Pages

samedi 11 juin 2011

Concours de la nouvelle George Sand 2011 de Déols en Berry


george-sand.1305032870.jpg

Puisque je suis plongée, en ce moment, dans la lecture de George Sand, je veux signaler ce concours que j'ai découvert récemment : Concours international de la nouvelle George Sand de Déols en Berry
Ce concours a été fondé en 2004 et a lieu chaque année en hommage à l'écrivain, à son combat humaniste en faveur des femmes et aux valeurs de liberté, d'égalité et de fraternité que George Sand a défendues. Il a pour but de promouvoir la langue française.
Le Concours international de la nouvelle George Sand de Déols en Berry est ouvert à toutes les femmes sans distinction de lieu de naissance ou de résidence.
Le Concours étant attaché à promouvoir la langue française, les règles d'orthographe et de grammaire doivent être respectées. Les textes doivent répondre aux exigences génériques de la nouvelle : la simplicité de l'intrigue, une action resserrée autour de quelques personnages, l'existence d'une chute sont autant d'éléments qui garantissent la brièveté et la force de la nouvelle.
Mais surtout, les textes distingués le seront pour leur qualité littéraire : le jury prête une attention particulière à l'originalité de l'histoire et du style, à l'efficacité de la narration, à la puissance ou à la beauté de l'écriture.
La septième édition du concours propose le thème suivant : Frontière(s). Les candidates peuvent envoyer leur texte jusqu'au 30 Juin 2011.
Je  renvoie au règlement du concours pour celles qui sont intéressées.
A vos plumes! Devrais-je dire : A vos claviers!

......
logo-challenge-la-nouvelle5.1304787274.jpg de Sabbio
challenge-george-sand1-1.1304787241.jpg de  George

George Sand : Nouvelles (2) Metella et Mattea


 Metella
Dans la première partie de Metella, George Sand crée un personnage de femme belle et intrépide, installée à Florence, Lady Metella Mowbay mais qui, passé un certain âge, craint de perdre son amant, le comte de Buondelmonte. Le comte, d'abord jaloux et blessé dans sa vanité par la crainte de voir un jeune rival le supplanter, le jeune suisse Olivier en visite à Florence,  finit par rompre. Dans la société du XIXème siècle,  George Sand dénonce l'absence d'amour véritable et la vanité égoïste des hommes. Une femme n'a de valeur que si elle flatte l'orgueil de son amant et lui permet de briller en société. Comme dans Lavinia ou Pauline, les hommes confondent amour avec  amour propre. Mais les relations entre femmes sont terribles aussi. Quand Metella est abandonnée par le comte, ses "amies" se réjouissent et la raillent, tout comme le faisaient celles de la Marquise.. Malheur à celle qui devient vieille et qui ne parvient plus à plaire!
Dans la seconde partie, Metella vit en Suisse au bord du lac Léman avec Olivier. Elle l'appelle "mon fils", lui "ma mère" (allusion à Jean Jacques Rousseau?) mais ces relations sont un peu incestueuses! Leur tête à tête est interrompue par la venue de Sarah, la nièce de Metella qui sort du couvent. Celle-ci naïve croit que le jeune homme est le fils adoptif de sa tante. Les deux jeunes gens, comme l'on doit s'y attendre, finissent par s'aimer. Metella, d'abord jalouse de Sarah, parvient à dominer ses sentiments et continue à offrir protection et affection à la jeune fille. Mais une union comme celle-là serait scandaleuse. Olivier le comprend et part de son plein gré. Le portait de cette femme vieillissante deux fois abandonnée n'est pas sans grandeur. Metella finit par dominer la souffrance et par trouver dans l'amour  qu'elle éprouve envers sa nièce une raison de vivre et atteint à la sérénité. Ce qui est sûr, c'est que ce n'est pas avec  un homme que la femme peut trouver la paix.

