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dimanche 14 mai 2023

Voyage à Copenhague

La petite sirène

Et oui, je suis là à Copenhague pour une semaine !  
 
Et comme je viens de lire Le roi et l'horloger d'Arnaldur Indridason j'espère bien voir la fameuse horloge d' Isaac Habrecht  -qui se trouve au château de Rosenborg- avant  de commenter le livre ici

 


La littérature danoise

Quelques écrivains danois ICI commentés dans mon blog

Hans Christian Andersen : Peer-La-Chance
 
Hans Christian Andersen : Les contes
 
Thorkild Hansen : La mort en Arabie
 
Anne-Cathrine Riebnitzsky : Les guerres de Lisa

Maren Uthaug : La petite fille et le monde secret
 
et un auteur suédois :
 
Per Olov Enquist  : le médecin personnel du roi qui raconte l'histoire de Christian VII, roi du Danemark et de son médecin Struensee,  que l'on retrouve dans le roman de Indridason cité ci-dessus. Voir aussi le film Le médecin du roi  de Nikolaj Arcel
 

La peinture danoise

 

Vilhem Hammershoi
 

Les musées sont nombreux à Copenhague et j'ai voulu savoir quels peintres danois j'allais rencontrer. 

Je n'en connais qu'un pour l'instant que j'aime beaucoup :  Vilhem Hammershoi (1964-1905). 

J'adore ces intérieurs en demi-teintes, aux lignes épurées, sans ornements, ces camaieux de noirs, de gris et de bruns, qui présentent une  femme ( il s'agit de la femme du peintre), le plus souvent de dos, debout devant une fenêtre lisant une lettre ou assise, absorbé dans ses pensées, se dérobant aux yeux qui les contemplent. Parfois une fenêtre laisse passer un rayon de soleil et une porte ouverte nous laisse entrevoir l'extérieur. Je  trouve ces peintures mystérieuses, énigmatiques : Que fait cette femme ? a quoi pense- t-elle?  La saisissons- nous dans un moment de repos ou de tristesse ?


Vilhem Hammershoi


Ses amis, Peter Islted et Carl Vilhem Holsøe ont des univers proches de Hammershoi.

 Les peintres de Skagen


Peder Severin Kroyer

Il y aussi les tableaux magnifiques des peintres de Skagen dans le Jutland du Nord, une ville et une plage qui ont attiré par leurs lumières et par la fameuse "heure bleue" des peintres comme Peder Severin Krøyer et Michael Ancher , des écrivains,  et des visiteurs du monde entier

Peder Severin Krøyer

 

Michael Ancher

 

Michael Ancher
 

Enfin j'ai lu un article sur  l'âge d'or de la peinture danoise  ICI que je vous résume ci-dessous

L’Âge d’or de la peinture danoise (1801-1864)

 

Christoffer Eckersberg

Christoffer Eckersberg 

Considéré comme  précurseur et de père de l’âge d’or danois Christoffer Eckersberg (1783-1853) se forme à l’Académie royale des beaux-Arts de Copenhague avant de faire un long voyage qui le mène à Paris, où il  a pour maître Jacques-Louis David durant un an, puis à Rome, comme c’est la coutume chez les artistes du XIXème siècle. Il y côtoie des artistes danois, et surtout s’emploie à perfectionner son approche du paysage. Puis Eckersberg s’éloignera  de la peinture idéalisée danoise  peindra les paysages en pleine nature. Ses compositions sont habitées d’une grande rigueur, qui leur donne tout leur équilibre.  

Christoffer Eckersberg

Christen Købke

Christen Købke : Le château de Frederikborg


Christen Købke (1810-1848) a été l’un des élèves de Christoffer Eckersberg, et a suivi son exemple en multipliant les travaux sur le motif. Il a eu une vie très courte qui a interrompu  une eouvre qui témoigne d'une grand talent. Il voyage, en Allemagne et en Italie, avant de revenir au Danemark. Là, il pratique un art d’une très grande délicatesse, en s’attachant notamment à peindre les paysages qui l’entourent, des portraits de personnes familières, des sujets ordinaires, intimes.

Martinus Rørbye

Martinus Rørbye Vue depuis la chambre de l’artiste


Martinus Rørbye 1803-1848  suit les cours de Christoffer Eckersberg à l’Académie royale des beaux-Arts de Copenhague, où il entre à dix-sept ans et se trouve également récompensé. Sa célèbre Vue depuis la chambre de l’artiste (1825) dit beaucoup de son talent et de son goût : comme bien des peintres danois de cette époque, il est attentif aux environnements intimes, mais son regard porte vers l’extérieur, vers les bateaux prêts à partir. Martinus Rørbye voyagera en effet beaucoup. En Italie, en Grèce, en Turquie, en Norvège… Partout, il travaille à saisir la lumière et peint des scènes de genre charmantes.

