ce billet n°3.

 Tome  IV : Les pionniers du Minnesota


Ce quatrième tome  raconte l’installation de la famille de Karl Oskar autour du lac Ki- Chi-Saga et la venue autour d’eux de  milliers de Suédois dont la colonie ne cesse d’augmenter. Avec la transformation des paysages, le défrichage de la forêt, l’ensemencement des champs et la relative prospérité qui s’en suit, nous assistons à la construction de l’Amérique :  Le Minnesota est reconnu comme état par Lincoln. La communauté suédoise doit s’organiser. Peu habitués à la liberté, eux qui étaient sous tutelle aussi bien temporelle que spirituelle dans leur pays d’origine, ils se rendent compte qu’ils ne peuvent plus rien attendre que d’eux-mêmes.  Entièrement libres même au point de vue religieux puisqu’ils n’ont pas de clergé, ils doivent décider de tout.  Ils doivent  se doter d’une église, d’une école…  La liberté va de pair avec la responsabilité :
"Ceci les obligea à faire preuve de vertus dont ils n’avaient pas l’usage dans leur pays natal. Ils transformèrent l’Amérique, - mais l’Amérique les transforma également."
Ce tome IV voit aussi le retour de Robert dans la famille de son frère et le récit de son épopée avec Arvid à la recherche de l’or californien. C’est un des épisodes les plus sombres du récit  dans lequel Vilhem Moberg  révèle une réelle puissance  dramatique. Le destin de Robert si épris de liberté et d’absolu et en même temps si naïf, si crédule, est un moment déchirant.

 Tome V Le Terme du voyage 


Les  deux personnages principaux  Kristina et Karl-Oscar ont vieilli. C’est comme l’indique le titre du Tome V, c’est le terme de leur voyage ! Tous deux ont été réunis toute leur vie pas un amour très fort, qui se passe bien souvent de mots, mais s’est consolidé dans une mutuelle compréhension et un soutien sans faille. Pourtant tous deux sont très dissemblables dans leur foi et dans leur adaptation au pays : La foi de Kristina doit passer par l’acceptation totale de la volonté divine même lorsqu’il s’agit de ses maternités à répétition qui épuisent sa santé et la mettent en danger. Pour elle, tout ce qui arrive est voulu par le créateur. Karl-Oscar, au contraire, mise sur la liberté et la volonté humaine. La réussite dépend de lui et de lui seul. Il est de cette race de pionniers qui a pour devise : « Aide-toi, le ciel t’aidera ». De même Kristina aura toujours la nostalgie du pays natal et refuse d’apprendre l’anglais; alors que Karl-Oscar fait tout pour pouvoir s’intégrer et se sentir réellement américain. C’est pourquoi il cherche à s’engager lorsque survient la guerre de Sécession. 

A la fin de ce dernier volume, la boucle est bouclée, les premiers colonisateurs s’éteignent et laissent la place à la nouvelle génération. Les enfants sont déjà de bons petits américains; ils parlent la langue et éprouvent même un peu de honte envers leur père qui parle si mal l’anglais. Ils n’ont pas de nostalgie pour un pays qu’ils ne connaissent pas. Ils sont l’Amérique en marche.

dimanche 16 avril 2017

Vilhem Moberg : La saga des émigrants Tome III La terre bénie


J’ai présenté les deux premiers tomes de La saga des émigrants de Vilhem Moberg Ici. Voici maintenant la suite :

Tome III :  La terre bénie

Une image du Minnesota de nos jours
Lorsqu’ils arrivent à New York, les émigrants ne sont pas encore au bout de leurs peines. La visite de Broadway par les plus intrépides, Robert et Arvid, est un véritable choc culturel. Mais la route est encore loin jusqu’au Minnesota.
Voici leur itinéraire selon les termes de leur contrat en date du 26 Juin 1850  : De New York à Albany par bateau à aubes en remontant l’Hudson; d’Albany à Buffalo par voiture à vapeur et de Buffalo à Chicago par bateau à vapeur.  Et puis par leur propre moyen jusqu’au Minnesota. Encore bien des dangers les guettent, le choléra règne à bord d’un des bateaux, c’est d’ailleurs une maladie endémique qui a décimé de nombreuses colonies partout dans le pays. Privations et souffrances pour la famille de Kristina et Karl Oscar et leurs amis.

