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lundi 29 août 2011

Retour de vacances: Avignon, Marseille, Lozère, Creuse, Lille, Creuse, Lozère, Avignon

Retour à Avignon
Et me voilà de retour après des vacances bien remplies et mouvementées.

  Le mois de Juillet a été consacré au festival d'Avignon.

 J'ai vu beaucoup de pièces de théâtre que j'ai commentées dans mon blog et si  je dois faire mon palmarès, je placerais parmi mes coups de coeur, une pièce dans le IN : Kristin d'après Mademoiselle Julie de Strinberg
Une pièce pour enfants vue avec ma petite fille de 15mois : Onda prima

Départ en Lozère via Marseille

 Ruisseau lozérien

Fin du mois de Juillet ; déménagement de Marseille vers la Lozère  ma fille Aurore, la Petite Dernière qui part aux Etats-Unis pour un an.
Début août :  Avignon de nouveau pour les ultimes préparatifs du voyage puis pour la mettre à l'avion  à l'aéroport de Marseille.
Août : Retour en Lozère avec ma fille Aurélia - la Plus Grande -, Yannick  et ma petite fille Léonie

 Mi-août départ en Creuse rejoindre ma fille Amandine (la moyenne, vous vous y retrouvez? Heureusement il y en n'a que trois!))  et  Pierre pour donner un coup de main pour la restauration de leur maison.

 Une vieille maison entourée de granges dans un petit hameau creusois

Une vieille maison peuplée de fantômes, pleine de souvenirs





Robes de fillettes


Détails broderies



 Un Saint veille dans le jardin



Un habitant bien vivant de la maison (mais pas des plus actifs, il faut le reconnaître!)
photos d'Amandine

 Travaux intensifs, apéros le soir dans le jardin après le boulot devant de magnifiques couchers de soleil. Récurage des joints du plancher de la salle de bain. A genoux! Si vous n'avez pas de rhumatismes avant, vous en aurez après :  Garanti!  Pêche à l'écrevisse dans la rivière de la Creuse. Bataille rangée avec une de ces bébêtes récalcitrantes qui ne voulait pas mourir et s'est carapatée dans la salle à manger. Gâchées de ciment ou de chaux pour les forts en bras! Réfection du plancher de la grange ...  ça avance, avance! En fait, j'adore la restauration de cette vieille maison. J'aimerais pouvoir en faire plus mais je ne peux me charger que des petits travaux. Remise solennelle de La patate d'Or à mon petit neveu, vaillant combattant du Monstre Patator. Orage de grêle violent qui a détruit le si joli jardin d'Amandine; une citrouille sauvée, pourtant, pour le carosse de Cendrillon.
Un nouveau déménagement, cette fois-ci de la Creuse vers Lille et vice versa pour déménager le reste des affaires restées en garde-meuble à Lille après les études de la Petite Dernière. 1800 km en deux jours! Bravo au conducteur du camion  qui a conduit vaillamment  et sans faiblir pendant ce long voyage ( pas moi j'en aurais été bien incapable), père dévoué voire père pélican .. un peu flagada au retour à Avignon  après environ 4000 km de trajet total et deux déménagements!  En espérant qu'il va pouvoir se reposer après les "vacances" d'été!

Avec toutes ces péripéties, je n'ai pas pu m'occuper beaucoup de ma Librairie; heureusement, j'avais programmé des articles de mon ancien blog.
  Je n'ai pas  eu non plus le temps de lire énormément, vous vous en doutez! Voici les livres du mois d'août :

Rentrée littéraire avec :

Amalia Albanesi de Sylvie Tanette 











Famille modèle de David Puchner



 




Le testament de Ben Zion Avrohom de James Frey










Une LC avec Canel 

Tokyo de Mo Hayder









et un roman que je termine pour la lecture de Calypso et dont le titre doit comporter le mot soleil  :


Laurent Gaudé : Le soleil des Scorta









Et voilà pour mon été! A mon tour de venir lire vos aventures.

mardi 26 juillet 2011

Kristin , Nach Fraülein Julie. Christine d'après mademoiselle Julie de Strindberg de Kathie Mitchell et Leo Warner


Avis de Claudialucia

J'ai vu Kristin dans le cadre du festival In, une pièce créée par le metteur en scène Katie Mitchell et le vidéaste Leo Warner avec les comédiens du Schaubühne Berlin d'après Mademoiselle Julie de Strindberg. Et disons le tout de suite, c'est une réussite tant au point de vue de la réalisation technique que de l'esthétique du spectacle et de l'émotion qu'il procure au spectateur.  Un spectacle qui combine étroitement deux arts, le théâtre et le cinéma, avec une  égale maîtrise. Un coup de coeur!

Rappelons l'intrigue de la pièce de Strindberg.
Pendant la nuit folle de la Saint-Jean qui lâche la bride aux maîtres comme aux serviteurs, mademoiselle Julie séduit son domestique et/ou  se laisse séduire par lui. Ils croient pouvoir bousculer les rapports de classes traditionnels, remettre en cause la hiérarchie sociale et s'imaginent s'enfuyant ensemble pour refaire leur vie au loin. Mais le lendemain de fête les ramène à eux-mêmes, chacun enfermé dans son rôle social et Julie se suicide.

Le serviteur, Jean, un jeune homme séduisant et ambitieux, beau parleur aussi, est fiancé à Christine, une servante qui joue un rôle secondaire dans la pièce.  Katie Mitchell et Leo Warner s'emparent de ce personnage pour imaginer ce que la servante a vu, compris ou saisi de l'aventure entre sa maîtresse et son fiancé et quels ont été ses sentiments. Il a donc fallu, en fait, réécrire une nouvelle pièce où Kristin devient le personnage central, tout en restant le plus proche possible de celle de Strindberg.

Grâce à un ingénieux dispositif scénique, le décor de la maison de Julie qui se transforme par des panneaux coulissants entre intérieur et extérieur, on peut se rendre compte que Kristin est à même de voir et d'entendre ce qui se passe dans les pièces où elle n'est pas. Il en de même pour l'extérieur qu'elle observe d'une fenêtre. Si bien qu'elle suit, et avec quelle douleur rentrée! l'idylle qui se noue entre les jeunes gens, sans jamais pouvoir exprimer sa révolte, son humiliation, son chagrin, elle, servante soumise au pouvoir de sa riche maîtresse comme à  celui de l'Homme, Jean, qu'elle sert avec dévouement.

En même temps que se déroule le drame au théâtre, celui-ci est filmé de près par plusieurs caméras qui suivent les comédiens. Le film se fait devant nous, projeté sur un écran au-dessus du décor, nous permettant d'assister à la représentation théâtrale et simultanément à la réalisation filmique! Un enrichissement certain pour le spectateur qui peut voir à la fois la scène de l'extérieur de la maison mais aussi de l'intérieur, dédoublement spatial absolument étonnant et qui nous éclaire sur les personnages. Grâce au film, le spectateur approche les comédiens de près, observe les gestes quotidiens de la servante qui confectionne un plat pour son fiancé, vaque à ses occupations, puis épie, traque avec obstination les amants. Par l'intermédiaire de  gros plans sur son visage transparaissent tous ses sentiments; son silence, car la servante parle peu est plein de douleur et de reproche.
Quant au film qui se réalise devant nous, il faut d'abord souligner l'exploit technique qu'il représente, plusieurs caméras filmant au pied levé Kristin mais aussi sa doublure, et les doublures  de ses mains, une Kristin démultipliée qui nous apparaît ainsi sous diverses facettes. Mais ce qui est saisissant, c'est la beauté du film, magnifié par de splendides éclairages, halos des lampes en cuivre qui crée des clairs-obscurs dignes d'un tableau de Rembrandt. Notons aussi la beauté du texte très poétique repris en allemand par une voix féminine puis masculine qui accompagne les images.