Constantin Hansen

Constantin Hansen

 Constantin Hansen (1804-1880) :  Né à Rome d’un père portraitiste, il vit ensuite à Vienne puis à Copenhague. Étudiant de l’Académie royale, il profite d’une bourse pour voyager en Europe et s’attarder en Italie durant huit ans. Il excelle dans l’art de la fresque et du portrait, singulier ou de groupe.

Et voilà tout ce que j'ai à voir à Copenhague ... et plus encore, si j'en juge par la richesse de la ville. Et je vais aller aussi au château d'Hamlet à Elseneur. A bientôt !

mercredi 3 mai 2023

Leon Morell : Le ciel de la chapelle Sixtine


Le ciel de la chapelle Sixtine de Leon Morelle raconte les quatre années consacrées à la peinture du  plafond de la chapelle Sixtine, travail imposé à Michel Ange par le pape Jules II et que l’artiste vécut comme un cauchemar.  Il faut dire que Michel Ange ne se considérait pas comme peintre mais comme sculpteur et n’était heureux que devant un bloc de marbre. En 1508, lorsqu’il commence ce travail titanesque, Michel Ange n’a pas d’expérience au niveau de la fresque. De plus, le plafond de la Sixtine avec ses bosses, ses replats, est une surface particulièrement difficile à maîtriser. Mais le pape s’entête, conseillé par son favori, l’architecte et peintre Bramante, jaloux de Michel Ange qu’il espère voir échouer. Michel Ange n’a pas vraiment le choix, les geôles du Château Saint Ange ou obéir.

 

La chapelle Sixtine, plafond inauguré en 1512 devant le pape Jules II

Leon Morelle imagine un personnage fictif, Aurélio, jeune homme d’une grande beauté, qui  entre dans l’atelier de Michel Ange comme apprenti et surtout comme modèle, inspirant les personnages d’Adam ou de jeunes éphèbes qui peuplent le plafond de la Sixtine. C’est à travers ce personnage, tout à fait crédible, que l’on va suivre les étapes de la fresque, les découragements, les tâtonnements, les échecs, mais aussi les progrès fulgurants de l’artiste pour maîtriser la technique de la fresque, sa maîtrise du dessin et de la couleur, son imagination foisonnante, et ses traits de génie qui susciteront l’émerveillement dans tous les pays de la Renaissance. Nous apparaît aussi, à travers les yeux du jeune homme, la personnalité de Michel Ange, un homme tourmenté, qui rejette le péché de la chair et son homosexualité latente, un chrétien qui est imprégné d’histoire biblique, un artiste qui ne vit que pour son art, la sculpture. Un homme capable de se priver de sommeil, de nourriture, qui vit son art comme une ascèse et qui refuse à ses compagnons d’atelier - qu’il a pourtant fait venir de Florence -  d’intervenir dans son travail de création même si ce sont des artistes renommés. Autour d'eux gravitent tout une foule de personnages célèbres dont le moindre n'est pas celui de Rafaël en train de peindre les stanze du palais du Vatican, ou encore Erasme que Michel Ange admire.

 J’ai moins aimé, par contre, le personnage fictif de la courtisane Aphrodite qui vit dans le palais pontifical et est la maîtresse de Jules II. La manière dont elle intervient dans la vie de Michel Ange ne m’a pas paru convaincante. Pour montrer la prostitution et la dépravation de l’Eglise, le personnage de Magherita, jeune et belle jeune femme que Aurélio rencontre sur la route de Flaminia, en direction Rome, suffit amplement.

 Peu à peu, les différentes scènes de la Bible se créent devant nous et font de ce roman historique très bien documenté un livre très intéressant.


De Zacharie et Jonas : évolution de la technique et des coloris

 

Le prophète Zacharie

Michel Ange a commencé les fresques du plafond  par la partie située au-dessus de la porte d'entrée de la chapelle avec Le prophète Zacharie. Il a terminé par la partie située au-dessus de l'autel, près du mur du Jugement dernier qu'il peindra plus tard, avec le prophète Jonas qui témoigne de l'évolution de la technique du dessin, de la composition et des couleurs, au cours de ces années.

Le prophète Jonas

Des premières scènes aux dernières

 

L'ivresse de Noë

La première scène est L'ivresse de Noë trop classique, sans inventivité, aux coloris froids; la deuxième est le Déluge pour laquelle le peintre se reprochait d'avoir placé trop de personnages.