Mattea
Mattea est la seule nouvelle de ce recueil qui finit bien. La jeune héroïne, Mattéa, se libère de la tutelle oppressante de ses parents, commerçants vénitiens, et de la brutalité de sa mère; elle s'enfuit de Venise, à bord du navire de Abdul, riche marchand turc, sous la protection du jeune grec, Timothée, employé d'Abdul, qui veut l'épouser. Elle arrive en Grèce où elle travaille pour gagner sa vie. Elle épouse Thimotée. A la mort de sa mère elle revient s'installer à Venise avec son mari et elle obtient le pardon de son père, Zacomo.
Il s'agit d'une "fantaisie", "une turquerie" comme on le disait du temps de Molière, très à la mode aussi au XVIIIème et que George Sand reprend à son actif. Ce récit, romanesque à souhait, ne peut être pris au sérieux car les aventures de Mattea sont plutôt rocambolesques. L'intrigue pourrait être facilement transposée au théâtre tant les scènes clefs, dont certaines sont presque entièrement dialoguées, prêtent au rire : Zacamo dont le chapeau est emporté par le vent tombe dans la barque de la princesse, Thimotée, le jeune grec, s'amuse franchement de la cupidité de Zacomo en lui faisant croire que Abdul réclame son argent. Veneranda qui refuse d'avouer son âge se croit aimée de Thimotée qui n'est là que pour les beaux yeux de Mattea. Le  Turc, Abdul, préfère la mère qui est une  grosse matrone à l'exquise jeune fille jugée trop maigre! Les personnages obéissent eux aussi à des types théâtraux : la jeune première idéaliste mais au caractère affirmé  qui n'a pas froid aux yeux, le jeune premier, Thimotée, habile et malin, une sorte de Figaro qui domine son maître Abdul, le père avare, la méchante marâtre...
Pourtant, les thèmes que George Sand aborde sont très sérieux :  Le mariage forcé car la mère veut marier sa fille à un cousin qu'elle n'aime pas; les rapports entre mère et fille qui rappellent ceux que George entretenait avec sa propre mère; le désir d'indépendance de Mattea qui n'hésite pas à braver les conventions sociales. Enfin l'on y retrouve une critique sociale vive et pleine d'ironie : cupidité du marchand Zacomo qui utilise sa fille Mattea comme appât sexuel auprès de Abdul. Ridicule de la princesse Veneranda qui refuse de vieillir, enfermée dans son égoïsme et sa richesse.
Enfin cerise sur le gâteau, une belle description de Venise!
J'ai déjà résumé Pauline ici
Voir Mattea chez Kathel