 Peu à peu, nous entrons dans la peau de la servante qui devient si proche de nous que nous sentons l'émotion nous gagner, nous sommes envahis par  la pesanteur  qu'elle éprouve et que rien ne semble pouvoir soulager.

Avis de Wens
 
Katie Mitchell a décidé d'adapter la pièce de Strinberg en se plaçant  le regard et l'écoute de Christine, la cuisinière que  Jean le valet délaisse pour la fille de la maison, Julie.
     Sur un vaste écran est projeté un film qui adopte le point de vue de Christine. Le spectateur  est invité à partager  son drame profond et intime, à plonger dans un univers étouffant et angoissant digne de Bergman. Pas un cri, mais simplement une attitude, un geste, un regard suffisent à trahir le désespoir et la souffrance intérieure de Christine. Magie du cinéma, on lit tous les sentiments sur le visage de l'actrice  grâce aux gros plans, ce qui habituellement est pratiquement impossible à voir
au théâtre, à moins d'occuper les premiers rangs.
    Mais sous l'écran, la pièce se joue, elle est filmée en direct. Jusqu'à cinq caméras en mouvement suivent les acteurs au plus près, captent leurs émotions. Le montage image s'effectue en direct avec une rigueur étonnante, tous les raccords sont exceptionnels d'une grande beauté : mouvements, gestes, regards…Ce montage nécessite plusieurs "Chistine" qui est alors doublée par d'autres actrices venant prêter, une partie de leur corps, leurs mains.
     Le mixage son est aussi réalisé en "live". Les quelques beaux dialogues sont enregistrés avec des niveaux sonores variables, parfois ils nous parviennent étouffés, perçus à travers une cloison ou le plancher de la chambre de Christine. En effet la perception des dialogues de Jean et Julie est subjective, nous entendons comme Christine en fonction de l'endroit où elle se trouve. Dans quelques scènes, apparaissent des voix off splendides, enregistrées par les comédiens présents sur la scène. La poignante musique originale pour violoncelle, jamais envahissante, de Paul Clark est interprétée devant nos yeux sur le plateau. Les bruitages sont réalisés aussi en direct. L'eau qui coule, le son des verres qui s'entrechoquent, le couteau qui s'enfonce dans un morceau de viande…tous ces simples bruits du quotidien  soulignent l'enfermement social  de Christine.
     Le décor est constitué de deux pièces fermées. L'une est censée être la chambre de la domestique, le spectateur dans la salle de théâtre ne voit pas l'intérieur, il ne le verra qu'à travers l'objectif d'une caméra présente dans la chambre. Christine, très prude, enlève son corsage à l'abri des regards ; nous partageons son domaine intime où sur un mur figure en bonne place un crucifix qui souligne le caractère très religieux du personnage. La seconde pièce est la cuisine, l'intérieur n'est visible pour le spectateur que par quelques fenêtres. C'est le lieu de travail de la cuisinière, toute irruption de Jean ou de Julie dans cet espace brise l'équilibre social et moral, brise les conventions. Un couloir relie la chambre et la cuisine. Sur ce sombre corridor s'ouvrent de nombreuses portes que Christine souvent ne fait qu'entrouvrir. A travers l'entrebâillement, elle observe, écoute… parce que dans les dialogues entre Julie et Jean se joue son destin. Deux cloisons mobiles transforment la disposition du décor, et permettent de donner l'impression d'une vaste demeure, l'illusion est telle que nous en arrivons à penser que les chambres sont situées à l'étage alors que tout le décor est de plein pied. La maison n'est pas un lieu clos, elle est  ouverte sur une grande rue animée, comme le montre des ombres de passants marchant devant les fenêtres. Une porte s'ouvre : des cris de joie de la fête de la Saint-Jean ou le chant d'un oiseau, la lumière du soleil pénètrent dans le lieu du drame en un terrible contrepoint.
Rarement le théâtre peut nous offrir un tel moment de bonheur, quand le plaisir de l'esprit rejoint le plaisir des sens.

vendredi 22 juillet 2011

Festival OFF d'Avignon : Plaisanteries de Tchékov par la compagnie La Crème

La compagnie La crème donne dans la chapelle de Notre-Dame à Avignon un spectacle de Tchekov :  Plaisanteries composé de trois petites pièces du dramaturge russe :  les méfaits du tabac, Tragédien malgré lui et l'Ours. Ces oeuvres n'appartiennent pas au grand répertoire de Tchekhov. Ce sont des comédies  courtes et légères du moins en apparence.

Dans Les méfaits du tabac, un professeur vient, sur l'ordre de sa femme, faire une conférence sur les méfaits du tabac pour une association charitable. De digression digression,  l'homme se laisse aller à des confidences et l'on s'aperçoit bientôt qu'il est bafoué par son épouse, traité comme un domestique, soumis et sans défense. Face à sa vie gâchée, il a des rêves d'évasion qui ne se réaliseront jamais! Pas si légère, finalement cette courte pièce!
Hélas! je n'ai pas été convaincue par l'interprétation qui ne fait pas passer le tragique de l'échec du personnage.

Avec Tragédien malgré lui nous retrouvons sensiblement le même thème. Un homme expose à son ami la manière dont sa femme  et toute sa famille l'exploitent, le ridiculisent. Le monologue -car l'ami reste quasi muet-  ne s'achève qu'à la chute finale qui provoque le rire malgré sa cruauté. Là encore pas assez de nuances dans cette  mise en scène et cette interprétation qui manquent de subtilité. Elle ne rend pas vraiment compte du comique et ne souligne par le tragique sous-jacent.

Enfin l'Ours qui est la plus développée de ces petites scènes raconte l'histoire d'un propriétaire terrien, sorte d'ours mal léché, misogyne et  coléreux, qui vient rendre visite à une veuve éplorée pour lui réclamer l'argent dû par son mari défunt. Et ce qui doit arriver arrive, ces deux êtres de caractère  après s'être copieusement insultés,  tombent dans les bras l'un de l'autre!

J'ai aimé  cet Ours servi par deux bons comédiens qui savent rendre le caractère inflammable des protagonistes et maintenir un crescendo trépidant dans les scènes  de dispute.  Le comique vient des contradictions des personnages, de leurs  revirements, des brusques emportements qui vont jusqu'à la démesure voire l'absurde, ce  que les deux comédiens ont su rendre avec une belle énergie et vitalité. Il est dommage, cependant, que l'exiguïté de la scène ne leur permette pas de s'exprimer sans contrainte.  C'est le meilleur moment du spectacle!