 

Le Déluge

Dans les dernières scènes, la création d'Adam, la création du soleil et des plantes,  la séparation de la lumière et des ténèbres, Michel Ange est arrivé à l'apogée de son art et maîtrise la fresque plus qu'aucun  artiste ne l'a jamais fait !


Michel Ange  : Dieu créa le soleil et les plantes


(Détail)  Michel Ange  : Dieu créa le soleil


Voir aussi dans mon blog : Rome la chapelle Sixtine redécouverte par Robin Richmond  

mardi 21 mars 2023

Alexandre Pouchkine : Сказка о царе Салтане : Le conte du tsar Saltan

Illustration Ivan Bilibine : Conte du tsar Saltan : La princesse cygne et l'île Bouaïana
   

"Le Conte du tsar Saltan, de son fils, glorieux et puissant preux le prince Gvidon Saltanovitch et de la très-belle princesse-cygne " : voici le titre complet du conte merveilleux  d'Alexandre Pouchkine qu'il a publié en 1832.  Il  s'agit d'un conte traditionnel issu du folklore russe mais de nombreux contes dans le monde reprennent le thème des deux soeurs jalouses qui cherchent à se venger de la troisième plus chanceuse, épouse du prince.

Le conte du tsar Saltan de Pouchkine est l'un des contes les plus célèbres en Russie. Nicolaï Rimski Korsakov et son librettiste Bielski ont adapté l'oeuvre de Pouchkine pour créer un opéra  Сказка о царе Салтане portant le même titre.

 

Ivan Bilibine :  le tsar choisit Militrissa pour épouse, les deux autres comme cuisinière et tisseuse

Trois sœurs rêvent à leur avenir dans une modeste isba  : que ferait chacune d'elle si elle était tsarine ?   L'une dit qu'elle préparerait un grand festin, l'autre qu'elle tisserait des vêtements somptueux, la troisième, la belle Militrissa, qu'elle donnerait un bogatyr (preux-chevalier) à son tsar bien-aimé. Le tsar Saltan qui passait près de chez elles les entend. Il décide d'épouser la troisième et engage les deux autres comme cuisinière et tisserande.

 


Mais le tsar doit partir à la guerre. Il laisse son épouse enceinte. Celle-ci accouche bientôt d'un beau petit garçon, le tsarévitch, Guidon, qui grandit à une vitesse prodigieuse. Les deux sœurs, jalouses, avec l'aide de leur mère Babarikha, envoient un message à Saltan pour lui dire que sa femme a accouché d’un monstre. 

La Babarikha est la mère des trois soeurs, mais elle tient le rôle de la marâtre des contes de fées quand elle devient complice de ses deux filles pour faire obstacle à la troisième. Elle est aussi une femme- marieuse. Le tsar répond en demandant qu'on attende son retour pour décider du sort de l'enfant mais les méchantes femmes substituent le message du tsar à un autre qui ordonne d'enfermer la tsarine avec son enfant dans un tonneau et de les jeter à la mer. La mer a pitié de l'enfant et la mère et le tonneau échoue sur une île lointaine nommée Bouïana ... 

 

Ivan Bilibine : la ville merveilleuse sur l'île Bouïana

Le tsarévitch Guidon devenu un beau jeune homme sauve un cygne poursuivi par un vautour. Le cygne lui explique qu'elle est une princesse et que le vautour qu'il vient de tuer est un sorcier. En signe de reconnaissance, la princesse-cygne fait surgir une ville magnifique sur l'île. Le bogatyr Gvidon en devient le roi puis comme il languit de son père, elle le transforme en moustique ou en bourdon pour qu'il puisse voyager caché dans un navire de marchands jusqu'à sa patrie natale.  

 

Bilibine :  Le prince Gvidon transformé en moustique

Par trois fois le tsar entendant vanter les merveilles du royaume merveilleux et de son roi Gvidon par les marchands veut se rendre dans l'île mais Babarikha et les deux sœurs le dissuadent.

La première fois en affirmant que la merveille n'est pas cette ville sur une île lointaine mais un écureuil enchanteur qui croque des noisettes d'or au coeur d'émeraude.

La seconde fois en affirmant que la merveille n'est pas cette ville lointaine mais trente trois bogatyrs- frères, des géants jeunes et braves,  issus des vagues de l'océan.

La troisième fois  en affirmant que la merveille n'est pas cette ville lointaine mais une princesse si belle que

Le jour, elle éclipse le soleil

 La nuit elle éclaire toute la terre

Le croissant brille sous sa tresse

Et une étoile illumine sa jeunesse

traduction Tetyana Popova-Bonnal

Chaque fois le cygne réalisera le voeu du prince pour obtenir l'écureuil, les trente trois guerriers,  mais pour la princesse, ce ne sera possible que par un véritable amour.