Une recherche historique solide

Le train :  une voiture à vapeur qui terrifie les immigrants.
Comme dans les précédents romans, ce qui me frappe c’est la profonde connaissance de Vilhem Moberg envers son sujet. Il a fouillé toutes les archives concernant l’émigration suédoise en Suède et aux Etats-Unis et s’appuie sur des textes solides : la liste de de ceux qui sont partis du village de Ljuberg, les contrats qu’ils ont passés avec les compagnies maritimes, le prix qu’ils ont payé pour les différentes étapes du voyage et pour l’acquisition des terres, pour l’achat du matériel agricole et des animaux de ferme très coûteux, l’accueil réservé aux nouveaux  arrivants…. Mais il va encore plus loin grâce au courrier envoyé par les immigrants à leur famille restée au pays. Il peut ainsi décrire les mentalités des ces personnes déracinées, marquées par la religion et l’obscurantisme et par l’absence de liberté,  il peut connaître par l'intérieur les sentiments que ces gens ont éprouvés. Par exemple, leur terreur en montant dans un voiture à vapeur, un train qui crache le feu et peut à tout instant les brûler vifs. Une invention voulue par le diable? L’ivresse de découvrir des terres vierges, riches, à déchiffrer où la terre fertile rend au centuple les efforts du paysan pour l’ensemencer. Mais aussi la découverte d’un climat rigoureux avec un hiver enneigé et glacial et un été démesurément chaud. Et le mal du pays. Et puis la menace des indiens que l’on repousse de plus en plus loin. Vilhem Moberg a mis douze ans pour écrire ce livre, fruit de recherches approfondies.

Le thème épique

Minnesotta : prairie

On retrouve dans ce troisième tome, le thème épique avec, toujours, ce contraste entre la faiblesse de l’homme et la puissance infini de la nature.
Les immigrants avaient franchi la porte de l’Ouest. Ils se trouvaient à bord d’un nouveau bateau à vapeur et, sur celui-ci ils allaient traverser une nouvelle mer, qui ne ressemblait à aucune de celles qu’ils avaient déjà sillonnées, une mer qui n’était pas faite d’eau mais d’herbe, cette grande mer de l’Ouest américain ayant pour nom la prairie.

Ce qui donne lieu à de belles pages descriptives qui nous permettent d’imaginer le spectacle digne de la Création du monde qui s’ouvrait aux yeux de « ces paysans venus de la forêt ». Il y avait de quoi en avoir le vertige, et ceci d’autant plus pour un peuple nourri de la Bible.

Ces paysans venus de la forêt avaient un mouvement de recul devant l’immensité incompréhensible qui s’ouvrait devant eux. Ils désiraient certes trouver un sol plat et régulier, mais il ne fallait pas qu’il ne soit pas accidenté aussi vaste put-il être. Il manquait quelque chose, sur cette prairie : Dieu n’y avait pas totalement achevé la Création. Il avait fait le Ciel et la terre, il avait planté l’herbe et ce qui poussait sur le sol, mais il avait oublié les arbres, les buissons, les vallons et les hauteurs. Et cette mer constituée d’herbe et non pas d’eau les effrayait par son immensité, elle aussi?

