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mercredi 11 décembre 2019

Elias Lönnrot : Le Kalevala (1)

Vaïno Blomstedt :  Le Kalevala

 Le Kalevala est une épopée qui relate les faits et geste des Dieux et des Héros de la mythologie finlandaise. Ce long poème épique a été publié par Elias Lönnrot en 1835 puis dans une autre édition réaugmentée en 1849. Elias Lönnrot, médecin, écrivain, linguiste, folkloriste, a voulu donner au peuple finlandais, libéré de la domination suédoise, une oeuvre unificatrice, susceptible de réunir toutes les classes sociales autour de la notion de patrie, à la recherche d’une identité commune qui redonne à la langue et à la littérature finnoises ses lettres de noblesse..
Elias Lônnrot
Pour composer cette oeuvre, Elias Lönnrot (1802-1884 ), appelé aussi Le Homère finnois, a récolté pendant des années, les récits, contes populaires, et les chants traditionnels auprès des paysans et des bardes qui restaient très attachés aux croyances anciennes, caractère magique de la nature, chamanisme… bien que les suédois aient converti le peuple finlandais au catholicisme. C’est en Carélie qu’il collecte le plus de chants nouveaux.
Les chants recueillis ne remontant pas au-delà du XIII siècle, époque à laquelle la Finlande était déjà christianisée, certains dieux de la mythologie finlandaise ont parfois des ressemblances avec le dieu et les saints chrétiens.


Heikki W. Virolainen

Ainsi, lors de ma visite au musée Ateneum à Helsinki, la statue d'un artiste contemporain Heikki W. Virolainen représentait Marjata, une jeune fille fécondée par une baie miraculeuse qu'elle avait avalée. Toujours vierge, elle porte un enfant mais ses parents ne la croient pas et la chassent. Elle  ne trouve personne pour lui laisser l'usage d'une étuve pendant son accouchement. C'est dans le froid, sur le sol gelé, qu'elle met au monde un garçon miraculeux qui survit, réchauffé par le souffle d'un cheval, enfant qui révèlera une précocité et des dons étonnants.



  C'est la fin de l'épopée. Dans le dernier chant, le vieux barde Vaïnamoinen, le héros principal du Kalevala, est chassé par le Christ que Marjata (Marie) a mis au monde.

Akeselis Gallen Kallela : Väimöinen chassé par le christianisme
 
Il y a deux régions antagonistes dans le récit : le sud, le Kalevala, qui est le domaine du géant Kaleva où vivent les héros Vaïnämöinen, Ilmarinen, Lemminkäinen. Cela pourrait être La Carélie, et le Nord, sombre et froid, le Pojhola, (appelé aussi Osmola, Sariola, Pimentola..) pourrait être la Laponie. Mais il s'agit d'une interprétation de Lönnrot. Certains pensent  que le Pohjola est peut-être le monde d'en dessous, celui des défunts. Mais le monde des morts existent dans la mythologie finlandaise. C'est Tuonela. Le suffixe la indiquant l'appartenance, la maison, il s'agit donc du domaine de Tuoni, le dieu de ma mort.
Le cygne de Tuonela est une musique composée par Sibélius en hommage à ce passage du Kalevala qui voit le héros Lemminkaïnen chasser le cygne noir jusqu'à Tuonala et périr.

Carte réalisée pour un jeu Fantasy sur la mythologie nordique (ici)
 
 C’est à Pohjola que vit la sorcière Louhi, reine des neiges et de la glace, et ses splendides filles à marier qui attirent nos héros sur ces terres dangereuses, obscures et glaciales.

Serguei Minin ( 1901_1937) artiste russe Louhi : Reine de Pojhola (ici)
Le Kalevala n'est pas une oeuvre facile à lire, c'est du moins ce que j'ai éprouvé. Il faut dire qu’avec ses 22800 vers, souvent répétitifs, et ses 50 chants (runo), il requiert un peu de patience ! On peut être aussi surpris par sa composition erratique, on passe du récit d’un héros à un autre pour revenir au précédent ou à un nouveau. Il ne semble pas y avoir de plan très défini dans la construction mais plutôt des ajouts, pas de cohésion interne, parfois des incohérences dans le récit. Ceci, certainement pour mieux respecter la tradition orale de ces chants qui venaient de différentes régions de la Finlande et présentaient de nombreuses variantes.

