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jeudi 5 septembre 2019

Joyce Carol Oates : Petit oiseau du ciel


Quand Zoe Kruller, jolie serveuse se rêvant star de country, est découverte brutalement assassinée dans son lit, la police de Sparta vise aussitôt deux suspects : Delray Kruller, le mari dont Zoe est séparée, et Eddy Diehl, l'amant de longue date. Mais, sans preuve, l'enquête piétine. Les rumeurs s'amplifient, ravageant au passage l'existence des deux hommes et imprimant un cours étrange à celle de leurs enfants. Aaron Kruller et Krista Diehl, adolescents sacrifiés à l'histoire familiale, chacun persuadé que le père de l'autre est l'assassin, conçoivent peu à peu une redoutable obsession réciproque.  (éditeur Philippe Rey)

Le récit de Petit oiseau du ciel, titre d’une chanson folk, Little bird of heaven, est divisé en deux parties selon le point de vue adoptée : d’abord, celui de Krista, qui adore son père Eddy et qui est persuadée de son innocence. Son récit mêle différents moments de l’histoire, selon qu’elle est enfant ou adolescente. Puis, le point de vue d’Aaron, le fils métis de Zoé et de Delray (ce dernier est indien) qui porte à la fois le poids de son métissage et du regard négatif des autres et la honte du crime dont est accusée son père qu’il croit innocent. C’est lui qui découvre le cadavre mutilée de sa mère.
J’ai lu que l’on reprochait à ce roman des répétitions mais à mon avis, il s’agit d’une force du récit. En effet, les mêmes situations sont vécues à la fois par Krista et Aaron, donc sont forcément très semblables mais aussi très différentes puisque rapportées selon la subjectivité de l’un et l’autre. Peu à peu et par recoupement, l’intrigue progresse. Le roman fonctionne comme un thriller bien qu’il soit tout autre chose, le dénouement nous apportant la réponse à l’enquête policière.

Joyce Carol Oates dresse à nouveau à travers de ce récit un réquisitoire contre l’Amérique profonde : celle ou la police corrompue mène un enquête bâclée voire truquée, renvoyant dos à dos le mari et l’amant de la jeune femme assassinée sans pouvoir les inculper et sans vouloir les disculper. Celle ou les indiens des réserves n’ont aucune chance de pouvoir s’en sortir, faire des études, et où règnent le racisme qui entretient la violence. Les deux communautés se haïssent et ne parviennent pas à vivre ensemble d’une manière apaisée.
L’écrivaine analyse aussi les personnages principaux comme les personnages secondaires avec une maîtrise parfaite, montrant la complexité des sentiments, entre sensualité et rejet, entre amour et haine. Tous sont révoltés, englués dans un désespoir si profond que toute leur vie en sera marquée, du moins pour ceux qui parviendront à survivre. La vision des adultes par les enfants est d’une grande vérité et se révèle parfois très cruelle comme lorsque Krista juge sa mère anéantie par la trahison de son mari et par l’accusation portée contre lui. Elle la repousse pour prendre le parti du père. L’éveil de la sexualité de la jeune fille est lui aussi sans tendresse, marqué par la colère et la peur. Alcool et drogue semblent être un exutoire au mal être de la jeunesse et de la société en général.
Pas une fausse note dans ces personnages dont on partage les sentiments au plus près et qui ont une force et une vie qui font que l’on referme le livre poursuivi par ce récit noir et tragique. 


Little bird of heaven par le groupe Reeltime Travelers


Merci à toutes celles qui se sont inquiétées de mon absence. Votre gentillesse m'a touchée. Me voici de retour et j'espère plus régulièrement...  !

mercredi 13 mai 2015

Joyce Carol Oates : Les maudits


Les maudits est "gothique" mais … gothique à la manière de Joyce Carol Oates, c’est à dire très imbriqué dans la réalité, très provocateur, très ironique. Dans une note, l’écrivaine nous fait savoir qu’il faut le lire comme une métaphore.
Les vérités de la Fiction résident dans la métaphore, mais la métaphore naît ici de l’Histoire.

Joyce carol oates auteure de Les maudits
Joyce Carol Oates (source)

Le livre est présenté comme l’ouvrage d’un historien M.W van Dyck II, qui entreprend de nous relater, en s’appuyant sur un grand nombre de documents d’archives, de témoignages écrits ou oraux, l’histoire de la malédiction qui s’est abattue sur Princeton, la ville et son université, dans les années 1905 et 1906. Apparitions de fantômes, de vampires et de créatures diaboliques qui président à des meurtres d’enfants, au rapt d’une mariée devant l’autel,  à d’autres morts violentes. La folie s’empare de la petite ville et touche particulièrement la famille Slade, dont le patriarche, Winslow Slade, ancien président de l’université de Princeton, est un membre éminent et respecté de la société du New Jersey. C’est pourtant ses petit-enfants, Annabelle, Josiah, Todd et Oriana qui vont être les principales victimes des forces maléfiques. Mais si ces créatures innocentes payaient pour le crime de leur aïeul?

Interpénétration de la fiction et du réel

Grover Cleveland  président des Etats-Unis pendant deux mandats personnage de Les maudits de Joyce Carole Oates
Grover Cleveland  président des Etats-Unis 1885 à 1889 et de 1893 à 1897(source)
Une des forces de ce livre est dans l’interpénétration étroite de la fiction et du réel qui fait que je me suis  perdue dans ce dédale inextricable. Je ne savais plus si je me retrouvais dans la Grande Histoire ou dans la petite! Les présidents des Etats-Unis comme Grover Cleveland et Woodrow Wilson participent à la fiction du roman et rencontrent des personnages dont on ne sait plus s'ils ont réellement existé ou s'ils sont imaginaires! Les écrivains célèbres  comme Jack London, Upton Sinclair, Mark Twain sont évidemment connus. Mais qu’en est-il des grandes familles princetoniennes, Slade, (complètement fictive), Van Dyck, Burr, Fitz Randolph?

Un roman métaphorique

Université de Princeton campus source
Mais ce mixage entre le réel et l’imaginaire à bien d’autres fonctions que de nous étourdir et nous faire perdre la tête! Il nous ramène chaque fois à la métaphore dont parle Oates. Si les créatures diaboliques vivent dans le marais, se repaissant du sang de leurs victimes, vampirisant les femmes, tuant les enfants, le monde Princetonien réel n’apparaît pas meilleur et se nourrit lui aussi du sang des humbles comme le prouvent la naissance de Ku Klux Klan, le viol et le meurtre d’une fillette, le lynchage, dans le roman, d’un jeune couple noir qui ne soulève que peu d’émotion dans la ville. Les horreurs dénoncées par l’écrivain socialiste Upton Sinclair dans La Jungle sur les abattoirs de Chicago, la souffrance et l’exploitation des employés misérables, ignominieusement traités, sous-payés, vampirisés par le capitalisme (on en est toujours au même point actuellement d’ailleurs!!) sont autant d’atrocités, reflets du monde diabolique. Toutes ces grandes familles sont pleines de morgue et de suffisance envers leurs inférieurs, Oates parle de « snobisme »;  on comprend leur position par rapport aux noirs!  Le président Woodrow Wilson, lui-même, qui fut le premier à faire entrer un juif à l’université n’était raciste « que »… pour les noirs! Il justifiait le Ku klux Klan et il était, d’autre part, misogyne au point de ne pas envisager que les femmes puissent voter, encore moins qu’elles puissent entrer à l’université.
Ainsi "le gothique " de Joyce Carol Oates n’est pas gratuit et permet la satire d’une société qui n’a rien à envier à ceux qui règnent dans le marais. D'ailleurs,  l'écrivaine ne nous laisse jamais croire entièrement au fantastique. Lorsqu'un fait paraît inexplicable, elle lui substitue une explication réaliste comme pour les lys trouvés à l'endroit de l'apparition de la fillette du président Cleveland. De même l'apparition des serpents de pierre vivants qui sème la panique dans le pensionnat n'est-il pas le fait d'une hystérie collective? Nous sommes toujours ramenés au doute par une écrivaine qui joue au chat et à la souris avec ses lecteurs. 

