Elle est à la terrasse d'un café et elle n'attend personne. Un jeune homme s'arrête près d'elle qu'elle ne connaît pas et il l'interroge : "Anna?". Il ne connaît pas Anna, il l'a rencontrée sur internet, c'est leur premier rendez-vous. Elle ne connaît pas Anna mais elle répond affirmativement. Alors, elle improvise, elle recueille des informations sur l'inconnue en le faisant parler, elle imagine, elle entre dans la peau du personnage. Désormais pour Williams, elle sera Anna …
Après, il faudra prendre un autre rendez-vous… Il faut tenir le rôle par petites parcelles qu'il mettra bout à bout, William, puisque c'est son nom et, de ces segments collés ensemble, il fera quelque chose de moi, comme on fabrique un personnage avec des allumettes, en attendant de mettre le feu à l'échafaudage.
William est photographe : Son travail consiste à faire disparaître l'oeuvre photographique au profit du modèle. L'Anna qu'il voit devant lui se superpose à l'image qu'il se faisait d'elle. Chacun, à sa manière, va donc être créateur d'une femme qui ne vit que dans leur imaginaire.
Quant à la narratrice, elle existe désormais en double et peut-être en triple! En tant qu'elle-même, elle est cette enfant dont le père est parti après l'avoir rejetée violemment et qui s'est suicidé. Elle s'est créé un père imaginaire, parfait, bien sûr, tant qu'à faire! En tant qu'Anna, elle s'invente un travail, des goûts, une personnalité. Enfin, puisque qu'on lui demande quel photographe elle aime, elle "fabrique"Alice Kahn, une artiste qui va prendre vie grâce à elle.
Alice Kahn, est le premier roman de Pauline Klein qui a travaillé dans le milieu de l'art, en particulier dans une galerie à New York. Ne vous attendez pas à une narration classique avec histoire d'amour à l'appui. Il s'agit plutôt d'une réflexion sur l'identité, sur l'art, sur la création en général.
Alice Kahn crée de l'art à partir de rien. Un jour, elle entre au Musée de l'Art romantique avec un petit portrait encadré qu'elle dépose au milieu d'autres objets authentiques du musée. Je le regarde s'habituer et s'adapter à son nouveau milieu… Puis elle reprend le petit cadre en prenant bien soin d'être vue par le gardien : Le vigile s'avance rapidement vers moi avec son mauvais regard, demande que je repose l'objet immédiatement, c'est écrit juste là : "ne pas toucher". Mon petit portrait fait maintenant partie de l'exposition.
Le milieu artistique y est décrit de même que le snobisme des prétendus "connaisseurs" : ainsi tout le monde feint d'apprécier l'oeuvre d'Alice Kahn lorsque Anna en parle sans savoir qu'elle n'existe pas! William, quant à lui, dénonce le marché de l'art qui n'a plus rien d'authentique :
Je vais te dire, les mecs qui s'y connaissent soi-disant, il sont juste bons à dépenser leur fric dans des trucs conceptuels auxquels ils ne comprennent rien pour avoir l'impression de faire partie d'un club…
On lit ce qu'on nous donne à lire, et on bouffe ce qu'on nous donne à bouffer. C'est pareil pour l'art, on n'a pas le choix que ce qu'on nous donne à voir.
Curieux petit livre que je ne comprends pas entièrement et qui est assez étrange et déstabilisant de prime abord. L'effet de surprise dissipé, je cherche le sens et je crois le trouver dans cette phrase :
Une image dans un cadre dont je suis spectatrice, et que je pourrais raconter, comme on raconte un rêve, à d'autres gens qui souriront, ou pas d'ailleurs, et me donneront leur interprétation, bonne ou mauvaise.
Et si en fait, nous dit l'auteur, le monde n'était qu'une image? Et si en fait, être artiste mais aussi écrivain, c'est se trouver là pour le regarder et semer des petits cailloux en rassemblant des hasards pour en faire du sens!*
Je passe inaperçue, mais je dépose des traces de ma présence. Je vis pour me souvenir de mes moments d'absence.
Voir le billet de George
* interview de l'écrivain
Après, il faudra prendre un autre rendez-vous… Il faut tenir le rôle par petites parcelles qu'il mettra bout à bout, William, puisque c'est son nom et, de ces segments collés ensemble, il fera quelque chose de moi, comme on fabrique un personnage avec des allumettes, en attendant de mettre le feu à l'échafaudage.
William est photographe : Son travail consiste à faire disparaître l'oeuvre photographique au profit du modèle. L'Anna qu'il voit devant lui se superpose à l'image qu'il se faisait d'elle. Chacun, à sa manière, va donc être créateur d'une femme qui ne vit que dans leur imaginaire.
Quant à la narratrice, elle existe désormais en double et peut-être en triple! En tant qu'elle-même, elle est cette enfant dont le père est parti après l'avoir rejetée violemment et qui s'est suicidé. Elle s'est créé un père imaginaire, parfait, bien sûr, tant qu'à faire! En tant qu'Anna, elle s'invente un travail, des goûts, une personnalité. Enfin, puisque qu'on lui demande quel photographe elle aime, elle "fabrique"Alice Kahn, une artiste qui va prendre vie grâce à elle.
Alice Kahn, est le premier roman de Pauline Klein qui a travaillé dans le milieu de l'art, en particulier dans une galerie à New York. Ne vous attendez pas à une narration classique avec histoire d'amour à l'appui. Il s'agit plutôt d'une réflexion sur l'identité, sur l'art, sur la création en général.
Alice Kahn crée de l'art à partir de rien. Un jour, elle entre au Musée de l'Art romantique avec un petit portrait encadré qu'elle dépose au milieu d'autres objets authentiques du musée. Je le regarde s'habituer et s'adapter à son nouveau milieu… Puis elle reprend le petit cadre en prenant bien soin d'être vue par le gardien : Le vigile s'avance rapidement vers moi avec son mauvais regard, demande que je repose l'objet immédiatement, c'est écrit juste là : "ne pas toucher". Mon petit portrait fait maintenant partie de l'exposition.
Le milieu artistique y est décrit de même que le snobisme des prétendus "connaisseurs" : ainsi tout le monde feint d'apprécier l'oeuvre d'Alice Kahn lorsque Anna en parle sans savoir qu'elle n'existe pas! William, quant à lui, dénonce le marché de l'art qui n'a plus rien d'authentique :
Je vais te dire, les mecs qui s'y connaissent soi-disant, il sont juste bons à dépenser leur fric dans des trucs conceptuels auxquels ils ne comprennent rien pour avoir l'impression de faire partie d'un club…
On lit ce qu'on nous donne à lire, et on bouffe ce qu'on nous donne à bouffer. C'est pareil pour l'art, on n'a pas le choix que ce qu'on nous donne à voir.
Curieux petit livre que je ne comprends pas entièrement et qui est assez étrange et déstabilisant de prime abord. L'effet de surprise dissipé, je cherche le sens et je crois le trouver dans cette phrase :
Une image dans un cadre dont je suis spectatrice, et que je pourrais raconter, comme on raconte un rêve, à d'autres gens qui souriront, ou pas d'ailleurs, et me donneront leur interprétation, bonne ou mauvaise.
Et si en fait, nous dit l'auteur, le monde n'était qu'une image? Et si en fait, être artiste mais aussi écrivain, c'est se trouver là pour le regarder et semer des petits cailloux en rassemblant des hasards pour en faire du sens!*
Je passe inaperçue, mais je dépose des traces de ma présence. Je vis pour me souvenir de mes moments d'absence.
Voir le billet de George
* interview de l'écrivain