Dans la traduction due à Jean-Louis Perret, j'aime beaucoup le mètre employé, l'octosyllabe, intime, qui sait faire voir le chagrin d'une jeune fille qui ne veut pas se marier, léger, aérien pour décrire la beauté et la poésie attachées à toutes choses et l’animisme de la nature.

Hélas ! mère qui m'a portée,
Je pleure sur beaucoup de choses,
Sur la beauté de mes cheveux,
Sur l'abondance de mes tresses,
Sur la finesse de mes boucles,
Car jeune je dois les cacher,
Les voiler quand je pousse encore.
 Je pleurerai toute ma vie
La tendresse du chaud soleil,
La douceur de la belle lune,
La magnificence de l'air,
Car jeune, je dois les quitter,
Les oublier, petite enfant,
devant le chantier de mon frère, 

à la fenêtre de mon père.


Pourtant, j’ai été surprise dans le Kalevala, par le procédé répétitif qui fait que les vers sont repris en boucle, autant de fois qu’il paraît nécessaire, les vers suivants répétant les précédents parfois avec des termes différents mais souvent de manière exactement semblable, créant une sorte d’incantation. A ce propos, Jean Louis Perret écrit dans la préface :

L’emploi de ce procédé poétique propre à tous les peuples primitifs est constant, mais pas toujours très strict dans Le Kalevala. Il a contribué à donner à la poésie populaire finnoise son caractère imprécis, vague, qui frappe si vivement le lecteur étranger. »

J’ai aimé la musique qui s’élève de cette oeuvre mais ce procédé a fini par me lasser car le récit avance avec beaucoup de lenteur. Ce qui fait que j’ai été partagée entre admiration, plaisir de lecture - le style est vraiment très beau, parfois naïf et touchant, poétique, lyrique - , et le besoin de m'arrêter de lire ! Parfois, oui, je l'avoue, j'ai sauté des passages mais, en fin de compte, j'ai terminé le lecture de l'ouvrage.
Je me demande comment les Finlandais lisent ce livre qui est une oeuvre majeure de leur littérature. Peut-être sont-ils moins surpris que moi par la composition du poème, par les noms ( que je peine à retenir!) de ces dieux ou héros qui changent souvent de forme, peut-être aussi que la mythologie de leur pays leur étant familière, ils ont eu moins de difficulté que moi pour entrer dans ce livre?
Pourtant je ne regrette pas de l’avoir lu pour plusieurs raisons. Si vous allez en Finlande comme je l’ai fait, que vous avez admiré ces splendides forêts de pins et de bouleaux à perte de vue et ces lacs, innombrables, qui reflètent la lumière du ciel, Le Kalevala vous éclaire sur les finlandais, leur rapport profond avec la nature et la forêt et les animaux sauvages. Il dit beaucoup aussi sur les vieilles coutumes, parfois encore bien vivante comme celle du sauna, de son importance vitale, par exemple : les femmes accouchaient dans l'étuve, l'action émolliente de la chaleur permettant une délivrance plus aisée. Nous apprenons aussi beaucoup sur le sort des femmes, la jeune fille a le droit de porter ses cheveux nattés, celle qui est mariée doit mettre un voile sur la tête et se consacrer entièrement à son mari. Elle peut être répudiée ou tuée si elle se comporte légèrement. On assiste aux travaux de la ferme, au travail du forgeron, avec parfois un peu de magie en prime. Les héros eux-mêmes labourent leur terre même s'ils se font un peu aider par Ukko, le dieu suprême ou si, comme Ilmarinen, il laboure un champ de vipères pour obtenir la main de la fille de Louhi.
Le kalevala vous dit aussi comment ce peuple qui a été pendant des siècles sous la domination de la Suède puis de la Russie, refusant même de parler sa propre langue, a pu se construire une identité autour de cette oeuvre fondatrice. Enfin, vous ne pouvez comprendre vraiment la culture finlandaise, musique, théâtre, sculpture, et la peinture en particulier, si vous ne connaissez pas Vaïnamöinen, Ilmarinen, Lemminkäinen et Kullervo ! L'un des principaux peintres qui a illustré le Kalevala est Akselis Gallen Kallela extrêmement impliqué dans le mouvement de renouveau nationaliste du XIX siècle mais il y en a bien d'autres et pas seulement finlandais.

