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samedi 16 juillet 2016

Festival OFF d'Avignon 2016 : La valse du hasard de Victor Haïm au théâtre l'Arrache-coeur


La valse du hasard de Victor Haïm au théâtre de l’Arrache-coeur est un texte étrange, original où humour et drame se côtoient.
Imaginez-vous à la place de cette femme qui vient de mourir dans un accident de voiture (plutôt de sa faute, d’ailleurs, elle allait à 200 km heure et elle avait bu!) et qui, propulsée au ciel, rencontre un ange! Il la soumet à une sorte d’examen de passage dont l’issue n’est autre que le paradis ou la damnation éternelle! Vous imaginez le stress? Surtout quand l’ange paraît des plus capricieux, pour ne pas dire pervers, et vous retire des points sans que vous parveniez à comprendre les règles du jeu si cela en est un!
L’antichambre de l’éternité est encombrée de valises qui représentent l’âme des morts et l’ange est en contact direct avec dieu par une machine qui a les fonctions du fax mais… divin!
Cette rencontre est l’occasion d’un duo éblouissant entre deux comédiens de talent. Patrick Courtois, machiavélique à souhait, nous entraîne dans ce jeu du chat et de la souris au cours duquel il semble se délecter, - le spectateur aussi- , ramenant d’un coup de griffe sa victime, au moment où elle s’y attend le moins et croit pouvoir s’échapper ! Victime, oui, mais pas sans ressource ! La comédienne Marie Delaroche est de taille à disputer, face à cet ange cruel, une joute oratoire savoureuse pour le spectateur qui compte les coups.
Mais au cours de cette lutte la femme est obligée d’abandonner peu à peu les règles sociales en vigueur sur la terre :  ici le jeu de la séduction n’est pas de mise, le mensonge non plus, ni la flatterie, ni le calcul. Ici les lieux communs, les phrases toutes faites, les préjugés n’ont plus cours. Aucun échappatoire. Au fur et à mesure qu’elle nous conte son histoire, elle se dépouille de tout ce qui la retient à sa vie terrestre, et se révèle telle qu’elle est jusqu’à l’aveu final, douloureux mais salvateur.  Au total, c’est l’histoire d’une vie que nous venons de voir défiler devant nous, celle d’une femme fragile, avec ses défauts et ses faiblesses, souvent une proie dans le monde des hommes et qui a beaucoup souffert!
Un excellent spectacle!
 Fam Prod
Interprète(s) : Marie Delaroche, Patrick Courtois 
Mise en scène : Carl Hallak, Patrick Courtois 
Lumières : Philippe Quillet 
Costumes : Rick Dijkman 
Décors : Bernard Bourdeu 
Musique : Sylvain Gazaignes 
Régie : Rodrigue Louisar



Festival OFF d'Avignon 2016 : Quand je serai grande... Tu seras une femme, ma fille au théâtre l'Arrache-coeur




Être une femme. Avec les rêves que l’on avait petite fille. Avec les rêves que l’on a pour nos filles.
La comédienne seule en scène incarne 4 générations de femmes, avec leurs doutes, leurs espoirs, leurs contradictions.

Quel beau spectacle que ce Quand je serai grande, discrètement et sympathiquement féministe, plein d’humour et de nostalgie et si bien interprété par la comédienne Catherine Hauseux !
Celle-ci fait revivre pour nous quatre générations de femmes et elle est tour à tour Isabelle, Françoise, Maeva, Henriette, incarnant avec une vérité étonnante tous les âges de la femme de milieux sociaux et d'époques différentes, du XX siècle à nos jours. Une mention spéciale pour sa prestation de jeune fille beur, résolue à faire son chemin dans la vie grâce aux études et à échapper à la tyrannie du grand frère, ou encore pour la charmante et émouvante vieille dame qui, même en fin de vie, a le regard tournée vers l’avenir, c'est à dire vers sa petite fille, celle qui ne s’en laissera pas compter et qui représente l’espoir de liberté pour la femme.
La structure de la pièce écrite par Catherine Hauseux d’après des témoignages de femmes de 18 à 90 ans, mise en scène par Stéphane Daurat, n’est pas chronologique. C’est c’est peu à peu, au cours de ces monologues, avec des retours en arrière et des avancées dans le temps, que l’on assiste à la lente évolution de la condition féminine, que l’on passe des rêves avortés des unes à la libération des autres, de la grossesse obligée à la maîtrise des moyens de contraception, évolution qui correspond aussi à celle des hommes, du père lointain au papa concerné! J’ai aimé aussi la scénographie, ce linge blanc étendu sur des cordes, symbole de La corvée féminine par excellence, sur lesquels sont projetées des images du temps passé.
Ne ratez pas ce spectacle intelligent, alliance réussie entre un beau texte chargé d’émotion et d’humour et une interprète pleine de sensibilité.

Et bien sûr, pour le sous-titre Tu seras une femme, ma fille, vous avez reconnu le poème de Kipling mis au féminin.