Une ironie féroce

Woodrow Wilson, président des Etats-Unis de 1913 à 1921 dans le roman de Joyce Carol Oates Les maudits
Le très puritain Woodrow Wilson
C’est avec férocité (comme toujours) que Oates dénonce  et tourne en ridicule le puritanisme des moeurs, de la pensée et du verbe de cette vertueuse société. Ainsi le mot « indicible » souvent répétée ne désigne jamais le lynchage, l’exploitation des ouvriers, les souffrances des pauvres, mais tout ce qui a trait à la sexualité, et en particulier à l’homosexualité. Et c’est « indicible », en particulier, devant les « dames » qui ne doivent pas perdre leur pureté! Elles s’empressent donc de l’apprendre de manière indirecte, par les ragots des domestiques ou autres bavardages féminins. Quant à leur maris, si guindés, si comme il faut, si écoeurés par les « mystères » féminins, s’ils ne prononcent pas le mot adultère, ils le pratiquent! Les lettres authentiques de Woodrow Wilson l’attestent!
Oates se fait donc un plaisir de croquer l’hypocrisie collective. La censure de la religion n’a d’égale que sa transgression, la vertu a pour revers le vice.
Hypocrisie aussi chez les penseurs, les écrivains qui devraient être des esprits libres mais qui abandonnent leurs idéaux dès qu’ils font fortune et fréquentent le beau monde. Tout au long du roman on retrouve cet art du portrait que Oates transforme en arme redoutable et porte à un niveau maximal!

L’intérêt du roman

Upton Sainclair dans le roman de Joyce Carol Oates Les maudits
Upton Sainclair (source)
Les maudits n’est pas un roman facile; si vous voulez le lire seulement pour vivre des aventures sulfureuses, légères, et pour vous faire peur, mieux vaut le laisser de côté. Et quand j’ai parlé de dédale, précédemment, ce n’était pas qu’une image! Il faut parvenir à s’y retrouver. La multiplicité des points de vue fait la richesse du roman mais déroute parfois. C’est à cause de cela que j’ai préféré certains passages à d’autres car le style diffère chaque fois et l’on peut s’intéresser plus à l’un des personnages qu’à l’autre. J’ai beaucoup aimé, par exemple le journal secret et codé d’Adélaïde Burr.  Il nous fait pénétrer dans l’intimité d’une « dame » de la riche société princetonienne en ce début du XX siècle. La maladie et la fragilité de cette jeune femme toujours alitée peut gagner la sympathie du lecteur mais en même temps, nous nous rendons compte des préjugés sociaux, raciaux d’Adélaïde, de l’égoïsme, de la mesquinerie de ces femmes privilégiées, des conflits d’intérêt, des jalousies. A travers ce journal apparaît aussi le manque de liberté de la femme qui est élevée autant qu’il est possible dans l’ignorance de la sexualité, tenue par les hommes à l’écart de la politique et de l’instruction.
Les rencontres avec les écrivains m’ont passionnée :  Joyce Carol Oates dresse un portrait à charge, haut en couleur de Jack London qui n’affiche plus qu’un socialisme de surface pour ne pas dire de pacotille lors du meeting organisé par le naïf, sincère et pur Upton Sainclair! Un grand moment du roman assez étourdissant! Mais le portrait de Mark Twain ne manque pas de pittoresque lui  aussi!
Enfin les lettres de Woodrow Wilson sont, contre toute attente, (après tout, il n’est pas écrivain) très intéressantes. Il a, malgré un certain aspect désuet et conventionnel, un beau brin de plume!

Les maudits est le cinquième roman gothique de Joyce Carol Oates après Bellefleur ICI, A bloodsmoore romance, Mysteries of Winterthurn ICI, My heart laid blair.

Mais pourquoi Joyce Carol Oates n'a-t-elle pas encore obtenu le prix Nobel de littérature? On se le demande?

mardi 28 janvier 2014

Mudwoman de Joyce Carol Oates


Mudwoman, le dernier roman de Joyce carol Oates est une grande réussite, un roman puissant et haletant que l'on ne peut lire qu'avec passion.

Mudgirl est une petite fille maltraitée que sa mère, folle, jette dans les marais des Adirondacks. Tandis qu'elle s'enfonce dans la boue, promise à une mort terrible, elle est sauvée par une jeune homme faible d'esprit qui prétend avoir été guidé vers la fillette par le roi des corbeaux. Mudgirl est ensuite placée en famille d'accueil puis adoptée par des quakers qui lui donnent beaucoup d'amour. Mais peut-on guérir d'une telle enfance? Il le semble bien puisque Meredith Neukirchen, brillante philosophe, chercheuse de renom, devient la première femme présidente d'une université prestigieuse malgré le machisme du milieu. Pourtant il va suffire d'un voyage sur les lieux de son enfance pour que le passé resurgisse. Mudgirl n'a jamais cessé d'exister, elle est devenue Mudwoman.

Le personnage de Mudwoman est passionnant, complexe et attachant. Sous cette femme en apparence forte, sous la froideur, se cache un être fragile, naïf, qui croit encore malgré tout à la bonté des hommes, mais aussi très solitaire. Elle doit faire d'immenses efforts pour parvenir à assumer ses fonctions, à avoir des relations avec les autres,  à refouler le passé et l'angoisse qui montent en elle. Elle se fait appeler par ses initiales MR comme si elle voulait se cacher, ne pas s'impliquer en tant qu'être humain, nier sa personnalité, sa féminité aussi. Et d'ailleurs qui est-elle? Elle a porté deux autres noms avant de devenir MR.

Le fait d'adopter son point de vue, par un parti pris de l'auteur, nous pousse à épouser tous ses sentiments, à partager sa tension intérieure, et, en même temps, brouille la narration romanesque dite "normale".
La narration est, en effet, complexe mais très maîtrisée par Oates. L'on passe de la réalité à l'onirisme dans un glissement léger qui ne permet pas d'en saisir les frontières, ce qui est assez rare dans un roman occidental.  En effet, bien souvent le lecteur est dérouté car il ne sait pas si les évènements qui se déroulent sont vrais ou s'ils sont la projection des pensées de Meredith, de ses rêves, de ses cauchemars. Il s'ensuit que nous sommes entraînés avec elle dans une descente aux Enfers, un monde hostile, glacé où survivre demande des efforts. Un monde aussi où l'on perd ses repères, où l'on ne sait plus ce qui est réel ou imaginaire. Un récit haletant.