Nicolaï Kochergin : Louhi et une de ses superbes filles

Akselis Gallen Kallela : Le départ vers Tuonela, le royaume des morts


Le cygne de Tuonela : Jean Sibélius (Karajan)

Etant donné la longueur du poème épique, je ne vais pas vous le résumer !  Je vais seulement vous parler des quatre héros principaux, et des dieux les plus importants dans un prochain billet.


samedi 7 décembre 2019

Arto Paasilinna : La douce empoisonneuse et Le cantique de l'apocalypse joyeuse

La douce empoisonneuse

Et c’est vrai qu’elle est douce cette empoisonneuse et, d’ailleurs, elle ne le fait même pas exprès d’empoisonner et à la limite… peut-être n’a-t-elle pas le choix, à la différence d’Hamlet, entre empoisonner ou ne pas empoisonner !
Je voudrais vous y voir ! Si comme Linnea, veuve du colonel Rabvaska, amoureuse de son jardin et de son chat, vous aviez chaque mois la visite de votre voyou de neveu flanqué de ses sinistres amis et que ceux-ci en profitaient pour racketter votre modeste retraite, vider votre garde à manger, vous insulter, sinistrer votre maison, abimer votre jardin, s’attaquer violemment à votre chat … Que feriez-vous ? Porter plainte ? Oui, c’est ce qu’elle finit pas faire après des années de patience. Mais la police a bien autre chose à faire (ou à ne pas faire) et désormais vous êtes poursuivie par la bande qui veut vous tuer !
Tel est le thème du livre au cours duquel Arto Paasilinna se plaît, comme d’habitude, à distribuer des coups de griffe à la police, l’armée, la société, qui assiste, indifférente, au martyre de la vieille dame et, bien sûr, à tous ceux qui, en âge de travailler, préfèrent vivre au dépens d’autrui. Avec son humour noir habituel, il met en scène sa douce héroïne (qui sème les cadavres sur son passage) avec une candeur et une probité qui attirent la sympathie ! Et oui, le livre est amusant, on rit avec l’empoisonneuse et l’on se révolte contre les voyous qui attaquent ainsi une pauvre vieille dame sans défense ! (sans défense… ?)  Un livre réussi !


Le cantique de l’apocalypse joyeuse

Le roman Le cantique de l'apocalypse joyeuse commence bien et Arto Paasilinna, en bon anar, se fait un plaisir de nous raconter la fin du « grand brûleur d’églises » Asser Toropâinen, vieux coco entrant dans sa quatre-vingt dixième année.  Sur son lit de mort, ce dernier demande à son petit-fils de devenir président d’une fondation qui aura pour but de construire une grande église en bois sur les terrains qu’il lui a légués. Conversion tardive ?  Peur de l'enfer ?  Désir d'expiation ? Non ! Le grand père a juste un sens particulier de l'humour !
Le roman qui commence à notre époque deviendra ensuite une oeuvre de science-fiction décrivant la troisième guerre mondiale et la fin de notre civilisation. Plus de gouvernement, le chaos s’installe, des hordes de miséreux errent de pays en pays. Seule la communauté fondée autour de l’église en bois va réussir à survivre grâce à une gestion économique saine basée sur le travail dans la nature et sur le partage et la solidarité.
 J’ai moins aimé ce livre. S’il y a de bons moments assez savoureux, j’ai trouvé qu’il tournait un peu trop à l’utopie, à la démonstration écologique, c’est à dire au sérieux. On comprend assez vite ou l’auteur veut en venir et les longueurs finissent par lasser..