Amitié et solidarité

Dans le film de J Toelle : Kristina et Karl-Oscar

Mais le roman est aussi une ode à l’amitié et la solidarité. Le danger le plus grave qui menace les immigrants en dehors des épidémies et de la faim, ce sont les autres. Toute une faune humaine qui rôde autour des nouveaux venus et cherche à gagner leur confiance pour mieux les détrousser. Gare aux naïfs et à ceux qui croient en la bonté humaine! Robert aussi bien que son frère aînée Karl-Oscar en font les frais. Pourtant, il y a de beaux moments d’humanité et des rencontres qui redonnent confiance en la nature humaine.
C’est là, en effet, que va naître la grande amitié entre Kristina et Ulrika la prostituée. Tout sépare pourtant ces deux femmes. D’un côté, la prude et religieuse Kristina, plutôt collet monté, si docile aux commandements de l’Eglise et à la parole du pasteur; de l’autre La Joyeuse comme on la surnomme, à la vie scandaleuse - Kristina apprendra que Ulrika est avant tout une victime- qui a son franc parler, un peu vulgaire, et nomme un chat un chat, elle qui connaît si bien les hommes et leurs désirs refoulés. Le partage du pain, scène biblique, dans le train, est une très belle scène  traitée avec sobriété et délicatesse. Entre elles, va naître une amitié irréductible.
Et puis la solidarité : Le pasteur Jakob les accueille avec tant de bonté à leur arrivée. Le contraste entre le clergé suédois riche, soutenant les intérêts des puissants, durs envers les pauvres qu’il domine par la peur, et Jakob si bon, si attentif, si délicat envers les humbles va être une révélation. 
Il y a aussi, cette vache que l’on prête à la famille et qui permet d’avoir du lait, sauvant les enfants d’une mort certaine pendant ce premier hiver dans le Minnesota et ces échanges de services et de compétences, ces partages d’outils, ces travaux faits en commun qui permettent d’avancer dans la construction des cabanes et le défrichage des terres. Une course contre la montre est engagée, les premières années, pour assurer la survie de la famille; sans compter les nouveaux enfants qui vont naître, bénédiction de Dieu (ou malédiction de la femme?) et bouches supplémentaires à nourrir. Avec Kristina, se développe le thème du mal du pays, du regret lancinant du pays natal. Contrairement à Karl-Oscar, la jeune femme s'adapte mal à son nouveau pays.  C’est aussi dans ce livre que l’on voit le départ de Robert et Arvid pour la Californie à la recherche de l’or. Ce n’est pas la cupidité qui mène Robert mais son désir d’être libre, d’être riche pour ne plus appartenir à aucun maître. De nombreux thèmes, donc , qui font la richesse de ce livre.

Ce tome III est donc encore un très beau moment de La saga des émigrants.

samedi 15 avril 2017

Vilhem Moberg : La saga des émigrants Tomes I et II Au Pays/ La traversée

 
Je lis moins en ce moment, lassitude ? mais il ne faut pas croire pourtant que je peux me passer de ma drogue quotidienne ! Il me faut simplement trouver des livres faciles à lire (bon, attention, cela ne veut pas dire idiots ! ) et qui me procurent une évasion voire une addiction ! Et cela existe ! C’est ce que je viens de vivre avec les cinq tomes de La saga des émigrants de l’écrivain suédois Vilhem Moberg  dans la collection de poche. Il peut avoir jusqu’à huit divisions dans d’autres éditions.

Mais évasion n’a rien de péjoratif, évasion signifie voyage passionnant, plein de découvertes, d’aventures, mais aussi de réflexions sur l’humain : sur la liberté de conscience, le rôle de la  religion et de de la foi, sur le libre arbitre aussi, sur le courage de ces hommes et ces femmes qui ont fondé l’Amérique et cultivé au péril de leur vie ces terres riches; ce qui n’occulte pas les problèmes des peuples amérindiens spoliés de leur terre, de leur terrain de chasse et voués à la famine. Cette suite de plus de 2000 pages a été élue par les suédois comme le meilleur roman de la littérature suédoise.

Tome I :  Au Pays


Dans le Tome I, sont posées les bases de l’histoire, les raisons de l’émigration et la présentation des personnages auxquels nous allons nous attacher pour cette longue traversée littéraire d’un continent à l’autre.
Car La saga des émigrants est un voyage dans l’espace et dans le temps : nous sommes dans le Smäland, province du sud-est de la Suède dans les années 1830 à 1850. A travers plusieurs familles de Ljuger et sur plusieurs années, le lecteur est introduit dans la vie quotidienne des habitants et comprend comment ceux-ci ont été poussés à l’exil. Le pays est régi par une autocratie rigoureuse dans laquelle le souverain est relayé par le clergé qui a tout pouvoir sur les consciences; la censure est telle qu’elle brime toute liberté individuelle. Les gens sont considérés comme hérétiques s’ils lisent la bible chez eux sans avoir recours au pasteur; la persécution religieuse est implacable pour ceux qui ne respectent pas strictement l’orthodoxie religieuse.