Les thèmes comme toujours chez cette écrivaine sont nombreux et riches et j'apprécie qu'elle ancre son personnage dans la réalité de l'époque et de son pays, sans que cela paraisse plaqué. Oates présente ses idées politiques généreuses que son personnage partage mais n'est pas libre d'exprimer dans un pays qui se dit pourtant démocrate!

Description du milieu universitaire hostile aux femmes et ostracisme qu'elles subissent au quotidien; il y a peu de temps que les femmes peuvent arriver à un tel poste; guerres intestines entre républicains et démocrates au sein même de l'établissement;  prises de position réactionnaires des républicains qui refusent l'accès de l'université aux boursiers comme ils le refusaient aux juifs, aux noirs et aux femmes il y a peu;  manque de liberté de la présidente d'université qui est soumise au diktat des riches donateurs de l'université et peut à tout moment si elle n'est pas politiquement et socialement "correcte" être destituée. Tout ceci sur fond de conflit menaçant. Nous sommes à la veille de la guerre en Irak, les mensonges politiques troublent les esprits, fomentant la haine et créant une atmosphère délétère, réveillant les actes fascisants.
L'amour, dans ce monde noir, ne semble pas apporter un grand soutien. L'amant "secret" de Mudwoman n'est jamais présent et ne la soutient qu'occasionnellement. Et Mudwoman s'efface devant lui, ne peut laisser cours à ses sentiments : prisonnière? de quoi? de la boue qui n'a jamais cessé de l'étouffer! Elle ne peut répondre entièrement à l'amour de ses parents, peut-être parce que ceux-ci ont essayé de lui faire jouer le rôle de la fillette qu'ils ont perdue avant de l'adopter. Ne lui ont-ils pas donné le nom de leur petite morte? Pourtant l'amour qu'elle porte à son père adoptif et réciproquement donne une lueur d'espoir au dénouement... semble-t-il? Un dénouement qui me paraît pourtant équivoque*.


Un très grand roman au même niveau pour moi que Chutes ou Nous serons les Mulvaney, mes préférés. Un coup de coeur!


* j'aimerais bien discuter du dénouement avec un lecteur du roman. HOU! HOU! il y a quelqu'un?


Lire George ICI

Sylire ICI

Dominique Un avis négatif



mercredi 12 septembre 2012

Joyce Carol Oates : Bellefleur




Bellefleur de Joyce Carol Oates paru en 1980 aux Etats-Unis est un roman fleuve de près de mille pages qui conte l'histoire d'une dynastie fondée par Jean-Pierre Bellefleur, aristocrate d'origine française, chassé de son pays au XVIII siècle et qui crée un immense empire en achetant des terres. Il  amasse une colossale fortune dont il ne reste que des traces (mais substantielles!) au moment ou Leah épouse son cousin Gideon et décide de restaurer la puissance et la richesse de l'orgueilleuse famille.
 Le récit court sur plusieurs générations de la fin du XVIII à la fin du XX  siècle et présente un nombre impressionnant de personnages et d'actions. La structure du récit qui refuse la chronologie, passe d'une époque à l'autre, d'un personnage à l'autre, est extrêmement complexe à l'image de cette famille absolument hors du commun. L'écrivain ouvre parfois des portes sur un évènement mais les referme bien vite, piquant notre curiosité qui ne trouvera satisfaction que bien des chapitres après. Bellefleur n'est donc pas de tout repos ni pour le lecteur ni pour l'auteur et ce n'est pas étonnant que Carole Joyce Oates ait déclaré que ce roman l'avait "vampirisée". Mais s'il semble partir dans toutes les directions, si les personnages paraissent impossibles à maîtriser dans leur folie et leur fantaisie meurtrières, il aboutit exactement là où l'écrivaine a voulu le conduire, lorsque tout nous a été révélé, que toutes les pistes se sont rejointes, et que le seul dénouement que l'on pouvait attendre pour une telle famille survient enfin!
 Le roman navigue entre réalisme et fantastique. Certes, la vie de la famille est bien ancrée dans les époques et la société et Oates décrit les jeux de pouvoir et d'argent d'une société inégalitaire et capitaliste mais il se passe de drôles de choses dans l'antique et ténébreux manoir des Bellefleur! Un des fils disparaît dans une chambre hantée et l'on ne le revoit jamais. Il n'est pas le seul! Yolande, une des filles d'Ewan, frère de Gideon, disparaît elle aussi  après avoir croisé un mystérieux chien jaune, incarnation maléfique d'un jeune garçon, voisin pauvre des Bellefleur. Germaine, la fille cadette de Gideon et Leah a des pouvoirs de divination et annonce les catastrophes. Un bébé Bellefleur est enlevé et dépecé par un oiseau d'une envergure démesurée et doté d'une intelligence machiavélique. Le nain, domestique de Leah, ne cesse de grandir et de se redresser… Mais, même lorsque le Merveilleux n'a pas sa part dans le roman, les personnages sont tellement exacerbés, excessifs, tordus, ou carrément déments que l'on croit rêver. Je pense à Jedediah, sorte de Fou de Dieu, ermite qui se retire en solitaire dans la montagne, à  Jean Pierre II  psychopathe et sérial killer a l'air innocent… ou Leah et son araignée géante perchée sur l'épaule qui régle le sort des prétendants de la jeune fille un peu trop entreprenants..! Bref! Lire ce roman de Joyce Oates, c'est aller de surprise en surprise! J'avoue que certains passages de ce roman m'ont fascinée et qu'il m'a été difficile d'échapper à ma lecture. Pourtant, il y a des moments où j'ai été moins captivée. Pourquoi? Une impression de surplace, des personnages qui m'intéressent moins, une fatigue passagère liée à un trop grand nombre d'évènements. Quoi qu'il en soit Bellefleur est un bon roman qui est le fait d'une écrivaine de caractère, en pleine possession de son art et qui frappe fort.





lundi 24 octobre 2011

Parlons un peu challenges? (2)

Après Parlons un peu challenge? (1) ICI voici mes autres challenges en cours

La  Lecture

Mon Challenge préféré :   George Sand chez George et moi



J'aimais déjà George Sand avant de commencer ce challenge : ses romans, bien sûr, mais aussi la femme, avec ses idées socialistes, généreuses, malgré son rang social qui aurait pu faire d'elle une privilégiée, préoccupée seulement du bien être et du confort de sa classe sociale. Il me plaisait aussi qu'elle lutte par ses écrits et son attitude pour le statut des femmes. Avec ce challenge,  j'ai été carrément bluffée en découvrant les multiples facettes du talent de l'écrivaine qui aborde tous les thèmes, tous les genres aussi. Bravo à George, donc, qui a initié ce challenge et qui nous fait profiter aussi de ses grandes connaissances sur Sand avec ses billets du samedi sandien intéressants et détaillés.
 Pour ce challenge J'ai lu 12 romans ICI et.. ce n'est pas fini!


 Le Challenge Nature Writing chez Folfaerie 


Hélas! je suis venue un peu trop tard à ce challenge qui va bientôt finir.  Mais il aura eu l'immense mérite de me faire découvrir de très beaux livres et des auteurs que je ne connaissais pas. Bien sûr, je ne vais pas m'arrêter en si bon chemin!
J'ai lu cinq livres pour l'instant de Pete Fromm, Edward Abbey; Gerard Donavan, David Vann : ICI. je vais bientôt lire des nouvelles de Jack London, l'auteur vénéré de mon enfance.
 Merci à Folfaerie, blog Au coin du feu, pour cette belle découverte .


