Raymond Depardon : la vie moderne
Samedi 1 novembre, le matin, au cinéma Utopia d'Avignon, avait lieu une projection du dernier film de Raymond Depardon, La vie moderne, en présence des membres d'un collectif d'agriculteurs : Manger sans paysans. J'ai choisi d'aller à cette séance car j'étais curieuse de savoir comment des agriculteurs du Vaucluse recevraient cette vision des paysans du Massif Central, région géographiquement et économiquement très éloignée d'eux.
Mais d'abord, parlons du très beau film de Raymond Depardon, qui est est le troisème volet de la trilogie Profil paysan : La vie moderne que le grand photographe aura mis près d'une décennie à tourner, montrant la vie et, au cours des années, l'évolution de personnages emblématiques de la "paysannerie" dans ces régions que d'aucuns considèrent comme reculées : les montagnes de Lozère et d'Ardèche.
Le but de Raymond Depardon au cours de cette trilogie était de filmer un monde en voie de disparition à travers de vieux paysans comme Marcel et Raymond Privat, Louis Brès, Marcelle Brès, Marcel et Germaine Chalaye ... et de poser la question de la passation entre les générations en allant à la rencontre de jeunes nouvellement installés au début de la trilogie : Amandine Vella, lyonnaise venue, pleine d'espoir, s'établir dans le pays avec son mari pour faire de l'élevage, Jean-François Pantel, fermier de Marcelle Brès, et sa compagne.
Et bien voilà, la fin de la trilogie! Voilà que la boucle est bouclée. Le film est d'ailleurs dédié aux disparus, Louis Brès et Marcelle Brès et aurait pu l'être aussi à Marcel Privat décédé depuis. La fin d'une époque! Et la relève, bien compromise! Amandine, annonce qu'elle doit renoncer à son projet, faute d'argent et de terre, Jean-François se débat lui aussi avec toutes sortes de difficultés, une maison encore en construction, pas de possibilité d'acquérir des terres pour agrandir sa propriété. Et lorsque son petit garçon dit qu'il veut faire le métier de papa, sa mère répond: "quand tu seras grand, ça aura changé, il n'y aura plus de paysan". Alors, reste encore une jeune fille qui fait des études pour reprendre la ferme des Privat. En général, les enfants ne veulent pas devenir paysans et les vieux se prennent à regretter la passion des anciens pour la terre et souffrent de voir le pays peu à peu gagné par les genêts, les ronciers, la forêt et le sanglier.
Il ne faut pas s'étonner donc s'il y a une nostalgie profonde dans ce dernier film, nostalgie rendue par des images splendides magnifiées par l'utilisation d'une caméra cinémascope qui donne au cadre une dimension et une profondeur inégalées jusque-là dans les autres films; jamais Raymon Depardon n'a aussi bien filmé ces paysages dans toute leur sauvage beauté, le changement des saisons, les éclairages froids de l'hiver, les teintes rousses de l'automne, la grisaille d'un été pluvieux.. Jamais, non plus, il n'a si bien filmé les habitants, donnant de plus en plus de sens aux silences par la fixité des images, laissant le temps de l'intériorisation, accordant une importance au langage du corps, aux mains qui se crispent, aux regards qui s'appesantissent, pratiquant le contraire même des reportages de télévision, communiquant son respect et son amour de ces gens qui se qualifient eux-mêmes de "bourrus", bref! laissant l'image parler et quelle image! On sent le vent, le froid, la solitude, on sent la tristesse, le découragement mais aussi, entre les générations, la jalousie, voire la haine, et encore, pour les plus âgés, l'amour des bêtes et le dévouement absolu presque inhumain, à nos yeux de citadins, à la terre de leurs ancêtres.
Quel beau film! On y entre par un travelling avant sur une route que nous suivons avec le cinéaste vers ces fermes du bout du monde. On le quitte par un travelling arrière où l'on parcourt à reculons la route du Villaret d'où se détache la silhouette de Raymond Privat et son adieu.
Quant au débat qui a suivi? Mon attente a été déçue. A part un ou deux spectateurs, personne ne s'est jamais vraiment intéressé au film. Quelqu'un a même regretté que Depardon ne parle pas des productions lozériennes, fromages de chèvre, cultures... Ce n'est évidemment pas le propos du réalisateur! Les interventions ont porté sur "le manger mal", la culture et l'élevage hors sol. Deux maraîchers ont pris la parole disant la difficulté de maintenir une véritable culture écologique, les dangers qui menaçaient la ceinture verte d'Avignon qui se réduisait peu à peu, menacée par les constructions et le projet de passage d'un axe est-ouest. Certaines de ces interventions étaient intéressantes mais ont rarement été mises en rapport avec le documentaire de Depardon et d'ailleurs les citadins étaient plus nombreux que les agriculteurs dans la salle... Le beau film que nous venions de voir n'était pas au coeur de la discussion et c'est bien dommage, car il se serait prêté à une réflexion sur le devenir du "métier" (mot souvent employé par Raymond Privat) dans les deux régions et en France en général. Le film n'a servi que de prétexte, ce qui, malheureusement est trop souvent le cas dans ce genre de rencontres.
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