Enfin, c’est aussi un pays où la terre est rare pour les plus humbles, où la famine règne. On comprend, dans ce cas qu’il y ait eu plus d’un million de suédois, pour beaucoup des agriculteurs, qui choisit l’exil en Amérique, plus d’un million à quitter le pays pour s’installer sur les terres américaines attribuées aux colons qui viennent s’y installer pour les cultiver.
La famille Nilsa, le père Karl-Oscar, la mère Kristina et leurs enfants sont parmi ces mal lotis, s’échinant toute la journée sur une terre ingrate et caillouteuse, soumis aux aléas du climat ou de la sècheresse qui les laissent exsangues. De plus, la toute puissance des nantis, des riches propriétaires terriens sur leurs employés est sans limites. Les valets sont liés par un contrat à leur patron qui a tous les droits et peut exercer sa violence sur eux en toute légitimité. Ainsi le jeune frère de Karl Oscar, Robert, rêveur et insoumis, placé comme valet chez un maître brutal est frappé si violmment qu’il s’enfuit; poursuivi par la police, il est obligé de vivre caché. C’est lui qui, le premier, a l’idée de partir en Amérique et cherche à entraîner dans l’exil son ami Arvid. Son frère Karl Oscar le rejoint bientôt dans cette idée et, après la mort de sa petite fille pendant un hiver de famine, il donne corps à ce rêve en vendant la ferme. La fin de ce tome I raconte les préparatifs de départ et le ralliement de ceux qui décident de partir avec eux : le voisin, Jonas Petter, mal marié, qui fuit sa femme, l’oncle de Kristina, Daniel Andreadson, illuminé qui se croit investi d’une mission par Jésus et est obligé de fuir la persécution religieuse avec sa famille et ses convertis. Parmi eux, la prostituée Ulrika de Västergölh une femme de caractère et sa fille Elin

Tome II : La traversée



Ce qui est bien avec cette Saga, c’est que l’intérêt augmente d’un tome à l’autre. L’on a souvent entendu parler des souffrances subies par les pionniers entassés dans des cales exiguës, sans possibilité d’intimité ni d’hygiène, tourmentés par les poux, le mal de mer et bientôt le scorbut, mais c’est autre chose de le vivre par l’intermédiaire des personnages. Dès son premier pas sur La Charlotta, vieux rafiot qui ne semble pas pouvoir tenir la route, Kristina, enceinte, sait qu’elle va mourir. Nous assistons avec empathie aux épreuves quotidiennes qu’endurent les voyageurs. L’absence de vent retarde encore l’arrivée à New York. La maladie sévit, la mort rôde et emporte plusieurs d’entre eux. Les conditions de vie, les rapports conflictuels liés à la promiscuité, l’odeur pesitlentielle, la saleté, les vomissures qui s’incrustent dans les vêtements, les cheveux, sur les couvertures, sont décrits avec un tel réalisme que l’on a parfois l’impression de partager cet enfer.

D’autre part, Vilhem Moberg décrit avec beaucoup d’acuité la psychologie des personnages, leur révolte vis à vis de Dieu qui les abandonne à l’océan ou au contraire la foi qui les raffermit; leur peur de cette immensité liquide prête à les engloutir. Il analyse leurs sentiments lorsqu’ils comprennent que c’est un voyage sans retour, qu’ils ne reverront plus jamais la terre natale et les vieux parents qu’ils ont laissés désemparés sur le pas de la porte, et aussi les lieux où ils ont été jeunes et amoureux.

Le style est parfois empreint de nostalgie, parfois traversé d’humour comme lorsque Robert apprend l’anglais ; il peut atteindre le burlesque avec les contes grivois de Jonas Petter mais il prend aussi le ton l’épopée. En effet, il y a quelque chose d’épique dans cette traversée, dans le contraste entre l’infiniment petit, les hommes, face à l’immensité de l’océan.

Robert écoutait le fracas des paquets de mer, au-dessus de leurs têtes. Ils claquaient, clapotaient, puis coulaient sur le pont. Une puissante masse d’eau s’abattait, cognait contre le navire et rebondissait. Lorsque la vague se brisait sur le pont le bruit faisait vacarme et bouchait les oreilles comme une grande giffle. La vague venait frapper le flanc du navire, se brisait et retombait dans la mer. Puis survenait la suivante (…) Il écoutait ces vagues, les unes après les autres, et entendait le navire se libérer chaque fois de la langue de mer, échapper à la grande gueule béante du monstre. La Charlotta flottait toujours.

