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dimanche 17 mars 2013

Un Livre/ Un film : Horace Mc Coy, On achève bien les chevaux


Résultat de l'énigme n°59

Les heureux gagnants du derby : Asphodèle, Dasola, Dominique, Eeguab, Keisha,  Pierrot Bâton, Somaja, Thérèse

Le roman : Horace Mac Coy : On achève bien les chevaux
Le film : Sidney Pollack : On achève bien les cheveux avec Jane Fonda




La relecture du roman de Horace Mc Coy (1935) m'a confirmée dans le souvenir que j'en avais : un livre choc, un livre coup de poing.

La crise économique
Le roman se déroule pendant la Grande Dépression et met en scène, dans ce contexte terrible où la misère est extrême et où des millions de personnes sont jetées à la rue et souffrent de la faim, des couples obligés de se produire dans un marathon de danse pour gagner un peu d'argent. Il s'agit de danser ou plutôt de bouger sans jamais s'arrêter sur la piste d'un dancing populaire, devant un public avide de sensations. Les temps de pause sont rares, la souffrance physique et morale intense, les problèmes de santé fréquents; l'épuisement succède à la fatigue.
Les personnages principaux sont Gloria et  Robert qui est aussi le narrateur de l'intrigue. Le récit commence par le jugement de Robert accusé du meurtre de Gloria et le reste est un immense flash back qui va nous donner la compréhension du drame.

L'exploitation de la misère
Horace Mc Coy, dans ce roman noir, dénonce l'exploitation de la misère, tout en replaçant le récit dans un cadre historique, la crise économique des années 30. Ces marathons flattent dans les spectateurs les instincts les plus bas. Ils sont surexcités lorsqu'ils voient les danseurs s'écrouler devant eux, victimes d'un malaise et se repaissent de la souffrance des victimes, oubliant ainsi la leur. Voir les couples éliminés les uns après les autres procure au public un sentiment de supériorité à bon compte. Le sujet est universel et déborde le cadre de la Grande Dépression. Quand Sydney Pollack l'adapte il pourra faire lui aussi un constat des années 70.  Mc Coy compare le marathon à "une course de taureaux". On peut y voir, en effet, l'héritage des jeux de cirque romains et même la préfiguration des séances de télé-réalité actuelles, certes édulcorées, mais faisant appel, elles aussi, au voyeurisme et à l'instinct de domination des voyeurs, avec les mêmes conséquences tragiques pour ceux qui subissent ces violences, humiliation, dévalorisation, perte de confiance en soi. Et que dire des organisateurs qui s'enrichissent sur le dos des autres? L'homme est un loup pour l'homme et cela n'est pas prêt de changer.
  
Deux personnages opposés
Les deux personnages sont radicalement opposés : Tous deux veulent faire du cinéma, Gloria comme actrice, Robert comme metteur en scène mais il y a longtemps que Gloria a cessé de croire qu'elle peut s'en sortir. Elle hait la vie et voudrait mourir. Son passé a été dévastateur. L'expérience inhumaine vécue dans le dancing  n'est pas fait pour lui redonner confiance ni en elle-même, ni en l'espèce humaine. Robert, lui est encore plein d'espoir,  est sûr de sa réussite, il aime la vie. Il est encore capable de goûter la beauté d'un coucher de soleil et d'aller saluer le metteur en scène Borzage, présent dans la salle, avec un enthousiasme  juvénile. Les faits sont présentés par ce jeune homme naïf, qui ne connaît encore rien du monde, qui n'est pas encore blasé. Cette naïveté met en relief la noirceur du récit et la sobriété avec laquelle il est conté. La fragilité de Robert explique aussi pourquoi il va se laisser entraîner par Gloria dans l'engrenage fatal de la dépression, la mort devenant synonyme de délivrance. La dernière phrase - on achève bien les chevaux- qui clôt le roman, évoquant un souvenir d'enfance du jeune homme, est dans sa concision d'une violence extrême. 
Un grand roman.

Le film de Sydney Pollack
J'avais un très bon souvenir du film de Sydney  Pollack  (1969) vu à sa sortie et de l'interprétation exceptionnelle de Gloria par Jane Fonda. Je viens de le revoir en DVD de médiocre qualité. Impossible d'utiliser la version anglaise sous-titrée. Il m'a fallu "subir" (c'est bien le mot) la version en langue française dont le doublage est exécrable, la qualité sonore épouvantable. J'ai eu des difficultés à entrer dans le film dans ces conditions. Je souligne cependant quelques scènes très fortes dont celle du derby extrêmement bien filmée, qui entraîne tous les couples dans une course insoutenable autour de la piste, chacun ayant peur d'être éliminé. Les personnages donnent l'impression d'être poursuivis par la Mort.
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