 Avis de Wens

Trois textes courts de Tchekhov sont regroupés pour constituer une bonne heure de spectacle. Dans un espace digne d'un aquarium de salon, où la mise en scène est réduite à sa plus simple expression et l'éclairage inexistant, tout repose sur la qualité de l'interprétation. Dans "les méfaits du tabac" un vieux conférencier s'adresse à nous pour faire le bilan tragique de sa pitoyable existence. L'acteur s'efforce de dire le mieux possible un texte, avec des attitudes étudiées, des respirations… travail sur le corps et sur la voix, certes, mais sans aucune émotion, on ne partage jamais la souffrance du conférencier palpable dans le texte. On souhaite ardemment que la conférence cesse, on voudrait  allumer une clope même si on n'est  pas fumeur. Aucune empathie. Ennui. Le "Tragédien malgré lui" hurle son désespoir  d'être une marionnette manipulée par son épouse dans des aigus toniques. Vos oreilles réclament une boule quies. Vous comprenez l'épouse. Aucune émotion. Ennui. Heureusement "l'Ours" apparaît en face d'une veuve tout de noir vêtue, recluse dans son domaine, vous en arrivez à oublier l'inconfort de la salle, vos jambes repliées sur votre menton, les reins brisés et vous commencez à sourire, à rire même. Magie des acteurs. Un très inégal spectacle.




Plaisanteries De Tchekhov 
Théâtre Notre-Dame
du 8 au 31 Juillet à 19H15
Durée 1h15

mercredi 20 juillet 2011

Festival OFF d'Avignon : Volpone d 'après Ben Jonson par la Fox Cie


Volpone par la Fox Compagnie


Ben Jonson( 1572-1637)
  On sait que Volpone, Le Renard en italien, grand seigneur vénitien, veut soutirer de l'argent à ses prétendus amis  qui guettent son héritage! Grâce à la complicité de son valet, Mosca, il se fait passer pour mourant. Les charognards viennent le voir sur son lit de mort, lui apportant de coûteux cadeaux,  espérant ainsi devenir son héritier. Volpone se croit rusé mais rira bien qui rira le dernier!
Avec cette pièce, Ben Jonson, le rival de Shakespeare, nous fait rire, en effet, mais il s'attaque avec férocité aux  travers des hommes, aux riches cupides et avides, à la justice qui donne raison à ceux qui ont le pouvoir et l'argent. Il peint aussi  la condition de la femme enfermée chez elle, surveillée par un mari jaloux et finalement  prostituée à son avidité.

Le seul Volpone que je connaissais avant d'assister à la représentation de la pièce par la Fox Compagnie, est celui incarné -et avec quelle classe- non au théâtre mais à l'écran par l'inimitable, l'élégant  Rex Harrisson dans un film de Mankiewicz. Encore s'agissait-il d'une transposition intitulée Guêpier pour trois abeilles. Rex Harrisson y campait le rôle d'un certain Mr Fox, filou et retors à souhait, mais grand seigneur méchant à homme, à la façon du Dom Juan de Molière.

Le parti pris des metteurs en scène de la Fox Cie est tout le contraire! Volpone nous apparaît, au physique et au moral, comme repoussant, torse nu, pantalon à carreaux à bretelles, prompt à jouer de la braguette avec les femmes de chambre ou tout jupon qui passe. Le maquillage accentue ce côté repoussoir, les yeux rouges comme ceux.. d'un loup ou d'un chien enragé plutôt que d'un renard!  Il est affreux et digne des monstres de la comédie à l'italienne de Monicelli, Comencini, Scola.  Il en est ainsi des autres personnages dont les visages soulignés par traits noirs et les costumes insistent sur leur appartenance à la gent animale plutôt qu'humaine, corneille (Corvino), vautour, (Voltore) corbeau (Corbaccio), mouche (Mosca).. Excellente idée, aussi, d'avoir utilisé des marionnettes pour interpréter le rôle des juges. Les soubrettes portent d'impressionnants masques humains mais figés qui leur enlèvent tout humanité, esclaves des désirs de leur maître.  Tout ce beau monde évolue autour d'un décor pivotant, sorte de cube dont les faces permettent le changement de lieu.  Les jeux de scène des acteurs, d'ailleurs fort bons, s'organisent autour de ce dispositif scénique et jouent sur le côté farce, accentuant la bouffonnerie. Ce choix de mise en scène réussi met en valeur la concupiscence, l'avarice, la bassesse de ces hommes qui sont prêts pour obtenir l'héritage de Volpone,  à vendre leur femme, à déshériter leur fils.


Volpone d'après Ben Jonson par la Fox Cie
Théâtre la Luna
DU 8 au 31 Juillet à 14H30
Durée 1H25

mardi 19 juillet 2011

Jean-Luc Lagarce : Juste la fin du monde et J'étais dans ma maison... de la Cie Ubwigenge

J'étais dans ma maison et j'attendais que la pluie vienne .. Cie Ubwigenge


Jean-Luc Lagarce est un des auteurs contemporains les plus joués non seulement festival d'Avignon mais aussi en France. Il est au programme du baccalauréat et de l'agrégation de Lettres modernes. J'ai voulu lire une des oeuvres du dramaturge avant d'aller voir une de ses pièces.

Juste la fin du monde raconte l'histoire d'un homme qui est parti loin de sa famille et ne lui a jamais donné de nouvelles. Apprenant qu'il va mourir, il retourne chez les siens pour leur annoncer sa mort prochaine. Son frère et son épouse, sa petite soeur et sa mère l'accueillent. Chacun se met à parler pour lui dire comment ils ont vécu la séparation, pour lui reprocher son indifférence et son silence, exprimer ses souffrances. Sous ce flot de paroles qui laissent apparaître des sentiments mêlés d'amour et de colère, l'homme ne replie sur lui-même. Il repart sans leur avoir révélé la vérité et mourra loin d'eux.
Je suis ensuite allée assistée au spectacle de J'étais dans ma maison et j'attendais que la pluie vienne de la compagnie Ubwigenge à l'Espace Roseau. L'histoire est sensiblement la même : Le jeune frère, chassé dans la maison par son père revient mourir près de sa mère, sa grand mère et ses trois soeurs. On ne saura rien de ce qui lui est arrivé. Les cinq femmes ont vécu dans l'attente de son retour, dans l'espoir de voir justifier le sacrifice qu'elles ont fait de leur vie en l'attendant, victimes? ou responsables de leur soumission à l'image du mâle et de leur adhésion à sa prétendue supériorité?

Pour comprendre ce thème récurrent, il faut savoir qu'il est en partie autobiographique. Jean-Luc Lagarce après s'être séparé de sa famille est mort du sida en 1995. Il écrit Juste la fin du monde au moment où il apprend qu'il est séropositif. Mais il ne parlera jamais directement de sa maladie dans ses pièces.

L'on dit de Jean-Luc Lagarce qu'il est "un classique contemporain" car il occupe une place à part et se différencie des tendances du théâtre contemporain en accordant beaucoup d'importance à la parole. Le texte est primordial dans son oeuvre. Dans les deux pièces, celle que j'ai lue et celle que j'ai vue, l'intrigue, en effet, est réduite au minimum, il n'y a pas d'actions mais des personnages qui parlent. Ce qui est très étonnant aussi, c'est qu'il y a très peu de dialogues. A peine amorcés, ceux-ci s'interrompent pour laisser place à de longs monologues où chaque personnage exprime ses sentiments, présente son point de vue, monologues qui alternent, se coupent parfois, pour mieux reprendre. On a parfois l'impression de ne pas avancer, de repartir en arrière, d'être en suspension, en attente. Les personnages sont murés dans leur silence, ont des difficultés pour communiquer. Peut-être ne s'intéressent-ils qu'à eux-mêmes et à leurs propres souffrance? Les rapports entre eux sont cruels.