George Sand : Pauline


Pauline est un court roman de George Sand qui décrit en peu de pages mais avec une plume énergique et forte les tourments intérieurs d'une jeune fille, héroïne éponyme du roman, et ses relations avec son amie Laurence.
Dans la première partie qui se passe en province, Laurence qui est devenue une actrice célèbre revient par hasard à Saint-Front, la ville qu'elle a quittée pour aller vivre à Paris. Elle décide de rendre visite à son amie Pauline dont elle n'a plus eu de nouvelles depuis son départ.
Laurence vit dans l'aisance, ce qui lui permet d'assurer le confort matériel de sa mère et de sa soeur. Pauline, elle, vit dans la solitude et l'austérité et soigne sa mère aveugle. Les deux jeunes filles, en se retrouvant, renouent immédiatement avec leur amitié mais il ne faut pas longtemps pour que Laurence s'aperçoive de la souffrance morale et matérielle de Pauline. Aussi lorsque la mère de cette dernière meurt, Laurence croit bien  faire en invitant Pauline à venir partager sa vie à Paris. La seconde partie se déroulera donc dans la capitale. Mais comment réagira Pauline face à la vie brillante de son amie admirée de tous; comment vivra-t-elle l'hospitalité pourtant désintéressée de Laurence et sa réussite?
La première partie rend compte de la vie grise, monotone, terne d'une petite bourgade provinciale dans laquelle on croit reconnaître La Châtre, ville que George Sand jugeait laide et sans ouverture.  L'écrivain peint avec brio et humour l'esprit de ces petits bourgeois étriqués et moralisateurs. Toujours prête à dénigrer la morale des comédiens, toute cette clique bien-pensante vient ensuite, pour tromper son ennui et en constatant la réussite de Laurence, lui  faire sa cour et se prévaloir d'être son amie! Les scènes provinciales décrites par George Sand tiennent de la meilleurs comédie de moeurs. Le lecteur ne peut s'empêcher de sourire quand, au cours du dîner où Pauline et sa mère ont convié le Maire pour lui faire rencontrer Laurence, on voir arriver Madame la mairesse qui passait par là, par hasard, puis une seconde, une troisième visite... jusqu'à ce que le salon soit bondé! Ce qui fait déclarer à la mère de Pauline :
Oui-da, mesdames, je me porte mieux que jamais puisque mes infirmités ne font plus peur à personne. Il y a deux ans que l'on n'est venu me tenir compagnie le soir et c'est un merveilleux hasard qui m'amène toute la ville à la fois.
George Sand dénonce donc les travers de la vie provinciale  et ceci  d'une dent acérée qui prouve qu'elle a eu à souffrir elle-même de cet état d'esprit  :
Quoi qu'on dise à cet égard, il n'est point de séjour où la bienveillance soit plus aisée à acquérir, de même qu'il n'en est pas où elle soit plus facile à perdre. Le temps est un grand maître; il faut dire en province que c'est l'ennui qui modifie, qui justifie tout.
A côté de cette dénonciation sociale, George Sand explore l'âme humaine avec une perspicacité et une clairvoyance qui font froid au dos. En adoptant le point de vue de Laurence, l'écrivain laisse deviner, en effet, la vérité sur les relations de Pauline, fille exemplaire, avec sa mère aveugle. Peu à peu sous les gestes de dévouement de son amie, Laurence voit percer l'impatience, la rancoeur de la jeune fille qui n'a plus de vie personnelle. Sous l'affection de la vieille dame pointe l'égoïsme de la malade qui sait qu'elle sacrifie sa fille et au final sa peur d'être abandonnée.
La seconde partie présente la vie parisienne et nous voyons évoluer plusieurs spécimens d'hommes que j'ai déjà rencontrés dans mes lectures sandiennes, celui de l'ami fidèle et désintéressé, ici le vieil acteur Lavallée. Et  celui du dandy superficiel et mondain, Montgenays, incapable d'aimer vraiment et pour qui les conquêtes féminines sont surtout un moyen de briller dans le monde. Ce Montgenays n'est pas sans rappeler le héros de Indiana, Raymon. L'attitude de Pauline envers lui ressemble aussi à celle d'Indiana et révèle un manque  de lucidité voire d'intelligence difficile à accepter. Les ressorts qui permettent à Montgenyas d'abuser Pauline tiennent plus, en effet, du  mélodrame que du roman de moeurs.
Ce que j'ai préféré dans cette seconde partie, c'est l'étude psychologique toujours aussi fine qui étudie les progrès de la jalousie dans l'âme de Pauline. C'est ici que Pauline devient vraiment l'héroïne du roman car ce sont ses sentiments qui font évoluer l'action et conduisent à ce naufrage d'une amitié que Laurence ne peut rien faire pour éviter.
La morale, écrit George Sand, s'il faut en trouver une, c'est que l'extrême gêne et l'extrême souffrance sont un terrible milieu pour la jeunesse et la beauté. Un peu de goût, un peu d'art, un peu de poésie, ne seraient point  incompatibles, même au fond des provinces, avec les vertus austères de la médiocrité.