 

Bilibine :  Arrivée du tsar et la méchante mère Babarikha

La quatrième fois, quand il entend vanter les merveilles de l'île et apprend le mariage du Gvidon avec une belle princesse, le tsar décide de partir. Lorsqu'il arrive sur l'île, il reconnaît son épouse, la belle Militrissa, fait connaissance de son fils Guidon marié à la  princesse qui se cachait sous l’apparence du cygne. Le conte se termine dans la joie. 

 

 Une oeuvre en vers musicale

Le tsar Saltan et les trois soeurs :  miniature de Palekh

 

Cette oeuvre est une petite merveille, un bijou brillamment ciselé,  un récit vivant, animé, poétique, amusant. Le poète l'a rédigé en vers de sept ou huit syllabes dans une langue populaire, savoureuse, joyeuse, avec des personnages proches du folklore russe. On a l'impression que les vers sont chantés.

Le rythme des  heptasyllabes accentués sur les syllabes impairs  (1/3/5/7 ) est, en effet, très musical, et le retour des mêmes vers dans les situations qui se répètent créent un rythme interne que l'on attend comme un refrain. Ce qui nous rappelle que le conte est destiné à être oral,  un conte que l'on lit aux enfants et dont les répétitions sont attendues avec joie.

 

 Un conte merveilleux

Peintres de Palekh :  Dans son palais de cristal, L'écureuil croque une noix/ une noix d'or par ma foi

 

Le conte est une belle histoire d'amour, celle du prince Gvidon et de la princesse-cygne, un récit qui fait intervenir le rêve, la magie, le fantastique. Il obéit au schéma classique du conte traditionnel : à partir d'une situation initiale perturbée par des méchants, le héros ou l'héroïne devra rétablir l'équilibre, aidé en cela par des adjuvants magiques, humains, animaux, ou objets. Il s'agit de contes initiatiques qui permettent au personnage principal (auquel l'enfant s'identifie) de passer de l'enfance à l'âge adulte. La magie ne suffit pas et il faut faire preuve de courage, de débrouillardise, d'intelligence, de bonté.

Dans ce conte tout est en double. Il y a deux couples le Tsar et Mélitrissa et Gvidon et la princesse-cygne  dont l'équilibre est  pareillement  détruit par l'intervention d'éléments déclencheurs qui viennent rompre l'équilibre :  

Militrissa et le tsar Saltan séparés par la guerre vont être victimes de la jalousie des deux soeurs et de la mère. C'est le tsarevitch Gvidon qui les réunira.

Comme dans de nombreux contes, la princesse est transformée en animal, ici en cygne : Gvidon tue le magicien qui la poursuivait métamorphosé en vautour. Il aide la princesse-cygne qui l'aidera à son tour.

 Le cygne va se poser

Sur les bords dans un fourré.

Il s'ébroue et se secoue,

en princesse se dénoue :

Une étoile entre les yeux,

Un croissant d'or aux cheveux (...) 

Traduction Ivan Mignot

Le prince doit prouver sa bravoure mais a besoin pour réussir d'adjuvants magiques : Le cygne réalise ses voeux pour le récompenser. Ils sont au nombre de trois, l'écureuil qui assure la richesse de tous les habitants de l'île; les trente bogatyrs qui assurent la sécurité de l'île et la princesse-cygne qui permet à l'amour de triompher.


Peintres de Palekh : La princesse est majestueuse et bonne

 Un conte plein d'humour

Peintres de Palekh: la fête de retrouvailles

Mais le Merveilleux est étroitement mêlé à l'humour qui tient à des personnages burlesques dont la fonction est double :  semer des embûches sur le chemin des héros et héroïnes mais aussi faire rire telles les deux soeurs et la mère Babarikha et aussi, parfois, le tsar lui-même !  

Enfin,  autre source de comique, le moustique. Ainsi lorsque  les méchantes soeurs se font piquer par le moustique ou bourdon et deviennent borgnes, l'une de l'oeil droit, l'autre de la gauche ou quand il s'agit de la Babarikha :

Il bourdonne et fait des rondes, 

 Il se pose sur son nez bien rond.

Notre héros pique le nez 

Et une ampoule y apparaît.

Là encore l'alerte commence 

En mettant la défiance

AU secours ! Attrapez-le !

Ecrasez la bête féroce ! 

 Traduction De Tatyana Popovna -Bonnal  Les contes de  fée de Pouchkine Edition bilingue  ou une autre traduction

Il va tourner autour d'elle

se met sur le nez d'icelle

Une cloque vient marquer

 aussitôt le nez piqué.