mardi 3 décembre 2019

Kjell Westö : Un mirage finlandais


Ce roman de Kjell West, Un mirage finlandais a obtenu le prix de littérature du conseil nordique. Et il faut dire qu’il le mérite.Voilà le résumé de la quatrième de couverture mais élagué parce que je trouve qu’il en dit trop.Matilda Wiik est une sténodactylo hors pair. Elle travaille à Helsinki pour l'avocat Claes Thune. Ce soir de mars 1938, le Club du mercredi - un groupe de gentlemen qui se retrouvent chaque mois pour refaire le monde - est réuni dans le cabinet de son patron. Soudain, Matilda reconnaît la voix d'un homme qu'elle aurait préféré oublier...
Le roman est qualifié de « roman à suspense » car nous n’apprenons à qui appartient la voix reconnue par Matilda qu’au dénouement. Et c’est vrai que rester dans l’ignorance tout au long du roman génère un malaise et découvrir qui est, en définitive, ce personnage crée un effet de surprise assez fort. Ce « suspense», donc nécessite de la part de l’auteur une habileté dans la construction du récit et dans la façon de le mener à terme sans rien révéler. Mais ce n’est pas ce qui m’a le plus frappée dans ce roman. Non, c’est d’abord l’aspect historique qui dévoile une période noire de la Finlande en 1918 dont je n’avais jamais entendu parler. C’est ensuite la peinture psychologue des personnages qui sont tous assez complexes, marqués par leur position sociale et leur passé plus ou moins tragique. L’on s’intéresse à leur histoire, la petite, à côté de la grande Histoire, et l’on entre dans leur univers et leurs pensées.
 
Finlande : gardes rouges (photo wikipedia)
La Finlande a été traversée par une guerre civile meurtrière en 1918. En effet, au moment de l’indépendance en 1917, la Finlande qui était alors un Grand duché sous domination russe, voit sa population se diviser entre les Rouges, sociaux démocrates, ouvriers, travailleurs agricoles et les Blancs, paysans, classe moyenne, bourgeoisie. Les Rouges étaient soutenus par les Soviétiques et les Blancs recevaient l’aide de l’armée allemande. 
La guerre dure quelques mois du 25 Janvier au 15 mai 1918 et se termine par la victoire des Blancs; elle fait 39 000 morts dans un pays qui comptait 3 millions d’habitants.
Prisonniers rouges
La répression des Blancs est terrible. Les Rouges enfermés dans des camps de prisonniers meurent de faim, de maladie et de maltraitance.  Kjell Westö place l’action de son récit en 1938, autre période troublée, avec la montée du nazisme et l’approche d’une autre guerre. Les conversations du patron de Matilda et de ses amis ou clients rendent compte du climat délétère qui règne alors, les pro-germanistes sont gagnés par l’idéologie nazie sur fond d’antisémitisme. Kjell Westo a le courage de dénoncer dans ce livre, un scandale lié à la sélection des Jeux olympiques de 1940 qui devaient avoir lieu en Finlande. Deux époques de l’histoire de la Finlande se chevauchent ainsi mettant en scène des personnages qui ont vécu les deux.

 Le personnage de Matilda Wiik est impressionnant. Que se cache-t-il derrière la façade calme et sévère de « la proprette Mme Wiik, de ses gestes parfaitement maîtrisés, de cette apparence nette et classique, cette rigueur dans son travail de parfaite secrétaire qui ne trahit jamais aucun sentiment ? Et qui est cette demoiselle Milja qui lui succède parfois et qui n’en fait qu’à sa tête, folle et fantasque ? et Matilda, prise entre la demoiselle Milja et madame Wiik, n’est-elle pas la femme sensible, certes tourmentée et malheureuse, mais que l’on peut encore atteindre ? C’est ce que se demande son patron, l’avoué Clas Thune. Celui-ci est un patron fort sympathique, un peu paumé, pas très heureux lui non plus, qui essaie de comprendre ses employés et s’intéresse à l’être humain en dehors de toute considération sociale, même si son éducation bourgeoise ne lui permet pas de se sentir à l’aise avec des ouvriers. Les rapports sociaux sont  très finement observés et décrits.
Tous les personnages secondaires sont intéressants, denses, complexes et font revivre cette société d’entre deux guerres en nous menant vers un dénouement auquel on ne s’attend pas forcément… ou peut-être que si !

