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mercredi 31 octobre 2012

Toni Morrison : Home





Nous sommes dans les années 50, Frank, un soldat noir qui revient de Corée, n'a pas le courage de retourner au pays, en Géorgie, sans ses deux amis d'enfance disparus à la guerre. Il porte en lui l'horreur des combats et tout son cortège de violences, de culpabilités, de fantômes, comme le visage de cette petite coréenne qui cherche désespérément un peu de nourriture dans les poubelles de l'armée américaine. C'est pourquoi il demeure à Seatle et cherche l'oubli avec Lily, une femme qu'il pourrait aimer s'il n'était souvent terrassé par des crises de dépression ou de violence. Pourtant, quand il reçoit une lettre lui annonçant que sa petite soeur bien-aimée, Cee, dont il a toujours été le protecteur, est en train de mourir, Frank se décide à faire le voyage vers le sud, vers Lotus, sa ville natale. Home! C'est ce retour à la maison qui va nous révéler, avec le passé de Frank,  la vérité sur la guerre qu'il a vécue et qu'il ne peut oublier. Un retour cathartique.
Le narrateur raconte l'histoire de Frank mais aussi de tous les autres personnages, Cee, sa grand mère, Lily… mais son récit est entrecoupé par les interventions de Frank mises en valeur dans le roman par le graphisme mais aussi par le style poétique. Ces moments nous font pénétrer dans les souvenirs du personnage, son intimité, ce qui nous permet d'explorer les zones d'ombre, d'aller au-delà de l'apparence.
 Ce court roman intense contient en condensé tous les thèmes de l'écrivain présentés avec une sobriété et une concision efficaces : racisme, haine, ségrégation, figure de la femme qui est à la fois la victime désignée, celle qui souffre le plus dans sa chair et son esprit mais aussi celle qui détient la sagesse et la force, celle qui a le pouvoir d'accéder à la liberté de l'esprit qui met véritablement fin à l'esclavage. Toni Morrison dit aussi que la violence n'est pas l'apanage d'une classe sociale ni d'une race mais est partout, prend toutes les formes comme celle exercée sur Cee par sa grand-mère, Lénore, qui se considère comme supérieure à tous parce qu'elle a de l'argent. Enfin, l'écrivaine dénonce l'horreur de la guerre et montre comme celle-ci peut détruire l'humain en l'homme et le transformer en monstre. Ce beau roman enferme en lui une  charge émotionnelle qui reste contenue et maîtrisée. La dernière scène où le frère et la soeur enfin réunis remettent en place l'ordre du monde par un geste symbolique est un message d'espoir - Ici se dresse un homme- dans un pays où les tensions raciales sont loin d'avoir disparu.