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mercredi 13 mars 2013

Le Berry : Sur les traces de George Sand avec la Fée Poussière (3)



Quand on voyage avec une petite fille de trois ans et que l'on veut partir avec elle sur les traces de George Sand dans le Berry,  il n'y a rien de mieux que de lui lire La fée Poussière, un conte que George Sand a  imaginé pour ses petites filles, Aurore et Gabrielle, les filles de son fils Maurice et de Lina.
Lire? Non car le conte est bien difficile à la fois par le sujet et la langue mais raconter, oui! Tout en tournant les pages délicieusement illustrées par Ghislaine Dodet dans la série contes Anaïs aux éditions Saint-Mont…



Autrefois, il y a bien longtemps, mes chers enfants, j'étais jeune et j'entendais souvent les gens se plaindre d'une importune petite vieille qui entrait par les fenêtres quand on l'avait chassée par les portes. Elle était si fine et si menue, qu'en eût dit qu'elle flottait au lieu de marcher, et mes parents la comparaient à une petite fée. Les domestiques la détestaient et la renvoyaient à coups de plumeau, mais on ne l'avait pas plus tôt délogée d'une place qu'elle reparaissait à une autre.
Elle portait toujours une vilaine robe grise traînante et une sorte de voile pâle que le moindre vent faisait voltiger autour de sa tête ébouriffée en mèches jaunâtres.
La fée Poussière est méprisée par tous et on la chasse avec un plumeau. Pourtant, elle invite la petite fille à l'appeler par trois fois dans la nuit afin de pouvoir la rejoindre dans son palais enchanté où elle  apparaît à l'enfant sous la forme d'une belle dame resplendissante. Car la fée Poussière n'est pas celle que l'on croit. Sans elle, le monde minéral ne nous offrirait pas ses joyaux les plus beaux et rien de solide n'existerait sur cette terre.

Tout ce que tu vois là, me dit-elle, est mon ouvrage. Tout cela est fait de poussière ; c'est en secouant ma robe dans les nuages que j'ai fourni tous les matériaux de ce paradis. Mon ami le feu les avait lancés dans les airs, les a repris pour les recuire, les cristalliser ou les agglomérer après que mon serviteur le vent les a eu promenés dans l'humidité et dans l'électricité des nues, et rabattus sur la terre ; ce grand plateau solidifié s'est revêtu alors de ma substance féconde et la pluie en a fait des sables et des engrais, après en avoir fait des granits, des porphyres, des marbres, des métaux et des roches de toute sorte.



George Sand nous convie alors à un voyage dans le temps, dans le "laboratoire" de la Fée où s'élabore la matière, où les corps gazeux deviennent solides après avoir illuminé l'espace. Et la fée confectionne, à partir de la poussière, devant les yeux émerveillés de la fillette, une savante cuisine. Elle pile, pulvérise, mélange, met au feu de savantes préparations qui deviennent granit, grès, sable, quartz, ardoises… Elle emprisonne aussi des animaux  et des végétaux mystérieux dans une gangue de calcaire, de silice et d'argile, témoins des vies passées qui ont laissé leur place à d'autres car la Nature est toujours en perpétuelle évolution. Tout disparaît pour renaître encore sous de nouvelles formes. Lorsque la fée dit au revoir à l'enfant, elle lui donne un morceau de sa robe de bal :

Tout disparut, et, quand j'ouvris les yeux, je me retrouvai dans mon lit. Le soleil était levé et m'envoyait un beau rayon. Je regardai le bout d'étoffe que la fée m'avait mis dans la main. Ce n'était qu'un petit tas de fine poussière, mais mon esprit était encore sous le charme du rêve et il communiqua à mes sens le pouvoir de distinguer les moindres atomes de cette poussière.
Je fus émerveillée ; il y avait de tout : de l'air, de l'eau, du soleil, de l'or, des diamants, de la cendre, du pollen de fleur, des coquillages, des perles, de la poussière d'ailes de papillon, du fil, de la cire, du fer, du bois, et beaucoup de cadavres microscopiques ; mais, au milieu de ce mélange de débris imperceptibles, je vis fermenter je ne sais quelle vie d'êtres insaisissables qui paraissaient chercher à se fixer quelque part pour éclore ou pour se transformer, et qui se fondirent en nuage d'or dans le rayon rose du soleil levant.


Ce conte est une petite merveille de poésie. Il peut être lu à plusieurs degrés. On  voit que George Sand était convertie au darwinisme et que le récit est une manière de faire comprendre  l'évolutionnisme à ses petites filles tout en les plongeant dans le Merveilleux et le rêve… Quant à Nini, la petite admiratrice de George Sand, elle n'a certes pas tout compris mais elle a adoré la Fée Poussière qui vit dans un palais magnifique et qui a des robes de princesse. Et vous pouvez lui demander qui est George Sand! Elle vous répondra que c'est la mamie d'Aurore et de Gabrielle et qu'elle raconte de belles histoires!


Suite Lundi :  Le Berry : Sur les traces de George Sand (4)




mardi 12 mars 2013

Le Berry : Sur les traces de George Sand : Angibault et Sarzay (2)


Le château de Sarzay

Visiter le Berry de George Sand, c'est rencontrer au fond d'un bois, au coeur d'un château ou d'une chaumière, dans les méandres de la Creuse, les personnages de ses romans, Marcelle de Blanchemont et Grand Louis près du moulin d'Angibault, la petite Marie et Germain perdus dans le brouillard au bord de la mare, Emile et Gilberte marchant la main dans la main dans les ruines de Châteaubrun non loin de Gargilesse...


Carte des oeuvres de George Sand






Le meunier d'Angibault

Le meunier  d'Angibault de George Sand a pour personnage principal, la baronne, Marcelle de Blanchemont. Celle-ci vient de perdre son mari qu'elle n'aimait pas. Veuve et indépendante, elle se rend, accompagnée de son fils Edouard, dans sa propriété de Blanchemont, chez son fermier Bricolin.  voir ICI

C'est le château de Sarzay qui a servi de modèle au domaine de Marcelle de Blanchemont. 

 Le château de Blanchemont avec son paysage, sa garenne et sa ferme, existe tel que je l'ai fidèlement dépeint ; seulement il s'appelle autrement, et les Bricolin sont des types fictifs.

Ce château n'a jamais été d'une grande défense : les murs n'ont pas plus de cinq à six pieds d'épaisseur en bas, les tours élancées sont encorbellées. Il date de la fin des guerres de la féodalité. Cependant la petitesse des portes, la rareté des fenêtres, et les nombreux débris de murailles et de tourelles qui lui servaient d'enceinte, signalent un temps de méfiance où l'on se mettait encore à l'abri d'un coup de main.