Un très beau livre!

vendredi 29 novembre 2019

Finlande, Helsinki : Musée Ateneum le XX siècle (10)

Vilho Lampi : Nocturne à Laminka

Je n'ai pas eu de véritable coup de coeur  au musée Ateneum en ce qui concerne la peinture du XX siècle, et ceci, d'autant plus que, bien souvent, n'était exposée qu'une seule oeuvre du peintre présenté. Il était donc impossible  de le connaître vraiment. Je n'aime pas trop non plus la période cubiste finlandaise qui me paraît en retrait par rapport à la peinture française.

Je n'ai donc retenu que quelques oeuvres du XX siècle au musée Ateneum, mes préférées.
Ce paysage de Vilho Lampi (ci-dessus), peintre finlandais (1988 - 1936 ) intitulé Nocturne à Laminka (la ville où il habitait) m'a intéressée. Il me fait un peu penser à la manière de peindre d'Edvard Munch avec ces grandes ondulations, lignes torturées semblables à des vagues. On dirait que le sol n'est pas stable, le ciel semble aussi en mouvement. Impression de déséquilibre.
Tove Jansson : Le  mystérieux paysage
Tove Jansson n'est pas seulement la créatrice de ces délicieuses créatures nommées Moumines. C'est aussi une peintre talentueuse.
Tove jansson : Moumine le troll
 On peut voir son oeuvre à Helsinki au Ham museum que je n'ai pas eu le temps de visiter. Au musée Ateneum, il n'y avait que celle-ci.
Tove Jansson : le paysage mystérieux (détail)
Sulho Sipilä (1895_1949)

Ernar Jolin : Jeune fille
Une peintre suédoise née à Stockholm( 1890-1976). Style expressionniste naïf (c'est ce qu'ils disent!) ?

Gosta Diehl  : Village bombardé
Gosta Diehl (1899_1964) Je n'aime pas trop les cubistes, disais-je, mais celle-ci me plaît.

Enfin des murs entiers couverts de portraits ou auto-portraits donnaient une impressionnante rétrospective des artistes finlandais, ce qui m'a permis de découvrir l'étendue de mon ignorance !






vendredi 22 novembre 2019

Finlande, Helsinki : Musée Ateneum le XIX siècle (9)

Akseli Gallen-Kallela : Portrait de sa fille : La petite Anna

Akseli Gallen-Kallela

 

Akseli Gallen-Kallela est un peintre et graveur finlandais de la fin du XIXᵉ et du début du XXᵉ siècle.  Son œuvre est associée aux styles nationaliste romantique finlandais*, symboliste et réaliste.
Il est certainement le peintre finlandais le plus célèbre peut-être parce qu'il est celui qui incarne le plus le sentiment d'éveil nationaliste que vivait la Finlande devenue Grand duché autonome sous domination russe, au début du XIX siècle. De langue suédoise, il a appris le finnois avec les domestiques de son père, une langue qui était considérée avec mépris par la bourgeoisie de l'époque. Dans un autre billet, je vous présenterai ses tableaux illustrant le Kalevala, épopée composée au XIX siècle par Elias Lönnrot à partir des chants et récits populaires de la mythologie finnoise. Mais il est aussi portraitiste et paysagiste.

* le mouvement romantique national des pays nordiques qui se développe à la fin du XIX siècle mais aussi au début du XX est à distinguer du mouvement romantique des autres pays européens qui apparaît au début du XIX siècle, notamment en France, après le grand bouleversement de la société par la révolution et l'aspiration à la liberté.
 
