Les gagnants sont : Aifelle, Alain, Dasola, Dominique, Eeguab, Keisha, Maggie, Marie-Josée, Somaja, Thérèse
Le roman : Kazuo Ishiguro Les vestiges du jour
Le film : James Ivory Les vestiges du jour
Merci à tous et toutes pour votre participation ....
Kazuo Ishiguro est né en 1954 à Nagasaki et arrive en grande Bretagne à l'âge de cinq ans.
Il est l'auteur de six romans : Lumière pâle sur les collines; un artiste du monde flottant, les vestiges du Jour ( 1989); L'inconsolé; Quand nous étions orphelins; Nocturnes. Il a été décoré de l'ordre de l'Empire britannique pour ses services rendus à la littérature en 1995. En 1998, la France le fait chevalier de l'ordre des Arts et des Lettres. Il vit à Londres à l'heure actuelle.
Les vestiges du jour, oeuvre adaptée par James Ivory avec à la fois une grande fidélité et un talent très personnel, (le propre d'un grand réalisateur et d'une excellente adaptation), présente l'histoire de Stevens narrée par le personnage lui-même, à un âge avancé. Stevens y raconte la fin d'une époque, celle des grands majordomes dont il a fait parti, responsable d'une nombreuse domesticité et, en même temps, la fin d'une classe sociale, celle d'une noblesse extrêmement riche, dont le sens de l'honneur et de la dignité réglaient la vie quotidienne et forçaient l'admiration de leurs subalternes. Le destin individuel de Stevens, avec son refus des émotions, est étroitement mêlé à l'Histoire de son pays. Son maître, Lord Darlington, dans les années 1920, organisait des conférences chez lui et recevait de hauts personnages jusqu'à la guerre de 1940.
Le récit commence en 1956 lorsque Darlington Hall est vendu à un américain, Mr. Farraday. Stevens qui doit réorganiser la maison avec peu de domestiques, reçoit une lettre de l'ancienne intendante de Darlington, Miss Kenton qui semble vouloir reprendre du service après s'être séparée de son mari. Stevens va entreprendre un voyage pour retrouver cette femme, en espérant la ramener. Tout au cours de voyage, de longs retours en arrière nous permettent de retourner dans le passé.
Intérêt historique : Le fonctionnement de ces nobles maisons est absolument étonnant. On ne se doute pas de ce que représente la gestion d'une telle domesticité, la compétence et les qualités nécessaires à un majordome pour la bonne marche, au quotidien, d'une demeure comme celle-là et l'habileté, la précision, la rigueur, qu'exige le bon déroulement d'une réception lorsque le maître reçoit. Aucune erreur ne peut être tolérée. Il est obligatoire d'établir un plan, nous explique Stevens, et de prévoir plusieurs solutions de substitution en cas d'anicroches! Si cet aspect-là du livre est passionnant, le film sait rendre à merveille l'activité de ruche qui règne dans les cuisines, la salle à manger, les chambres à coucher... Tout est réglé au millimètre près, comme dans une chorégraphie précise, que la mise en scène d'Ivory souligne brillamment.
La mentalité de ce domestique est tout aussi étonnante à nos yeux. Ce qui caractérise un grand majordome précise Stevens est la dignité. Celui-ci doit être capable de maîtriser ses émotions dans n'importe quelle condition. De plus, il doit être loyal et servir son maître sans le juger. Servir est donc pour Stevens un beau et noble métier, d'autant plus qu'en exerçant ses talents pour son maître, il sert aussi son pays. Mais corollairement, le maître doit être digne d'être servi. Le majordome doit pouvoir se dire : "Cet employeur incarne tout ce que je trouve noble et intelligent. Dorénavant, je me consacrerai à son service"
Qu'en est-il du personnage de Lord Darlington d'après ce critère. En 1923, quand il invite des représentants des gouvernements anglais, français, américains, allemands, c'est dans le but de réparer l'injustice et l'humiliation infligées aux allemands par l'armistice de 1914. Par la suite, on le verra, au cours des années, se compromettre avec le régime nazi, tout en croyant encore préserver la paix et la justice. Peu à peu la propagande antisémite agit sur lui, même s'il le regrette plus tard et cherche à réparer son erreur.