De nouveau c'est la panique 

 Et puis la chasse héroïque : 

Au secours, attrapez-le,

Dieu du ciel, écrasez-le,

Tu vas voir, attends, vil traître (...)

 Traduction de Ivan  Mignot  Les contes de Pouckine  Le tsar Saltan peinture de Palekh

Comique aussi dans l'agitation qui suit les piqûres de l'insecte car la scène est traitée avec un grossissement épique que les deux traductions préservent bien "La bête féroce !" "Vil traître !"  "chasse héroïque", "Panique ", "alerte" ...  qui contraste dérisoirement avec  la taille de la bête féroce.

Le dénouement aussi est joyeux et enlevé  : l'on y voit le tsar fêter dignement ses  retrouvailles  avec la Tsarine et son Tsarevitch (pas de punition pour les méchantes)  mais on doit porter au lit le tsar  à moitié ivre.

 денъ прошел - царя салтана

 уложили спать вполньяна

я там был ; мед, пиво пил 

 усы лищь обмовил

 La traduction mot à mot dit ceci : 

 Le jour passe - le tsar Saltan

Est mis au lit à moitié ivre

 J'étais là;  j'ai bu du miel, de la bière (hydromel ?)

 Mes moustaches seules j'ai mouillées.  

 

 Quelles traductions choisir ?

Je vous propose deux traductions  qui s'opposent et témoignent de deux positions très divergentes face au fait de traduire. Laquelle préférez-vous ? 

Doit-on rester  proche du texte et, dans la cas où il s'agit de vers, ne pas respecter la métrique ? celle de  Tetyana Popovna-Bonnal

La journée passe et Saltan énivré

 fut tout de suite couché.

J'y étais, j'ai bu l'hydromel 

 Seule ma moustache fut mouillée.

Traduction Popova-Bonnal dans Les contes de  fée de Pouchkine Edition bilingue

  Ou la traduction d'Ivan Mignot qui s'éloigne du texte (tout en respectant l'esprit)  mais garde la versification et utilise l'heptasyllabe comme le vers pouchkinien et la rime.

Le soir, il fut sur sa couche 

Ivre comme une vraie souche

J'y étais et j'ai bien bu

Ne m'en demandez pas plus.

Traduction Ivan Mignot Les contes de Pouchkine  Le tsar Saltan peinture de Palekh   


Les éditions  et les illustrations

 


1) Traduction en vers proche du texte et juxtalinéaire de Popova-Bonnal Les contes de  fée de Pouchkine Edition bilingue    

Illustration couverture Ivan Vanestiv :  Ivan Tsarevitch chevauche le loup gris 1889


 


 2) Traduction Ivan Mignot en vers heptasyllabes Les contes de Pouchkine  Le tsar Saltan  ma traduction préférée.

Peinture de Palekh  Editions медный всадник : Le cavalier de bronze.  J'ai acheté ce livre à Saint Pétersbourg. Je ne sais pas si on le trouve en France.

Palekh :  Les illustrations, splendides,  sont des peintures d'icônes sur bois laqué, provenant de la ville de Palekh devenue centre de la miniature sur laque. Collections privées ou musée russe de Saint Petersbourg, ou musée Pouchkine.

 


3) Vous pouvez aussi lire ces contes aux Editions Albin Michel  jeunesse illustrés par Ivan Bilibine  d'après une réédition de 1906. traduction en vers de  Henri Abril. Je n'ai pas lu cette traduction mais les illustrations de Bilibine sont enchanteresses.

 Ivan Bilibine est né en 1876.  Il est peintre et illustrateur. Formé sous la direction  du grand maître Ilia Répine, il réalise en 1899 ses premiers travaux graphiques et ses premières illustrations de contes populaires russes : il trouve là son domaine de prédilection, dont il ne se départira plus et qui caractérise son oeuvre. Ivan Bilibine s'est fait aussi connaître comme décorateur d'opéra. 