Akseli Gallen-Kallela : l'enfant et la corneille

Pekka Halonen

Pekka Halonen : paysage d'hiver  musée Ateneum
Pekka Halonen, c'est le peintre que j'avais le plus envie de rencontrer pendant mon voyage en Finlande mais je ne le connaissais qu'à travers des reproductions. 
J'aime énormément ses paysages de neige et de bouleaux qui correspondent si bien à l'esprit de la Finlande, qui font sentir le froid, la matière et qui évoque les sensations que j'ai ressenties devant les magnifiques paysages de ce pays.
Hélas ! J'ai été déçue car il y avait peu de tableaux (quatre, je crois) de lui exposés au musée Ateneum alors que ce dernier en possède une centaine, paraît-il ! Moralité, si vous voulez voir l'oeuvre de Pekka Halonen, allez dans sa maison-musée au bord du lac Tuusula, à une cinquantaine de kilomètres au nord d'Helsinki. Si j'en crois ma fille, le lieu est magique et l'oeuvre de Pekka Halonen, splendide ! Moi, je n'ai pas eu le temps de m'y rendre!
Pekka Halonen naît à Lapinlathi en 1865 dans une famille d'agriculteurs et meurt à Tuusula en 1933. Son oeuvre est associée au mouvement romantique national et au Carélianisme, mouvement de la fin du XIX siècle qui voit en la Carélie l'une des régions de Finlande qui a su le mieux conserver son identité à travers les siècles d'occupation suédoise et russe.

Pekka Halonen musée Ateneum

Pekka Halonen :  Bord de lac (musée Ateneum)

Albert Edelfelt (1854-1905)

Convoi funéraire d'un enfant 1879 (musée Ateneum)

 Albert Eldelfelt est né à Borga (Porvoo ) en 1854 et il est mort dans sa ville natale en 1905. Après avoir fait des études à Helsingfors (Helsinki), il part étudier aux Beaux-Arts d'Anvers, puis à Paris. Là il se tourne vers la peinture naturaliste et se lie d'amitié avec Emile Zola, Alphonse Daudet. Il participe au salon du Champ-de Mars et obtient la notoriété à Paris en s'adaptant au nouveau marché de l'art, c'est dire qu'il abandonne la peinture religieuse et historique. Il peint beaucoup de portraits de commande et des paysages.
Le tableau ci-dessous, Le jardin du Luxembourg  a été peint lors de son séjour parisien en 1887.

Albert Edelfelt : Le jardin du Luxembourg
Il partage désormais son temps entre des séjours à Paris en hiver et en Finlande en été, où il participe au grand mouvement artistique et nationaliste de son pays. Il s'intéresse à la vie quotidienne de ses compatriotes qu'il représente dans des scènes quotidiennes, et, au cours de ses promenades, il chercher à rendre compte de la beauté des paysages de son pays .
Albert Edelfelt :  Coucher de soleil sur le lac de Kaukola (musée Ateneum)
Albert Edelfelt  : Femmes  dehors  à l'église de Ruokolathi (musée Ateneum)
Albert Edelfelt  : Garçon jouant sur la plage (musée Ateneum)

Eero Järnefelt (1863-1937)


Eero Järnefelt :

Eero Järnefelt (détail) : le brûlis

 Ce tableau de Eero Järnefelt est peut-être le plus célèbre de son auteur en Finlande. Il faut dire que la composition en est puissante et le personnage de la petite fille qui nous fixe ne peut laisser indifférent. Son regard a une intensité poignante. Il m'a rappelé le poème de Victor Hugo : "Où vont tous ces enfants, dont pas un seul ne rit ?"

Eero Järnefelt est lui aussi un des artistes du mouvement romantique national. Il est né à Viborg en Russie en 1863 et meurt à Helsinki 1937. Son père et officier dans l'armée russe. Sa soeur est l'épouse de Sibélius. Il fait ses études à l'école des Beaux-Arts d'Helsinki, puis de Saint-Pétersbourg, puis à Paris où il devient l'ami d' Akselli Gallen- Kallela.