C'est un caste ! assez élégant, un carré long renfermant à tous les étages une seule grande pièce, avec quatre tours contenant de plus petites chambres aux angles, et une autre tour sur la face de derrière servant de cage à l'unique escalier. La chapelle est isolée par la destruction des anciens communs ; les fossés sont comblés en partie, les tourelles d'enceinte sont tronquées à la moitié, et l'étang qui baignait jadis le château du côté du nord est devenu une jolie prairie oblongue, avec une petite source au milieu.


Perdue dans des chemins hasardeux, elle rencontre le meunier d'Angibault surnommé le Grand-Louis, jeune homme honnête et travailleur, qui l'accueille dans son moulin pour une nuit. 


Voilà comment George Sand parle de ce moulin dans le prologue de son roman :

Or, il y a dans notre vallée un joli moulin qu'on appelle Angibault, dont je ne connais pas le meunier, mais dont j'ai connu le propriétaire. C'était un vieux monsieur, qui, depuis sa liaison à Paris avec M. de Robespierre (il l'appelait toujours ainsi), avait laissé croître autour de ses écluses tout ce qui avait voulu pousser : l'aune et la ronce, le chêne et le roseau. La rivière, abandonnée à son caprice, s'était creusé, dans le sable et dans l'herbe, un réseau de petits torrents qu'aux jours d'été, dans les eaux basses, les plantes fontinales couvraient de leurs touffes vigoureuses. Mais le vieux monsieur est mort ; la cognée a fait sa besogne ; il y avait bien des fagots à tailler, bien des planches à scier dans cette forêt vierge en miniature. Il y reste encore quelques beaux arbres, des eaux courantes, un petit bassin assez frais, et quelques buissons de ces ronces gigantesques qui sont les lianes de nos climats.

Mais ce coin de paradis sauvage que mes enfants et moi avions découvert en 1844, avec des cris de surprise et de joie, n'est plus qu'un joli endroit comme tant d'autres.



  
Et voilà comment Marcelle de Blanchemont découvre le moulin en se levant de bonne heure le lendemain matin
Curieuse de savoir en quoi consistaient ces préparatifs, Marcelle franchit le pont rustique qui servait en même temps de pelle au réservoir du moulin, et laissant sur sa droite une belle plantation de jeunes peupliers, elle traversa la prairie en longeant le cours de la rivière, ou plutôt du ruisseau, qui, toujours plein jusqu'aux bords et rasant l'herbe fleurie, n'a guère en cet endroit plus de dix pieds de large. Ce mince cours d'eau est pourtant d'une grande force, et aux abords du moulin il forme un bassin assez considérable, immobile, profond et uni comme une glace, où se reflètent les vieux saules et les toits moussus de l'habitation. 



Marcelle contempla ce site paisible et charmant, qui parlait à son coeur sans qu'elle sût pourquoi. Elle en avait vu de plus beaux; mais il est des lieux qui nous disposent à je ne sais quel attendrissement invincible, et où il semble que la destinée nous attire pour nous y faire accepter des joies, des tristesses ou des devoirs.

Jeudi : Sur les traces de George Sand (3) suite




lundi 11 mars 2013

Le Berry : Sur les traces de George Sand : La Vallée Noire et Nohant (1)


Buste de George Sand à Gargilesse


Passer ces vacances à Issoudun, près de Nohant, c'est évidemment se trouver immergé au coeur du pays de George Sand, c'est aller à la rencontre de cette femme dont le souvenir est si vivace ici, dans ce pays qu'elle a appelé par un caprice d'écrivain, La Vallée Noire. C'est vivre avec des fantômes, apercevoir la petite silhouette d'Aurore Dupin au détour d'une allée ou les boucles blondes de son jeune amant Jules Sandeau, c'est galoper avec elle chaque jour jusqu'à La Châtre pour apprendre les péripéties de la Révolution de 1830 à Paris, c'est partager les discussions passionnées,  au cours des veillées de Nohant, des plus grands personnages du romantisme...


La vallée Noire

Mais qu'est-ce que la Vallée Noire? George Sand dans un long texte éponyme précise les limites de cette région pour répondre à une question posée par un habitant de la Brenne qui l'a piquée au vif. Elle analyse les caractéristiques de la Vallée Noire et le caractère de ses habitants  .

Mais puisqu'on veut que la Vallée-Noire n'existe que dans ma cervelle, je prétends prouver qu'elle existe, distincte de toutes les régions environnantes, et qu'elle méritait un nom propre.

Elle fait partie de l'arrondissement de La Châtre ; mais cet arrondissement s'étend plus loin, vers Eguzon et l'ancienne Marche. Là, le pays change tellement d'aspect, que c'est bien réellement un autre pays, une autre nature. La Vallée-Noire s'arrête par là à Cluis. De cette hauteur on plonge sur deux versants bien différents. L'un sombre de végétation, fertile, profond et vaste, c'est la Vallée-Noire : l'autre maigre, ondulé, semé d'étangs, de bruyères et de bois de châtaigniers.

  Du côté de Cluis, toutes les hauteurs sont boisées, c'est ce qui donne à nos lointains cette belle couleur bleue qui devient violette et quasi noire dans les jours orageux. 


Dans les pays à grands accidents, comme les montagnes élevées, la nature est orgueilleuse et semble dédaigner les regards, comme ces fières beautés qui sont certaines de les attirer toujours.
Dans d'autres contrées moins grandioses, elle se fait coquette dans les détails, et inspire des passions au paysagiste. Mais elle n'est ni farouche ni prévenante dans la Vallée-Noire elle est tranquille, sereine, et muette sous un sourire de bonté mystérieuse. Si l'on comprend bien sa physionomie, on peut être sûr que l'on connaît le caractère de ses habitants. C'est une nature qui ne se farde en rien et qui s'ignore elle-même. Il n'y a pas là d'exubérance irréfléchie, mais une fécondité patiente et inépuisable. Point de luxe, et pourtant la richesse ; aucun détail qui mérite de fixer l'attention, mais un vaste ensemble dont l'harmonie vous pénètre peu à peu, et fait entrer dans l'âme le sentiment du repos. Enfin on peut dire de cette nature qu'elle possède une aménité grave, une majesté forte et douce, et qu'elle semble dire à l'étranger qui la contemple : «Regarde-moi si tu veux, peu m'importe. Si tu passes, bon voyage ; si tu restes, tant mieux pour toi.»


