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samedi 7 avril 2012

Un Livre/ Un film : réponse à l'énigme N° 28 Tennessee Williams, Soudain l'été dernier

Soudain l'été dernier de Martial Raysse 1963  (Centre Pompidou)

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Les gagnants sont : Aifelle, Asphodèle, Dasola, Eeguab, Jeneen, Marie-Josée,  Maggie, Shelbylee, Somaja.
La pièce de théâtre :  Soudain l'été dernier de Tennessee Williams
Le film : Soudain l'été dernier de Mankiewicz avec Elizabeth Taylor, Katherine Hepburn, Montgomery Clift

 Merci à tous et toutes pour votre participation ....





Thomas Lanier Williams, dit Tennessee Williams, est né le 26 Mars 1911 à Colombus , Mississipi  aux États-Unis. Il meurt le 25 Février 1983 à New York.
Ecrivain et dramaturge, il est engagé à Hollywood pour faire l'adaptation cinématographique d'une pièce mais peu attiré par ce travail, il écrit  un scénario refusé par la MGM. Il le transforme en pièce de théâtre et connaît le succès en 1945 avec cette première pièce : La ménagerie de verre

Seize de ses pièces ou nouvelles furent adaptées au cinéma  par les plus grands réalisateurs, entre autres : Un tramway nommé désir(1951) Baby Doll (1956)de Elia Kazan, La chatte sous un toit brûlant (1958) Doux oiseaux de jeunesse de Richard Brooks, L'homme à la peau de serpent (1960) Last of the mobile Hot shots(1970) de Sidney Lumet, La nuit de l'iguane (1964) de John Huston; Propriété interdite (1966) de Sydney Pollack,  Boom (1968) de Joseph Losey.
La dernière adaptation de son oeuvre au cinéma a lieu en 1987 :  La ménagerie de verre, film de Paul Newman avec John Malkovitch. Elle avait déjà été adaptée en 1950 par Irving Rapper.
Dans Soudain l'été dernier, Madame Venable, Violette, fait venir un chirurgien de renom chez elle et lui demande de lobotomiser sa nièce Catherine pour l'empêcher de raconter ce qu'elle appelle "des radotages" sur la mort violente de son fils, Sébastien.  Le spectateur se rend bien vite compte de l'amour exalté et équivoque de la mère pour le fils qu'elle idéalise et place sur un piédestal. Peu à peu, nous comprenons que ces voyages d'été où Sebastian entraînait sa mère, séduisante, riche et brillante sudiste, lui permettait d'attirer pour son compte de jeunes gens peu fortunés qu'il pouvait mettre sur son tableau de chasse. Mais soudain l'été dernier...  Sébastien n'invite plus sa mère, malade, à le suivre mais sa cousine, la belle et jeune Catherine. Il ne reviendra jamais de ce voyage dans un pays du Tiers-Monde (que Tennessee Williams a voulu imaginaire). Que s'est-il passé? Ce que raconte Catherine est si terrible que madame Venable est prête à tout pour la faire taire. Mrs Holly, la mère, et Georges, le frère de Catherine, uniquement préoccupés par l'argent, ne lui seront d'aucun secours.