Eero Järnefelt

Hugo Simberg

Hugo Simberg : l'ange blessé
Cet étrange tableau avec cet ange blessé porté par deux petits bonhommes aux grosses joues et à l'air mécontent (ou triste), il paraît que le peintre avait prévu des petits diables à la place) est encore une oeuvre très connue et reproduite un peu partout en Finlande. Elle m'a laissée perplexe.  Que veut dire l'artiste ? Quel symbolisme ?


En cherchant sur internet, j'ai vu des fresques de Hugo Simberg peintes sur les murs de la cathédrale de Tampere, représentant des squelettes Les gardiens de la mort ou des squelettes dansant sur le quai avec des jeunes filles. Mais rien de tout cela au musée Ateneum, des tableaux d'une facture plus classique dont ce très beau grand père avec son petit-fils. Ce n'était pas le genre de peinture qu'appréciait Simberg, nous dit-on, mais il fallait obéir au goût du public ! Il continuait cependant de peindre à la manière qu'il aimait des oeuvres où l'imaginaire s'exprimait.
Il était aussi illustrateur de contes.


Le père d'Hugo Simberg et son fils Tom

Magnus Von Wright : Annankatu par un froid matin d'hiver

lundi 18 novembre 2019

Finlande, Helsinki : Le musée d'art Sinebryschoff (8)

Lucas Cranach  l'aîné : jeune femme (détail) musée Sinebrischoff
La Galerie nationale finlandaise à Helsinki  se compose de trois musées : le Musée d'art Ateneum, le Musée d'art contemporain Kiasma ainsi que le Musée d'art Sinebryschoff.

Paul et fanny Sinebryschoff
Le musée Sinebryschoff expose les collections privées de la famille de brasseurs qui y vécut et légua les oeuvres d’art et la demeure à la ville d’Helsinki en 1921.
Le sous-sol est consacré aux photographies et archives qui retracent la vie de cette famille d’origine russe : Nikolaï Sinebryschoff qui fit construire le bâtiment en 1842, son neveu Paul qui collectionna les oeuvres ainsi que sa femme Fanny. La Brasserie Sinebrychoff a fonctionné des années 1800 jusqu'en 1992.
Fanny Sinebryschoff  par le peintre finlandais A. Edelfelt

 Exposition temporaire : Lucas Cranach L'Aîné

Lucas Cranach l'Ancien : Actéon se changeant en cerf
Chaque année le musée Sinebryschoff présente une exposition temporaire. Cette année, le peintre n'est autre que Lucas Cranach l'Ancien dont le musée possède deux oeuvres. Les autres sont prêtées par des établissements européens.

Lucas Maler, dit Lucas Cranach l'Ancien, né le 4 octobre 1472 à Kronach en Haute-Franconie (Allemagne) et mort le 16 octobre 1553 à Weimar (Allemagne), est un peintre et graveur de la Renaissance allemande. Son patronyme dérive de celui de sa ville natale. Il est le père de Lucas Cranach le Jeune (1515-1586).

Les portraits de ses jeunes beautés sont d'un grand raffinement avec leurs vêtement luxueux, aux couleurs chaudes, dont on a l'impression de pouvoir toucher la texture, la douceur du tissu, et les détails de leur coiffure et de leurs bijoux. Ces derniers ont tant d'importance dans l'oeuvre de Cranach que les jeunes filles les portent même lorsqu'elles sont nues. Ils ont inspiré des joailliers allemands lors d'un concours lancé en l'honneur du cinq centième anniversaire de la naissance du peintre. Certaines pièces sont exposées dans le musée ainsi que de grandes photographies de jeunes contemporaines qui les portent.