 L’énergie dans la marche de ce petit voilier se frayant un chemin sur les abysses, le courage, la détermination de ces pauvres gens, malgré leurs doutes et leurs angoisses, nous entraînent bien loin. Un suspense se crée; une envie d’arriver au port comme eux. Une lecture, donc, que l’on ne peut quitter. Je  dois dire que j’ai préféré le deuxième tome même si j’ai aimé le premier. Je considère Au Pays comme une  scène d’exposition nécessaire et intéressante. Mais La Traversée est animé d’un souffle plus intense.

Scène du film Les émigrants : Kristine, Karl-Oscar et leurs enfants

Je vous parlerai dans un prochain billet des volumes suivants : 
Tome III : La terre bénie
Tome IV : Les pionniers du Minnesota
Tome V : Au terme du voyage

Vilhem Moberg  auteur de La saga des émigrants : photographie de Lars Nordin.
Vilhem Moberg : photographie de Lars Nordin.


samedi 20 juin 2015

Stockholm : Historiska Museet : Le musée historique

Stockholm : Pierre runique du musée d'Histoire : département  Les Vikings
Runes de Historiska museet : Les Vikings

Historiska Museet de Stockholm se dresse dans le quartier résidentiel d'Ostermalm où siègent les ambassades et la radio-télévision.  Le marché couvert Saluhall que j'ai raté est paraît-il à voir! Entouré d'un parc immense où  je n'ai pas eu le temps de mettre le pied, Ostermalm ne compte pas moins de quatre grands musées. Je n'ai vu que que le musée d'histoire.

Ostermalm

Stockholm :  le quai de Strandvägen vu du pont de Djugarden dans le quartier de Ostermalm
Strandvägen vu du pont de Djugarden
Stranvagen avec ses palais des débuts des année 1900  et les voiliers des propriétaires amarrés au quai est une des plus riches artères de Ostermalm

 Historiska Museet

Musée historique de Stockholm : Département Histoire suédoise  le XVIII siècle
Historiska museet : Département Histoire suédoise  le XVIII siècle

Je n'ai visité que deux départements du musée historique de Stockholm qui est très vaste puisqu'il présente sur plusieurs étages le passé de la préhistoire à l'histoire moderne : Les Vikings et L'histoire de la Suède.

Mais d'abord un conseil : peut-être vaut-il mieux prendre un audio-guide en français qui vous permettra d'entrer dans la logique de l'exposition plus facilement. Ce que je n'ai pas fait car je n'aime pas visiter avec des écouteurs sur les oreilles.

 La muséographie est très belle, très recherchée, et toujours conçue avec un discours à la fois pédagogique et ludique en direction des enfants.  Je ne peux qu'être admirative devant la beauté de la présentation et la modernité de l'aménagement de l'espace.

J'ai cependant été un peu déçue par la conception très fragmentaire de l'histoire suédoise liée au fait que l'exposition soit résolument thématique. Et bien qu'un chemin de dates sillonnant le sol est censée vous permettre de vous repérer dans le temps, l'histoire suédoise apparaît tronçonnée, aléatoire : pourquoi mettre en valeur ce souverain plutôt qu'un autre, pourquoi occulter la nouvelle monarchie au XIX siècle (Bernadotte), la guerre au XX siècle? Le commissaire d'exposition revendique son choix mais personnellement je suis restée sur ma faim!

Stockholm : musée historique département histoire suédoise: la datation
Historiska museet : chemin chronologique dans le département de l'histoire suédoise

 Les Vikings

Musée historique de Stockholm :  Pierre runique viking
Pierre runique
Dans une première partie consacrée à la noblesse sont exposés des armes, des épées ciselées, des bijoux et des parures splendides, des ustensiles et des pierres runiques de toute beauté et la reconstitution d'un drakkar. Une vidéo un peu trop basique montre le rôle de la noblesse donc des guerriers vikings.