Avis de Claudialucia

Mon ressenti par rapport à ce style de théâtre a été différent selon que je l'ai lue ou vue.

Lors de la lecture de Juste la fin du monde j'ai d'abord été surprise par la forme théâtrale mais surtout par ce style si étrange. Les personnages ne sont pas sûrs de ce qu'ils avancent, ils s'interrompent, tâtonnent comme pour affiner la pensée, reprennent un mot, s'appuient sur lui comme pour se projeter en avant. Au fur et à mesure, les mots s'accrochent, s'agglutinent les uns sur les autres, forment une chaîne, à laquelle s'agrippe la pensée pour mieux progresser. C'est dans ces hésitations, dans ces tâtonnements que la femme ou l'homme qui s'exprime parvient à se trouver.*
Puis, je me suis peu à peu laissée prendre par ce rythme comme par une poésie incantatoire. Le ton est doucement élégiaque. La douleur des personnages paraît bercée par les mots mais elle ne s'exprime pas moins intensément. J'ai été sensible à la souffrance qui s'exprimait ainsi.

Le spectacle théâtrale de J'étais dans ma maison et j'attendais que la pluie vienne donnait lui beaucoup d'importance au corps. Les cinq comédiennes-danseuses vêtues de noir évoluent sur scène dans une pénombre bleutée, chacune coupée de l'autre, enfermée dans sa pensée. Le fils mourant gît sur son lit, enfermé derrière un voile blanc qui déjà le sépare du monde des vivants. La scénographie, et la gestuelle sont très belles, inventives. Les comédiennes disent  bien ce texte difficile. Alors pourquoi n'ai-je pas, malgré les qualités du spectacle, complètement adhéré à la pièce? J'en ai aimé l'esthétique mais beaucoup moins le texte qui n'est pas parvenu à me toucher. Peut-être est-ce à cause de la diction hachée, dure, un peu mécanique, presque désincarnée des comédiennes? A part, la petite soeur qui exprime son désespoir avec violence (peut-être parce qu'elle est jeune et peut encore être sauvée?) j'ai eu l'impression que la metteur en scène, Catherine Decastel, refusait l'émotion. Veut-elle nous indiquer ainsi que ces femmes ne sont plus vraiment en vie? Pourtant, à la fin, elles se révoltent et se libèrent du joug. Toujours est-il que je n'ai pas ressenti la poésie du texte.

Avis de Wens
Hérétique! je le suis. Jean-Luc Lagarce est un des auteurs les plus joués dans l'hexagone, l'enfant chéri actuellement des metteurs en scène mais "J'étais dans ma maison…", j'ose l'avouer, m'a laissé totalement de marbre. Intellectuellement je peux comprendre la portée du propos, la richesse et la beauté de la langue (je préfère lire le texte que le voir jouer! ), mais la forme théâtrale me laisse totalement insensible. J'assiste, étranger, à un spectacle de la pure parole  même si les corps parfois s'expriment. Les personnages n'agissent pas, ils récitent leurs propres réflexions, leurs longues confidences, rarement interrompus par quelques dialogues. L'ennui me gagne, je me sens comme ces femmes sur la scène enfermé dans un espace clos que je ne peux quitter. Mon corps devient souffrance.
Mon jugement mériterait peut-être d'être corrigé en assistant à une autre mise en scène, en écoutant le texte porté par d'autres comédiennes. Qui sait? J'en doute.


*Extrait d'un passage de Juste la fin du monde

Je me suis éveillé, calmement, paisible,
avec cette pensée étrange et claire

je ne  sais pas si je pourrai bien la dire

avec cette pensée étrange et claire
que mes parents, que mes parents,
et les gens encore, tous les autres, dans ma vie,
les gens les plus proches de moi,
 que mes parents et tous ceux que j'approche ou qui
s'approchèrent de moi (...)
que tout le monde après s'être fait une certaine idée de moi,
un jour ou l'autre ne m'aime plus, ne m'aima plus
et qu'on ne m'aime plus
(ce que je veux dire)
"au bout du compte "
comme par découragement, comme par lassitude de moi,
qu'on m'abandonna toujours car je demande l'abandon.


J'étais dans ma maison et j'attendais que la pluie vienne
Compagnie Ubwigenge
Espace Roseau
Du 8 au 31 Juillet à 14H
Durée : 1h 15

lundi 18 juillet 2011

Festival OFF d'Avignon : L'augmentation de George Perec, Théâtre de la Boderie


 Comme j'avais beaucoup aimé l'excellent spectacle Pièces détachées Oulipo en 2009 (qui revient d'ailleurs cette année  au Théâtre du chien qui fume), j'ai couru voir l'Augmentation de George Perec par le Théâtre de la Boderie, sachant que Paul Fournel, président de l'Oulipo, était satisfait de de l'adaptation.
 Georges Perec a appartenu au mouvement littéraire de l'Oulipo ( OUvroir de LIttérature POtentielle) fondé par le mathématicien François Le Lionnais et l'écrivain Raymond Queneau en 1960. Les membres se définissent comme des "rats qui construisent eux mêmes le labyrinthe dont ils se proposent de sortir". En effet les auteurs du groupe se fixent des séries de contraintes formelles plus ou moins complexes, mathématiques et littéraires. C'est de la contrainte, en effet, que naît la liberté. Les Oulipiens jonglent avec les mots, avec les sons, avec la langue et même s'ils rendent compte de notre société et traitent de sujets graves, il faut se garder de les aborder en les prenant trop au sérieux ! Avec Oulipo, on entre dans le jeu, dans le monde de l'absurde, dans le feu d'artifice de la langue.

Avis de Claudialucia Ma  Librairie

Comme souvent dans Oulipo le sujet mince - un employé va demander une augmentation à son chef de service- mais le parcours compliqué!!  Si vous êtes persuadés, en effet, que demander une augmentation est facile, détrompez-vous! Et si vous êtes assez naïfs pour croire que l'obtenir est à votre portée, vous déchanterez ! Vous vous apercevrez bien vite que vous allez accomplir un parcours d'ancien combattant, rencontrer mille difficultés, vous heurtez à des portes closes, vous faire rabrouer comme un malpropre ou bercer de fallacieuses promesses, bref arpenter vainement les couloirs labyrinthiques de la grande entreprise broyeuse d'hommes qui vous emploie. Car sous l'absurdité de la situation, des dialogues et des mots, perce l'indignation de Perec qui dénonce ici, tout en nous faisant rire, le capitalisme et l'exploitation de l'homme méprisé, utilisé et rejeté comme un objet. Le décor ressemble parfois un décor d'hôpital, sous une lumière crue, on vous y fait des conférences sérieuses, rétroprojecteur à l'appui, sur la rougeole ou la scarlatine! Peut-être pour mieux monter combien ce monde est malade.