Lucas Cranach l'Ancien : portrait de jeune femme musée Sinebryschoff

Lucas Cranach l'Ancien : portrait de jeune femme (détail)
Lucas Cranach l'Ancien : portrait de jeune femme (Copenhague)

Kerstin  Mayer : or et perles

L'exposition présente toute une série de Lucrèce se donnant la mort, thème très à la mode, personnage parfois confondu avec Didon. Toutes deux sont représentées en train de s'enfoncer un poignard dans le sein. Pour Didon, c'est par désespoir d'amour quand son bien-aimé Enée fuit Carthage sur les ordres des dieux. Dans le cas de Lucrèce,  la scène est édifiante, moralisatrice. Elle montre qu'une femme violée doit avoir assez de fierté pour ne pas survivre au déshonneur.
 
Lucas Granach l'Ancien: Lucrèce
Lucas Cranach l'Ancien : Didon
Lucas Cranach l'Ancien : musée de Prague 1530
La photo du vieillard embrassant la jeune fille pendant que celle-ci le vole est un oeuvre moralisatrice et caricaturale très populaire à l'époque de Granach, au XVI siècle.  Lui-même en a peint une quarantaine.
Des gravures reprennent des scènes bibliques ou des légendes.

La légende de Saint John Chrysostom
 Lucas Cranach l'Ancien,
Extase de Sainte Marie Madelaine
Enfin des tableaux de Picasso montrent comment il a fait sienne la peinture de Granach, un artiste qu'il admirait.

Picasso : A la manière de Cranach

Picasso : Vénus et Cupidon

Lucas Cranach l'Ancien : Venus et Cupidon voleur de miel (Copenhague)

L'appartement et la collection de Paul et de Fanny Sinebryschtoff


Le salon de réception de Paul et de Fanny Sinebryschoff

Au deuxième étage, nous pénétrons dans les somptueux appartements meublés de la famille. Les oeuvres d’art  sont nombreuses et certaines d’entre elles sont belles mais elles sont difficiles à admirer car elles couvrent des murs entiers de haut en bas et ne peuvent parfois pas être approchées. Paul et Fanny Sinebryschoff se sont surtout intéressés à la peinture du XVII et XVIII siècle. Depuis le legs, des dons ont permis d’enrichir la collection qui couvre plusieurs siècles de peintures, du XIV siècle au XIX siècle et viennent de pays européens divers, peintures suédoises, italiennes, flamandes, néerlandaises, françaises…

Musée Sinebryschoff L'un  de salons XVIII siècle
Le bureau de Paul
Les deux soeurs (peintre flamand inconnu)
Le tableau des Deux Soeurs a été vendu à Paul Sinebryschoff sous la signature de Cornélis de Vos (1584_1651), un peintre baroque flamand que j'aime beaucoup. Il est né à Anvers. Mais il semble que l'attribution soit erronée et que le tableau soit classé maintenant de peintre inconnu.
 
Bureau de Paul : détail
Frans Hals : Jeune garçon riant (bureau de Paul)
Frans Hals né à  Anvers ( 1580_1666) est un peintre baroque néerlandais  considéré avec Rembrandt et Vermeer comme l'un des peintres les plus importants du siècle d'or.

Frans Hals : autoportrait (bureau de Paul)
Frans Luyckx : Portrait d'un jeune garçon (Bureau de Paul)

 Frans Luycx ou Frans Luyckx était un peintre flamand devenu le principal portraitiste de la cour impériale de l'empereur Ferdinand III à Vienne. Il est surtout connu pour ses portraits de la famille de l'empereur et de divers membres des Habsbourg, y compris ses branches autrichienne et espagnole.

Surprise aussi de découvrir un très beau Rembrandt :  

Rembrandt : Moine lisant

Quelques peintres italiens

Giovanni Boccati (1420/1490) : L'adoration des mages (1448)
Giovanni Boccati (1420/1490) : L'adoration des mages(détail)
Giovanni Battista Bertucci : Sainte Catherine (1516)

Jacobo Bassano (1510_1592) : la Sainte famille (1560)

Giovanni Domenico Tiepolo (1727-1804) Les Grecs entrent dans Troie

ou peintres français

Watteau ( 1684_1721) : L'escarpolette
Jean Baptiste Camille Corot : paysage