Le voyage de Stevens va l'amener à une prise de conscience tragique, un constat d'échec : Ce n'était pas du tout un mauvais homme. Et au moins a-t-il eu le privilège de pouvoir dire à la fin de sa vie qu'il avait commis ses propres fautes. C'était un homme courageux. Il a choisi un certain chemin dans la vie, il s'est fourvoyé, mais il l'a choisi lui-même; il peut au moins dire ça. Pour ma part, je ne suis pas en mesure de le dire. Vous comprendrez j'ai eu confiance. J'ai fait confiance à sa seigneurie. au long de toutes ces années où je l'ai servie, j'ai été convaincu d'agir de façon utile. Je ne peux même pas dire que j'ai commis mes propres fautes. Vraiment - on se demande- où est la dignité là-dedans?
Intérêt psychologique : Le roman est aussi l'histoire d'une vie gâchée. Stevens est un homme qui ne peut jamais exprimer ses sentiments et qui même se refuse à se les avouer à lui-même. Il passe ainsi à côté de l'amour, refusant de comprendre les sentiments de Miss Kenton.
La fin du livre est très triste non seulement dans la scène où il dit adieu à Miss Kenton mais aussi dans celle (absente dans le film) où, assis sur un banc, il se confie à un inconnu pour constater l'échec de sa vie sentimentale mais surtout professionnelle à laquelle il a tout sacrifié.
Le film, quant à lui, rend avec finesse toutes les nuances psychologiques indiquées par le roman car il est superbement servi par les acteurs, Emma Thompson et surtout Anthony Hopkins dont la gestuelle, la moindre expression du visage, révèlent sans en avoir l'air tout ce qu'il ressent mais aussi le combat intérieur qu'il doit mener à tout moment contre lui-même.
La fin, dans le livre comme dans le film, permet pourtant un lueur d'espoir. La vie doit continuer et Stevens doit apprendre à accepter les mutations irréversibles de la société. Dans le roman, il décide donc, en retournant à Darlington, d'adopter le style nouveau réclamé par son maître américain : "le badinage", c'est le terme qu'il emploie. Autrement dit, notre majordome va apprendre à être un peu moins empesé et à plaisanter!! Dans le film, Ivory reprend cette idée, en montrant Stevens lançant une plaisanterie à son maître. L'acteur révèle par son attitude corporelle ce changement subtil. Pas besoin de nous en dire plus. C'est là que l'on voit le génie de celui qui adapte un livre : remplacer les mots, voire les phrases, par une image.
Il est l'auteur de six romans : Lumière pâle sur les collines; un artiste du monde flottant, les vestiges du Jour ( 1989); L'inconsolé; Quand nous étions orphelins; Nocturnes. Il a été décoré de l'ordre de l'Empire britannique pour ses services rendus à la littérature en 1995. En 1998, la France le fait chevalier de l'ordre des Arts et des Lettres. Il vit à Londres à l'heure actuelle.
Les vestiges du jour, oeuvre adaptée par James Ivory avec à la fois une grande fidélité et un talent très personnel, (le propre d'un grand réalisateur et d'une excellente adaptation), présente l'histoire de Stevens narrée par le personnage lui-même, à un âge avancé. Stevens y raconte la fin d'une époque, celle des grands majordomes dont il a fait parti, responsable d'une nombreuse domesticité et, en même temps, la fin d'une classe sociale, celle d'une noblesse extrêmement riche, dont le sens de l'honneur et de la dignité réglaient la vie quotidienne et forçaient l'admiration de leurs subalternes. Le destin individuel de Stevens, avec son refus des émotions, est étroitement mêlé à l'Histoire de son pays. Son maître, Lord Darlington, dans les années 1920, organisait des conférences chez lui et recevait de hauts personnages jusqu'à la guerre de 1940.
Le récit commence en 1956 lorsque Darlington Hall est vendu à un américain, Mr. Farraday. Stevens qui doit réorganiser la maison avec peu de domestiques, reçoit une lettre de l'ancienne intendante de Darlington, Miss Kenton qui semble vouloir reprendre du service après s'être séparée de son mari. Stevens va entreprendre un voyage pour retrouver cette femme, en espérant la ramener. Tout au cours de voyage, de longs retours en arrière nous permettent de retourner dans le passé.