La littérature fait son cinéma chez Will dans Kabaret culturel


 Je viens à peine de découvrir le challenge de Will qui unit la passion de la lecture à celle du cinéma. C'est donc pour moi! Et j'ai choisi tout de suite la catégorie supérieure, grande actrice! Une belle idée!
Mes participations sont ICI


Le challenge Carol Oates chez George



Je l'ai choisi car j'aime cette écrivaine depuis le jour où je l'ai découverte avec  deux romans qui restent pour moi ces chefs d'oeuvre : Nous étions les Mulvaney et Chutes. Oates a été pressentie plusieurs fois pour le prix Nobel de littérature et le mériterait bien. Elle  a une puissance d'analyse des personnages et de la société extraordinaires et ses romans sont cruels parce que sans concession. Sa lecture me donne souvent l'impression de recevoir une volée de coups et c'est pourquoi j'ai besoin d'arrêter parfois de la lire. Mais c'est pour mieux repartir car c'est une vraie vision de la société que nous donne Oates  et elle nous parle de la nature humaine.. Encore une bonne idée de George. j'ai lu 10 romans ICI

Le challenge Nouvelles de Sabbio



L'art de la nouvelle est extrêmement difficile. Normalement, je ne suis pas très nouvelles, moi qui aime les romans et les gros pavés! Souvent les nouvelles me déçoivent car elles me laissent en attente, sur ma faim. J'aimerais en savoir plus sauf.. quand elles sont écrites par de grands écrivains comme Raymond Carver, par exemple. Alors c'est sublime. Le challenge est initié par Sabbio qui, je l'espère, va revenir bien vite sur son joli blog, A l'ombre de mon cannelier! Mes participations voir ICI

Un mots, des titres, chez Calypso



Calypso propose un mot : bleu, soleil... Et c'est à nous de choisir un titre qui contient ce mot pour une lecture commune très variée. J'aime  l'idée de Calypso, j'aime aussi que l'on aille de blog en blog ensuite lire ce que les autres lectrices ont découvert.
Les mots auxquels j'ai participé : Bleu; Soleil, Nuit.. le prochain est "secret" pour le 1er décembre ICI  



Il s'agit de lectures communes concoctées selon un menu qui vaut au moins****! Venez nous rejoindre chez Ogresse : plus on est de fous...

 Mercredi 12 octobre
Apéritif
  BRETON A. Nadja.

Jeudi 10 novembre
Entrée
  DOSTOÏEVSKI F. Le Double.  ET/ OU Crime et châtiment

Samedi 10 décembre
Premier plat
  ZWEIG S., Le Joueur d’échecs.
                                                                       Voir la suite ICI

Et j'adore ce logo!
Pour le 10 Novembre, j'ai choisi de lire Le double de Dostoievsky

 Challenge Marylin chez George



 C'est mon mini challenge, juste pour le plaisir de revoir des films que j'aime, de découvrir des écrits sur Marylin : ICI  ...


                                                                   1% chez Hérisson


Puisque je lis des livres pour la Rentrée littéraire,  je me suis inscrite ici mais c'est tout nouveau et pas encore au point pour moi. Pour les livres de la Rentrée 2011 voir ICI




J'aime beaucoup aussi le Blogoclub de Sylire et Lisa où nous pouvons choisir tous ensemble le livre commun à partir d'un thème proposé par les initiatrices. Des lectures enrichissantes et un beau travail d'organisation.  Pour le 1er Décembre, le thème était le voyage et le livre retenu, parmi de nombreux autres, est : L'extravagant voyage du jeune et prodigieux T.S Spivet de Reif Larsen,

Les Ateliers d'écriture


Je participe à l'atelier d'écriture du Skriban chez  Gwenaelle.
Le vendredi, tous les quinze jours, Gwenaelle nous propose un thème. Nous écrivons un texte en respectant les consignes (hum! sauf les étourdis!) qui sont publiés le dimanche dans l'Atelier du Skriban :  Ecriture et échange! On s'amuse chez Gwen!




Et à l'atelier d'écriture  désirs d'histoire  de Olivia. Chaque mardi les participants proposent un mot  Olivia les récolte, en dresse une liste et il faut écrire un texte en y glissant les mots imposés. Il faut parfois se creuser la cervelle pour les utiliser mais ça marche!

Jeux et Enigmes littérature/ Cinéma




Wens et moi, nous proposons chaque samedi un jeu-énigme :  Un livre/ un film. Il s'agit de découvrir à partir de l'extrait d'une oeuvre littéraire quel est le titre et l'auteur et quelle est son adaptation au cinéma. Dans son blog En effeuillant le Chrysanthème Wens propose l'énigme sur le film, dans le mien, le livre. Le dimanche, nous présentons dans nos blogs respectifs un billet sur ces oeuvres.


 Eeeguab, blog Blogart (La comtesse), propose aussi, le dimanche, un jeu cinématographique que vous trouverez ICI


L'énigme du samedi de Chantal Serrières a repris dans son blog : Ecritures du monde



                                                             Et mes deux anciens challenges



Elizabeth Braddon de  Lou 4 livres lus  ICI


English classics de Karin  19 participations   ICI

jeudi 28 juillet 2011

Joyce Carol Oates : La fille tatouée



 De qui est-ce? Le jeu de l'été (9)
De qui est-ce? Ce petit jeu de l'été a été initié par  Mango et repris à sa demande dans mon blog.
Ce jeu de qui est-ce? - juste pour le fun- consiste tout simplement à retrouver l'auteur et le titre du roman célèbre dont je présente un extrait. Vous pouvez donner vos réponses par mail (que vous trouverez dans mon profil) et me laisser des indices dans les commentaires sans révéler l'auteur, indices qui me permettront de savoir si vous avez vu juste et d'aider ceux qui ne savent pas.

Nouvelle énigme
 Voilà un texte d'un de mes auteurs favoris (je  sais, je sais, j'en ai beaucoup!) du XIXème siècle. Il est surtout connu pour ses poèmes. Je n'ai donné que la première lettre des prénoms des fillettes car ceux-ci, surtout le S... , seraient trop révélateurs. Cela se passe dans le Valois. Mais si vous avez besoin d'autres indices, vous n'avez qu'un mot à dire!

J'étais le seul garçon de cette ronde, où j'avais amené ma compagne toute jeune encore, S... une petite fille du hameau voisin, si vive et si fraîche, avec ses yeux noirs, son profil régulier et sa peau légèrement hâlée!... Je n'aimais qu'elle, je ne voyais qu'elle, - jusque-là!  A peine avais-je remarqué, dans la ronde où nous dansions, une blonde, grande et belle, qu'on appelait A... Tout à coup, suivant les règles de la danse, A... se trouva placée seule avec moi au milieu du cercle. Nos tailles étaient pareilles. On nous dit de nous embrasser, et la danse et le choeur tournaient plus vivement que jamais. En lui donnant ce baiser, je ne pus m'empêcher de lui presser la main. Les longs anneaux roulés de ses cheveux d'or effleuraient mes joues. De ce moment un trouble inconnu s'empara de moi. La belle devait chanter pour avoir le droit de rentrer dans la danse. On s'assit autour d'elle, et aussitôt, d'une voix fraîche et pénétrante, légèrement voilée, comme celle des filles de ce pays brumeux, elle chanta une de ces anciennes romances pleines de mélancolie et d'amour, qui racontent toujours les malheurs d'une princesse enfermée dans la tour par la volonté d'un père qui la punit d'avoir aimé.