             Souvenirs de Nohant d'Aurore Sand 

 Le château de Nohant


Aurore, la petite fille de George Sand évoque la vie à Nohant dans un texte intitulé : Souvenirs de Nohant. Elle fait revivre sa grand mère, à une époque où âgée, celle-ci est apaisée et sereine, entourée de l'affection des siens. L'évocation d'Aurore est à la fois pleine d'admiration pour cette grande dame et ce grand écrivain et d'amour pour la grand mère qui l'a entourée d'affection, l'a bercée d'histoires, lui a enseigné avec douceur et patience mais aussi avec intelligence et habileté les principales matières, le français, l'anglais, la géographie, l'histoire, les sciences.. Sauf, nous dit-elle, la religion et les mathématiques. C'est une découverte pour moi : L'écrivaine était aussi une bonne pédagogue! Elle se passionnait pour les sciences, passion qu'elle partageait avec son fils Maurice, la botanique, l'entomologie, la paléontologie… Et comme elle était une excellente pianiste, une érudite en ce qui concerne l'art, la musique, l'architecture, la peinture, on peut dire qu'elle forçait l'admiration de tout son entourage.

Le château de George Sand à Nohant a été construit en 1760 sur l'emplacement d'un château-fort du XIV° siècle. Madame Dupin de Franceuil, la grand-mère d'Aurore, l'acheta en 1793, avant de la léguer à sa petite fille en 1821.
La visite de la demeure de George Sand est guidée. Impossible de s'arrêter, de rêver devant un tableau, un objet, une relique, mais elle est conduite par des guides qui parlent d'Elle avec une sorte de vénération. Tout est fait pour que l'on ait l'impression que la propriétaire est là, qu'elle va bientôt rentrer d'une promenade dans le parc, que la table toujours dressée selon les indications d'Aurore est prête accueillir ses hôtes illustres : Chopin, Balzac, Le prince Napoléon, Delacroix, Flaubert, Tourguéniev, Liszt et Marie d'Agoult…autour de George Sand, de Maurice son fils, de Lina sa belle-fille et de ses petites filles, Aurore et Gabrielle.
 
Une des pièces les plus remarquables est bien sûr, le théâtre, construit pour convier les hôtes du château à des spectacles conçus par Maurice Sand et sa mère. C'est Maurice qui fabrique les marionnettes, c'est George Sand qui confectionne leurs vêtements.

A l'étage la chambre bleue est celle de la romancière. Aurore se souvient très bien des visites faites à sa grand mère dans cette chambre. C'est là aussi qu'elle a vu sa grand mère pour la dernière fois sur son lit de mort après une agonie douloureuse. La chambre de Chopin, le cabinet d'études qui renfermait les collections de fossiles, de papillons, les herbiers, la chambre au décor japonisant de Gabrielle et d'Aurore font suite, en enfilade, à celle de l'écrivaine.

Le parc et le jardin méritaient l'attention et les soins constants de George Sand qui adoraient les fleurs. Aurore Sand explique tous les embellissements voulus par sa grand mère, les plantations d'arbres, le choix des espèces végétales pour faire de ce lieu un séjour enivrant de couleurs et de parfums.

 Le parc de Nohant


Sur les traces des romans de George Sand (2)

Demain je présenterai les lieux où se déroule l'intrigue de nombreux romans de George Sand : pour commencer Angibault et Sarzay






vendredi 15 février 2013

Voyage sur les traces de George Sand


Aurélia Frey : Berry,  travail sur George Sand


Et oui, pas d'énigme ce samedi... Nous partons pour le pays de George Sand à la recherche de la Fée Poussière ou de la Fée aux Gros Yeux, des meneurs de loups, des farfadets dansant autour de la mare au diable. Rencontrerons-nous les Lavandières de la nuit, les Flammettes, le moine bourru? Je ne sais! Quelles aventures nous réserve le pays berrichon?
A bientôt!

jeudi 31 janvier 2013

George Sand : L' art est une recherche de la vérité idéale..

La mare au diable de Bernard Patrigeon (artiste berrichon)


 Voilà ce qu'écrit George Sand à propos de l'art et de la littérature dans la préface de La mare au diable

Nous croyons que la mission de l’art est une mission de sentiment et d’amour, que le roman d’aujourd’hui devrait remplacer la parabole et l’apologue des temps naïfs, et que l’artiste a une tâche plus large et plus poétique que celle de proposer quelques mesures de prudence et de conciliation pour atténuer l’effroi qu’inspirent ses peintures. Son but devrait être de faire aimer les objets de sa sollicitude, et, au besoin, je ne lui ferais pas un reproche de les embellir un peu. L’art n’est pas une étude de la réalité positive ; c’est une recherche de la vérité idéale...

mercredi 23 janvier 2013

George Sand : Teverino Lecture commune




Dans le prologue de Teverino George Sand réfute les arguments de ses détracteurs : oui, les caractères qu'elle a peints dans son roman ne sont pas forcément vraisemblables, oui elle a poétisé l'excessive délicatesse de sentiments et la candeur de l'âme aux prises avec la misère, oui Teverino est écrit sans autre but que celui de peindre un caractère original, une destinée bizarre qui peuvent paraître invraisemblables …  Et elle ajoute : Est-il donc nécessaire, avant de parler à l'imagination du lecteur par un ouvrage d'imagination, de lui dire que certain type exceptionnel n'est pas un modèle qu'on lui propose? Ce serait le supposer trop naïf, et il faudrait plutôt conseiller à ce lecteur de ne jamais lire de romans…"
Donc, tenez-le vous pour dit ! Les caractères de ces personnages sont idéalisés, en effet, l'intrigue assez invraisemblable, le roman est une une pure fantaisie, et tant mieux, puisque c'est l'aspect du roman que je préfère!

L'intrigue :
Léonce, un jeune marquis, est amoureux de Sabina qui a fait un mariage de convenance avec un  anglais, lord G., qui l'indiffère et ne sait que boire et s'enivrer en compagnie de ses amis. Sabina, Lady G.,  refuse l'amour de Léonce et ne voit en lui qu'un ami d'enfance, un frère. En attendant, elle s'ennuie dans le luxe de sa prison dorée et soupire après des aventures qui lui permettraient de vivre des sentiments passionnés. Léonce la prend au mot et l'amène en promenade pour une journée en tête à tête dans cette région de montagnes où ils sont en villégiature. Il lui promet qu'il va lui faire oublier son ennui. Et c'est ce qu'il fait, en effet! C'est l'occasion pour Sabina de rencontrer des personnages hors du commun, Madeleine, la fille aux oiseaux et Teverino, un italien, voyageur artiste et bohème, qui donne son nom au roman.