Pour rendre cette déshumanisation, le metteur en scène, Marie-Martin Guyonnet, règle au millimètre près les déplacements et les interventions de ses acteurs. Ceux-ci évoluent comme s'ils suivaient des lignes géométriques, coupées en angles droits, ils marchent mécaniquement comme des robots ou, mieux encore, comme des marionnettes dont les fils seraient actionnés par le Pouvoir. De la même manière, l'ordre des interventions verbales qui se succèdent, se croisent, rebondissent, obéit à une rigueur mathématiques, une précision de métronome. Les trois comédiens, excellents, répondent à la lettre à ces exigences bien oulipiennes!

Comme tout le texte repose sur un système de répétitions de situations, de gestes, de formules, de mots qui donnent (à tort car on avance) l'impression de faire du surplace, le spectateur (c'est ce qui m'est arrivé) peut-être désorienté au début. Mais si vous acceptez d'entrer dans le jeu, vous vous laisserez emporter par ce délire permanent et vous apprécierez pleinement ce spectacle qui déclenche le rire. Une beau travail de mise en scène et de jeu d'acteurs.

Avis de Wens En Effeuillant le Chrysanthème

L'Augmentation ou: "Comment, quelles que soient les conditions sanitaires, psychologiques, climatiques ou autres, mettre le maximum de chances de son côté en demandant à votre chef de service un réajustement de votre salaire…". Commence alors pour l'employé modèle et discret d'une multinationale  un intense processus de réflexions, de suppositions, de solutions positives, de solutions négatives.. dans le dédale  d'une logique de  pensée toute kafkaïenne, les stratégies mises en place sont souvent  à reconstruire totalement car tout les raisonnements reposent sur des choix multiples.  Mais l'objectif pour l'employé ne doit jamais être perdu de vue : obtenir une augmentation! Pérec déclenche le rire  par le jeu des mots et des formules répétées ou réinventées, par l'absurde logique de la situation. Mais le texte nous présente aussi une vision très critique de notre monde. L'employé est  enfermé  dans un mécanisme de pensée qui lui est de fait dicté par la société. Qui est-il? un simple pion dans un rouage complexe. Il est le transparent jouet d'une société capitaliste structurée, hiérarchisée qui l'exploite. Hommes politiques, hauts fonctionnaires, sabres et goupillons sont au service des grandes entreprises. Alors l'employé n'a aucune chance de recevoir une augmentation.
L'intelligente  mise en scène de Marie-Martin Guyonnet rend parfaitement le propos de Perec. Trois excellents comédiens, incarnent l'ensemble des personnages : l'employé, la secrétaire, le chef et le sous chef… Chaque déplacement, chaque geste, chaque phrase  obéit à une chorégraphie d'une grande précision. Parfois un chant  sorti tout droit de l'univers de Jacques Demy, vient briser  la respiration mécanique du texte. Un moment de poésie chez Kafka. Le décor déshumanisé, aseptisé, fonctionnel, géométrique qui n'est pas sans rappeler celui de Mon Oncle de Jacques Tati, semble guider, imposer les déplacements des acteurs. Le choix de couleurs vives saturées à la fois au sol et dans les costumes renforce la férocité sous-jacente du propos. Un grand moment de théâtre.

L'augmentation. Georges Perec.
Théâtre de la Boderie.
Avec : Jehanne Carillon, Jean-Marc Lallement,Olivier Salon.
Mise en scène: Marie-Martin Guyonnet.
La Luna du 8 au 31 juillet. 18H20


Brassée d'images : Le festival d'Avignon 2011


 Comédiennes photographiées dans la rue des Teinturiers


Dimanche a été un jour de repos! Pas de théâtre pour  pouvoir aborder une seconde semaine de festival! Où est le temps où j'étais capable d'assister à trois ou quatre représentations par jour  sans fatigue? Pour l'instant j'ai vu 9 spectacles dans le OFf  et 4  pour enfants avec ma petite fille. Une bagatelle par rapport aux 1143 pièces qui seront jouées en 2011 par 969 compagnies et 6000 artistes. Cette année, je verrai un seul spectacle dans le In car je m'y suis prise trop tard ; il n'y avait plus de places pour ce que je voulais voir.
Voici donc une brassée d'images prises ces jours-ci dans les rues bondées d'Avignon.

LES PARADES DANS LES RUES

Les artistes du Off présentent leur spectacle dans les rues d'Avignon et tractent. Au début du festival quand nous ne sommes pas encore habitués, il y a quelques surprises! Par exemple, je me suis retrouvée une année face à face avec un rhinocéros! Choc! Heureusement, c'était celui de Ionesco.
L'incident le plus spectaculaire survenu il y a quelques années est celui où un individu en uniforme et croix gamée  est venu faire un discours  nazi sur la place de l'Horloge. Scandale parmi les promeneurs, huées, attroupements houleux, colère... jusqu'au moment l'on a appris qu'il était échappé d'une pièce de Bertold Brecht. Le metteur en scène (c'était dans le In) avait demandé au comédien de sortir du théâtre pour prononcer son discours devant la foule sans penser à la réaction d'un public improvisé et non averti! Hier, dans la rue des Teinturiers nous avons été abordés par les hommes sanguinolents (qui nous ont d'ailleurs offert des tracts couverts de mercure au chrome) des flagellés (? ), par Louis XIV avec une perruque en papier accompagné de son fidèle Lully, par de curieux personnages au bec d'oiseaux, par une géante qui dominait toute la foule...

Rue des Teinturiers

Rue de la République

                               Rue Carnot
 Rue des Teinturiers

 Rue des Teinturiers

LES AFFICHES 

A Avignon, les affiches montent jusqu'au ciel, escaladent tout ce qui est vertical, arbres, gouttières, poteaux, s'agrippent aux murs, s'attachent aux poubelles. Par temps de Mistral, elles claquent comme des drapeaux et parfois s'envolent; par temps de pluie, elles dégoulinent, gondolent, se délitent. Certains trouvent que cela fait désordre mais moi, j'aime bien le désordre. Chaque année, je guette qu'elle sera la première affiche qui apparaîtra dans ma rue!






 
 QUELQUES LIEUX

La rue des Teinturiers, ancienne rue des Roues, une des plus pittoresques d'Avignon, a conservé son aspect médiéval. C'est la plus fréquentée du festival.

                                                               



La Place des Carmes, ombragée, avec sa halle, son cloître qui reçoit des spectacles du In, le théâtre de Benedetto, ses nombreux restaurants et cafés est aussi un lieu convivial et agréable.





dimanche 17 juillet 2011

Une femme seule, Dario Fo et Franca Rame par la compagnie Vents et marées au Théâtre La Luna

 Dario Fo, écrivain, dramaturge italien, metteur en scène et acteur est aussi un homme politiquement engagé. Son théâtre se fait porteur d'une idéologie proche des gens du peuple, des ménages qui ne peuvent boucler la fin du mois (Faut pas payer!) de l'ouvrier  exploité  mais aussi de la femme doublement victime du capitalisme et de son mari (Un femme seule). Il dénonce le colonialisme avec Johan Padan ou la découverte de l'Amérique, la puissance et la richesse de l'Eglise et toutes les formes d'injustice dans une langue populaire, volontiers truculente et burlesque. Avec son épouse Franca Rame, il fonde une compagnie théâtrale et cherche à amener le théâtre dans les usines et les maisons de jeunesse. Il est prix Nobel de littérature en 1997.