Réponse à l'énigme (8)

 La fille tatouée de Joyce Carol Oates


Vous avez été nombreux à trouver le résultat de l'énigme, soit l'auteur ou le titre, ou l'un et l'autre : Aifelle,  Dominique Jeanne,  George, Gwen, Wens...
 La fille tatouée de Joyce Carol Oates est un roman qui vous bouscule, que dis-je? qui vous malmène, vous rudoie, vous bouleverse, vous empoigne enfin. Tout, du récit au style, de l'intrigue générale aux détails, est dérangeant et je comprends pourquoi il a été si controversé à sa sortie! Une chose est sûre : s'il ne fait pas plaisir, si l'on n'en sort pas indemne, c'est parce que c'est un grand roman!

Deux personnages en opposition totale
Alma Bush est décidément une pauvre fille, une paumée.  Elle vient d'un pays, le comté d'Akron en Pensylvannie, qui ressemble  à l'enfer -  au sens propre-  avec ses fumerolles qui s'élèvent du sol, ses vapeurs, ses gaz toxiques, sa puanteur, avec les incendies de ses mines d'anthracite. Elle est issue d'une famille pauvre où le mot amour n'existe pas. Les hommes l'ont toujours traitée en objet sexuel, ils l'utilisent, ils la vendent, l'insultent et la seule chose qu'elle reçoit d'eux, ce sont des coups de pieds dans le ventre, ce dont ils ne se privent pas. Pourquoi accepte-t-elle? parce qu'elle n'a aucune estime pour elle-même, est persuadée que personne ne peut l'aimer, parce qu'elle pense le mériter!
Joshua Seigl est de famille juive. Ecrivain brillant et reconnu, il a écrit un livre, considéré comme un chef d'oeuvre, sur ses grands parents morts dans les camps de concentration. Lui aussi est fragile et prompt à se replier sur lui-même mais il est riche,  érudit, bel homme, habitué à recevoir l'admiration des femmes et les hommages des lettrés et des intellectuels qui l'entourent.  Cependant, quand, atteint d'une grave maladie, il est obligé de prendre un assistant, le voilà qui refuse tous les brillants étudiants qui se présentent chez lui pour prendre Alma Bush à son service! Voir la suite ici



samedi 2 juillet 2011

Joyce Carol Oates : La fille tatouée


 La fille tatouée de Joyce Carol Oates est un roman qui vous bouscule, que dis-je? qui vous malmène, vous rudoie, vous bouleverse, vous empoigne enfin. Tout, du récit au style, de l'intrigue générale aux détails, est dérangeant et je comprends pourquoi il a été si controversé à sa sortie! Une chose est sûre : s'il ne fait pas plaisir, si l'on n'en sort pas indemne, c'est parce que c'est un grand roman!

Deux personnages en opposition totale
Alma Bush est décidément une pauvre fille, une paumée.  Elle vient d'un pays, le comté d'Akron en Pensylvannie, qui ressemble  à l'enfer -  au sens propre-  avec ses fumerolles qui s'élèvent du sol, ses vapeurs, ses gaz toxiques, sa puanteur, avec les incendies de ses mines d'anthracite. Elle est issue d'une famille pauvre où le mot amour n'existe pas. Les hommes l'ont toujours traitée en objet sexuel, ils l'utilisent, ils la vendent, l'insultent et la seule chose qu'elle reçoit d'eux, ce sont des coups de pieds dans le ventre, ce dont ils ne se privent pas. Pourquoi accepte-t-elle? parce qu'elle n'a aucune estime pour elle-même, est persuadée que personne ne peut l'aimer, parce qu'elle pense le mériter!
Joshua Seigl est de famille juive. Ecrivain brillant et reconnu, il a écrit un livre, considéré comme un chef d'oeuvre, sur ses grands parents morts dans les camps de concentration. Lui aussi est fragile et prompt à se replier sur lui-même mais il est riche,  érudit, bel homme, habitué à recevoir l'admiration des femmes et les hommages des lettrés et des intellectuels qui l'entourent.  Cependant, quand, atteint d'une grave maladie, il est obligé de prendre un assistant, le voilà qui refuse tous les brillants étudiants qui se présentent chez lui pour prendre Alma Bush à son service!

L'intrigue psychologique et sociale
La réunion de Joshua et Alma sous le même toit, c'est la confontation explosive de deux extrêmes, de deux milieux sociaux que tout oppose, de deux Amériques qui d'habitude ne se connaissent pas et n'ont pas de rapport entre elles en dehors de l'exploitation de l'une par l'autre.
Pendant que les familles du comté d'Akron meurent les poumons rongés par l'emphysème et toutes sortes de maux au-dessus des mines incendiées, dans l'indifférence générale de ceux qui détiennent le pouvoir, pendant qu'Alma est ramassée mourante de faim dans le ruisseau, Joshua ne sait que faire de son argent. Il est si riche qu'il n'ouvre même pas les lettres qui contiennent des chèques de rémunération pour ses interventions dans des colloques ou ses publications. Si riche qu'il a le bon goût d'en avoir honte! Et si cultivé que chacun de ses mots blesse l'écorchée vive qu'est Alma!
Ce qui explique le sentiment qu'elle va paradoxalement éprouver pour son patron, la haine! Paradoxalement, car c'est le seul homme qui la respecte, le seul qui ne la touche pas, le seul qui se soucie de son bien être, de son avenir! Pourtant, il suffirait d'un mot, d'un geste, d'une attention pour qu'une étincelle s'allume dans le coeur d'Alma, pour parvenir à percer sa carapace, pour que la haine se transforme en amour.
Voilà pour la situation et comme vous devez savoir que Joyce Carol Oates n'est pas précisément une habituée de Cendrillon,  il est inutile de vous dire que le livre finit mal!

La condition de la femme
J'avoue que j'ai vraiment eu du mal à lire jusqu'au bout cette histoire si noire. Cela tient d'abord à la personnalité d'Alma. On ne peut ressentir de la sympathie, ni même de la pitié pour cette fille même si l'on sait qu'elle est victime. En fait, c'est parce que  l'écrivain nous invite à partager le point de vue des hommes, des brutes, sur elle, en particulier de Dmitri, ce garçon de café qui la prostitue. Et ce regard est tellement dégradant, tellement salace que, malgré la beauté de la jeune fille abimée par ses tatouages, l'on ne voit plus en elle qu'une "femelle" (sic) nécessaire à l'assouvissement de besoins sexuels et bonne à apporter de l'argent, une épave sans dignité, un objet dont on peut disposer à sa guise. On souhaiterait pouvoir s'intéresser au personnage mais le fait qu'elle se soumette, qu'elle paraisse n'avoir aucun orgueil, nous en empêche et  finalement, il est très incorfortable pour le lecteur d'éprouver pour elle indifférence ou mépris, bref! d'épouser le point de vue des salauds.  Et c'est là que réside la force de l'écrivain. Elle nous fait prendre conscience de l'exploitation sexuelle, financière et psychogique de la jeune femme issue d'un milieu modeste en nous amenant à être du côté de l'exploiteur non de de la victime. Et notre prise de conscience sera d'autant plus grande que nous serons amenés peu à peu à la voir sous un autre angle, celui de Josua, celui du narrateur ou encore le sien, de l'intérieur,  quand nous serons éclairés sur ses pensées et ses sentiments..
Ainsi le roman de Joyce Carol Oates est une dénonciation de la condition des femmes qui partent dans la vie avec un handicap social insurmontable et un capital d'amour égal à zéro..  Et cette dénonciation est d'une telle crudité, avec des mots si violents, que cela nous touche jusqu'au malaise.