Teverino



Le thème principal est lié au personnage éponyme, ce voyageur insaisissable, inclassable, Teverino, artiste plein de finesse doué pour les arts et en particulier pour la musique, bohémien, séducteur et brillant, issu du peuple et pourtant grand seigneur à ses heures, bref protéiforme. La vision que nous offre ainsi Sand de l'artiste est celle d'un être libre, qui se place hors des conventions sociales, et laisse parler ses sentiments avec spontanéité. Il n'est pas étonnant que Sand ait choisi un italien pour incarner ce personnage, un enfant du peuple né au bord du Tibre. On a vu dans Consuelo qui se déroule à Venise, la place de l'art, en particulier de la musique, en Italie, et comment George associe le caractère italien à la joie, l'expression des sentiments, la sensualité, le tempérament artistique. Teverino s'oppose au caractère français et à la vie mondaine représentés par Sabina et Léonce qui sont froids et maîtres d'eux-mêmes, refoulent leurs sentiments et se préoccupent de la bienséance au point de demander au curé de les accompagner pour leur servir de chaperon. En effet, si Lady G. était vue seule en compagnie de son ami, elle pourrait être déshonorée et perdrait sa place dans la société.

 Madeleine

Madeleine, la fille aux oiseaux, vit hors du monde, en sauvageonne. Son frère est contrebandier, un brigand donc, mais qui veille sur sa soeur affectueusement. Elle exerce son pouvoir sur les oiseaux tout en respectant leur liberté et se révèle le pendant féminin de Teverino. Et il faut bien le dire, ce sont les personnages sympathiques du roman! L'amour pur, simple et naïf que Madeleine témoigne à Teverino est mis en parallèle à l'amour sophistiqué et complexe de Léonce qui n'ose s'exprimer, muré dans son amour-propre; il est en opposition aussi à la coquetterie, la superficialité, l'orgueil et le sentiment de supériorité de la grande dame, Sabina, qui refuse d'aimer et d'être aimée.

Le joug affreux du mariage



Savez-vous Léonce, que c'est un joug affreux que celui-là?
- Oui, il y a des maris qui battent leur femme.
- Ce n'est rien, il y en a d'autres qui les font périr d'ennui.


Le roman est écrit en 1845 et explore un thème cher au coeur de Sand, celui du mariage et de la liberté de la femme. Aurore  Dupin a épousé le baron Dudevant en 1822 et a eu de lui deux enfants, Maurice et Solange. En 1832, elle quitte son mari avec qui elle ne s'entend pas et part se réfugier à Paris avec son amant Jules Sandeau. C'est le début de sa vie littéraire. Elle n'aura de cesse alors de lutter contre le mariage de convenance arrangé par les parents. Elle s'insurgera - et ses prises de position feront scandale- contre le statut de la femme dans le mariage qui prive celle-ci de ses droits, de sa fortune et la place sous la tutelle de son mari tout puissant. Elle revendique le divorce et le droit à l'égalité pour les femmes. Dans Teverino, Sabina subit l'affreux joug du mariage sans avoir le courage de le secouer. Léonce l'exhorte d'ailleurs à avoir moins de crainte de l'opinion publique. Il est certain que Sabina n'a rien d'une George Sand! Elle serait pourtant justifiée d'aimer hors mariage puisqu'on l'a mariée sans amour. Sabina est une femme sous dépendance et pleine des préjugés de sa classe. Ce voyage sera pour elle initiatique et elle en reviendra transformée.

L'amour triomphera-t-il de l'orgueil? Un écho de Musset 

 Les caprices de Marianne

L'amour triomphera-t-il de l'orgueil? est l'un des grands thèmes du roman et on retrouve dans cette interrogation un écho des deux comédies de Musset *:  Les caprices de Marianne et On ne badine pas avec l'amour.
En effet, les personnages de Marianne et de Camille dans les pièces de Musset rappellent celui de Sabina. Toutes les deux comme l'héroïne de Sand refusent l'amour par orgueil : Marianne, semblable en cela à Sabina, est mal mariée à un vieillard qui ne lui inspire que du mépris. Elle ne veut pas écouter Octave qui lui parle de l'amour que Célio a pour elle. Elle finit par tomber amoureuse d'Octave et fait le malheur de Célio. Quand, dans le roman, Teverino parle de l'amour de Léonce à Sabina, la jeune femme est fascinée par le bel italien et croit être amoureuse de lui.
 Dans On ne badine pas avec l'amour,  Camille, jeune fille sortie du couventne veut pas s'exposer à être trompée et à souffrir; elle refuse l'amour de Perdican. Ce dernier cherche, en courtisant la servante Rosette, à attiser la jalousie de Camille. Les deux pièces se terminent tragiquement car Célio et Rosette en mourront. Dans le roman de George Sand, Teverino embrasse Sabina, ce qui fait souffrir Madeleine-Rosette et Léonce-Célio mais la ressemblance s'arrête là. Madeleine ne mourra pas et Sabina humiliée mais rendue plus  humaine, plus simple, par cette mésaventure, y verra clair dans ses sentiments pour Léonce. L'orgueil est terrassé.

*voir l'étude de Françoise Genevray à propos des Lettres d'un voyageur de George Sand


La noblesse et le peuple



De par ses origines, George Sand appartient, par son père,  à une noblesse qui remonte au maréchal de France, Maurice de Saxe, par sa mère, ouvrière de mode, elle est fille du peuple. L'écrivain partagée par sa double origine, aristocratique et populaire, thème qui se retrouve souvent dans ses oeuvres, se déclare du côté du peuple. Dans Teverino, Lady G. croit à la supériorité de l'homme du monde et méprise le peuple.
Et puis si vous voulez que je me confesse, je vous dirai que je crois un peu à l'excellence de notre sang patricien. Si tout n'était pas dégénéré et corrompu dans le genre humain, c'est encore là qu'il faudrait espérer de trouver des types élevés et des natures d'élite.
Léonce pense, au contraire que : l'homme du peuple peut valoir et surpasser l'homme du monde  a beaucoup d'égards.
Lady G. a tort. Elle l'apprendra à ses dépens en se laissant presque séduire par un homme du peuple, Teverino, qui se fait passer pour gentilhomme. La leçon est cuisante. Une humiliation qui la rendra plus humble et plus attentive aux sentiments des autres et l'amènera à réfléchir à la véritable valeur des êtres. Quant à l'aristocrate Lord G. que nous voyons à la fin du roman, l'image qu'il nous donne de la noblesse paraît peu reluisante :
 Mylord s'était réveillé la veille au soir et avait pris de l'inquiétude mais il avait bu pour s'étourdir, et lorsque sa femme rentra, il dormait encore.