La deuxième partie est consacrée à Birka, le village au nord-ouest de Stockholm  qui est le berceau de la civilisation viking suédoise. Une maquette permet de voir Birka tel qu'il devait être alors. Le squelette d'une petite fille d'environ six-sept ans retrouvée sur les lieux a permis de reconstituer les traits de la fillette.  Et comme elle était d'une famille d'artisans aisés d'après les objets qui étaient auprès d'elle dans la tombe, on l'a habillée de rouge, cette couleur étant plus coûteuse.  Cette partie rappelle que les vikings n'étaient pas obligatoirement des guerriers mais des paysans, des éleveurs et des artisans. La femme y tenait un grand rôle.
La troisième partie de l'exposition montre  la christianisation de ce peuple avec l'arrivée en 830 du moine bénédictin Anschaire.

Musée historique de Stockholm :  département des Vikings : Birka ; reconstitution  d'une fillette d'après son squelette.
Historiska museet : Une fillette viking

Musée historique de Stockholm :  département des Vikings : Birka ; reconstitution d'un village Viking.
Birka : reconstitution d'un village Viking.

jeudi 18 juin 2015

Stockholm : Waldemarsudde Prins Eugen / Musée du Prince Eugène


Stockholm : Nils Gunnar Zander : Territoire du Silence, de l'autre côté de 25 ans. exposition au Prins Eugène Waldemarsudde
Nils Gunnar Zander : Territoire du Silence, de l'autre côté de 25 ans. (source)

 Le prince Eugène est l'arrière-petit fils de Bernadotte. Il se coupa un peu de la famille royale en embrassant le métier de peintre. Il acheta Waldemarsudde sur l'île de Dujugarden pour se consacrer à son art et devint aussi un grand mécène; ce qui explique la richesse de sa collection. Les deux passions du Prince Eugène étaient la peinture et les fleurs. C'est ce que reflète sa demeure.  Dans les appartements du Prince sont exposées ses oeuvres et celles d'autres peintres suédois. Le musée Waldemarsudde donne chaque année des expositions temporaires. 

Stockholm : Prins Eugen Waldemarsudde : île de Djugarden
Prins Eugen Waldemarsudde : île de Djugarden
Stockholm :  le palais-musée du Prince Eugène sur l'île de Djugarden
Prins Eugen Waldemarsudde : île de Djugarden

Stockholm :  Entrée du musée Prins Eugen Waldemarsudde sur l'île de Dujugarden
Entrée du musée Prins Eugen Waldemarsudde
Stockholm : Ivar Johnsson : Bronze du  prince Eugène à Waldemarsudde sur l'île de Djugarden
Ivar Johnsnsson : Le prince Eugène

  Nils Gunnar Zander :  Territoire du Silence, de l'autre côté de vingt-cinq ans

Je commence par vous montrer des images de l'exposition qui m'a le plus plu :  un véritable coup de coeur pour ce peintre, né à Stockholm en 1944. Il partage sa vie entre Stockholm et Melbourne depuis 25 ans et il est très marqué par les couleurs et les formes des paysages australiens d'où le titre de l'exposition qui a lieu du 13 Juin au 20 Septembre 2015. Photographier étant interdit dans les expositions temporaires, je vous présente des images du site de Prins Eugen Waldemarsudde.
Stockholm exposition temporaire de Prins Eugen Waldemarsudde : Nils Gunnar Zander
Nils Gunnar Zander source
 Stockholm : exposition temporaire du musée du Prince Eugene  :Nils Gunnar Zander (voir site du Waldermarsudde Prins Eugen)
Nils Gunnar Zander source
Stockholm : Nils Gunnar Zander exposition temporaire du 13 juin au 20 Spetembre de Prins Eugen Waldemarsudde
Nils Gunnar Zander : Source
Mon imagination se perd dans ces paysages de Nils Gunnar Zander qui semblent nous projeter au milieu des constellations, dans un incroyable Big Bang silencieux où la silhouette humaine semble se fondre, voire se dissoudre. J'aime ces teintes ocres et rouilles qui évoquent pour moi la couleur de la terre et les gris bleutés des espaces infinis.

Ruben Heleander : Changements de la nature

J'ai beaucoup aimé aussi ce peintre suédois qui peint les paysages d'Osterlens : arbres qui paraissent s'effacer dans la brume, petits matins bleutés où la lumière est diffuse, où l'eau et l'air semblent mêlés si étroitement que l'on ne peut les distinguer, teintes automnales, variations des saisons. L'arbre est peint sous toutes ces formes, un étalement du même  motif qui  est toujours, aussi, un paysage intérieur.