Italie. Une femme seule dans son appartement s'adresse par la fenêtre à une nouvelle voisine que nous n'entendrons jamais. Elle lui explique sa vie partagée entre son ménage, ses enfants et la garde d'un beau-frère paralysé et pervers. Peu à peu, on découvre  la condition désespérée de cette "italienne" épiée par un voyeur, harcelée par des coups de téléphone, simple objet sexuel de son mari jaloux et violent qui  la retient enfermée dans le logement. Quel espoir? le suicide ou donner la mort.
Avis de Claudialucia
Dans Une femme seule, Dario Fo montre l'aliénation de la femme enfermée physiquement mais aussi moralement dans un carcan que la société et la religion lui imposent. Cette pièce aurait demandé à être traitée avec subtilité et émotion, de la découverte progressive de son quotidien à sa révolte aux accents de folie, au goût de crime. Alors qu'elle se confie à sa voisine par la fenêtre restée entrouverte, on aurait dû assister à des confidences d'abord hésitantes, pudiques puis de plus en plus pathétiques jusqu'à l'explosion finale. Malheureusement, il n'en est rien.  La comédienne dit son texte à tout allure, sans pause, sans variation, d'une voix haut perchée et monocorde dans l'aigu. Il n'y a aucune gradation dans les révélations, aucune montée de la tension dramatique.  Habituellement  Dario Fo a l'art de nous faire rire des situations les plus tristes, un rire grinçant, certes, mais toujours en empathie avec le personnage dont le spectateur partage les sentiments. Avec cette mise en scène, au contraire, on  se détourne de cette femme. Le manque de nuances et de sentiments crée l'ennui. On finit en désespoir de cause par regarder le bruiteur sur scène, à côté de l'actrice. Et certes celui-ci est doué. Il parvient à rythmer l'action avec toutes sortes d'objets les plus hétéroclites, devient acteur à part entière, nous distrait et même nous fait rire! Mais c'est au détriment de la pièce et vous avouerez que cela n'est pas le but recherché!

Avis de Wens de En effeuillant le Chrysanthème
Dans le théâtre de Dario Fo et de Franca Rame, le tragique surgit progressivement d'une situation anodine qui nous fait sourire et rire. Nous regardons s'agiter cette femme au foyer qui s'occupe de son gosse, de son pervers de beau frère, fière de ses appareils ménagers, de sa télé, de sa radio. Mais la tension monte progressivement, quelques bribes de texte déclenchent chez le spectateur un rire salutaire. Elle est une victime d'une société machiste, comme de nombreuses femmes en Italie ou ailleurs.
Dans l'adaptation proposée par la Compagnies Vents et Marées, cette montée progressive du tragique n'existe pas. D'entrée, la femme seule crie son désespoir, elle le fait sur le même registre pendant toute la durée du spectacle. Pas de pause, pas de respiration, pas un sourire :  l'étouffement permanent. Le regard du spectateur cherche l'issue salvatrice, il le trouve du côté de l'excellent travail du bruiteur qui sur scène nous crée les champs sonores de l'appartement : bruits de pas, claquements de portes, sonneries de téléphones…en synchronisme parfait avec le monologue et les déplacements de l'actrice. Le son aurait dû souligner le comique comme dans le cinéma de Jacques Tati où les situations burlesques sont mises en valeur par les bruitages qui suppléent souvent la parole. Mais  le bruit est en off, en contrepoint de l'image, pas sur scène comme dans cette représentation. Ici, le bruiteur devient souvent aussi présent, voire même plus que l'actrice et que le texte! Dommage!

samedi 16 juillet 2011

Festival OFF d'Avignon : Shakespeare, La nuit des rois par Comédiens et Compagnie


La Nuit des Rois est la dernière comédie de Shakespeare et une des plus grandes. La pièce a été écrite pour être jouée à l'épiphanie de 1601. C'était la dernière célébration des fêtes de Noël, la douxième nuit, la nuit des travestissements, des jeux, la nuit des fols et du chaos, héritage des fêtes païennes et des Saturnales romaines antiques. L'intrigue dite "romantique"  traite d'un sujet, le naufrage et  l'île, que Shakespeare reprendra plus tard dans la Tempête. Sébastien et Viola sont jumeaux, thème de la géméllité, du double, cher à Shakespeare. Au cours d'un naufrage, ils sont séparés et échouent sur une plage différente, dans un pays nommé l'Illyrie, chacun déplorant la mort de l'autre. Viola décide de se déguiser en homme et prend le nom de Césario. Elle devient le page du Duc d'Orsino. Celui-ci, amoureux de la belle Olivia envoie Césario comme messager d'amour auprès de la jeune fille qui s'est retirée du monde après la mort de son frère. Olivia tombe amoureuse de Viola-Cesario qui, elle-même, aime Orsino. Lorsque Sébastien apparaît une série de quiproquos et de chassés-croisés va s'engager. Qui est qui? Qui est amoureux de qui? A ces intrigues amoureuses nobles répondent, dans le domaine de la farce, les prétentions amoureuses de Sir Andrew et  de l'intendant Malvolio pour la noble Olivia.

 Avis de Claudialucia


La Nuit des rois présentée par Comédiens et Compagnie a été pour moi une déception. Certes la compagnie qui traite la pièce à la manière Commedia dell'Arte est sympathique, Les costumes, les masques, les éclairages, la musique et les chants sont beaux,  la gestuelle et les bruitages réussis mais le niveau des acteurs est trop inégal (une mention spéciale cependant pour le fou) et la troupe ne retient de la comédie que la farce occultant les autres aspects de la pièce et l'appauvrissant. Une conception de la pièce bien superficielle! Le public s'amuse pourtant et si vous n'avez pas d'autre attente en allant voir La nuit des rois vous pouvez passer un bon moment. Mais vous ne rencontrerez pas Shakespeare! Il faut des comédiens et une mise en scène d'envergure pour rendre la richesse de cette oeuvre!
 La pièce, en effet, mêle tous les genres, la comédie, le marivaudage, la farce avec les personnages de Malvolio ou  de Messire Tobby mais aussi la gravité avec Orsino et Olivia, le rire et la tristesse à parts égales. Malgré la féerie et le grain de folie qui semble s'emparer de tous les personnages, la Nuit des rois pose des questions graves : les serviteurs ont l'illusion d'égaler les maîtres (Malvolio), les maîtres jouent les serviteurs, les femmes empruntent le rôle des hommes (Viola), nul ne sait plus où est sa place. La pièce est une interrogation sur l'identité des rôles, l'identité sexuelle, sur la dualité féminin-masculin incarné par les jumeaux, sur l'homosexualité même, sur l'amour en fait, illusion, caprice? Que penser de ces revirements amoureux de derniers instants si ce n'est que l'amour est bien inconstant, fantasque, capricieux ou qu'il ne repose que sur du vent. En effet, si la comédie se termine par deux mariages, car on est là pour rire, c'est un artifice théâtral qui paraît bien artificiel et auquel le spectateur ne peut adhérer. La plupart des personnages, d'ailleurs, offrent une dimension comique et tragique à la fois : Malvolio, imbu de lui-même, par exemple, est grotesque avec ses bas jaunes et ses jarretières croisées et provoque le rire mais c'est un personnage de tragédie, puritain, austère, autoritaire qui cherche à accéder au pouvoir pour dominer les autres. Pourtant la farce que l'on joue à ses dépens est tellement cruelle que l'on finit presque par le plaindre. Le fou est désenchanté et a une vision du monde si pessimiste qu'il faut bien qu'il le tourne en dérision. Olivia  porte le deuil et refuse la vie et l'amour mais elle tombe amoureuse au premier regard... d'une femme! Orsino est un personnage mélancolique, en proie au doute et c'est parce qu'il est incapable d'agir qu'il se fait cocufier si j'ose dire par son page qui est en fait une femme.
Les éclairages que l'on peut donner à la pièce sont multiples. L'interprétation des personnages par la troupe de Comédiens et Compagnie ne rend pas cette complexité. Ce n'est pas en faisant prendre à Orsino une pose grotesque et ridicule que l'on rend compte du personnage. Le comique n'est pas là, il est intérieur et il est le pendant du tragique. On a l'impression en voyant jouer les comédiens qu'il n'y a pas de réflexion sur le sens de la pièce. Tout est en surface et c'est dommage!