 Le style , une variété de tons


Dans ce roman, le ton employé par Sand est celui d'une moraliste qui, à travers les dialogues de Léonce et Sabina, développe des idées qui lui importent et que le récit va illustrer. Pourtant ce ton un peu trop didactique cède vite à une langue fraîche, volontiers poétique dans la description des paysages, dans l'évocation de la fillette aux oiseaux. Alors que le dialogue de Léonce et Sabina est empesé et démonstratif, celui du bohémien musicien est plein de vie et de brio. Il devient aussi haletant, véritable roman d'aventures, dans les passages où les voyageurs bravent les dangers de la montagne. Enfin, il emprunte un registre comique et caricatural avec le personnage du curé qui ne pense qu'à manger et apprécie outre mesure la dive bouteille, au demeurant un  très brave homme!




Lecture commune avec Cléanthe, George, Miriam et Nathalie

lundi 21 janvier 2013

Invitation au romantisme dans le blog d'Eimelle : Marie Dorval, Sand, Vigny, Hugo, Lemaître...


Marie Dorval


Il y a longtemps que je ne vous ai pas conviés à aller découvrir les textes écrits dans le cadre du challenge romantique. Je vous invite donc à visiter Les carnets d'Eimelle, un joli blog dédié aux spectacles, opéra, théâtre, concert, à la lecture et au voyage.
Eimelle a effectué un véritable travail de recherche sur Marie Dorval, célèbre actrice du début du XIXème siècle, qui a interprété les plus grands rôles des drames romantiques, en particulier ceux de Victor Hugo.

 Voici un extrait du  premier texte d'Eimelle sur cette grande actrice qui a si magnifiquement incarné le romantisme au théâtre. Aller lire la suite. C'est passionnant!



Marie Dorval 1 les débuts

En ce jour d'hommage et de commémoration, c'est vers une figure du théâtre romantique que je me tourne: 

Marie Dorval... souvenir de lycée... on étudie Chatterton, le lycée s'appelle Alfred de Vigny, on évoque sa vie, et la comédienne qui créa le rôle de Kitty Bell. Des années après, c'est en lisant un ouvrage sur les actrices du XIX que je retrouve cette comédienne, et que naît l'envie d'en savoir plus sur ce personnage qui me semble passionnant.

Et avec ce blog, l'opportunité de communiquer à d'autres peut-être l'envie de mieux la connaître.
Résultat de mes lectures de ces derniers mois, une série d'articles à venir, trois autour de sa vie et de son entourage d'abord, puis d'autres sur ces grands rôles au théâtre.
A travers Marie Dorval, c'est toute l'histoire littéraire et théâtrale de l'époque qui se révèle, et la naissance et la propagation du théâtre romantique. Et puis c'est aussi l'histoire d'une femme, tantôt au sommet de la gloire, tantôt tragique, dont la légende s'est vite emparée, avant d'être un peu oubliée, et c'est dommage.
En espérant que cela vous donne envie de vous plonger à votre tout dans l'une ou l'autre de ses biographies ou de celles de ceux avec qui elle était liée : Alfred de Vigny, George Sand, Dumas....

Marie Dorval en quelques citations d'abord pour mieux cerner la femme et l'actrice;  


 

Grand génie et grand cœur
, c'était dit George Sand, une des plus grandes artistes et une des meilleures femmes de ce siècle. Tout était passion chez elle, la maternité, l'art, l'amitié, le dévouement, l'indignation, l'aspiration religieuse.   La suite...




 

Biographie de Marie Dorval


 Marie Dorval dans Marion Delorme de Victor Hugo
Les deux forçats Marie Dorval 1822 

Lectures  consacrées à Marie Dorval

 

Alfred de Vigny : correspondance amoureuse

- Mademoiselle Mars et Marie Dorval au théâtre et dans la vie de Francis Ambrière

- Marie Dorval, 1789-1849, documents inédits. Biographie critique et bibliographie. Par E. Coupy. de Émile Coupy (1868)

-  La dernière année de Marie Dorval, Alexandre Dumas 

 - Lettres pour lire au lit : Correspondance amoureuse d'Alfred de Vigny et de Marie Dorval, 1831-1838

 - Comédiennes : Les actrices en France au XIXe siècle de Anne Martin-Fugier

- Théophile Gautier Histoire du romantisme

- Marie Dorval : grandeur et misère d'une actrice romantique par A Gaylor . 

- Histoire de ma vie / George Sand : vol. 9

 et  les archives Gallica et BNF

Ruy Blas et Victor Hugo

 

 Ruy Blas de Victor Hugo

 La Reine de Ruy Blas et les costumes de scène

 

 

mardi 23 octobre 2012

George Sand : Cora, une satire du romantisme


 Théodore Chasseriau

Cora est un très court roman de George Sand. Il paraît en 1833, la même année que Lélia. Certes, ce n'est pas une oeuvre majeure dans l'immense production littéraire de l'écrivaine mais on y découvre une plume alerte, assez méchante envers les moeurs provinciales et pleine d'ironie envers les passions amoureuses. L'utilisation de la première personne entretient une ambiguïté. C'est sans nul doute le jeune homme qui dit "je" mais parfois on a l'impression que l'auteure se substitue à lui surtout quand il s'agit de s'amuser aux dépens du jeune homme tout en pratiquant l'auto-dérision. Il me semble à cet égard significatif que l'écrivain et son personnage portent le même prénom.

Georges est une jeune homme candide qui revient de l'île Bourbon et n'est pas trop au fait des coutumes des petites villes de Province française. Il a trouvé du travail dans l'administration des postes. Cependant, bien vite, il se fait admettre dans la société et il rencontre au bal une belle jeune fille nommée Cora dont il tombe follement amoureux. Mais Cora ne répond pas à son amour.