Les pièces de Tennessee Williams sont largement autobiographiques. Elia Kazan disait : "Tout ce qui est dans sa vie est dans ses pièces et tout ce qui est dans ses pièces est dans sa vie".
Dans La ménagerie de verre, il met en scène Rose, sa soeur bien-aimée, timide, repliée sur elle-même, plongée dans le rêve, diagnostiquée plus tard comme schizophrène, et sa mère Edwina. Edwina est, quant à elle,  l'archétype,  de "la belle Sudiste", uniquement préoccupée de sa position sociale, snob dans ses aspirations, légèrement hystérique. 
Dans Soudain l'été dernier il met à nouveau en scène sa soeur Rose que sa mère a fait lobotomiser parce qu'elle avait dénoncé les attouchements sexuels que son père, un alcoolique violent, lui a fait subir.  Nul doute que dans cette pièce, Madame Venable, prête à sacrifier sa nièce Catherine pour l'empêcher de dire la vérité sur son fils, ne soit l'incarnation de la mère de Tennessee Williams! L'écrivain qui détestait son père depuis son enfance rompt définitivement avec sa famille après la lobotomisation de Rose qui reste handicapée par cette opération. Plus tard, quand ses moyens financiers le lui permettent, il prend en charge sa soeur pour qui il a toujours eu beaucoup d'affection et de qui il était si proche que l'on aurait dit des jumeaux. On comprend alors pourquoi, dans l'oeuvre de Tennessee Williams, le thème du paraître, du rang social, du qu'en dira-t-on, est primordial. A tel point que la vérité, si elle blesse les conventions et les bienséances, doit être étouffée à n'importe quel prix.  De plus, l'homosexualité de Williams qu'il a eu du mal à accepter pendant longtemps est aussi un thème présent dans sa pièce. L'homophobie, à cette époque, dans cette Amérique sudiste, est si violente que madame Venable, lui oppose un véritable déni. Elle présente son fils comme un être "chaste", se vouant à un célibat "total" "comme s'il avait prononcé ses voeux", dévoilant par ces propos, d'une manière probablement inconsciente, des relations quasi incestueuses avec son fils : J'étais vraiment le seul être dans sa vie qui pût satisfaire ses exigences. Elle est prête à tout pour éviter les révélations de Catherine sur son fils. Elle s'est mise en détruire notre légende, à démolir le souvenir de..  dit-elle en parlant de la jeune fille. Prête à la faire opérer malgré les dangers de l'intervention, prête à acheter la conscience du chirurgien puisqu'il s'agit non de la soigner mais de la faire taire. 
Le docteur
madame Venable? Je ne peux vous donner l'assurance qu'un lobotomie arrêtera son... son radotage!
 
Madame Venable
Peut-être que oui, peut-être que non, mais après l'opération, docteur, qui osera encore la croire?


Pour Violette Venable, la vérité n'est pas ce qui compte, c'est l'apparence! Elle se trahit en  parlant de "ma vérité"  au sujet de la mort de son fils même si elle se corrige et  rectifie :  "la vérité".

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Je ne fais pas de publicité pour Amazon mais j'y ai découvert une analyse de la pièce excellente. En voici des extraits :


Foin de généralités donc, venons-en aux deux points qui ont frappé l'auteur de ces lignes à la lecture de l'œuvre :
Premièrement, Tennessee Williams joue admirablement avec l'ambivalence « dit/non dit ». En peignant cette microsociété inconsciente de la portée de ses jugements et de ses actes, Tennessee Williams slalome avec habileté entre les piquets de l'individuel et du collectif par la dualité « absence/présence du langage », « dit/non dit », « vulgarité/bienséance ». La famille Holly (celle de la mère de Catherine et de son benêt de frère, Georges) est caractérisée par l'incapacité de taire les choses, ce qui la rend au pire vulgaire, au mieux incontrôlable ; la famille Venable, elle, se caractérise par sa propension à les taire où à les enrober de manière à les rendre acceptables. Mais en réalité, les deux sont aussi méprisables, et font montre des mêmes bas instincts (argent), des mêmes caprices (qui se matérialisent par une boisson de drugstore pour l'un, par un daïqiri pour l'autre), des mêmes radotages : l'hagiographie de son fils par Madame Venable contrecarre les « radotages » de Catherine sur les circonstances troubles de la disparition de ce très cher Sebastian.

Quelle que soit la situation symbolique des deux « camps » (les Venable dominants, les Holly quémandeurs), leurs attitudes exhalent une pourriture moite à laquelle la chaleur suffocante de la jungle reconstituée qui sert de décor à la pièce sied à merveille. L'auteur siffle la fin de cette bataille entre le « dit » et le « non dit » sur un immonde match nul. Famille Venable, moins que zéro ; famille Holly, moins que zéro. Sauf Elizabeth Taylor, euh, Catherine pardon, qui tout en s'étant fait voler ou briser sa pureté, physiquement et symboliquement, sublime le « dit » et brise les certitudes, quitte à apparaître inacceptable.
Deuxième thématique majeure, la question de l'irresponsabilité. Dans ce petit monde où tous sont complices, personne ne peut être innocent. La demi-crise de conscience qui provoque la chute de Sebastian est d'autant plus violente qu'elle reste inconsciente, diffuse, qu'elle s'insinue en lui comme un poison sans qu'il en comprenne le sens, ou presque. Pour une fois qu'il ne bouge plus, qu'il n'est pas emmené vers l'ailleurs par sa mère, qu'il marine dans ses actes, il devient vulnérable, potentiellement perméable au mal-être, à la culpabilité, sans toutefois atteindre la prise de conscience (ce serait trop facile). .... Lire la suite ici