Cénotaphe de Montaigne au musée d'Aquitaine. |
Le cénotaphe de Montaigne a été restauré en 2018 et à nouveau ouvert au public au mois de mars. Mais le corps de Montaigne ne s'y trouve pas et il a disparu depuis longtemps. Or, je viens de lire dans un article publié récemment, le 16 novembre 2018, qu'il serait peut-être retrouvé.
La tombe de Montaigne
La récente découverte dans les sous-sols du musée d'Aquitaine à Bordeaux
de restes humains permettra peut-être d'établir enfin s'il s'agit bien
de la dépouille disparue du philosophe Michel de Montaigne (1533-1592)
L'actuel maire a raconté comment, dans la réserve des collections
médiévales du musée, "une petite construction qui est là depuis plus
d'un siècle et à laquelle personne ne s'est jamais intéressé" a attiré
l'attention du directeur du musée, Laurent Védrine. Ce dernier a donc
percé "deux petits trous" dans le mur de ce caveau jusque-là inconnu.
Peut-être a-t-il percé du même coup le mystère de la tombe du
philosophe, dont la dépouille a erré d'une sépulture à l'autre depuis
son décès en 1592.
Les restes de Montaigne ont beaucoup erré
En 1593, le cercueil de Montaigne est installé dans la chapelle du couvent des Feuillants, situé à ce qui correspond aujourd'hui à l'emplacement du musée d'Aquitaine. En 1802, ce couvent fait place au lycée Royal, dont la chapelle abrite le cercueil jusqu'en 1871. C'est cette année-là que le lycée est détruit par un incendie. Les restes de Montaigne sont alors transportés au dépositoire du cimetière de la Chartreuse, à Bordeaux.
En 1886, nouveau transfert des ossements présumés de Montaigne de La Chartreuse au site initial qui a fait place entre-temps à la faculté des Lettres et des Sciences. C'est là que le tombeau réalisé par l'architecte Charles Durand est installé, dans le hall de la faculté. Depuis lors, le tombeau n'a jamais été ouvert. Voir la suite ICI
En 1886, nouveau transfert des ossements présumés de Montaigne de La Chartreuse au site initial qui a fait place entre-temps à la faculté des Lettres et des Sciences. C'est là que le tombeau réalisé par l'architecte Charles Durand est installé, dans le hall de la faculté. Depuis lors, le tombeau n'a jamais été ouvert. Voir la suite ICI
Le cénotaphe de Montaigne
Le cénotaphe de Montaigne a donc été restauré à la suite d'une collecte publique et peut être vu à nouveau au musée d'Aquitaine à Bordeaux. Il a été commandé par son épouse Françoise de la Chassaigne et est attribué aux sculpteurs bordelais Prieur et Guillermain, vers 1593.
Deux médaillons en marbre rouge précisent :
« François de la Chassaigne, vouée, hélas, à un deuil perpétuel, a
fait ériger ce monument pour son époux chéri, homme d’une seule épouse,
pleuré à juste titre par la femme d’un seul homme. »Deux médaillons en marbre rouge précisent :
« Il est mort à 59 ans, 7 mois, 11 jours, en l’an de grâce 1592 aux ides de septembre. »
Le lion (détail) |
Une vanité (détail) |
De chaque côté du tombeau figurent des épitaphes, l'une en latin, l'autre en grec qui rendent hommage au défunt. L'épitaphe en latin a été traduite en 1861 par Reinhold Dezeimeris et réétudié par Alain Legros de la façon suivante :
A Michel de Montaigne, périgourdin, fils de Pierre, petit-fils de
Grimond, arrière petit-fils de Raymond, chevalier de Saint Michel,
citoyen Romain, ancien maire de la cité des Bituriges Vivisques, homme
né pour être l’honneur de la nature et dont les mœurs douces, l’esprit
fin, l’éloquence toujours prête et le jugement incomparable ont été
jugés supérieurs à la condition humaine, qui eut pour amis les plus
grands rois, les premiers personnages de France, et même les chefs du
parti de l’erreur, bien que très fidèlement attaché lui-même aux lois de
la patrie et à la religion de ses ancêtres, n’ayant jamais blessé
personne, incapable de flatter ou d’injurier, il reste cher à tous
indistinctement, et comme toute sa vie il avait fait profession d’une
sagesse à l’épreuve de toutes les menaces de la douleur, ainsi arrivé au
combat suprême, après avoir longtemps et courageusement lutté avec un
mal qui le tourmenta sans relâche, mettant d’accord ses actions et ses
préceptes, il termine, Dieu aidant, une belle vie par une belle fin. »
j'ai trouvé ces renseignements sur le site du musée d'Aquitaine que vous pouvez aller lire : https://www.pourmontaigne.fr/categorie/actualites/
Très jeune, Montaigne eut peur de la mort. C'est une angoisse qui le tenaillait sans arrêt et ne le quittait jamais.