 


4) Keisha  a lu ces contes aux éditions Ginkgo  ICI


 Et bien sûr l'auteur de ces  contes

 Alexandre Pouchkine

Peinture de Palekh : Pouchkine  quatrième de couverture Editions le cavalier de bronze


 

                                                       Le Tsar Saltan :  Opéra de Rimski Korsakov le vol du bourdon





samedi 11 février 2023

Lisbonne : Musée national d'art ancien : le MNAA (2) : La Renaissance portugaise

 Nuno Gonçalvez : Panneaux de Saint Vincent de Fora au MNAA
 

 Quand vous vous rendez au musée national d'art antique ( le MNAA) de Lisbonne vous pensez y voir la série de tableaux de Nuno Gonçalvez, peintre portugais du XV siècle (actif 1450 à 1471), dont tous vos guides vous parlent avec gourmandise ! Nuno Gonçalves, le peintre des Painéis de São Vicente de Fora, ces panneaux sublimes rassemblant cinquante huit personnages autour de Saint Vincent qui figure dans les deux peintures centrales vêtu d'une large chasuble rouge damasquinée. Magnifiques portraits, pleins de vie, de caractère, de couleurs qui révèlent des individus dotés de caractère et  dont on a l'impression  que l'on pourrait les rencontrer sur la place du Commerce !

 

Nuno Gonçalvez : Panneaux de Saint Vincent de Fora au MNAA Lisbonne

 

Nuno Gonçalvez : Panneaux de Saint Vincent de Fora au MNAA Henry le navigateur

 

Je crois, en voyant les images des visiteurs assis sur des bancs face aux panneaux  que cet ensemble est regardé par les visiteurs avec la même révérence et le même bonheur  que celui des  tapisseries de la Licorne au musée national médiéval de Cluny à Paris ! 

Hélas ! quand j'y suis arrivée, voilà  ce que j'ai aperçu : 

 

Nuno Gonçalves : Restauration des panneaux de Saint Vincent de Fora

Et oui, en restauration ! Mais c'est une bonne chose que les panneaux soient exposés dans un espace vitré pendant le temps où ils sont soustraits au public. On peut en voir la beauté et puis l'on se dit qu'il faudra revenir à Lisbonne !

Ce musée est si riche que l'on peut y rester des heures sans se lasser. Il me faut donc choisir ce que je vais présenter dans ce billet ! Dans celui qui précédait j'ai publié des images de la légende de santa Auta. Je continue donc par  mes coups de coeur  correspondant à l'âge d'or de la Renaissance portugaise  à une époque où la richesse du Portugal est à son apogée et ou les rois Manuel 1er dit le Fortuné et Jao III  encouragent les arts et attirent à leur cour les plus grands artistes. 

La Renaissance portugaise s'appuie pour dégager sa propre originalité sur les aspects techniques et artistiques de la Renaissance italienne et flamande. Des peintres flamands viennent se fixer à Lisbonne. Van Eyck, lui, a séjourné au Portugal de 1428 à 1429.  On comprend pourquoi l'influence flamande avec la connaissance de la technique de la peinture à l'huile, fut si importante au Portugal. 

 

 Jose Afonso  (actif 1504-1540)    

 

Jose Afonso : l'adoration des bergers (détail)

 Jose Afonso  (actif 1504-1540) est nommé peintre royal par Manuel 1er et intendant des peintures. C'est lui qui coordonne tout ce qui a trait à la l'art pictural, sélection des peintres, mise à disposition des pigments et matériaux, ordonnance des festivités, relations diplomatiques. Il s'entoure des plus grands artistes de Lisbonne et parmi eux des peintres flamands.

Autour de Jose Afonso gravitent les  principaux artistes de cet âge d'or dont Nuno Gonçalves (actif 1450-1492), Cristóvão de Figueiredo (actif 1515-1554) qui est peut-être l'auteur de la légende de Santa Auta (Voir Ici ) ou encore Gregorio Lopes (actif 1513-1550).  

Francisco Henrique d'origine flamande attire dans son atelier d'autres peintres flamands, Frei Carlos, le maître de Lounhira, le maître anonyme de l'Enfer, qui se fixent au Portugal.


 L'Enfer : un maître inconnu

 

L'Enfer  maître anonyme Renaissance portugaise MNAA Lisbonne


Les spécialistes se divisent quant à l'attribution de l'oeuvre. Ce maître inconnu pourrait être un peintre flamand ou un peintre portugais influencé par la peinture flamande, on l'a aussi attribué à un atelier français. Mais peu importe ! Car ce qui frappe c'est la force et la cruauté de cette oeuvre ! Le peintre témoigne d'une imagination féconde à la Jérome Bosch quant aux différents supplices et à leur raffinement. L'oeuvre a peut-être été conçue pour un monastère et l'on y voit d'ailleurs de nombreux moines. On comprend la violence de ce tableau si l'on pense qu'elle s'adressait à un public qui vivait dans la hantise du péché et pour qui la peur de l'enfer était quelque chose de bien réel. J'imagine la terreur de ceux qui voyaient ce tableau avec la crainte de ce qui les attendait au-delà ! Si cette oeuvre est remarquable, on ne peut pas dire, par contre, que le christianisme est une religion rassurante !