Le thème de l'holocauste et l'antisémiste d'Alma
Un autre chose m'a gênée, c'est l'antisémiste d'Alma, un antisémiste qui ne lui est pas naturel, que lui appris son amant Dmitri à grand renfort de coups de  pied mais qu'elle fait sienne pour deux raisons : pour plaire à Dmitri  parce quelle veut être aimée par quelqu'un, fut-ce par la pire ordure, et parce qu'il faut bien aussi qu'elle  se raccroche à sa haine envers son employeur. C'est ce qui lui permet d'exister.  Là encore l'antisémistisme s'exprime d'une manière et dans des termes d'une telle violence que l'on a l'impression d'être traîné dans un bain de boue, de partager l'enfer de cette femme.
Quant à Josua, même s'il est très éloigné de la la religion, il reste hanté par l'holocauste  Il y a un moment très beau lorsque Josua  provoque une prise de conscience chez elle en cherchant à lui montrer la réalité de l'holocauste perpétrée non seulement contre les juifs mais contre toutes les autres victimes (merci à JC Oates de le rappeler) et le non fondé de sa haine pour les juifs. C'est comme s'il ouvrait une brèche  vers la conscience de la jeune femme. A partir du moment où Josua s'intéresse à elle comme être pensant, en se souciant de ses idées, il la fait naître en tant que personne. Et pour le lecteur, c'est une brève trouée de ciel bleu dans un univers sans espoir.

Prise de position politique
JC Oates n'hésite pas aussi à dénoncer les responsables de catastrophes écologiques, de pollution comme elle l'a fait à propos de la ville de Niagara dans "Chutes"... C'est un thème qui lui est cher. Même s'il est secondaire, il est  important parce qu'il éclaire la psychologie d'Alma et l'affrontement social entre les deux personnages :
On dit qu'on aurait pu éteindre les incendies dans ces  mines il y a des années mais que le comté d'Akron n'a rien fait. L'Etat de Pensylvannie n'a rien fait. Pourquoi?
C'est les politiciens. C'est les propriétaires-banquiers juifs avec leurs hypothèques sur Wind Ridge, Bobtown, McCraken, Cheet.  Que les mines brûlent, qu'elles déposent leur bilan. Personne n'a en rien 
à fiche des gens qui vivent ici, c'est comme ça que les banquiers juifs gagnent des millions de dollars, et le gouvernement américain approuve de la même façon qu'il soutient Israel.
Je pense  en lisant ces lignes aux accents de John Steinbeck dans Les raisins de la colère ou ceux d'Emile Zola dans Germinal.. car c'est le propre d'un grand écrivain de dénoncer l'inégalité sociale  à travers des personnages qui l'incarnent individuellement.

 Challenge de George

Joyce Carol Oates : Mère disparue




Joyce Carol Oates  a écrit ce roman Mère disparue en pensant à sa mère décédée en 2003, si j'en juge par la dédicace du livre... Il ne s'agit pas, cependant, d'une autobiographie mais d'une oeuvre entièrement fictionnelle puisque l'écrivain imagine  comment l'héroïne de son roman, Nikki, après une soirée de fête des mères ratée, retrouve sa mère  morte quelques jours plus tard, sauvagement assassinée. Le livre n'est pas non plus un  roman policier. Le lieutenant Ross Stabane retrouve tout de suite le meurtrier et clôt l'enquête.
Et pourtant, il y a enquête! Celle que Nikki va mener auprès des amies de sa mère, "l'hypocondriaque" Alice Proxmire,"le distingué" Gilbert Wexley, "la sévère" tante Tabitha,  pour apprendre qui était véritablement Gwen Eaton que ses amis avaient surnommée "Plume" et qui cherchait désespérement à rendre les gens heureux autour d'elle faute de pouvoir l'être vraiment elle-même. Au cours de cette recherche la personnalité de Nikki va évoluer ainsi que ses sentiments.
Au début de Mère disparue, Carol Joyce Oates s'adresse directement à chacun d'entre nous en ces termes : Je raconte ici comment ma mère me manque. Un jour, d'une façon qui ne sera qu'à vous, ce sera aussi votre histoire. J'ai pensé, à la lecture de ces lignes, que ce livre allait beaucoup me toucher ... et puis non! Il se lit, pourtant, avec intérêt.
En effet, il présente les qualités que j'ai rencontrées au cours de mes lectures de Joyce Carol Oates. Celle-ci excelle dans la peinture des relations humaines et de ses ambiguités, des rancoeurs, et des blessures qui ne peuvent se refermer. Les rapports, par exemple entre les deux soeurs, Nikki et Clare Eaton, la jalousie qu'elles éprouvent l'une envers l'autre, l'attrait-répulsion voire  le manque d'amour et d'affinités sont décrits avec beaucoup de finesse, de même que ceux plutôt équivoques entre Nikki et son beau-frère, Rob Chisholm.
J'aime beaucoup aussi, comment sans avoir l'air d'y toucher, l'écrivain sait faire comprendre la hiérarchie des rapports sociaux, le sentiment de supériorité éprouvé par une certaine bourgeoisie envers les classes dites inférieures, les non-dits au sein d'une même famille. Par exemple la  condescendance feutrée manifestée à la si "gentille" et si "petite" Plume qui fut dans les années 60 "une pom pom girl fadement mignonne", comme des "milliers- des millions?- d'autres jeunes filles instantanément reconnaissables pour des américains de la classe moyenne par tout non-américain".
Peu à peu se dessine aussi le portrait du père mort des années auparavant et c'est là, une fois encore, une  des grandes  forces de l'écrivain, celle de faire découvrir de manière allusive la relation entre Gwen et son mari, de faire revivre par petites touches impressionnistes cet homme silencieux, coléreux, imbu de lui-même, représentant l'autorité, et qu'il valait mieux ne pas taquiner, le père  impatient  et exaspéré par ses enfants, le mari amoureux de sa femme mais méprisant la famille modeste de celle-ci, les Kovach.
Par contre j'ai moins aimé le personnage de Nikki qui, contrairement à Ariah dans Chutes, est finalement peu intéressante. Superficielle, égocentrique, préoccupée uniquement de son pouvoir sur les  hommes, et de son apparence, elle est sensée changer après la terrible épreuve qu'elle a vécue. Or, son évolution me paraît peu convaincante et profonde. Joyce Oates m'a paru plus inspiré à d'autres  moments, pour d'autres personnages.
Enfin, et c'est ce qui explique une relative déception à la lecture de ce livre, l'auteur nous avait annoncé un roman sur le manque et je m'attendais à une réflexion sur la mort, sur le vide, sur les rapports mère-fille, sur l'amour maternel et filial ... Bien sûr, il est question de tout cela dans ce roman mais le fait d'avoir imaginé ce meurtre donne un côté anecdotique au récit. C'est pourquoi j'ai ressenti un manque de profondeur comme si ce n'était pas et ne pouvait pas être mon histoire. Peut-être est-ce pour cela que je n'ai pas été vraiment touchée par ce roman?