Challenge initié par George Sand


George Sand : Nouvelles (1) La Marquise et Lavinia

Dans ce recueil Editions Des femmes de Eve Sourian sont réunies cinq nouvelles que  Georges Sand  a écrites à l'âge de trente ans quand la jeune femme, après avoir quitté son mari, Casimir Dudevant, se rend à Paris et cherche sa voie pour devenir indépendante en gagnant sa vie. C'est à ce moment qu'elle découvre sa vocation littéraire. Le "métier d'écrire" devient une passion et elle écrit énormément "avec autant de facilité dit-elle que je ferai un ourlet". C'est une période douloureuse pour elle, elle est hantée par le suicide, trop "lâche" dit-elle pour mettre fin à ses jours. C'est pourquoi ces textes que l'écrivain aimait particulièrement et qu'elle rassemblera en 1861 dans un recueil, une trentaine d'années environ après leur rédaction, reflètent ses préoccupations de l'époque. Ils ont tous pour personnages principaux des femmes. Ils traitent de thèmes communs :  la femme par rapport à l'amour, au mariage, ses relations avec les hommes dans la société, l'infériorité de sa position, sa difficulté à être indépendante...
Les titres de ces nouvelles : La Marquise, Lavinia,  Metella, Mattea et Pauline
La Marquise
La marquise est une vieille femme peu spirituelle, ce que la société encline aux stéréoptypes attendrait d'elle. Pourtant quand on daigne l'écouter, elle a beaucoup à raconter; c'est ce dont s'aperçoit le narrateur qui l'interroge sur sa vie passée. Mariée à seize ans au Marquis de R., beaucoup plus âgé qu'elle, veuve à seize ans et demi, la Marquise de R, a eu une telle expérience de la sexualité qu'elle cesse tout commerce amoureux avec les hommes. Non par vertu, dit-elle, mais par dégoût, aversion et haine envers eux. Mais une femme sans mari ou amant n'a aucun soutien dans la société et subit humiliations, sarcasmes, railleries. Pour faire cesser ce harcèlement constant, la Marquise prend un amant qu'elle n'aime pas, le plus terne et le plus sot qui soit. Elle subit sa présence auprès d'elle pendant soixante ans, ce qui lui assure la tranquillité d'esprit et une relative indépendance. L'amour passion mais platonique et romanesque, elle le vivra pourtant à travers le personnage d'un acteur, Lélio. Mais n'est-ce pas les ombres du Cid ou de Cinna qu'elle admire à travers lui?
Dans cette courte nouvelle, on sent la rage et la révolte de George Sand. C'est avec âpreté qu'elle dénonce cette aberration qui pousse les toutes jeunes filles dans le lit des vieillards, cette société fausse, froide et méprisante où les conventions, le qu'en dira-t-on règnent en maître, où la femme doit obéir à ce que l'on attend d'elle. En prenant un amant, la Marquise entre dans les normes voulues par la société mais renonce à elle-même. C'est une sorte de suicide moral. Certes, George Sand a beaucoup en commun avec son héroïne mais elle ne veut pas lui ressembler. Contrairement à la Marquise, l'écrivain ne veut pas se contenter d'entrer dans un moule et de passer à côté de la vie.  Quand elle écrit ce texte, elle doit subir, elle aussi, les pressions sociales, elle est l'objet d'un scandale que suscite son farouche désir d'indépendance. Elle ne renoncera pas, ne voulant pas comme la jeune femme de la nouvelle se contenter de faux semblants et d'un amour fantasmé, idéalisé et factice lui donnant, à tort, l'impression d'avoir vécu.
Lavinia
Lavinia est aussi le type de la femme victime de l'homme. Elle a passionnément aimé Sir Lionel Bridgemont, un dandy fat et sans coeur, à qui elle s'est donnée et qui l'a abandonnée. Profondément blessée, elle a accepté d'épouser un vieillard dont elle est veuve. Mais Sand lui accorde une revanche ... bien amère. Quand elle revoit Lionel, Lavinia a gagné en beauté, en assurance, en raffinement. Ce qui provoque un retour de flammes chez le jeune homme. La demande en mariage du riche comte de Morangy attise encore les sentiments du dandy en redonnant du prix à Lavinia. Il ne peut supporter qu'elle lui échappe et lui demande à son tour de l'épouser. Mais Lavinia ne choisit ni l'un ni l'autre.
Nous retrouvons ici donc des thèmes semblables à ceux de La Marquise. Abandonnée et déshonorée, Lavinia cède aux conventions sociales en épousant un homme âgé. Elle le paie chèrement :  l'alliance d'un vieux lord ne m'a jamais bien lavée de la tache cruelle qui couvre une femme délaissée. On sait qu'un vieillard reçoit toujours plus qu'il ne donne. Elle refuse d'aimer à nouveau, protégée, en cela, non par la vertu mais par la méfiance.  les hommes apparaissent dans leur superficialité, incapables d'un sentiment vrai, inconstants,  vaniteux, soucieux surtout de leurs succès féminins et de leur carrière.
Le ton de Sand emprunte parfois au registre du vaudeville. Ainsi, certains passages font sourire :  Sir Lionel caché sur un balcon doit assister, furieux, aux déclarations d'amour de son rival; de plus, Lavinia s'en va et l'oublie! Mais l'amertume domine. Si Lavinia refuse l'amour, ce n'est pas comme la Marquise pour se plier aux exigences de la société. Au contraire, elle décide de se retirer du monde, de sa perfidie, de sa fausseté. Mais la véhémence douloureuse avec laquelle elle s'exprime, sa colère, sa haine, cachent mal les blessures profondes qui lui ont été infligées et l'amour qu'elle porte toujours à Sir Lionel.
" Et puis je hais le mariage, je hais tous les hommes, je hais les engagements éternels, les promesses, les projets, l'avenir arrangé à l'avance par des contrats et des marchés dont le destin se rit toujours.
A la fin de ce récit, Sir Lionel, loin d'être désespéré, recouvre ses esprits, se rabiboche avec sa fiancée actuelle, la riche Margaret, qui lui permettra de vivre dans l'opulence et de réussir dans la vie.
Allons lui dit Henry* en le voyant baiser la main de Miss Margaret, l'année prochaine nous siégerons au parlement.  (*Henry cousin de Lavinia)
On le voit, la conclusion est loin de tout romantisme. Cynique, pessimiste, désabusée, elle montre que George Sand en écrivant ces mots est revenue de tout... comme son héroïne! Car l'indépendance à un prix pour la femme, semble dire George Sand. Elle ne peut l'acquérir sans souffrance!