 George Sand

Une critique de la ville provinciale

George Sand pratique à l'égard de la petite ville de province qu'elle ne nomme pas un ironie certaine qui s'étend, avec plus de tendresse, à son héros dont la naïveté l'amuse.
L'apparition d'une nouvelle figure est un événement dans une petite ville, et, quoique mon emploi fût des moins importants, pendant quelques jours je fus, après un phoque vivant et deux boas constrictors, qui venaient de s'installer sur la place du marché, l'objet le plus excitant de la curiosité publique et le sujet le plus exploité des conversations particulières
Les exigences de la mode et ses ridicules sont ainsi dénoncés. Les habitants la petite ville le méprisent tant qu'il n'est pas habillé à la française;  tout le monde  se moque de sa tenue vestimentaire mais l'apprécie quand il se vêt d'une manière qu'il juge pourtant ridicule! L'habit fait le moine, il devient alors fréquentable.
 La satire du bal provincial est aussi très nette, ce qui fait ressortir l'ingénuité du jeune homme prêt à tout admirer dans son enthousiasme juvénile :
La salle était un peu froide et un peu sombre, un peu malpropre; les banquettes étaient bien tachées d'huile ça et là, les quinquets jouaient bien un peu, sur les têtes fleuries et emplumées du bal, le vieux rôle de l'épée de Damoclès, le parquet n'était pas fort brillant, les robes des femmes n'étaient pas toutes fraîches(…) et pourtant c'était une charmante fête, une aimable réunion…

Une satire du romantisme

Jeune romantique Désiré François Laugée

George Sand s'amuse aussi en faisant de son personnage un jeune romantique rêveur, tellement nourri de lectures qu'il perd de vue la réalité, idées romantiques qu'il transforme parfois en clichés. Ainsi quand il parle du suicide et du poison dans une coupe, il s'interrompt :
 Je dis coupe parce qu'il n'est pas séant et presque impossible de s'empoisonner dans un vase qui porte un autre nom quelconque.

Il me rappelle Théophile Gautier, Gérard de Nerval et leurs amis, jeunes romantiques exaltés, en train de boire dans un crâne que Gérard a volé à son père, chirurgien aux armées!.
 Le jeune homme s'exalte en comparant son amoureuse qui est fille d'un épicier à une "reine espagnole", à "l'ange de Rembrand" et en faisant l'héroïne d'un roman du "grand" Walter Scott, la Juliette de Shakespeare ou un être magique issu des contes d'Hofmann :
Pour mon malheur aucune créature sous le ciel ne semblait être un type plus complet de la beauté fantastique et de la poésie allemande que Cora aux yeux verts et au corsage diaphane.

L'écrivaine ménage même une digression pour disserter des goûts littéraires de la jeunesse actuelle en opposition à ceux des vieux bourgeois. Là encore elle me rappelle le Gautier du petit Cénacle!

La cristallisation amoureuse

aquarelle de MAG  : la cristallisation (source)

Sand décrit avec une précision admirable le coup de foudre ressenti par le jeune homme, autrement dit le processus de cristallisation de l'amour comme si elle s'était imprégnée du texte de Shendhal :
Aux mines de sel de Salzbourg, on jette dans les profondeurs abandonnées de la mine un rameau d'arbre effeuillé par l'hiver ; deux ou trois mois après, on le retire couvert de cristallisations brillantes (…) Ce que j'appelle cristallisation, c'est l'opération de l'esprit, qui tire de tout ce qui se présente la découverte que l'objet aimé a de nouvelles perfections  écrit Stendhal.

Voilà l'application de cette analyse à notre héros Georges dans les sentiments qu'il éprouve pour Cora:
Elle était extraordinairement brune pour le climat tempéré où elle était née; mais sa peau était fine et unie comme la cire la mieux moulée.

Quand on sait que, au XIXe siècle, la blancheur du teint est un critère de beauté absolu, on comprend combien le processus d'idéalisation est puissant!

La cristallisation donne lieu à des situations cocasses : Quand Georges s'aperçoit que Cora lit des romans sans valeur et qu'elle est inculte: "je rentrai chez moi enthousiasmé de Cora dont l'ignorance était si candide et si belle. 
Quand Cora lui tend un billet, il croit à une déclaration d'amour alors que c'est une note d'épicerie, il en tombe presque malade et puis : "Ingrat! pensais-je, tu te révoltes parce qu'un mémoire de savon et de chandelle a été rédigé et présenté par Cora, tandis que tu devrais baiser la belle main

Un roman d'initiation

Le roman est donc un roman d'initiation amoureuse où Georges,"de nature inflammable et contemplative" va faire connaissance de l'amour et de ses revers. Cette expérience va le transformer et peut-être lui ôter sa naïveté et sa sincérité en tout cas ses illusions. Sand fait preuve d'une connaissance assez désabusée de la nature humaine et la fin du roman est bien pessimiste. Si le jeune homme a beaucoup souffert, la femme mariée et mère ne s'en sort pas mieux. La peinture de la condition féminine en province au XIXe siècle n'est pas enviable!





vendredi 24 février 2012

Invitation au romantisme : George Sand


George Sand

Si j’étais garçon, je ferais volontiers le coup d’épée par-ci, par-là, et des lettres le reste du temps. N’étant pas garçon je me passerai de l’épée et garderai la plume, dont je me servirai le plus innocemment du monde.   George Sand Correspondance (1835)

 De temps en temps, je vous invite à aller voir de blog en blog les billets écrits dans le cadre du challenge romantique afin d'en découvrir les richesses et trésors, un voyage dans l'univers romantique de la blogosphère.

Pour ce challenge Romantique, un écrivain s'imposait et se devait d'être mise en avant. Il s'agit de George Sand qui a connu un moment de gloire littéraire en France de son temps mais a ensuite été méconnue, dénigrée, étouffée jusqu'à maintenant parce qu'elle était femme et berrichonne autrement dit "régionaliste", deux tares impardonnables en France.  Il faut dire aussi qu'il y avait bien autres choses qui gênaient (et qui gênent encore!) en elle, ses prises de position socialistes, la défense des pauvres, des femmes, ses idées égalitaires, son désir de peindre la beauté du peuple. Et puis il y a sa vie! Son divorce, son indépendance, ses vêtements d'homme, ses amants! Quel scandale! Une femme libre et qui se dit l'égale des hommes!
Je conçois et j'admets que l'on puisse ne pas apprécier l'idéalisme de George Sand, son romantisme utopique mais à une condition, c'est qu'on l'ait lu. On la juge en général à partir de deux ou trois romans alors qu'elle en a écrit une centaine, explorant tous les genres, du roman champêtre, au roman social, politique, historique, fantastique, aux contes folkloriques, au théâtre, à son immense correspondance!
Nous sommes quatre pour l'instant à avoir publié des billets sur cette écrivaine dont on pense que le XXI siècle sera peut-être enfin son siècle : George, Cleanthe, L'Ogresse de Paris et moi-même.
 