Joyce Carol Oates : Les mystères de Winterthurn


                            

Les mystères de Winterthurn de la grande romancière Joyce Carol Oates que l'on pourrait qualifier de roman noir gothique aborde un registre auquel je ne m'attendais pas  après avoir lu  Nous étions les Mulvaney bien ancrée dans la société américaine des années 1970.
Le livre est divisé en trois parties qui correspondent à trois énigmes, associées à des meurtres, résolues par le détective Xavier Kilgarvan :
          La vierge à la roseraie ou la tragédie du manoir Glen Mawr
          Le demi-arpent du diable ou le mystère du "cruel prétendant"
          La robe nuptiale tachée de sang ou la dernière affaire de Xavier Kilgarvan
Le fil directeur de ces trois récits est d'abord, bien sûr, Xavier Kilgarvan qui a seize ans au début du roman et les personnages récurrents  comme les deux cousines du jeune homme, Perdita et Thérèse Kilgarvan ainsi que les frères du héros; ensuite le lieu, le village de Winterthurn, et le genre, un mélange de réalisme lié au roman policier et de fantastique qui rappelle le roman gothique avec intervention du diable et de démons. L'intrigue se situe  à la fin du XIX ème siècle.
On peut lire cette oeuvre au premier degré, en tremblant, caché(e) sous sa couverture, fasciné(e)par les horreurs du manoir de Glen Mawr, terrifié(e) par les atrocités commises par le  "cruel prétendant" ou la robe couverte de sang de la belle et malheureuse Perdita.
Et puis, il y a le second degré : un humour sous-jacent au récit qui nous interpelle comme si l'auteur voulait attirer notre attention vers autre chose, vers un autre point de vue, d'autres centres d'intérêt, thèmes qui ne sont pas si éloignés, finalement, du roman que je citais plus haut : Le double visage d'un Juge, égoïste et incestueux dans le privé mais qui se prétend juste, sévère et impartial dans l'exercice de son métier et qui condamne à la pendaison une servante, séduite par son patron et jetée à la rue, parce que son bébé est mort de froid lors de l'accouchement. Un fils de famille coupable des pires atrocités, innocenté et libéré sous un fallacieux prétexte, mais en fait parce que les jeunes filles torturées et violées par lui ne sont après tout que des ouvrières d'usine. Calomnies, cruautés, vanités, superstitions, obscurantisme... Description d'une société bien-pensante et méprisante qui cache sous les aspects extérieurs de la vertu, les dépravations les plus totales. Même le pasteur n'est pas épargné, terminant en beauté (si j'ose dire!) la satire d'une société que l'auteur épingle d'un trait vigoureux, incisif.
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Joyce Carol Oates et Ian MC Ewan : Chutes (2) ; Sur la plage de Chesil

 J'ai découvert des correspondances certaines entre le roman de Carol Joyce Oates : Chutes et celui de Ian McEwan :  Sur la plage de Chesil.
Tous deux parlent  de jeunes mariés en voyage de noces, l'un aux Etats-Unis en 1950, l'autre en Angleterre, en 1962, une nuit de noces qui sera sans lendemain pour les deux couples. Tous deux seront en effet, des victimes de leur époque  et de leur milieu.  Si le récit de cette nuit de noces ne couvre que la première partie du long roman de Joyce Carol Oates, et ne représente qu'un moment rapide (mais décisif) de la vie de son héroïne, Ariah, il constitue par contre  le corps du court roman de Ian McEwan, le reste de la vie des personnages, Florence et Edward, étant résumé en quelques pages.
Les deux récits sont construits de la même manière avec des retours en arrière qui renseignent sur le passé, le milieu social, le caractère, les sentiments des personnages.
Pour le couple américain tous deux issus de milieux protestant puritains -lui est un pasteur évangéliste-  le sexe, considéré comme un péché, est une souillure. L'absence d'amour entre le couple, sa peur de la damnation, les non-dits sur les tendances homosexuelles du mari, tout va les conduire à un dénouement tragique. Le couple anglais, à priori, paraît moins marqué par le puritanisme et l'empreinte judéo-chrétienne, il doit surmonter pourtant tout autant d'inhibitions. Les années soixante sont encore une période où la sexualité est tenue secrète, où l'on cache la vérité sur la procréation aux enfants, sur les règles des filles aux garçons.. Les rares manuels d'éducation sexuelle sont maladroits et finalement malsains. Le sexe est associé à la peur d'avoir des enfants par "accident", à la crainte du contact physique ou d'échouer dans l'acte sexuel, de se ridiculiser. Pourtant si l'on devait parier sur l'un ou l'autre couple, j'aurais choisi celui de Mc Ewan car Florence et Edward ont une attirance physique l'un envers l'autre et s'aiment au contraire du couple de Oates qui n'éprouvent qu'un dégoût physique l'un envers l'autre assorti à un sens du devoir et des convenances peu réjouissant.
Les lieux éponymes des deux romans témoignent de l'influence déterminante qu'ils vont avoir sur l'avenir de ces jeunes mariés. Les Chutes du Niagara pour l'un, la plage de Chesil dans le Dorset, pour l'autre, vont consacrer la rupture du couple et décider de son avenir...
Le Niagara, fleuve à l'égal d'un Dieu, dans le roman de Oates, apparaît, en, effet, comme un personnage à part entière, obsédant par sa formidable présence, symbolique du destin des êtres humains qui gravitent autour de lui sans pouvoir lui échapper. Les chutes sont le symbole de la toute puissance de la Nature et de la Mort présentée comme un fléau et une délivrance à la fois. On dirait même qu'il s'impose comme la seule solution au mari d'Ariah. La plage de Chesil est présente, elle aussi, dans la soirée du couple; d'abord comme un paysage attrayant mais inacessible. Ils le contemplent par la fenêtre  lorsqu'ils sont à table mais n'osent se lever car ils sont retenus par les conventions sociales et gênés par les serveurs qui s'agitent autour d'eux.
Edward ne restait  pas insensible à cet appel venant de la plage, et, eut-il su comment faire ou justifier une telle suggestion, il aurait proposé de sortir sans plus attendre."
La plage représente donc un interdit que le couple s'impose et qui symbolise toutes leurs inhibitions au point de vue sexuel, tout ce qui, dans une éducation hypocrite et conventionnelle, brime la spontanéité et les élans du coeur et du corps. On se dit se dit que si le couple avait cédé à cet appel, il aurait trouvé dans toute cette beauté, "les falaises vertes et nues derrière la lagune, et quelques fragments de mer argentée,  l'air d'une douceur vespérale... la liberté de s'aimer.  Il est donc normal que, puisqu'ils sont trop polis, trop coincés, trop timorés, la plage ne puisse alors qu'être le témoin de leur rupture et de la fin de leur amour..
Ainsi les deux récits se terminent pour les deux couples par un échec à la suite de la nuit de noces. Pour ma part, j'avoue que j'ai été beaucoup plus séduite par le dénouement de Joyce Carol Oates non seulement parce qu'il est d'une puissance hallucinante mais parce qu'il est en accord avec la psychologie des protagonistes, des êtres entiers, tourmentés, exacerbés, marqués par la religion comme par un fer rouge, terrorisés par le sens de la faute et du péché.
Si le roman de Mc Ewan a de la force, je ne suis pas arrivée à adhérer à cette fin sur la plage car elle me paraît un peu superficielle. D'abord, parce que les deux jeunes gens s'aiment, et l'amour aurait pu, on le sent d'ailleurs à plusieurs reprises, leur permettre de surmonter la peur qui est sans commune mesure avec l'angoisse spirituelle qui précipite les héros de Chutes en enfer. Ensuite, parce que, pour justifier la rupture de Florence et Edward, Ian McEwan a dû préciser, dans le passé du jeune homme, sa tendance à l'emportement voire à la colère. Autrement dit si le héros n'avait pas été coléreux, il n'aurait pas brisé son couple. Ce fait paraît artificiel car il n'a rien à voir avec le sujet du roman qui s'énonce ainsi : Ils étaient jeunes, instruits, tous les deux vierges avant leur nuit de noces, et ils vivaient dans des temps où parler des problèmes sexuels était manifestement impossible.

