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mardi 15 juillet 2014

Goldoni : La locandiera


La locandiera, une de pièces les plus connues de Goldoni,  garde son titre italien qui vient de locanda : la pension, l'hôtel garni. Le titre n'a pas de traduction en langue française comme le fait remarquer l'auteur lui-même qui propose comme titre français "la femme adroite".
Cette "femme adroite", c'est Mirandolina qui tient toute seule la pension de famille depuis que son père est mort. Elle a un valet, Fabrice, à qui elle a promis le mariage. Elle héberge trois gentilhommes dont deux sont amoureux d'elle : le comte d'Albafiorita et le marquis de Forlipopoli. Mais le troisième, le chevalier de Ripaffratta fait profession de mépriser les femmes et ne succombe pas aux charmes de la charmante aubergiste. Mirandolina décide alors de le rendre amoureux puis, lorsqu'elle parvient à ses fins, épouse son valet.

Que penser de Mirandolina? Son personnage a donné lieu à de nombreuses interprétations : coquette rusée voire rouée qui accepte les cadeaux de ses messieurs sans rien leur accorder, elle joue avec le feu; femme de tête qui mène bien ses affaires mais doit dans une société où la femme est considérée comme inférieure user de séduction pour pouvoir être indépendante et patronne. De là à à faire de Goldoni un féministe et voir dans Mirandolina l'expression de la révolte féminine, supérieure aux hommes qu'elle mène par le bout du nez, et maîtresse de son destin puisque c'est elle qui choisit son mari, il n'y a qu'un pas! Il n'en reste pas moins que pour pouvoir continuer à gérer son hôtel, Mirandolina doit se marier, c'est à dire rentrer dans les normes, obéir aux règles. Une femme seule, surtout si elle est jeune, ne peut que se compromettre et se mettre au ban de la société en tenant une auberge et en hébergeant des hommes. Mirandolina se marie non pas amour mais pas nécessité et pour cela elle doit renoncer à son indépendance et à son statut de "patronne", se mettant ainsi sous la coupe d'un mari. L'ordre social est rétabli. Malgré son intelligence et sa ruse, Mirandolina est  de toutes façons la perdante dans un monde fait pour et par les hommes!

Comme d'habitude la pièce donne un aperçu de la société vénitienne même si Goldoni, par prudence et pour éviter la censure, situe son action à Florence. La pièce est une comédie et nous rions beaucoup de ces personnages qui sont tournés en dérision, il n'en reste pas moins que la pièce est une satire assez virulente. Le comte et le marquis sont les représentants de deux sortes de noblesse : le marquis représente la noblesse ancienne, imbue de son nom et de son rang mais ruinée! Le comte vient d'acheter son titre mais sait faire sonner bien haut ses écus. Tous les deux sont tournés en ridicule puisque chacun d'entre eux se targue de ses avantage, le nom ou l'argent, pour gagner les bonnes grâces de Mirandolina et n'obtiendra rien! Mais le plus ridicule est peut-être le chevalier, celui qui n'aime pas les femmes et refuse d'aimer, mais qui  se fait prendre au piège par des flatteries et artifices tellement voyants qu'il faut être bien sot pour s'y laisser prendre.
Mais si les travers de la noblesse sont bien épinglés, les commerçants représentants de la bourgeoisie ne le sont pas moins en la personne de Mirandolina et Fabrice qui ne voient que leur intérêt, sont habiles à s'enrichir mais sans  beaucoup de scrupules, et font de l'argent leur maître à penser.

J'ai vu la pièce à Paris dans une mise en scène de Marc Paquien avec Dominique Blanc et André Marcon. De bons acteurs, mais quelle déception!  Des décors de carton pâte, pas de point de vue  sur les personnages; les oppositions entre les classes sociales, c'est à dire ce qui fait le sens de la pièce, ne sont pas mises en valeur ! Quelle platitude!

LC avec Maggie

Chez Eimelle ; challenge théâtre