L'action de La reine de beauté de Leelane de Martin McDonagh se situe dans un village pauvre du Connemara, de nos jours ! La région offre peu de perspectives d’avenir, le chômage est important et les jeunes partent travailler en Angleterre où ils sont méprisés et exploités. C’est à travers quatre personnages que McDonagh fait revivre cette région d’Irlande qu’il connaît bien et ce milieu rural populaire dont il utilise la langue assez pittoresque bien servie par la traduction. Celle-ci rend, en effet, le côté primaire des personnages qui ont peu de vocabulaire et appartiennent à une classe sociale défavorisée. Pourtant, malgré la maladresse et la simplicité du ton, j'ai été émue par la lettre de Pato à Maureen et par la manière touchante dont il exprime son amour.
Maureen est une femme de quarante ans qui doit s’occuper de sa mère Mag, une femme méchante, exigeante, égoïste, qui fait tout pour la maintenir à son service en l’empêchant de vivre sa vie. Maureen est amoureuse de Pato, son ami d’enfance, qui la proclame Reine de beauté de Leelane. Il lui écrit pour lui demander de la suivre dans son exil aux USA et confie sa lettre à son petit frère Ray. Mag va tout mettre en oeuvre pour faire échouer ce projet.
Les thèmes de la pièce sont riches et révèlent l'Irlande profonde, celle qui n'a pas encore totalement évolué. La pauvreté, le chômage et l’exil en sont les thèmes majeurs ainsi que le poids de la religion qui prive Maureen d’une sexualité normale et la maintient auprès de sa mère malgré la haine réciproque qu’elles éprouvent l’une envers l’autre; portée à son paroxysme, cette haine peut déboucher à tout moment sur la folie et Sophie Parel qui interprète Maureen a un jeu exacerbé qui exprime la tension extrême de ce personnage et la fait paraître prête à basculer dans la violence.
La reine de beauté de Leelane est une pièce pessimiste qui touche et remue et il faut tout l’humour de McDonagh son auteur et la mise en scène enlevée, rapide, incisive voire coup de poing de Sophie Parel pour faire passer la pilule! Car on rit beaucoup au cours de cette pièce, un humour noir, corrosif qui ne laisse pas indifférent! Et puis il y a, outre Sophie Parel, les trois autres comédiens, Catherine Salviat qui est Mag, Gregori Baquet, Pato, et Arnaud Dupont, Ray, qui interprètent magistralement tous ces personnages et provoquent le rire, font naître l’émotion. Un très bon spectacle!
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