 Mais laissons d'abord la parole à George qui la connaît si bien et qui l'aime tant. Je lisais  dans son blog Les Livres de George un  billet intitulé George Sand vue par Emile Zola où l'écrivain naturaliste la comparant à Balzac qu'il admire, lui reprochait  son idéalisme et la trouvait dangereuse pour les jeunes gens et surtout pour les femmes.
Ces livres ouvrent le pays des chimères, au bout duquel il y a une culbute fatale dans la réalité. Les femmes, après une pareille lecture, se déclareront incomprises, comme les héroïnes qu’elles admirent [...] Combien de femmes ont trompé leurs maris avec le héros du dernier roman qu’elles avaient lu! 

Voilà le beau plaidoyer de George (la nôtre) et sa déclaration d'amour à celle du XIXème siècle :

 Car si on peut reconnaître que l’œuvre de Sand témoigne d’une vision idéaliste, voire parfois totalement utopiste, il n’en reste pas moins, que cette utopie prend appui sur une observation réaliste du monde qui l’entoure. Placer ses romans dans son Berry natal, parler des paysans qu’elle côtoyait tous les jours, rendre compte de ses aspirations socialistes est aussi une façon de dire la vérité, mais non pour la montrer dans sa crudité, mais pour tenter de créer un monde meilleur, plus équitable, et égalitaire. Alors, certes George Sand n’est pas une romancière réaliste, mais ses romans ne sont pas seulement des rêves dangereux pour les femmes, et ses prises de position politique, ses combats socialistes, ses engagements montrent assez à quel point elle était de plein pied dans son siècle. Zola engage un duel entre deux auteurs, un combat perdu d’avance pour Sand. Et finalement Émile Zola s’est trompé, puisqu’en 2011 George Sand est encore lue, étudiée, rééditée et si elle reste méconnue ce n’est pas à cause de la faiblesse de ses romans, mais bien parce que depuis deux siècles pèsent sur elle cette interprétation erronée de son œuvre.
Émile Zola, Honoré de Balzac, George Sand sont trois auteurs majeurs du XIXème siècle, trois auteurs clefs et symptomatiques de l’évolution du roman durant ce siècle. Il ne s’agit plus aujourd’hui de les faire s’affronter pour savoir qui va gagner ou perdre, mais de les lire pour ce qu’ils sont. Qui a raison qui a tort, qu’importe, chacun donne sa vision de la réalité et c’est, après tout, ce que l’on demande à un auteur, nous faire partager sa vision du monde.

Lire l'article complet ici  

Et n'oubliez pas que George a ouvert un challenge George Sand illimité.

Indiana (1832)


 Chez George  : Aujourd’hui partons à la découverte du premier roman écrit par George Sand sous son pseudonyme. Après un roman écrit avec son amant Jules Sandeau, Aurore Dupin, publie donc Indiana, et, sur les conseils d’un ami, signe pour la première fois de son pseudo George Sand. Mais d’où vient ce pseudonyme ? ICI 

Chez Claudialucia : Ceux qui m'ont lu sans prévention comprennent que j'ai écrit Indiana avec le sentiment non raisonné, il est vrai, mais profond et légitime, de l'injustice et de la barbarie des lois qui régissent encore l'existence de la femme dans le mariage, dans la famille et dans la société. ICI

Valentine (1832)


Chez George : Valentine fait partie des romans de jeunesse de George Sand. Après la parution de son premier roman Indiana, elle a publié des textes courts, Valentine est donc un retour au roman. Les années 1830 marquent l’arrivée de la seconde génération de romantiques. George Sand a 24 ans quand paraît Valentine. ICI

Leone Leoni (1834)


 Chez George : Leone Leoni est un roman écrit pendant le séjour de George Sand à Venise avec Musset. Sand précise dans la préface du roman les circonstances de l’écriture de ce roman, qui semble intrinsèquement liées à sa situation personnelle :
"Étant à Venise par un temps très-froid et dans une circonstance fort triste, le carnaval mugissant et sifflant au dehors avec la bise glacée, j’éprouvais le contraste douloureux qui résulte de notre souffrance intérieure, isolée au milieu de l’enivrement d’une population inconnue". ICI

Journal intime (1834)

Chez GeorgeCe journal rend donc compte essentiellement du désespoir de Sand face à cette rupture et au désintérêt de Musset pour elle. On y lit la souffrance, le manque, le désespoir de n’être plus aimée et d’aimer toujours pourtant, la passion charnelle aussi. ICI

Simon (1836)


Chez George : Comme le veut la période romantique, le roman porte un titre centré sur le prénom du personnage principal. Cette coutume lancée par Chateaubriand (René), Mme de Staël (Corinne ; Delphine) ou encore Benjamin Constant (Adolphe) eut cours essentiellement durant la première période romantique et George Sand ne déroge pas à la règle puisque la plupart de ses premiers romans portent un titre-prénom, ce qui devait bien l’arranger, elle qui avait tant de mal à trouver un titre pour ses œuvres. Pourquoi un prénom? Car la période romantique s’intéresse au destin individuel d’une âme plongée dans l’Histoire.
Le roman court sur une période allant de 1824 à 1830, période donc antérieure à l’écriture du roman, et période romantique s’il en est ICI

 Mauprat (1837)


 Chez George : Avec ce roman, on pénètre dans les romans gothiques de George Sand. La noirceur de Tristan et de ses fils que décrit George Sand nous rappelle les romans d’Ann Radcliff voire de Sade! Mais on y lit aussi l’influence de Jean-Jacques Rousseau. Mauprat est écrit entre 1835 et 1837, le roman paraît en 1837. Sand choisit le cadre du Berry, son pays, dont elle connaît tous les recoins. C’est un roman clef dans l’œuvre de George Sand qui met en scène un personnage féminin, là encore, caractéristique de la vision féminine de Sand. Edmée de Mauprat est une jeune fille instruite et fine, sans doute l’une des premières héroïnes sandiennes à prendre une telle ampleur. ICI 

Chez Claudia : Quand on lit George Sand, on a toujours l'impression de la redécouvrir tant les genres qu'elle explore sont différents. Avec Mauprat, nous sommes en plein romantisme, un roman gothique avec une histoire d'amour et de mise à l'épreuve, des nobles sinistres perpétrant leurs méfaits derrière les fortifications de leur château, des brigandages, des meurtres...
Récit d'aventures, Mauprat est aussi un roman où l'on retrouve  tous les thèmes sérieux chers à l'écrivain. George Sand aborde ici le thème de l'éducation mais, si elle est rousseauiste et admire l'Emile, contrairement à Rousseau, elle est persuadée que l'homme n'est pas naturellement bon et que l'éducation a une fonction civilisatrice.
ICI