 

 L'Enfer de maître inconnu Renaissance portugaise MNAA Lisbonne (détails)

  Gregorio Lopez (actif 1513-1550)

 

Gregorio Lopez : la naissance de la Vierge MNAA (1530-1540)




 

Voilà mon tableau préféré de Gregorio Lopez. Evidemment, tous les atistes ne peignaient à cette époque que des scènes religieuses. Gregorio Lopez ne fait pas autrement avec ce tableau montrant la naissance de la Vierge. Mais loin d'être seulement une peinture iconique, c'est une scène de la vie quotidienne. 

Un bébé vient de naître - peu importe lequel - dans une famille aisée. Des servantes et parentes entourent le lit de l'accouchée que l'on réconforte. Trois des femmes ont le visage tourné (en un seul mouvement) vers l'enfant, pôle d'attraction, qui est sur les genoux d'une servante. Celle-ci le lave dans une petite bassine. Le bébé est adorable et particulièrement minuscule. Que porte l'une des servantes dans un panier ? J''aimerais bien le savoir.

 La personne penchée sur le lit de la mère, semble d'un rang supérieur aux autres par sa vêture. Je n'arrive pas à déterminer ce qu'elle fait. On dirait qu'elle lit un message à l'accouchée. Celle-ci a un visage doux, reposée, heureux, une main délicate est posée sur la couverture. Elle porte une auréole. C'est sainte Anne. Le père, Joachim, lui aussi auréolé, est selon la tradition, appuyé sur son bâton, en pleine méditation.  C'est le seul personnage conventionnel qui obéit à des codes religieux. On dirait qu'il s'ennuie et non qu'il est heureux du bébé qui vient de naître. Il n'est pas naturel dans cette scène qui l'est pourtant beaucoup. 

La composition est très rigoureuse : Trois personnages à la tête du lit, trois personnages au pied du lit dont le mouvement converge en avant vers le bébé, en arrière vers le hors champs de la pièce.  La profondeur est rendue par le rideau soulevée qui laisse percevoir une arrière-salle avec quelqu'un en train de s'affairer, peut-être de sortir des vêtements d'un coffre ? La  ligne médiane passe sur le lit et  nous amène jusqu'à la servante qui allume le feu, non pas au milieu mais un peu décalé sur la droite par rapport à l'axe médian. La servante agenouillée attire l'attention sur des détails domestiques. Elle attise le feu d'un petit brasero  avec une sorte d'éventail en paille peut-être pour faire chauffer de l'eau ou pour maintenir la chaleur près du lit.  A observer les détails des costumes de tous !


Gregorio Lopez : la naissance de la Vierge MNAA (détails)


Francisco Henriques ( actif 1506 -1519)


Henriques Francisco retable de sao Francisco de Evora   : la dernière cène, la récolte de la manne


En 1509, Francisco Henriques participe à la décoration de l’église Sao Francisco d’Evora et se rend en Flandres en 1512 pour recruter des artistes. Frei Carlos, le maître de Lourinha et le maître anonyme de l’Enfer auraient fait partie de son atelier. Il est le beau frère de Jose Afonso. Il meurt de la peste en 1518-19.
Le retable de Sao Francisco d'Evora comporte seize panneaux dont onze se trouvent au MNAA . J'ai choisi de montrer ici ceux de La Cène et de  La récolte de la manne  car eux aussi  fourmillent de détails pris sur le vif qui dépasse l'allégorie religieuse pour atteindre l'humain. La peinture fixe un geste en suspens comme dans une photographie  : le personnage en vert qui nous tourne le dos se penche pour saisir  une aiguière, l'un porte un couteau à la bouche, d'autres sont plongés dans une discussion, Jésus tend la main pour attraper ce que lui tend l'un de ses compagnons. Là aussi la Cène obéit à des codes, Jésus est au centre de la table, tourné vers nous, entouré des apôtres, Jean est endormi mais la peinture est une scène entre amis. 
La récolte de la manne témoigne d'un fait miraculeux mais est aussi un beau tableau champêtre dans lequel on peut admirer la composition avec ce petit sentier sinueux qui amène le regard vers le château, juste en haut dans le coin gauche de la scène et puis les habits, les coiffes, les chapeaux, les turbans, qui apportent une connaissance sur la manière dont on se vêtait, les coloris chaleureux qui donnent vie au tableau.


