Le roman de Mathias Enard Parle leur de batailles, de rois et d'éléphants... raconte le séjour de Michel Ange à Byzance appelé par le sultan Bajazet pour construire un pont au-dessus du Bosphore. Une tranche peu connue de la vie du grand sculpteur italien mais authentique! Michel Ange succédait en cela à Léonard de Vinci qui avait été pressenti de la même manière mais avait échoué dans cette épreuve. Michel Ange part, un peu sur un coup de tête, humilié par le pape jules II qui refuse de lui payer une avance sur son tombeau au moment où le sculpteur réalise son fameux Moïse. La promesse d'une somme fabuleuse est aussi un appât complémentaire et non des moindres et se mesurer à son grand rival n'est pas pour lui déplaire.
Pour moi qui ne savais pas que Michel Ange s'était rendu en Turquie, la surprise était totale. Bien sûr, je me suis particulièrement intéressée à cette histoire que je ne connaissais pas ayant en tête, depuis mon séjour à Istanbul, l'image d'un pont élégant, d'une longueur impressionnante (1500m) mais contemporain, construit en 1973, bientôt rejoint en 1988 par un autre. Que l'on puisse vouloir réaliser un tel exploit technique au XVIème siècle me paraissait sidérant et j'étais curieuse de savoir comment et pourquoi Michel Ange avait échoué. Nous apprendrons au cours du roman que le dessin du pont de Michel Ange a été retrouvé, le pont en passe d'être construit mais un complot oblige l'artiste à s'enfuir de Turquie peu avant le tremblement de terre qui engloutira le début des travaux.
Mathias Enard nous présente cette rencontre du sculpteur avec ce pays, ses moeurs, son peuple et cette fabuleuse ville dont la cathédrale de Sainte Sophie est le fleuron, rencontre qui laisse libre cours à l'imagination du peintre-sculpteur-architecte mais aussi à son sens de l'observation. Ce voyage même bref a énormément influencé Michel Ange et l'on peut voir ce que l'artiste doit à son séjour à Byzance, à son retour en Italie, en particulier dans les fresques de la chapelle Sixtine.
Mais, en fait, on a peu d'informations sur ce séjour et les carnets de Michel Ange où il note le prix de ses courses ne nous apprennent pas grand chose. Les lettres à son frère reflètent ses préoccupations matérielles et financières. Le sujet est donc bien mince. Mathias Enard imagine la liaison de Michel Ange avec un danseur androgyne. Il décrit les sentiments amoureux du poète de cour, Mesihi, envers le sculpteur. Mais dans l'ensemble le roman manque d'ampleur. La lecture est agréable mais on reste sur sa faim. On aimerait en savoir plus sur ce séjour de l'artiste et à défaut de renseignements connus, au moins découvrir la ville et les coutumes de ce peuple d'une manière plus approfondie.Le récit est donc un peu succinct mais il plaît par son sujet qui reste p