Challenge de George


  Challenge de Sabbio

Le monde de George Sand


George Sand par Nadar
Le Monde George Sand est un beau recueil de photographies consacré à l'écrivain, sa famille, ses amis et d'une manière plus générale à son époque.
Paru aux éditions  du patrimoine il est préfacé par Simone Veil qui lui rend hommage ainsi : Tout le temps qu'elle a vécu, elle a écrit, et par là, elle a puissamment agi sur ses contemporains. Le XXème siècle qui vient de s'achever a quelque peu masqué la force de son talent. Le moment est donc venu de reconnaître que George Sand est un auteur majeur de notre patrimoine, à la fois, femme, artiste, combattante et témoin de son temps.
L'introduction de Anne-Marie de Brem présente un court aperçu de la vie d'Aurore Dupin, de son mariage avec le baron Dudevant, de son combat de femme pour se libérer. Enfin nous assistons à la naissance de George en tant qu'écrivain puis à son engagement politique et social. Elle montre aussi l'importance de la famille et de son rôle de mère et surtout de grand mère lorsque approche la vieillesse "l'âge le plus heureux et le plus favorable de la vie".
Anne-Marie de Brem s'intéresse aussi aux contradictions de George Sand, cette femme  célèbre, reconnue,  entourée, respectée par de nombreux amis mais qui se plaint toujours de sa timidité, de sa sauvagerie : "Vous trouverez un personne bien timide et bien muette; mais ne vous en préoccupez pas et rien de ce que vous direz ne seraperdu pour moi". Un écrivain qui a besoin de silence et de recueillement pour réfléchir à la mission de l'artiste dans le monde mais qui sengage dans la lutte sociale et révolutionnaire à côté de ses amis politiques, Louis Blanc, Ledru-Rollin, Barbès, Lamartine..
Le recueil est divisé en cinq  chapitres qui regroupe les thèmes suivants :
Les liens de sang, de chair et d'encre
Belles-lettres
De l'art
La scène du pouvoir
L'univers du spectacle
Aurore Dudevant
Parmi ces images, il y a bien évidemment les superbes photographies de Nadar  : George à soixante ans en mars 1864, son fils Maurice Dudevant et sa belle fille Lina, Auguste Clesinger, le mari de sa fille Solange et surtout les deux magnifiques portraits de ses petites filles, Aurore et Gabrielle Dudevant, adolescentes. A côté de Nadar, ses contemporains Millet, Bisson,  Berthier, Verdot, Angerer,  Appert,  Bayard..





