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jeudi 20 juin 2013

Anne Brontë : La dame du manoir de Wildfell Hall





Quatrième de couverture : La dame du manoir de Wildfell Hall de Anne Brontë
 L'arrivée de Mrs Helen Graham, la nouvelle locataire du manoir de Wildfell, bouleverse la vie de Gilbert Markham, jeune cultivateur.
Qui est cette mystérieuse artiste, qui se dit veuve et vit seule avec son jeune fils? Quel lourd secret cache-t-elle? Sa venue alimente les rumeurs des villageois et ne laisse pas Gilbert insensible. Cependant, la famille de ce dernier désapprouve leur union et lui-même commence à douter de Mrs Graham... Quel drame s'obstine-t-elle à lui cacher ? Et pourquoi son voisin, Frederick Lawrence, veille-t-il si jalousement sur elle?
Publié en 1848, La Dame du manoir de Wildfell analyse la place des femmes dans la société victorienne.

Décidément les soeurs Brontë  ont toutes du talent et ce n'est pas le roman d' Anne La dame du manoir de Wildfell Hall qui me fera changer d'avis. D'Anne Brontë, j'avais lu Agnès Grey, un premier roman prometteur. Celui-ci qui est le second, paru en 1848, est bien supérieur, plus élaboré, et, s'il ne se hisse pas au rang de chef d'oeuvre comme Les Hauts de Hurlevent et  Jane Eyre, il faut lui reconnaître de solides qualités. Il n'y aura pas de troisième roman. Anne meurt à son tour de la tuberculose en 1849. Si La dame du manoir connut un immense succès, il provoqua un scandale car il montre une jeune femme mariée à un homme alcoolique et dépravé qui décide de se séparer de son mari, se heurtant ainsi aux lois sociales et religieuses de la famille victorienne. A la mort d'Anne, Charlotte, elle-même, empêchera la republication de ce roman, ce qui en dit long sur le caractère et les préjugés de la "grande" soeur.  Emily meurt en Décembre 1848. Heureusement que Charlotte ne nous a pas fait "ça" avec Les Hauts de Hurlevent!

 
Anne Brontë dessin de Charlotte

La technique romanesque

Dès son deuxième roman, Anne Brontë maîtrise la technique romanesque à un tel point qu'elle ne suit pas le schéma narratif habituel et multiplie les points de vue  :

Gilbert Markham, maître d'une grosse ferme, raconte son histoire à un ami. Il décrit la jeune dame du manoir de Wildfell Hall, Helen Graham, qui vient d'arriver dans le pays et c'est par ce regard extérieur - jamais neutre pourtant - que nous l'apercevons. Il commence d'abord par la trouver antipathique puis peu à peu tombe sous son charme. La jeune femme  nous apparaît donc comme un être mystérieux qui veille jalousement à ce que l'on ne sache rien de son passé. Le lecteur est placé à l'intérieur  de la conscience du jeune homme et suit de près l'évolution de ses sentiments, l'admiration, l'amour puis les doutes qui l'assaillent, la jalousie qui va finir par le dévorer. A travers l'observation du jeune homme apparaît aussi toute une société campagnarde, sa mère, sa soeur et son frère, le pasteur, Michaël Millward et sa jeune fille à marier, toute une société avec ses faiblesses, ses petitesses d'esprit, son amour des commérages et des médisances qui ne permettent pas à Helen Graham de vivre en paix .

La seconde partie du roman nous permet de découvrir le secret de la jeune femme par l'intermédiaire de son journal qu'elle confie à Gilbert pour se disculper. Il s'agit d'un roman dans le roman, une oeuvre en miroir, qui nous permet la fois de connaître son passé mais aussi de voir, de son point de vue, le récit conté par Gilbert à son ami. Une sorte de reflet inversé des personnages et des évènements. Le jeune homme reprend ensuite le récit entrecoupé cette fois par des lettres d'Helen qui ne sont pas toujours complètes, ce qui maintient des zones d'ombre autour du personnage. On voit que la technique d'Anne est extrêmement complexe et les personnages et l'intrigue en paraissent plus profonds, comme mis en abyme dans un miroir.

Les trois soeurs Brontë par Branwell


 Le féminisme de La dame du manoir de Wildfell Hall

Le roman d'Anne Brontë est résolument féministe. Elle dénonce une société où la femme n'a aucun droit, aucune liberté. Helen est obligée de fuir son mari avec son enfant  et  de se cacher si elle veut conserver le droit de garder son fils. Anne s'éloigne du romantisme exacerbé d'Emilie, du romantisme gothique de la Charlotte de Jane Eyre.  Le frère d'Anne, Branwell, a servi de modèle au personnage du mari de Helen, Arthur Huntington, et elle sait de quoi elle parle quand elle décrit les scènes de beuverie et d'adultère. Mais Anne a la finesse de ne pas tomber dans le manichéisme. Arthur, dit-elle,"n'est pas réellement mauvais" mais il se laisse aller à son goût du plaisir, à sa veulerie.Tout en écrivant le premier roman féministe et en dénonçant l'asservissement de l'épouse à son mari,  Anne Brontë montre aussi les perversions et les roueries des femmes à travers la figure d'Annabella, la maîtresse d'Arthur . Elle décrit aussi les faiblesses d'Helen qui a choisi Arthur pour époux alors qu'elle savait qui il était. La femme est donc responsable de ses propres choix. 

Pour ma part, j'ai trouvé Helen Graham un peu trop moralisatrice. Elle épouse Arthur malgré ses défauts parce qu'elle entend le réformer. Elle est souvent donneuse de leçon et par là même on comprend que son mari la fuit et la laisse à la campagne quand il va faire la noce à Londres!  Mais bien entendu, c'est une opinion personnelle. Anne Brontë est fille de pasteur, elle souffre trop de voir son frère détruire toutes ses capacités intellectuelles et sa santé physique . Elle veut donc montrer la vérité nue, dans toute son horreur, pour  la réformer : Si je puis empêcher la chute d'un jeune homme trop léger ou d'une jeune fille trop étourdie, alors je n'aurais pas écrit en vain, écrit-elle. Le roman est publié en Juin 1848.  Branwell meurt, alcoolique et tuberculeux, en septembre 1848.

Un style d'homme?
Le  roman  est écrit d'une plume ferme, sobre qui évite l'emphase et le pathétique et qui est même assez brutale. Un style d'homme? Le fait ce soit une femme qui ait écrit ainsi, avec autant de réalisme, sur l'alcoolisme et la débauche heurte d'autant plus les mentalités de l'époque victorienne.  Alors, laissons la parole à Anne Brontë qui répond ainsi à ses détracteurs :  Je suis convaincue que lorsqu'un livre est bon, il l'est quelque soit le sexe de son auteur. Tous les romans sont ou devraient être écrits pour les hommes comme pour les femmes. J'ai de la peine à concevoir comment un homme pourrait se permettre d'écrire quoi que ce soit qui puisse être véritablement déshonorant pour une femme, ou pourquoi une femme devait être censurée pour avoir écrit quoi que ce soit qui puisse être considéré comme approprié ou bienséant pour un homme.
Lecture commune  avec Gaëlle  ICI

Avec Alexandra

Chez Aymeline