Intérêt historique : Le fonctionnement de ces nobles maisons est absolument étonnant. On ne se doute pas de ce que représente la gestion d'une telle domesticité, la compétence et les qualités nécessaires à un majordome pour la bonne marche, au quotidien, d'une demeure comme celle-là et l'habileté, la précision, la rigueur, qu'exige le bon déroulement d'une réception lorsque le maître reçoit. Aucune erreur ne peut être tolérée. Il est obligatoire d'établir un plan, nous explique Stevens, et de prévoir plusieurs solutions de substitution en cas d'anicroches! Si cet aspect-là du livre est passionnant, le film sait rendre à merveille l'activité de ruche qui règne dans les cuisines, la salle à manger, les chambres à coucher... Tout est réglé au millimètre près, comme dans une chorégraphie précise, que la mise en scène d'Ivory souligne brillamment.
La mentalité de ce domestique est tout aussi étonnante à nos yeux. Ce qui caractérise un grand majordome précise Stevens est la dignité. Celui-ci doit être capable de maîtriser ses émotions dans n'importe quelle condition. De plus, il doit être loyal et servir son maître sans le juger. Servir est donc pour Stevens un beau et noble métier, d'autant plus qu'en exerçant ses talents pour son maître, il sert aussi son pays. Mais corollairement, le maître doit être digne d'être servi. Le majordome doit pouvoir se dire : "Cet employeur incarne tout ce que je trouve noble et intelligent. Dorénavant, je me consacrerai à son service"
Qu'en est-il du personnage de Lord Darlington d'après ce critère. En 1923, quand il invite des représentants des gouvernements anglais, français, américains, allemands, c'est dans le but de réparer l'injustice et l'humiliation infligées aux allemands par l'armistice de 1914. Par la suite, on le verra, au cours des années, se compromettre avec le régime nazi, tout en croyant encore préserver la paix et la justice. Peu à peu la propagande antisémite agit sur lui, même s'il le regrette plus tard et cherche à réparer son erreur.
Le voyage de Stevens va l'amener à une prise de conscience tragique, un constat d'échec : Ce n'était pas du tout un mauvais homme. Et au moins a-t-il eu le privilège de pouvoir dire à la fin de sa vie qu'il avait commis ses propres fautes. C'était un homme courageux. Il a choisi un certain chemin dans la vie, il s'est fourvoyé, mais il l'a choisi lui-même; il peut au moins dire ça. Pour ma part, je ne suis pas en mesure de le dire. Vous comprendrez j'ai eu confiance. J'ai fait confiance à sa seigneurie. au long de toutes ces années où je l'ai servie, j'ai été convaincu d'agir de façon utile. Je ne peux même pas dire que j'ai commis mes propres fautes. Vraiment - on se demande- où est la dignité là-dedans?
Intérêt psychologique : Le roman est aussi l'histoire d'une vie gâchée. Stevens est un homme qui ne peut jamais exprimer ses sentiments et qui même se refuse à se les avouer à lui-même. Il passe ainsi à côté de l'amour, refusant de comprendre les sentiments de Miss Kenton.
La fin du livre est très triste non seulement dans la scène où il dit adieu à Miss Kenton mais aussi dans celle (absente dans le film) où, assis sur un banc, il se confie à un inconnu pour constater l'échec de sa vie sentimentale mais surtout professionnelle à laquelle il a tout sacrifié.
Le film, quant à lui, rend avec finesse toutes les nuances psychologiques indiquées par le roman car il est superbement servi par les acteurs, Emma Thompson et surtout Anthony Hopkins dont la gestuelle, la moindre expression du visage, révèlent sans en avoir l'air tout ce qu'il ressent mais aussi le combat intérieur qu'il doit mener à tout moment contre lui-même.
La fin, dans le livre comme dans le film, permet pourtant un lueur d'espoir. La vie doit continuer et Stevens doit apprendre à accepter les mutations irréversibles de la société. Dans le roman, il décide donc, en retournant à Darlington, d'adopter le style nouveau réclamé par son maître américain : "le badinage", c'est le terme qu'il emploie. Autrement dit, notre majordome va apprendre à être un peu moins empesé et à plaisanter!! Dans le film, Ivory reprend cette idée, en montrant Stevens lançant une plaisanterie à son maître. L'acteur révèle par son attitude corporelle ce changement subtil. Pas besoin de nous en dire plus. C'est là que l'on voit le génie de celui qui adapte un livre : remplacer les mots, voire les phrases, par une image.
Challenge de Calypso : Le titre devait présenter le mot jour