Henriquez Francisco  retable de sao Francisco de Evora  MNAA Lisbonne : la dernière cène, la récolte de la manne (détails)


Frei Carlos

Frei Carlos moine et peintre d'origine flamande  MNAA


Frei Carlos moine et peintre d'origine flamande  MNAA


Frei Carlos (+ 1540) est un peintre flamand qui a probablement travaillé dans l'atelier de Francisco Henriques.  Il  rejoint l'ordre des moines hyéronimites de Sintra en 1517. Les tableaux que j'ai choisis, ces deux Vierges, au visage doux, graves mais sereins, l'une en train de donner le sein, l'autre de jouer avec son bébé qui mange des cerises, donnent un vision souriante et réconfortante de la religion à l'inverse de l'Enfer.


Frei Carlos Evora 1er moitié du Xvi siècle Vierge et deux anges


Quelques portraits du MNAA

 

Cranach Lucas l'Ancien : Salomé

 

Lucas Cranach l'Ancien (1472-1553) peint ici un tableau effrayant :  La richesse des vêtements de Salomé,  cette fourrure rousse qui encadre son visage et tombe sur ses épaules soulignant le chasuble noir aux lignes blanches sur un corsage aux tons mordorés, ses manches de tissu brillant, tout concourt à la vision d'une grande dame de la Renaissance, hautaine et impassible. Le visage dur de Salomé qui se détache sur le fond noir du tableau, son regard qui part dans le lointain, son indifférence, accentuent l'horreur de ce qu'elle porte entre les mains : la tête de Jean-Baptiste sur un plateau...


Maître flamand inconnu : portrait de femme (1569)


Joos van Cleves maître Flamand Anvers  : Eleonor d'Autriche

Eleonor d'Autriche Hasbourg est née à Louvain (pays-Bas des Hasbourg) en 1498 et est morte en Castille en 1558. Elle est la soeur de Charles Quint. Elle fut reine du Portugal de 1518 à 1521 en épousant Manuel 1er qui la laissa veuve puis reine de France avec son mariage avec François 1er. Son portrait est peint par Joos van Cleves peintre flamand de l'école d'Anvers.


Isabel du Portugal 1503-1539

Isabel de Portugal (1503_1539) est la fille de Manuel 1er et  de sa seconde épouse Marie d'Aragon.  Elle épouse en 1526 son cousin l'empereur Charles Quint, roi d'Espagne, du Pays-Bas. Son portrait est de peintre inconnu et la date est imprécise : le milieu du XVI siècle.


Maître inconnu : Jean de Luxembourg

Jean de Luxembourg 1475-1508 est mort à Bruxelles en 1508, il était seigneur de la ville. Il fut nommé chevalier de la toison d'or et devint le favori préféré du roi Philippe de Castille.


La statuaire  portugaise du XV et début XVI siècle

 

Troisième étage du musée national d'art ancien MNAA



Mestre Pero : Saint jacques


Mestre Pero : Vierge attendant l'enfant Jésus MNAA


Joao Afonso  : Sainte Agate, sainte Lucie et sainte Catherine


Joao Afonso : Sainte Catherine MNAA Lisbonne


Joao Afonso archange saint Michel 1450


Artiste flamand actif au Portugal : Saint Jacques


Cornelis de Holanda 1520-1525 Saint Marc l'évangéliste


Pierre Brueghel le Jeune (1564-1636)

 

Pierre Breughel le Jeune Les sept oeuvres de miséricorde

Les sept oeuvres de miséricorde selon les Evangiles représentées ici par Pierre Brueghel sont : Visiter les prisonniers, Ensevelir les morts, Accueillir les étrangers, Visiter les malades,  Donner à boire à ceux qui ont soif, Vêtir ceux qui sont nus ; Donner du pain à ceux qui ont faim.


Pierre Breughel le Jeune Les sept oeuvres de miséricorde  : Donner du pain MNAA Lisbonne

La salle des portraits des Francisco Zurbaran ( Actif 1614-1664)


Francisco Zubaran : Saint Paul  et Saint Jacques le Majeur MNAA Lisbonne

Francisco de Zurbarán est un peintre du Siècle d'or espagnol (1598–1664). L'art de Zurbarán est profondément religieux. Il peint des personnages mystiques,  qui expriment leur foi et témoignent de la grandeur divine. Il est l'artiste par excellence de la contre-réforme.

La salle réservée aux Zurbaran présente les douze apôtres grandeur nature. Surélevés, ils nous dominent de toute leur stature. Le peintre attache beaucoup d'importance au rendu des étoffes et des plis, tout en cherchant à rendre le recueillement, le mysticisme de ces hommes qui se tournent vers Dieu. Impressionnant !


Francisco Zubaran : Saint André MNAA Lisbonne


Francisco Zubaran : Saint Simon MNAA Lisbonne


Voir Lisbonne : le musée national de l'art ancien  : le MNNA (1) le retable de Santa Auta