Chutes de Joyce Carol Oates : (1)



Chutes, Le roman de Joyce Carol Oates raconte l'histoire d'une jeune femme, Ariah Littrell, fille de pasteur, devenue veuve après sa nuit de noce.  Au matin, en effet, son mari se suicide en se jetant dans les chutes du Niagara.
Cet épisode de la nuit de noces expose l'un des thèmes du roman : l'inhibition sexuelle liée à une religion et à une éducation puritaines, à l'ignorance de l'autre sexe, à la peur, la culpabilité mais aussi au mariage de convenance, sans amour. Mais il ne représente que la première partie du récit même si la jeune femme, devenue une légende sous le vocable de  "la veuve blanche", surnom donné par les journalistes, est à jamais marquée par cette tragédie.
La deuxième partie conte son mariage avec l'avocat Dirk Barnaby qui appartient à la bonne société de Niagara. Elle devient mère de trois enfants, Chandler, Royall et Juliet et mène un vie heureuse(?) si l'on peut employer ce terme en parlant d'Ariah...  jusqu'au moment où Dick Barnaby prend la défense des habitants d'un quartier de Niagara pollué par les industries chimiques. Autre thème très fort du roman. Mais c'est la lutte du pot de terre contre le pot de fer ...
L'accident de voiture qui le précipite dans le fleuve n'est pas dû au hasard.
La troisième partie est consacrée aux trois enfants de Dick et à la recherche que chacun d'entre eux entreprend pour mieux connaître leur père disparu, ce qui les amènera en même temps à une découverte des milieux industriels sans scrupules  qui ont dévasté la région et des élus corrompus qui étaient à leur solde dans les années 1950-60. Cette dénonciation sans complaisance montre comment une classe sociale aisée s'enrichit au détriment des défavorisés sans aucune considération morale, ne reculant devant rien pour satisfaire sa cupidité. Il faudra des décennies de lutte incessante pour qu'une relative justice soit rétablie.
Le  style de Joyce Carol Oates est d'une puissance extraordinaire. Elle seule peut nous faire ressentir avec autant d'intensité la présence obsédante du Niagara et de ses chutes, la grandeur, la puissance, la démesure. Elle nous en fait entendre le tonnerre, nous en fait percevoir la brutalité, nous imprègne de l'atmospère saturée d'humidité qui enveloppe la ville, nous noie dans sa brume. Elle établit entre les humains et la nature dans toute sa primitive sauvagerie, une échelle de valeurs qui réduit l'homme à ce néant dont parle Pascal. C'est une écriture absolument fascinante car l'on ne peut un seul instant oublier, au cours de la lecture, cette force maléfique liée indissolublement à la Mort qui pèse sur cette famille. Il n'est pas étonnant que les indiens d'Amérique ait vu en lui un Fleuve-Dieu. Comme un Dieu, en effet, il va s'imposer à tous les personnages du livre, il va  chercher à les attirer, les séduire; pour eux, il est, à la fois, châtiment et  promesse de consolation car il représente l'anéantissement mais aussi l'accomplissement d'eux-mêmes.
"Toute la nuit le fleuve tonnant l'avait appelé. Tout au long de la nuit, tandis qu'il priait pour rassembler les forces qui lui seraient nécessaires, le fleuve l'appelait. Viens! La paix est ici. La rivière du Tonnerre, ainsi l'avaient nommée les Tuscarora des siècles auparavant. Les chutes du Tonnerre. Les indiens d'Ongaria l'appelaient l'Eau-qui-a-faim. Elle dévorait les imprudents et les victimes offertes en sacrifice; ceux qui se jetaient dans ses eaux bouillonnantes pour être emportés vers l'oubli et la paix."
Le Niagara a toujours cherché à briser Ariah qui lui paie un lourd tribut. Il exerce sur Juliet une force d'attraction presque physique. Royall essaie de l'apprivoiser ou plutôt de se le concilier comme on le ferait d'une divinité  farouche en amenant les touristes en bateau jusqu'au pied des chutes. De plus, revient comme un leit-motiv, le personnage du funambule, le grand père de Dick Burnaby, qui marchait sur un fil tendu au-dessus des chutes et qui finit par y trouver la mort. La métaphore du fil au-dessus du Niagara et celle du point de non-retour, cet endroit  du fleuve où l'on est inexorablement entraîné par les chutes et où l'on ne peut plus échapper à son destin, courent, toutes deux, en filigrane tout au long du livre et symbolisent le destin de chacun des personnages.
Ariah Burnaby, est une femme hors du commun. Si sa vie est brisée par la lutte contre le fleuve, elle n'en laissera jamais rien paraître, s'accrochant à son orgueil et sa dignité, ne tergiversant pas avec sa conscience, intransigeante envers elle-même et envers les autres, refusant de s'avouer vaincue. Joyce Carol Oats brosse là le portrait d'un personnage hors du commun, aussi fascinante et dure que le fleuve, son adversaire; une mère "difficile" pense d'elle son fils Chandler. Les rapports qu'elle entretient avec son mari et ses enfants sont complexes et tourmentés.
Dick Barnaby, malgré sa richesse, le métier d'avocat qu'il exerce avec brio et compétence, son aisance sociale, est finalement plus fragile qu'elle mais sa faiblesse est le revers de ses qualités:   idéaliste, courageux quand il entreprend de prendre la défense des pauvres gens contaminés par les décharges toxiques, il a une haute conception de l'amitié et de la justice et ne peut envisager un seul instant la corruption, l'avidité, l'absence d'humanité qui sont la loi de ses amis, de sa propre classe sociale.
Chandler, Royall et Juliet, tous marqués par la tragédie vécue par leurs parents, vont réagir chacun selon leur caractère; Ce sont des personnages attachants, ce qui est encore un des intérêts de ce remarquable roman.