Challenge George Sand de George


George Sand : L'Orgue des Titans


L'orgue du Titan, récit fantastique, donne son titre au recueil de contes de George Sand paru à l'école des Loisirs/ classiques. Tous sont issus de deux ensembles : Les contes d'un grand-mère et Les légendes rustiques.

Certains de ces récits témoignent du désir de l'écrivain de conserver les croyances populaires des paysans du Berry. Elle fait véritablement oeuvre d'ethnologue en explorant l'imaginaire collectif, en collectant, avec l'aide de son fils Maurice, les anecdotes qui sont colportées par voie orale, en comparant les manifestations du surnaturel avec celles d'autres provinces françaises en particulier de la Normandie. Ce faisant elle s'efforce de préserver le patrimoine culturel du Berry en fixant la mémoire des coutumes, des mentalités et des mots spécifiques du terroir. Sa démarche me rappelle un peu celle de Frédéric Mistral pour la Provence, très conscient lui aussi des richesses de son pays et désireux de conserver cette mémoire collective, précieuse, uniformisée sinon sacrifiée par le centralisme français. Ce recueil  témoigne de l'intérêt du romantisme pour le folklore et les traditions et aussi pour le fantastique.
C'est ainsi que nous nous aventurons dans le pays berrichon, affrontant les Flambettes ou Flamboires ou feux fous, ces météores bleuâtres que tout le monde a rencontrés la nuit.(Tiens! tiens! souvenir de mon enfance, je découvre les feux follets avec La petite Fadette!). Parfois, ce sont les Demoiselles du Berry qui nous tourmentent, cousines des Milloraines de Normandie, êtres d'un taille gigantesque. Nous rencontrons encore au détour d'un sentier, au fond d'un bois ou près d'un marais, les meneux de loups, vestige de la légende des lycanthropes ou loups garous ou encore le  Moine fou, Moine libertin ou Moine bourru qui donne de si mauvais conseils aux jeunes fiancés.
Ces contes-là ne font pas peur et ils sont même pour certains assez amusants car les esprits ne sont pas toujours les plus fins et les hommes leur jouent parfois de bons tours!
D'autres histoires présentent une tonalité différente et exploitent un fantastique étroitement lié à la nature toujours présente. Dans L'orgue du Titan, par exemple, la montagne douée de vie est la cause d'hallucinations visuelles et auditives. Le Géant Yeous, dernier récit du recueil en fait partie et tranche sur les autres contes par sa longeur. Il  pourrait même passer pour un court roman. C'est celui qui m'a le plus intéressée.
Yéous est une grande roche dressée qui vue de loin avait un peu l'air d'une statue énorme. Impressionnant par sa taille, il domine la maison de Miquelon, paysan qui vit et travaille à ses pieds et le considère comme un Dieu païen qu'il méprise. Le géant se venge en s'abattant sur la maison et en estropiant Miquelon. Celui est obligé de mendier sur les routes avec sa famille. A sa mort, Miquel, son fils, décide de reconquérir la terre de son père et n'aura de cesse de débarrasser la propriété des rocs qui la parsèment.
Le roman présente un curieux mélange entre réalisme et fantastique. Miquel qui ne veut pas s'avouer vaincu doit charrier des tonnes de pierres qui sont les restes du Géant effrondré, un travail physique démesuré. Mais la nuit, il voit les pierres s'animer et le corps du géant renaître. Le combat qu'il mène prend alors une autre dimension. C'est à la Nature elle-même qu'il se mesure, celle-ci apparaissant comme un Dieu tout puissant. Et le fait que, dans cette lutte, ce soit Miquel qui l'emporte par son intelligence, sa force et sa patience, en dit beaucoup, à mon avis, sur les idées de George Sand et sa foi en la grandeur de l'Homme.