 Les Compagnons du tour de France (1840)


 Chez George : Avec ce roman, George Sand marque l’ancrage politique du romantisme, un romantisme social tourné vers la cause du peuple, tel que Victor Hugo le développera également dans Les Misérables. George Sand montre que l’artisan est aussi un artiste du quotidien.
Parallèlement, le roman rend compte de deux histoires d’amour : la première entre Pierre et Yseult, la seconde entre Amaury et Joséphine, la jeune cousine d’Yseult. Deux amours aussi différentes l’une que l’autre, le premier établi sur une entente philosophique et intellectuelle, le deuxième établi davantage sur la sensualité, avec toutes les conséquences que celle-ci peut entraîner.
ICI

Chez Claudia
: Pour écrire sur les Compagnons, George Sand s'est énormément documentée en s'appuyant notamment sur Le livre du compagnonnage d'Agricol Perdiguier, Compagnon sous le sobriquet de Avignonnais la Vertu -natif d'Avignon donc- menuisier, écrivain et député. George Sand reçut Agricol Perdiguier chez elle. Instruit, lettré, auteur de chansons et de poèmes, il était convaincu que l'instruction et la lecture sortiraient le peuple de l'obscurité. Il oeuvrait pour que les sociétés de compagnonnages se réconcilient et se solidarisent. Déjà gagnée au "socialisme humanitaire" par l'influence de Pierre Leroux, George Sand écrit alors en 1840 : Le compagnon du Tour de France, un roman social très fortement engagé. ICI

 Consuelo et La comtesse de Rudolstadt (1843)


Chez Cleanthe : On ne dira jamais assez qu'il faut ranger George Sand parmi les meilleurs écrivains du XIXème siècle français. Une auteure à effets, dans le goût du roman-feuilleton où elle excelle. George Sand ne s'économise pas, c'est parfois ce qu'on lui reproche, d'en faire trop. Mais c'est vraiment un plaisir, quand on est un lecteur, d'être mené ainsi par le bout du nez sur près de 1500 pages. ICI
 
Chez Claudialucia : La culture de George Sand au niveau historique et son érudition musicale qui nous transportent d'un pays à l'autre est un des plaisirs du roman. Mises à part quelques longueurs et répétitions dans le récit, j'ai aimé son aspect initiatique et picaresque quand les deux jeunes gens sont sur les routes et gagnent leur vie en chantant et en jouant de la musique. Les personnages qu'ils rencontrent sont bien campés. George Sand a l'art du portrait satirique aussi bien sur le plan physique que moral. Elle sait mettre en avant avec beaucoup d'humour le trait caricatural, les travers, les faiblesses, les vanités de chacun tout en rendant la complexité de l'âme humaine. ICI

Le péché de M. Antoine (1845)



Chez George : Le Péché de Monsieur Antoine est le dernier roman socialiste écrit pas George Sand. Elle commence la rédaction en juillet 1845, le roman paraît en feuilletons d’octobre à novembre 1845.
Le thème est donc engagé. George Sand est dans sa grande période socialiste, elle crée plusieurs journeaux, est amie avec Pierre Leroux, philosophe, réfléchit à une solution favorable au bien-être d’un peuple en souffrance. Elle dénonce ou du moins critique le Saint-Simonisme, mais aussi certaines idée de Fourier, donne son opinion sur les Associations…
ICI

Chez Claudialucia : Un jeune étudiant, Emile, voyage dans une région accidentée et sauvage aux confins de la Marche et du Berry, lorsqu'un violent orage se déchaîne. Obligé de s'arrêter, il rencontre un paysan, Jean Japeloup, qui l'amène s'abriter au château de Châteaubrun. Là au milieu des ruines, dans une aile restaurée, vivent M. Antoine de Chateaubrun, sa fille Gilberte, la mère Janille, la vieille gouvernante. Tout ce monde vit là, démocratiquement, sur un plan d'égalité et d'amitié, mangeant à la même table. Emile va être tout de suite séduit par cette famille dont les moeurs correspondent tant à ses idées socialistes. ICI

Histoire de ma vie (1855)


 Chez George : Dans son autobiographie, Histoire de la vie, George Sand développe la théorie romantique à laquelle elle adhère : "En résumé, idéalisation du sentiment qui fait le sujet, en laissant à l’art du conteur le soin de placer ce sujet dans des conditions et dans un cadre de réalité assez sensible pour le faire ressortir, si, toutefois, c’est bien un roman qu’il veut faire".  ICI

Les dames en vert 1857



Chez George  : Ce court roman joue allègrement sur la veine fantastique. Des fantômes, l’angoisse, des apparitions, une statue qui prend vie, et un étrange manuscrit ! Mais comme toujours avec George Sand, le roman dit plus, va plus loin que la simple petite histoire.
Situer l’action en 1788 a bien sûr son importance, d’autant plus pour George Sand. Son père, avant elle, avait une âme de révolutionnaire. Il défendait les idées de la Révolution, et George Sand a marché dans ses pas
. ICI 

Chez CleantheCe récit, tout en faux semblants et en chausse-trappes, est un petit bijou d'ironie qui montre que, même assagie, George Sand n'a rien perdu de la verve de sa jeunesse. Publiée la même année que Mademoiselle La Quintinie, roman charge croisant la question du mariage et celle de la religion, ces Dames vertes donnent, sous la forme d'une histoire de fantômes somme toute assez traditionnelle, un récit passionnant mêlant environnement fantastique et préoccupations sociales. ICI

L'orgue des Titans (1873)



Chez Claudia : L'orgue des Titans, récit fantastique, donne son titre au recueil de contes de George Sand paru à l'école des Loisirs/ classiques. Tous sont issus de deux ensembles : Les contes d'un grand-mère et Les légendes rustiques.
Ce recueil  témoigne de l'intérêt du romantisme pour le folklore et les traditions et aussi pour le fantastique. ICI
Le musée de la Vie Romantique


L'ogresse de ParisLe salon du peintre Ary Scheffer, réunit alors  le cercle romantique des années 1830. Le musée de la Vie Romantique conserve aujourd'hui les souvenirs de l'artiste, meubles, portraits, mais également ceux de son amie Georges Sand. ICI