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dimanche 16 février 2025

Merja Mäki : Quand les oiseaux reviendront

 


Décidément, avec les auteurs finlandais et par l’intermédiaire de la fiction, je suis en train de découvrir l’Histoire de la Finlande et en particulier l’histoire du XX siècle et de la guerre de 1940 de roman en roman.
Vous vous souvenez qu’Olivier Norek avait raconté la guerre d’endurance et la résistance acharnée des soldats finlandais en 1939 contre l’assaillant soviétique dans Les guerriers de l'hiver.
Avec Merja Mäki, Quand les oiseaux reviendront, nous sommes en Carélie du Sud et Alli et sa famille font face chaque jour aux bombardements ennemis soviétiques. Alli, envoyé à la ville pour apprendre le métier de guérisseuse, comme le veut sa mère, s’est bien vite enfui pour retourner chez ses parents et sa petite soeur. La famille vit dans une ferme au bord du lac Lagoda en Carélie du sud où son beau-père est pêcheur. C’est aussi ce que veut faire Alli mais ce métier n’est pas fait pour les femmes et elle se heurte à la désapprobation et à la colère de sa mère. Son Frère Aatos est mort au front, son  jumeau Tuomas continue le combat mais laisse derrière lui une jeune épouse enceinte, Silvi.

 Mais l’armistice est signé en mars 1940 et la famille apprend qu’une partie de la Carélie du Sud est annexée par les soviétiques et que toute la population est déplacée et doit fuir. La famille ira en train rejoindre le frère du beau-père d'Alli et celle-ci se propose de mener le bétail à pieds et en traîneau. Elle est accompagnée par sa belle-soeur Silvi. Elle veut prouver qu’elle n’est pas la rêveuse que voit en elle sa mère et qu'elle est très capable de réussir cette longue et harassante équipée. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’elle a du caractère et du courage ! C’est un beau personnage assez complexe avec ses faiblesses et ses défauts, son entêtement parfois, qui fait aussi sa force !

Le roman est un roman d’aventures où l’on voit Alli secondé par Silvi affronter des kilomètres dans la neige et le froid. C’est aussi un livre sur l’exil, sur le déchirement de devoir quitter son pays natal et de le laisser aux envahisseurs, même si l’espoir demeure, Alli est certaine qu’elle sera de retour au pays quand les oiseaux reviendront. Un livre aussi sur la tristesse de l’exil, l’humiliation d’être reçue en quémandeuse, en étrangère, dans son propre pays, la Finlande restée indépendante. La Carélie a l’air plus archaïque, plus pauvre que ceux qui accueillent les exilés. Cette région est encore proche des traditions, des croyances magiques, le vocabulaire, la prononciation des mots sont différents. Loin de rencontrer de la compassion, les exilés sont traités avec mépris et considérés comme des « semi-russes » alors qu’ils viennent de tout perdre, justement, à cause des russes !
Mais il y a bien d’autres thèmes dans ce riche roman. La faim, la misère en particulier des enfants. Les souffrances de la guerre avec son lot de blessés et les mourants. Les rapports mère et fille souvent violents. Alli est rejetée par sa mère. Il y a aussi la condition féminine en train d’évoluer. En Carélie, les femmes « ne devaient pas se montrer trop hardies sans quoi le maître de maison perdait tout crédit aux yeux du village». Dans sa nouvelle vie Alli voit des jeunes femmes s’affirmer en devenant infirmières, indépendantes et libres. C’est ce que souhaite ardemment Alli qui affronte toutes sortes de défis. Y parviendra-t-elle ?
 Le roman est bien écrit avec sobriété dans l’expression des sentiments et la nature y est présente à la fois belle et rude avec son lac si grand que les pêcheurs l’appellent la mer, sa myriade d’oiseaux sauvages, ses hivers rudes dans les forêts enneigées.

« L’île de Haavus s’élevait en pente raide au niveau de la falaise de Haukka.
Arrivée au sommet, j’eus l’impression que le vent me transperçait de part en part et formait un tourbillon glacé dans mon ventre. La falaise plongeait presque verticalement vers la glace en contrebas. J’avais observé les récifs de nombreuses fois depuis le bateau, et ils m’avaient toujours donné l’impression qu’ils s’apprêtaient à me tomber dessus et à m’écraser sous leur poids.
En bas, la mer étincelait sous le clair de lune. La glace craquait sous l’effet du gel. »

 

 

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