Il n’est rien dequoy je me soye des toujours plus entretenu que des imaginations de la mort : voire en la saison la plus licentieuse de mon aage, parmy les dames et les jeux, tel me pensoit empesché à digerer à par moy quelque jalousie, ou l’incertitude de quelque esperance, cependant que je m’entretenois de je ne sçay qui, surpris les jours precedens d’une fievre chaude et de sa fin, au partir d’une feste pareille, et la teste pleine d’oisiveté, d’amour et de bon temps, comme moy, et qu’autant m’en pendoit à l’oreille ...
Pour combattre la peur de la mort, c'est d'abord à la philosophie stoicienne qu'il fait appel.
Nous ne savons où la mort nous attend, attendons-la partout. Méditer sur la mort, c’est méditer sur la liberté ; qui a appris à mourir, a désappris la servitude ; aucun mal ne peut, dans le cours de la vie, atteindre celui qui comprend bien que la privation de la vie n’est pas un mal ; savoir mourir, nous affranchit de toute sujétion et de toute contrainte. (Livre I 20)
La préméditation de la mort est la préméditation de la liberté.
Le but de notre carrière, c'est la mort, c'est l'objet nécessaire de notre visée : si elle nous effraie, comment est-il possible d'aller un pas en avant sans fièvre. Le remède du vulgaire c’est de n’y penser pas. Mais de quelle brutale stupidité lui peut venir un si grossier aveuglement ? Ôtons-lui l’étrangeté, pratiquons-le, accoutumons-le, n’ayant rien si souvent en la tête que la mort. ( Livre I , 19)
Tout au long de sa vie, il n'a cessé de réfléchir sur ce sujet et il a évolué peu à peu. Voilà ce qu'il écrit dans le Livre III dans lequel le stoïcisme semble abandonné pour l'adhésion à une sagesse bâtie sur l'observation des lois de la nature.
Montaigne et la mort
Très jeune, Montaigne eut peur de la mort. C'est une angoisse qui le tenaillait sans arrêt et ne le quittait jamais.
Il n’est rien dequoy je me soye des toujours plus entretenu que des imaginations de la mort : voire en la saison la plus licentieuse de mon aage, parmy les dames et les jeux, tel me pensoit empesché à digerer à par moy quelque jalousie, ou l’incertitude de quelque esperance, cependant que je m’entretenois de je ne sçay qui, surpris les jours precedens d’une fievre chaude et de sa fin, au partir d’une feste pareille, et la teste pleine d’oisiveté, d’amour et de bon temps, comme moy, et qu’autant m’en pendoit à l’oreille ...
Pour combattre la peur de la mort, c'est d'abord à la philosophie stoicienne qu'il fait appel.
Nous ne savons où la mort nous attend, attendons-la partout. Méditer sur la mort, c’est méditer sur la liberté ; qui a appris à mourir, a désappris la servitude ; aucun mal ne peut, dans le cours de la vie, atteindre celui qui comprend bien que la privation de la vie n’est pas un mal ; savoir mourir, nous affranchit de toute sujétion et de toute contrainte. (Livre I 20)
La préméditation de la mort est la préméditation de la liberté.
Le but de notre carrière, c'est la mort, c'est l'objet nécessaire de notre visée : si elle nous effraie, comment est-il possible d'aller un pas en avant sans fièvre. Le remède du vulgaire c’est de n’y penser pas. Mais de quelle brutale stupidité lui peut venir un si grossier aveuglement ? Ôtons-lui l’étrangeté, pratiquons-le, accoutumons-le, n’ayant rien si souvent en la tête que la mort. ( Livre I , 19)
Tout au long de sa vie, il n'a cessé de réfléchir sur ce sujet et il a évolué peu à peu. Voilà ce qu'il écrit dans le Livre III dans lequel le stoïcisme semble abandonné pour l'adhésion à une sagesse bâtie sur l'observation des lois de la nature.
Il est certain qu’à la plus part la preparation à la mort a donné plus de tourment que n’a faict la souffrance.
Si vous ne sçavez pas mourir, ne vous chaille ; nature vous en informera
sur le champ, plainement et suffisamment ; elle fera exactement cette
besongne pour vous ; n’en empeschez vostre soing.
(Livre III 12)
Nous troublons la vie par le soing de la mort, et la mort par le soing de la vie. L’une nous ennuye, l’autre nous effraye. Ce n’est pas contre la mort que nous nous preparons ; c’est chose trop momentanée. Un quart d’heure de passion sans consequence, sans nuisance, ne merite pas des preceptes particuliers. (...)
Si nous avons sçeu vivre constamment et tranquillement, nous sçaurons mourir de mesme. Mais il m’est advis que c’est bien le bout, non pourtant le but de la vie ; c’est sa fin, son extremité, non pourtant son object.
Au nombre de plusieurs autres offices que comprend ce general et principal chapitre de sçavoir vivre, est cet article de sçavoir mourir ; et des plus legiers si nostre crainte ne luy donnoit poids.
Je ne vy jamais paysan
de mes voisins entrer en cogitation de quelle contenance et asseurance
il passeroit cette heure derniere. Nature luy apprend à ne songer à la
mort que quand il se meurt. (Livre III 12)