Stockholm exposition temporaire du 13 Juin au 20 Septembre  de Prins Eugen  Waldemarsudde  : Ruben Heleander Changements de la nature
Ruben Heleander : Changements de la nature (source)
Ruben Heleander : Changements de la nature (source)
Ruben Heleander : Changements de la nature (source)

 Emil Nolde

Emil Nolde : paysage
Emil Nolde est un peintre allemand expressionniste bien qu'il se dise libre par rapport au mouvement artistique. Si j'ai aimé ses paysages aux couleurs violentes, aux formes tourmentées, et les fleurs qu'il a peintes quand il s'est rapproché de la nature, j'ai  été choquée par l'antisémitisme  affirmé de certains de ses tableaux. Sa biographie nous apprend qu'il a adhéré au parti national-socialiste dont il partageait les idées. Il a été pourtant considéré par le parti nazi comme un artiste "dégénéré" et ses peintures ont été interdites ou brûlées.

Emil Nolde source



Emil Nolde source

La demeure du Prince Eugène : Intérieur

Waldemarsudde Prins Eugen: Interieur

A l'intérieur du palais du Prince Eugène, sur les murs du salon, de la bibliothèque... on peut découvrir des oeuvres du prince et d'autres artistes suédois. Ce n'est pas toujours facile d'aller voir de près ces tableaux, les pièces étant interdites d'accès par des cordons et c'est bien dommage!
Waldemarsudde Prins Eugen : Intérieur

Les jardins de Prins Eugen Waldemarsudde

Stockholm, Waldemarsudde Prins Eugen : Héraclès  bronze original de Antoine Bourdelle 1909
Héraclès de Antoine Bourdelle
Le parc, les jardins et les dépendances du musée qui domine l'entrée du port de Stockholm sont un véritable délice!  Encore une fois, c'est un endroit où il faut se donner le temps de flâner pour admirer les points de vue, la rive ombragée par des arbres romantiques dont les branches retombent au-dessus de l'eau où nagent des cygnes,  les magnifiques statues, les allées bordées de lilas fleuris,  une profusion de fleurs et de plantes et des dépendances pleines de charme, atelier-musée du peintre, orangeraie, "étable à voitures" (quand le mot garage n'existait pas), moulin...


Prins Eugen Waldemarsudde : île de Djugarden

Prins Eugen Waldemarsudde : île de Djugarden

Prins Eugen Waldemarsudde : île de Djugarden

Prins Eugen Waldemarsudde : île de Djugarden Le moulin

Prins Eugen Waldemarsudde : île de Djugarden la Victoire de Samothrace

Prins Eugen Waldemarsudde : île de Djugarden La gloriette

Prins Eugen Waldemarsudde : île de Djugarden Dépendance

Prins Eugen Waldemarsudde : île de Djugarden des allées fleuries seringa

Prins Eugen Waldemarsudde : île de Djugarden de magnifiques lilas

Prins Eugen Waldemarsudde : île de Djugarden Dépendances

Prins Eugen Waldemarsudde : île de Djugarden Statue de?

Prins Eugen Waldemarsudde : île de Djugarden Chêne séculaire

Promenade du Musée Waldemardusse à Thielska Galleriet

En suivant la rive, on peut aller du musée du prince Eugène à la Gallerie de Ernest Thiel  dont je vous ai parlé dans un billet précédent Ici. 

Musée Prince Eugène

Waldemarsudde prince Eugène
La tombe du Prince Eugène
Le jardin de Waldemarsudde


Promenade vers la Thielska Galleriet

Vers la Thielska Galleriet
De belles maisons sur la rive : vers la Thieska Galleriet

Du prins Eugen à Thielska Galleriet

Du prins Eugen à Thielska Galleriet : les jardins

Du prins Eugen à Thielska Galleriet
Du prins Eugen à Thielska Galleriet
Stockholm : Du Prins Eugen Waldemarsudde à la Thielska Galleriet île de Djugarden
Du Waldemarsudde vers la Thielska Galleriet
 Thielska Galleriet