Tous contre tous
Tous contre tous est une pièce interprétée en coréen (surtitrée en français) par les jeunes comédiens de l’Université nationale des Arts de Corée et mise en scène par Alain Timar. La pièce écrite en 1952 a pour thème les réfugiés. C’est un sujet que Arthur Adamov connaît bien : russo-arménien il a dû lui-même quitter la Russie avec ses parents, en 1914, quand il était enfant, pour l’Allemagne et la Suisse. Dans Tous contre tous, à la fin de la seconde guerre mondiale, Adamov fait allusion à la déportation des juifs et des minorités mais aussi aux déplacements de population liés aux nouvelles frontières de 1945. Mais, bien sûr, ce thème repris de nos jours est plus que jamais au centre de l’actualité contemporaine.
Le sujet m’intéresse mais je n’ai pas été entièrement accrochée. Tout d’abord la mise en scène me rappelle trop celle que Alain Timar avait concoctée pour Ubu Roi et que d’ailleurs j’avais énormément aimée! Les comédiens sont tous en scène et changent des costumes pour incarner l’un ou l’autre des personnages. Leur manière d’évoluer très symétrique, un peu mécanique, pour souligner l’oppression, la dictature, le racisme, est justifiée, certes, mais met en valeur ce qui ne m’a pas plu dans la pièce, son aspect démonstratif. En effet, sa structure repose sur une symétrie : lorsque la population du Sud émigre vers le Nord, il est pris en haine par ceux qui les accusent de leur prendre leur travail, mais lorsque le Nord fuit vers le Sud, la même situation se reproduit! Histoire de montrer comme le disait Cavanna qu’on « est toujours le Rital de quelqu’un » ! Mais on avait compris, merci! Comme souvent dans les pièces « engagées » d’une certaine époque, le dramaturge enfonce le clou pour se faire comprendre, d’où une insistance et un aspect répétitif assez ennuyeux et ceci d’autant plus que les personnages ne sont pas vraiment des êtres humains mais servent à la démonstration.
Les bêtes
L’autre pièce mise en scène par Alain Timar est de Charif Ghattas. C’est une satire de la bourgeoisie qui se veut féroce : un couple Line et Paul collectionnent à eux deux tous les défauts de cette classe sociale aisée mais vide, intéressée seulement par l’argent et sans conscience, sans état d’âme quant à la manière de le gagner ! Superficiels en amitié, snobs quand il s’agit de relations humaines ou d’oeuvres d’art mais finalement peu cultivés, ils ne sont qu’apparence, une façade sans rien derrière! Mais tout va changer quand ils font entrer chez eux un SDF.
Et c’est là que la pièce m’a déçue. J’espérais que l’histoire allait introduire un homme du peuple, un vrai, un personnage de chair non une idée, quelqu’un qui menacerait -même momentanément- l’équilibre du couple en lui opposant une réalité sociale. Il n’en est rien ; le SDF est du même milieu, il n’introduit pas une dimension humaine dans l’action. En fait, il est aussi pourri qu’eux et couchera avec tout le monde donnant ainsi à la pièce un petit air de vaudeville, de théâtre de boulevard. Dommage! Tous ces personnages sont peu intéressants. La pièce est brillante, peut-être? Méchante, sûrement! Mais superficielle! Un exercice de style qui fait rire mais ne me touche pas! Par contre les comédiens qui interprètent les trois personnages sont excellents et nul doute qu’ils n’obtiennent beaucoup de succès.
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