Les hommes et les animaux ont beaucoup en commun. C'est ce que constate Michel de Montaigne dans L'Apologie de Raymond de Sebond ... Mais les animaux sont-ils inférieurs ou supérieurs aux hommes?
Tout d'abord, si l'homme veut se prévaloir de son intelligence, il doit savoir que celle-ci n'est pas moindre chez les animaux :
"En la manière de vivre des thons, on y remarque une singulière science des trois parties de la Mathémathique.(...) Quant à la Géométrie et l'Arithmétique, ils font toujours leur bande de figure cubique, carrée en tout sens, et en dressent un corps de bataillon solide, clos et environné tout à l'entour, à six faces toutes égales.."
D'autres arguments font pencher la balance en faveur de l'infériorité de l'homme mais il sont parfois un peu surprenants :
"En la manière de vivre des thons, on y remarque une singulière science des trois parties de la Mathémathique.(...) Quant à la Géométrie et l'Arithmétique, ils font toujours leur bande de figure cubique, carrée en tout sens, et en dressent un corps de bataillon solide, clos et environné tout à l'entour, à six faces toutes égales.."
D'autres arguments font pencher la balance en faveur de l'infériorité de l'homme mais il sont parfois un peu surprenants :
La beauté :
"Celles (les bêtes) qui nous retirent* le plus, ce sont les plus laides et les plus abjectes de toute la bande : car, pour l'apparence extérieure et forme du visage, ce sont les magots et le singe (...) Pour le dedans et parties vitales, c'est le pourceau. Certes, quand j'imagine l'homme tout nu (Ouï en ce sexe qui semble avoir plus de part pour la beauté), ses tares, sa sujétion naturelle et ses imperfections, je trouve que nous avons eu plus de raison que nul autre animal de nous couvrir. Nous avons été excusables d'emprunter ceux que nature avait favorisés en cela plus qu'à nous, pour nous parer de leur beauté et nous cacher sous leur dépouille, laine, plume, poil, soie."
* retirer = ressembler *Ouï en ce sexe... = à l'exception de ce sexe (féminin)
* retirer = ressembler *Ouï en ce sexe... = à l'exception de ce sexe (féminin)
La génération : l'action d'engendrer
"La génération est la principale des actions naturelles : Nous avons quelque disposition des membres qui nous est plus propre à cela; toutefois ils (les médecins) nous ordonnent de nous ranger à l'assiette et disposition brutale*, comme plus effectuelle*. Et rejettent comme nuisibles ces mouvements indiscrets et insolents que les femmes y ont mêlé de leur cru, le ramenant à l'exemple et usages des bêtes de leur sexe, plus modeste et plus rassis : "Car la femme s'empêche de concevoir si, lascive, elle stimule l'amour de l'homme par ses déhanchements et fait jaillir de son corps disloqué les flots de sa liqueur; elle écarte ainsi le soc de la ligne droite du sillon et détourne de son but le jet de la semence" *
Mais c'est l'argument suivant, prouvant définitivement la sottise de l'homme, qui me paraît le plus convaincant. Jugez plutôt!* disposition brutale = la manière de s'accoupler des bêtes *effectuelle = efficace * citation de Lucrèce
La guerre :
"Quant à la guerre, qui est la plus grande et pompeuse des actions humaines, je saurais volontiers si nous nous en voulons servir pour argument de quelque prérogative, ou, à rebours, pour témoignage de notre imbécillité et imperfection; comme de vrai la science de nous entredéfaire et entre-tuer, de ruiner et perdre notre propre espèce, il semble qu'elle n'a pas beaucoup de quoi se faire désirer aux bêtes qui ne l'ont pas."
Finalement la balance ne penche pas en faveur des hommes...
.. nous avons pour notre part l'inconstance, l'irrésolution, l'incertitude, le deuil, la superstition, la sollicitude des choses à venir*, voire, après notre vie, l'ambition, l'avarice; la jalousie, les appétits déréglés, forcenés et indomptables, la guerre, le mensonge, la déloyauté, la détraction et la curiosité. Certes, nous avons étrangement surpayé ce beau discours* de quoi nous nous glorifions, et cette capacité de juger et de connaître, si nous l'avons achetée au prix de ce nombre infini de passions auxquelles nous sommes incessamment en prise.