Challenge George Sand sur une idée de George


George Sand : Marianne

Marianne est un délicieux petit roman de George Sand écrit à Nohant en Mai 1875 près d'un an avant sa mort. Délicieux parce qu'elle y conte une histoire d'amour où l'amoureux est si aveugle sur ses propres sentiments envers  la jeune femme qu'il aime, que cela donne lieu à des situations piquantes, des joutes verbales au cours desquelles le lecteur lucide s'amuse de ce personnage sans douter un seul instant de l'issue possible.
De quoi s'agit-il ? Pierre André se retire à la campagne auprès de sa mère à l'âge de quarante ans. Intelligent, érudit, à la fois scientifique et poète, il a échoué dans sa carrière faute de savoir se mettre en avant, souffrant d'une excessive timidité liée à un manque de confiance en lui. Sa voisine qui est aussi sa filleule, Marianne Chevreuse, 25 ans, pourvue d'une fortune confortable qui la rend indépendante, vit seule depuis la mort de ses parents. Elle a refusé jusque-là toutes les demandes en mariage. Mais depuis le retour de Pierre, un froid s'est glissé dans leur relation sans que celui-ci puisse en comprendre la cause. Lui-même a renoncé à la vie, trop pauvre pour songer à se marier, trop vieux pour aimer. Mais quand un ami lui demande d'arranger un mariage avec Marianne pour son fils Phillipe, pourquoi Pierre est-il si contrarié?Pourquoi la jeune fille accepte-t-elle de rencontrer ce prétendant? Pourquoi trouve-t-il Philippe si déplaisant? Pourquoi en veut-il à Marianne de sa coquetterie envers le jeune homme? Il faudra que Marianne y mette du sien aidée par la mère de Pierre pour qu'il finisse par comprendre!
Une bluette, ce roman? Et bien non! Certes, ce n'est pas l'oeuvre capitale de George Sand mais l'on y trouve tous les grands thèmes développés par elle au cours de sa création littéraire alliée à une finesse de ton, à l'art du non-dit, à une analyse psychologique tout en demi-teinte qui ne manque pas d'humour. J'ai eu en le lisant une pensée pour la Sylvia de Marivaux du Jeu de l'amour et du hasard et de son : "Ah! j'y vois clair dans mon coeur". Et ceci d'autant plus que Sand place dans la bouche de son héroïne à peu près les mêmes mots  : Enfin! se dit Marianne en reprenant au pas le chemin de sa demeure, il me semble que je vois clair à présent; j'ai bien cru qu'il ne m'aimerait jamais!" Mais ce n'est pas dans son coeur que la lucide Marianne décèle la vérité, c'est dans celui de Pierre.
Le thème récurrent dans tous ses romans est bien sûr celui de la femme et du mariage. Marianne est une jeune fille indépendante, fière, qui entend rester maîtresse d'elle-même et tenir sa destinée en main. Elle exerce son droit de décision quant à son mariage qu'elle veut fonder sur l'amour et non sur des considérations marchandes. On voit que ce thème est constant chez George Sand (Indiana, Consuelo...) elle-même mal mariée, séparée de son mari, est partisane de l'égalité dans le mariage, du rétablissement du divorce.
La nature tient aussi un grand rôle dans le roman et est le lien entre Marianne et Pierre. Tous les deux se retrouvent dans cet amour qui est aussi une disposition naturelle de l'esprit à goûter la solitude et la beauté loin de la foule et des ambitions humaines. Tous les deux  savent "voir" la nature, ce qui est un don précieux. Cette idée se concrétise dans les paroles que Pierre adresse à Philippe qui est peintre : Marianne dit que l'on ne doit pas aller de l'atelier à la campagne, mais aller de la campagne à l'atelier, c'est à dire que l'on n'apprend pas à voir parce qu'on est peintre mais que l'on apprend à être peintre parce que l'on sait voir. Voilà une belle définition de l'Art de la part de George Sand!
Enfin comme toujours dans les romans de George Sand et bien que ce soit ici plus rapide des notations sur la vie et les moeurs paysannes au XIXème siècle, la description précise des cours de fermes mais aussi des intérieurs donnent un intérêt et un pittoresque certains au roman.

Challenge George Sand initié par George Sand