Avis de Wens blog En effeuillant le Chrysanthème

Les comédies de Shakespeare jouent sur le mélange des genres. Se succèdent sans aucun temps mort les moments poétiques, romantiques et les scènes comiques, le spectateur est emporté par les quiproquos, les rebondissements.
L'adaptation réalisée par Comédiens et Compagnie prend le parti pris de mettre en avant le côté farce, une partie des acteurs jouent d'ailleurs sous des masques de la Commedia dell' Arte. Le travail sur la gestuelle, sur les bruitages et la musiques est d'ailleurs assez réussi. La scène de poche du théâtre, guère plus grande qu'un ring de boxe, ne permet pas les grandes envolées pour douze acteurs et limite les possibilités de mise en scène.
Ne retenir que l'aspect purement comique du texte, c'est oublier la richesse de la pièce. Car La Nuit des rois est une profonde réflexion sur le jeu des apparences trompeuses, sur la confusion des rapports amoureux, sur l'homosexualité à peine voilée. L'ambiguïté sexuelle devait être encore plus ressentie à l'époque de Shakespeare, puisque les rôles de femmes étaient tenues par des hommes. Où sont passés les différences et les tensions sociales présentes dans la pièce ? Elles sont totalement gommées, ignorées dans cette adaptation.
Pour savourer Shakespeare, il faut des acteurs qui savent manier sa langue et ses mots, une distribution sans faiblesse. Hélas, certains comédiens de la troupe ne sont pas à la hauteur du texte. Les poses, les mimiques, les soufflets ne remplacent pas la voix, la présence. Les personnages deviennent seulement des caricatures, alors que derrière l'attitude ridicule se cache la tragédie des êtres. Un acteur cependant fait l'étalage de son talent, celui qui tient le rôle de Feste, le bouffon : Guillaume Collignon.

La Nuit des Rois.
Comédiens et Compagnie.
Petit Louvre.
8 au 31 Juillet.
14H15

Challenge de Maggie et Claudialucia

vendredi 15 juillet 2011

Festival OFF d'Avignon : Moulins à Paroles d'Alan Bennett par la compagnie les Méridiens

 Stéphanie Gramont et Xavier Boulanger, interprètes de Moulins à Paroles

 Alan Bennett a commencé sa carrière comme comédien. Il est considéré comme un des romanciers et dramaturges actuels les plus importants du Royaume-Uni. Parallèlement, il poursuit une oeuvre de scénariste pour la télévision et le cinéma. La Compagnie les Méridiens nous propose deux monologues de Bennett, deux fragments d'existence de personnages  à la fois naïfs, comiques et tragiques : La chance de sa vie et Une frite dans le sucre. Leslie est une actrice qui rêve de percer dans le cinéma, de devenir une star mais elle ne possède qu'un réel  atout : son physique. Graham, vieux garçon, vit toujours chez sa vieille mère dont il s'occupe au quotidien. L'irruption dans leur vie d'un vieil amant de sa mère bouscule son existence.

Avis de claudialucia

J'aime beaucoup Alan Bennett, aussi est-ce avec plaisir que je suis allée voir Moulins à Paroles de la compagnie alsacienne Les Méridiens  à Essaïon théâtre.


Grâce à un dispositif scénique ingénieux, deux décors mobiles qui tournent sur eux-mêmes pour faire apparaître les acteurs, nous pouvons suivre les deux histoires en parallèle, celle de la jeune actrice sans talent exploitée sexuellement par les hommes et celle du fils dévoué à sa mère, "un grand garçon" jamais devenu un homme. Le metteur en scène, Laurent Crovella utilise avec habileté ce dispositif pour établir des parallèles, pour jouer sur l'alternance, la simultanéité, provoquer des ralentissements ou au contraire accélérer le rythme. Ainsi deux vies se déroulent devant nous, se croisent, sans jamais se rencontrer, deux univers très différents mais qui ont en commun l'échec, la noirceur de l'existence. Car Alan Bennett sait à merveille rendre le quotidien de ces vies qui s'étiolent, peindre la solitude de chacun, la cruauté des rapports humains. Et pourtant l'on rit beaucoup au cours de ces deux monologues que deux comédiens inspirés, Stéphanie Gramont et Xavier Boulanger, interprètent avec beaucoup de justesse et de conviction. Mais l'on ressent aussi beaucoup d'émotion et de tristesse tant le spectacle de ces vies gâchées nous touchent.  Un bon spectacle.




Le texte de Leslie est sans grande surprise, la pauvre figurante naïve et sans talent ne peut  finir que déshabillée sur un plateau de cinéma et dans le lit des participants d'un film de série B. Le deuxième monologue est beaucoup plus riche, plus complexe. Graham, vieux garçon emprunté apparaît comme le fils attentif et protecteur d'une vieille femme malade, qui semble perdre la raison. Mais l'arrivée d'un ex-amant extravagant donne une nouvelle jeunesse à la vieille mère, qui se sent  prête à refaire sa vie sans son fils. Alors Graham nous présente une  facette inconnue de son personnage. Il se révèle fragile, malade, complexé, c'est un homosexuel refoulé. Pour la plus grande satisfaction de Graham, le vieil amant disparaîtra et  la vie pourra reprendre son cours rythmé par des promenades  entre deux tasses de thé. La vie de tous ces êtres est triste, tragique, sans espoir mais Bennett arrive à nous faire sourire, rire même, d' un rire noir et grave.
La mise en scène est judicieuse. Au lieu de présenter les monologues l'un à la suite de l'autre, le metteur en scène, Laurent Crovella, a décidé de les faire interpréter en parallèle. Ce choix  correspond tout à fait à l'esprit de la préface de Jean-Marie Besset ,traducteur de Moulins à Paroles (Actes-Sud-Papier): "…les vies sont solitaires, immobiles et comiques-ô combien- dès qu'elles se mêlent à se commenter les unes aux autres". L'immobilité  est rendu par le dispositif scénique, les acteurs sont enfermés physiquement et donc moralement dans des petits kiosques qui tournent sur eux mêmes. Leslie est coincée dans une loge qu'elle décore de  photos de stars, elle joue avec des lumières, se place sous les projecteurs de ses rêves. Graham fait de la tapisserie, engoncé dans des vêtements trop étroits, vissé sur une chaise dans un décor victorien vieillot, il baisse l'éclairage pour se réfugier dans le noir quand ses peurs et ses angoisses le prennent. Stéphanie Gramont et Xavier Boulanger servent avec beaucoup de talent  les beaux textes de Bennett.

