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mardi 9 septembre 2014

Andrea Molesini : le printemps du loup



Ce que j'ai éprouvé en lisant ce roman Le printemps du loup de Andrea Molesini est assez étrange : J'ai d'abord été fascinée par le récit et aussi par l'écriture  puis, peu à peu, j'ai fini par être lassée par le procédé stylistique et j'ai trouvé que l'histoire traînait. 

Le roman raconte l'histoire de deux enfants juifs, Pietro et Dario cachés dans un couvent vénitien, obligés de s'enfuir après dénonciation, poursuivis par les allemands. Ils sont accompagnés d'adultes, deux soeurs juives, Maurizia et Ada, le frère Ernesto, soeur Elvira et aidés par un pêcheur, personnage pittoresque et courageux surnommé Lirlandais. Le récit est raconté par Piero, interrompu par instants par les pages du journal intime de Soeur Elvira que nous apprenons à connaître peu à peu. Mais lorsqu'ils sont sur le point d'être faits prisonniers, Karl, un allemand, les sauve. C'est une fuite éperdue sous la protection de ce déserteur qui dit avoir pris conscience de l'horreur du nazisme. le petit groupe traqué se déplace dans un pays désorganisé, à la fin de la guerre, où fascistes et nazis sentent le vent tourner mais n'en sont pas moins dangereux.

Le récit est raconté par Pietro (10 ans), petit garçon "effronté", plein d'imagination et  à la langue bien pendue, dans un style faussement naïf, où l'on sent à la fois la vision de l'enfance, drôle, fraîche et spontanée, et le regard de l'écrivain qui la sous-tend. 
"On ne juge pas les gens sur les apparences qu'elles m'ont dit. Ca, c'est typique des grands, ils dépensent des sous pour s'habiller, ils se coiffent devant la glace pendant des heures, mais après ils vous expliquent que la beauté, ça compte pour du beurre. On peut toujours courir pour que les grands nous disent la vérité, alors moi, je la cherche tout seul et je suis assez fortiche."

Car, bien sûr, dans ce procédé narratif l'adulte n'est jamais loin de l'enfant et, au début, le charme fonctionne! Et même plutôt bien! Le décalage entre les deux produit un effet amusant ou poétique, en particulier quand Pietro se mêle de théologie ou quand il observe les adultes, s'étonnant de leur raisonnement ou quand il parle de la nature. Le garçon s'exprime dans une langue familière, parfois un peu incorrecte, mais toujours très originale dans laquelle sont introduites des images concrètes, étonnantes, qui ne manquent pas de beauté.
"Pour moi la faim est une bête à double rangée de dents aiguisées qui vous grignote de l'intérieur, d'accord, elle fait moins de bruit que la lune mais vous sentez ses dents une à une, parce qu'elles sont froides comme des perles sur le cou des femmes riches."

"Je sais que la mort est faite de fruits froids entre les murs des maisons quand il pleut de la pluie. Des fruits froids comme des yeux de chat. Des fruits dans les buissons noirs aux feuilles brillantes de pluie, même quand la lune repart en emportant son bruit."

Et vraiment j'aime beaucoup! Pourtant, par la suite, le style et les images ne se renouvellent pas. Si l'arrivée du loup, cette bête imaginaire qui permet à Pietro de résister à la peur était une belle trouvaille au début, la répétition en devient lassante comme celle de la poule de Dario. Et le procédé stylistique, cette fausse naïveté dont les effets sont trop répétitifs, finit par être irritant.
De plus la disproportion entre les écrits d'Elvira qui apparaît peu et le récit du petit garçon qui est omniprésent se fait au détriment du personnage de la jeune femme qui devient un peu secondaire et  est moins intéressante.
Enfin, si l'on ajoute que j'ai trouvé le secret de l'allemand assez décevant, on peut comprendre comment ce roman commencé dans l'enthousiasme m'a déçue.