Moulins à Paroles 
Les Méridiens
Essaïon Théâtre
Du 8 au 30 Juillet à 12H40
Relâche les 18, 25 Juillet

jeudi 14 juillet 2011

Festival OFF d'Avignon : Montaigne de Michel Bruzat, Théâtre de la Passerelle

 Jean-Pierre Descheix interprète Montaigne
Il y en aura peut-être d'autre (je l'espère car le festival est loin d'être terminé) mais le spectacle du Théâtre de la Passerelle de Michel Bruzat sur Montaigne est d'ores et déjà un coup de coeur.

Montaigne? Mon enthousiasme ne doit pas vous étonner puisque mon blog lui est dédié à commencer par son titre Ma Librairie et le bandeau d'accueil qui représente la tour où il avait installé sa bibliothèque autrement dit sa librairie.

Pourquoi j'aime autant Montaigne? Le beau spectacle théâtral mis en scène par Michel Bruzat à partir d'un choix judicieux de textes répond à cette question. Et tout d'abord en montrant l'homme car Montaigne n'est pas un pur esprit et s'il porte en lui la forme entière de l'humaine condition, c'est parce qu'il est proche de nous, un être de chair et de sang, qui aime la bonne chère, les plaisirs du corps, l'amour, l'amitié, un épicurien qui aime la vie et la cultive telle qui a plu à dieu nous l'octroyer. Un homme qui pense que le corps et l'esprit sont liés par "une étroite couture" et qu'ils ne sont donc pas opposables. Un homme qui n'essaie pas de dresser un portrait flatteur de lui-même mais qui  se montre à nous tel qu'il est avec ses faiblesses et ses erreurs : "Je veux qu'on m'y voie en ma façon simple, naturelle et ordinaire, sans  étude et sans artifice". Et puis il y a le Montaigne philosophe, aussi éloigné des valeurs chrétiennes d'abstinence et de toutes formes d'ascétisme prônés par  la religion, "J'ai horreur d'imaginer un corps privé de plaisir", que du fanatisme lié à une quelconque certitude. Car cet humaniste est persuadé de la relativité des coutumes et des croyances. Et c'est parce qu'il ne pense pas détenir la vérité qu'il parle de tolérance, de respect des autres, du plaisir de découvrir d'autres pays, d'autres façons de vivre et de penser. La voix de Montaigne qui s'élève vers nous sur la scène du théâtre des Carmes est belle et toujours actuelle. L'adaptation en français moderne est de plus très réussie et nous rapproche de lui dans le temps. Elle nous dit, des choses toujours vraies, que la guerre est la preuve de la sottise humaine, que les hommes n'ont pas à imposer des règles aux femmes qu'ils sont bien loin de pouvoir respecter eux-mêmes, que la peur de la mort ne doit pas nous empêcher de vivre et que la vie, justement, est la plus belle des aventures humaines : "Mon métier et mon art, c'est de vivre".

 Michel de Montaigne, à qui l'excellent comédien Jean-Pierre Descheix prête son corps (il va même jusqu'à lui ressembler!) et sa voix, nous convie à un repas aux chandelles, nous invite à sa table et le spectateur est même parfois sollicité pour la préparation des plats. Convivialité, amour des saveurs, gourmandise, la glace est brisée, ce n'est pas le philosophe mais l'homme et même l'ami qui bavarde avec nous à bâtons rompus. Les évolutions de l'acteur qui sert à table, goûte avec sensualité un bon vin, trinque avec nous, danse, chante, ses digressions, ses hésitations, son franc parler, tout donne l'impression de ce style "à sauts et à gambades" si cher à Montaigne. Belle idée de Michel Bruzat et qui sert à merveille ces textes! Nous avons l'impression que ceux-ci s'écrivent devant nous, nous sentons le tâtonnement de la pensée, les mots qui se cherchent, qui se pressent, qui se bousculent. Jean-Pierre Descheix nous les donne à savourer. Avec bonhomie, simplicité et naturel, beaucoup d'humour aussi, il nous fait voir l'homme, nous fait rire, nous fait partager ses émotions, ses doutes aussi.  Avec cette mise en scène intelligente et pleine de finesse Michel Bruzat a réussi a concocté un régal théâtral goûteux salué par la qualité de l'écoute et des réactions des spectateurs.


Avis de Wens  blog En effeuillant le Chrysanthème

Ecrire sur Montaigne en parallèle à Claudialucia est un pari audacieux de ma part, elle qui se nourrit des Essais depuis sa prime jeunesse, qui a choisi de nommer son blog "Ma Librairie" en l'honneur de l'essayiste et philosophe. Mais...
Michel Bruzat par ses choix judicieux d'extraits des Essais montre la puissance de la pensée et la modernité de l'écrivain. Dans un rêve utopique on pourrait envisager que Montaigne inspire la conduite de nos puissants dirigeants, mus par le profit et l'ambition, où le visage des hommes se cache sous le masque de leur fonction, où se parjurer n'est pas un vice, mais une façon de parler où la politique sans conscience et sans âme consiste à faire le renard. Montaigne nous rappelle que la voix de la sagesse réside dans la tolérance, que notre richesse provient de notre diversité, qu'aucun homme sur notre terre ne détient la vérité absolue, que nos croyances sont le fruit de nos coutumes, de notre éducation. En vérité, dès notre naissance nous humons les règles de la coutume avec le lait…Par la suite, ce qui est contraire à la coutume, nous le croyons contraire à la raison.Il faut aller vers l'étranger, le comprendre, éviter tout repli sur soi, sur son propre monde. Le philosophe prône la tolérance religieuse, alors que son siècle est ravagé par les combats fratricides entre catholiques et protestants. Au nom de l'amour de Dieu, des paradis futurs, les croyants, les fanatiques s'étripent. Il dénonce la guerre, toutes les guerres, car elle font le jeu des ambitieux, des haineux, des violents. Aucune guerre n'est justifiable. En avance sur son temps, et sur le nôtre, il aborde le thème de l'égalité des sexes !
Au delà du philosophe, Michel Bruzat, nous fait rencontrer l'homme qui fait de lui même  un portrait pas toujours très flatteur. Nous sommes invités à un banquet par un hôte charmant, brillant, érudit, bavard, inquiet, curieux… qui nous fait rire, sourire, ou retenir notre souffle : Je veux qu'on m'y voie en ma façon simple, naturelle et ordinaire, sans étude et artifice. Les mots, les formules savoureuses surgissent, fleurissent comme celle mise en exergue en sous titre de la pièce: Sur le plus haut trône du monde nous ne sommes assis que sur notre cul. Parce que Montaigne c'est aussi une langue brillante servie par un acteur de talent : Jean Pierre Descheix. Il habite Montaigne, nous fait partager ses réflexions, ses interrogations, ses doutes sur la beauté de la vie qu'il nous faut remplir, sur la force de l'amitié, sur la mort, sur la nature. 
La mise en scène inventive, et la scénographie participent à la beauté du spectacle. On aimerait garder en bouche le goût de ce festin de mots et de sagesse.





Montaigne
au Théâtre des Carmes 
du 8 au 31 juillet à 17H50
Durée : 1H15